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jeudi, 29 octobre 2009

Echapper bien

"Les bois de hêtres sous ce qui leur reste de feuilles dorées font luire au soleil leurs branchages blancs. Les bouvreuils s'imaginent que midi c'est l'été. Ils se rengorgent et paradent sur les aubépines, mais l'ombre s'est déjà installée pour l'hiver au nord des pentes, les inquiète. Ils vont la voir de près d'un vol rapide, reviennent, s'interrogent, s'essayent à de petits vols d'alouette comme pour s'assurer de la présence du soleil. Les corbeaux s'organisent en grandes allées et venues. L'herbe des près déjà rousse à sa pointe se feutre et s'aplatit. L'homme qui râtelait son regain et est allé dîner a de la chance d'avoir pu gratter encore un peu. Je vis en bonne intelligence avec ce qui m'entoure."

JEAN GIONO "Les grands chemins", editions Gallimard 1951.

ECHAPPER282.JPG

Des chasseurs s'amusent avec une peau de chien. La poste n'ouvrira désormais qu'un jour sur trois. La petite rue est déserte, la grande aussi. "Au royaume de la chaussure" on vend des bottes en daim. On note la fermeture définitive de quatre magasins. Ici, il y a trois docteurs, huit salons de coiffure. Le petit casino est vide, l'intermarché est plein. Dans la vitrine de l'échoppe du fabricant d'huile, quatre immortelles débiles dans un pot en étain. On a fermé le château après le concours hippique. Des hollandais ont racheté la maison du notaire. Le chef de gare a pris une année sabbatique. La femme du Joanny court avec le Clotaire. Au cinéma on rejoue "les chtis". Des gamins ont tagué le portail du cimetière. On prévoit quelque randonnée sur le chemin des chouettes. Le baromètre descend. On a vu la Paulette. Le banquet des conscrits aura lieu à midi. L'usine en a encore licencié trente. Deux femmes causent à la pharmacie du neveu de mademoiselle Branche. :

"Il disait qu'il voyait des amours blancs dans la Bourbince. Ils l'ont emmené à La Cellette. Des amours blancs offerts par Marguerite-Marie, sa femme est repartie vivre à "La coquille"".

"Le pauvre homme ! Le pauvre homme, y doit se sentir bien seul"

"Ah oui ! c'est malheureux, c'est malheureux! finir comme ça !"

Je remonte le chemin entre Montrouan et Ozolles. Un panier d'osier à mon bras. Le marquis souhaiterait me montrer des girolles qui poussent dans les bois. Des girolles ou Girole, roussote, jauniré, ou même gallinace, chanterelle orangée. Le marquis est jovial, il arrive en poney. Les plis de la girolle me font beaucoup d'effet. Le marquis souhaiterait me montrer des bolets. (Boletus splendidus, à chapeau gris, ou rose ; boletus satanas, le monstre à pied renflé). Nous marchons gentiment sur des feuilles mouillées. Je sais que les bolets ne poussent qu'en été, ou bien à la rigueur au début de l'automne mais dans les régions chaudes. Le marquis me prend par la taille. Il s'arrête pour me dire des choses avec les yeux. Des choses qui ne se disent pas avec le langage. Marguerite-Marie flotte dans mes cheveux. Il y a des écureuils qui jouent sur les noyers. Des écureuils, et des chatons. Des chemins par milliers. La brume me rappelle mes vacances aux Ardennes, sous le pis des nuages, les Ardennes au mois de Mai. Un nuage s'en va, un bois de hêtre vient. Dans les champs, Marguerite moissonne des bleuets. Je vois des bolets blancs fondre sur les genêts. J'esquisse un pas de danse sur une pomme d'amour. "Je vis en bonne intelligence avec ce qui m'entoure".

Photo : Ce jardin. Nabirosina. Octobre 2009.© Frb.

Commentaires

Bonjour,
je trouve cette photo parfaite pour accompagner Giono
Question champignon comme j'y connais rien j'eviterai de vivre en bonne intelligence avec eux et je me contenterai de les déguster.mais pour l'heure sur le marché de mon petit magasin c'est une année sans! si ça continue Bonjour Picard!
Il est où ce jardin? mME NABIROSINA a l'air de s'y connaitre
ça m'étonnerait qu'ella n'ait pas aussi quelques truffes pour compléter le service ( à propos c'est une sorte de champignon ou pas la truffe ?)
aller bonne cueillete !

Écrit par : alex | jeudi, 05 novembre 2009

Confirmation : cette année les champignons ont pris le maquis. Introuvables même pour un marquis vous taillant un corsage du haut de son poney marquant au fer non rouge les feuilles déjà rouillées...
(NB : merci pour le lien, les nuages ardennais sont des mammifères qui ne s'ignorent pas).

Écrit par : JEA | jeudi, 05 novembre 2009

@Alex : Il faudrait demander à monsieur Giono comment il trouve la photo (je ne mettrai pas ma main au feu de ces feuilles mortes), mais si tu le dis... Je te croirai un peu...
Question champignons, je confie le soin à d'autres que moi, de les cueillir, (je n'ai pas envie de finir ma vie en prison) mais je veux bien faire bouillir la marmite ;-)

Bonjour Picard ! Alex, entre nous je ne peux pas lire ça ! C'est bien la première fois que tu écris ici quelque chose d'aussi insoutenable.

Il est où ce jardin ? Non ! non ! et non ! ça je ne le dirai pas. Tu ne voudrais pas que je révéle le point exact de ma cabane à la planète ? Quand même...
La truffe ? (Sauf ton respect, l'école Picard aura encore fait des ravages) Tu ne sais donc pas que la truffe c'est le petit nez des mammifères à JEA... ?
Te voilà tout à fait instruit, j'espère. Merci pour ce doux commentaire (PIcard excepté !)
Bonne fin de semaine à toi .A t. bientôt !

Écrit par : Frasby | jeudi, 05 novembre 2009

@JEA : Tant que les champignons
n'ont pas pris le marquis (;-O !)
Et mon corsage, le maquis (;-0 !),
tout ira encore dans "Le bon sens"
(comme dirait notre président).
Oui, je l'avoue, j'aime caresser la crinière de vos mammifères au mois de Mai quand je traverse la douce France à dos de poney ;-). Ce n'est pas un péché n'est ce pas ?
Merci infiniment JEA !

Écrit par : Frasby | jeudi, 05 novembre 2009

"Les Grands Chemins"... très beau livre, langue déliée, les arbres et l'herbe et les rivières qui chahutaient... J'aime beaucoup. Comme j'aime la liaison entre les ciels, les nuages et la réalité "sociale", ce vilain mot pour parler des gens et de leur vie.
Giono, je l'ai connu par "Les Grands Chemins" et j'ai toujours trouvé bizarre, voire paradoxal, qu'on le dise "enraciné" cet écrivain-là qui était tout c' qu'on veut sauf "enraciné"... C'est peut-être dû au fait que j'ai pris contact avec lui par ce livre de l'errance...
Y a un moment, un ami qui vit pas loin de Manosque m'a envoyé un exemplaire dédicacé par Giono à un de ses voisins. J'aurais préféré que la dédicace me soit adressée mais ça m'a fait très plaisir tout d' même. On s'arrange avec ce qu'on a.

Écrit par : mon chien aussi | jeudi, 05 novembre 2009

@Mon chien aussi : Je confirme. C'est un livre extraordinaire.
En roue libre. Mais aussi un livre de timidité humaine.
Merci d'apprécier la liaison, tout autant liaison que hiatus...
Votre réflexion sur Giono est très vraie, Giono enraciné c'est impensable. Je l'ai découvert avec la trilogie et surtout "Les âmes fortes". Mais "Les grand chemins" est vraiment son livre d'errance.
Un exemplaire signé Giono , vous ne vous refusez rien , mon chien ! Je serais vous j'usurperais l'identité de ce voisin...Une petite entorse à la loi, qui ne fera de mal à personne ! mais comme dit notre ami Hozan, notre poète "barbe à papa" (je cite :)
"Il faut faire avec faute, de mieux..."
(Si c'est pas malheureux d'lire ça ! mais on sera tous d'accord cependant... (;-O!))

Écrit par : Frasby | jeudi, 05 novembre 2009

Ah les champignons ! annus horribilis ! pas la queue d'un (ni de chapeau conséquemment)
quant à Giono , auquel je suis accro littéralement depuis l'adolescence (non Frasby ne ricanez pas bêtement en disant "à c't'époque Giono n'avait dû écrire qu'un seul livre!!!) si j'apprécie bien sur beaucoup "les grands chemins" je lui préfère -oh combien - le Roi ou le Hussard (sans parler du trop méconnu Noé)

Écrit par : hozan kebo | jeudi, 05 novembre 2009

À l'instar de Flaubert, je trouve que vous avez mille fois bien fait de composer une "note sur rien", disons sur trois fois rien, mais trois fois rien c'est déjà quelque chose.

Écrit par : Chr. Borhen | vendredi, 06 novembre 2009

@Hozan Kebo : Non ! je ne ricanerai pas ! je me souviens de vos débuts tonitruants ici râlant sur la trilogie , mais vous n'aviez pas spécifié (sinon pour "le hussard", je note tout tout tout !) que vous étiez "accro depuis l'adolescence" ce qui force le respect. Et m'invite à vous lire avec un sérieux des plus solennel, (sans rire) d'autant que Giono n'est pas l'écrivain "super tendance", voyez vous, en mon temps d'adolescence c'était même un "ringard fini", "un plouc" (ah les années fac !) . Enfin je me suis souvent bien fait foutre de ma gueule quand je disais que j'étais "accro" aux âmes fortes", à Giono, à "regain" etc ... ) mais j'ai tenu tête ah mais ! ;-)) maintenant il me semble que le vent tourne un peu. Cela dit vous insistez tellement avec le hussard, qu'il va bien falloir que je m'y colle d'autant que je ne le connais qu'en ayant visionné des extraits d'un film qui ne m'a vraiment pas convaincue (avec cet acteur là, lisse comme du formica et Binoche et la très talentueuse Isabelle Carré, il me semble) ... Et Noë, Parlez nous de Noë ... C'est vrai que c'est son" meconnu" .
Quant aux champignons, Annus Horribilis ! Il n'y a plus de champignons je confirme ! j'en ai vu 2 minuscules et carrément mort nés... Tout fout l'camp ma bonne dame ! Une question qui me tourmente: Pourra t-on tenir jusqu'à l'hiver sans fricassée ?

Écrit par : Frasby | vendredi, 06 novembre 2009

Chr Bohren : Ahhh !!! Flaubert ! Flaubert !Flaubert ! (Je n'en dirai pas plus !...) merci Chrisbohr ! j'aimerais lire ce nom partout ;-)
Trois fois rien ça fait pas quelque chose, ça fait presque rien, mais le presque rien va partout et finit même par faire "un mode"... Un petit clin d'oeil en passant à mon maître feu Luc Ferrari, (mort en Août 2005,) qui avait de belles lettres, et à sa partition une musique qui s'appelle justement "presque rien"(une must pour les oreilles)
http://www.electrocd.com/fr/cat/ina_c_2008/
elle a toujours fait partie de mes petites feuilles de route.
et ça c'est quelque chose ;-) non ?
Merci de votre visite...
Ps :
Pour les jardins suspendus, je les ai frôlés, j'ai bien pensé à vous... mais j'ai pris un train si crépusculaire que je n'ai trouvé dans le presque noir de la gare, que l'inaccessibilité à ces jardins, de toute façon, la photo n'aurait rien rendu, mais ce n'est que partie remise. C'est ce qui faut s'dire ...

Écrit par : Frasby | vendredi, 06 novembre 2009

Bon, ben je vais relire Giono, il m'a échappé à l'époque. Mais "les bouvreuils s'imaginent que midi c'est l'été", comment ai-je pu ? (on n'est vraiment pas sérieux quand on a etc.)

Écrit par : Anna de Sandre | samedi, 07 novembre 2009

@ Anna de Sandre : Ah mais oui, comment avez vous pu ? Y'a pas d'âge pour lire Giono mais il faut !
ça grouille à mort, ça va vous plaire. C'est d'une modernité affolante. Demandez dont à l' Hozan Kebo de vous faire une chtite liste pour la mise en bouche, il pourra pas refuser. Enfin là, je suis ravie, si vous aimez les bouvreuils, vous allez aimer ça : un bout de "Colline" (il me semble me souvenir que l'Hozan, il aime pas, mais on va passer outre ! ;-) Extrait:

" Sous le groussan jaune tremble le long corps musculeux d'un lézard surpris qui fait tête au bruit de la bêche.
« Ah ! L'enfant de pute. »
La bête s'avance par bonds brusques, comme une pierre verte qui ricoche. Elle s'immobilise, les jambes arquées ; la braise de sa gueule souffle et crachote.
D'un coup, Gondran est un bloc de force. La puissance gonfle ses bras, s'entasse dans les larges mains sur le manche de la bêche. Le bois en tremble.
Il veut être la bête maîtresse ; celle qui tue. Son souffle flotte comme un fil entre ses lèvres.
Le lézard s'approche.
Un éclair, la bêche s'abat."

Écrit par : Frasby | samedi, 07 novembre 2009

Coquin de sort ! Je fonce dans ma bibliothèque, je dois avoir Regain quelque part... Enfin, j'espère... Argh ! Mortecouille ! Comment ai-je pu ?

Écrit par : Anna de Sandre | samedi, 07 novembre 2009

@Anna de sandre : Mortecouille j'adore !
Tout dans les tons d'automne !
je subodore en vous l' esthète, Anna !
Allez ! allez ! foncez !
Vous laissez pas distraire !

Écrit par : Frasby | samedi, 07 novembre 2009

@ Anna de S : Vous dérangez pas, je reviens juste poser la majuscule à de Sandre.
Allez hop ! (Ni vu ni connu !)
;-))

Écrit par : Frasby | samedi, 07 novembre 2009

Ici
Pierrot, rêveur équitable du Québec

Bravo pour votre beau blogue
sur les ermites de ce monde
et leur cabane dans le bois:)))

Dans le cadre de mon vagabondage poétique
blogues-musée pertinents mais aléatoires
pour mon oeuvre littéraire pertinente mais aléatoire

permettez-moi de vous offrir
une de mes chansons

LA FILLE UNSHCOOLING

COUPLET 1

t’as 27 ans
puis tu me téléphones la nuit
pour me parler en bien
de tes trois beaux petits

mes 60 ans
ont fait de moi ton meilleur ami
une sorte de maître de philosophie

COUPLET 2

tu trouves
que j’ai l’air de l’Émile
de Jean-Jacques Rousseau
qui aurait vieilli trois siècles
en une vie

il est vrai
que vagabonder les routes du pays
sans aucune dépendance
ça ressemble à l’enfance

COUPLET 3

tu refuses d’envoyer
tes enfants à l’ecole
cloche qui sonne
chaque fois pour toi c’est un viol

ta jeune famille
se cache dans une forêt
dans l’bout d’Rawdon
pas de t.v.
juste un vieux téléphone

COUPLET 4

la ière fois
qu’tu m’as croise su l’boutte d’une plage
je sortais d’la nature sauvage

t’as vite compris
que l’gars c’était un intellectuel
qui a échange ses livres
contre deux ailes

COUPLET 5

t’as 27 ans
la nuit tu trippes sur Jean-Jacques Rousseau
tes enfants dorment tu lis l’Émile
tu trouves ça beau

j’ai 60 ans
qu’importe l’heure
j’te sers de précepteur
chaque fois qu’tu m’téléphones
de ta forêt d’Rawdon

COUPLET 6

à soir
j’vous ai conté
l’histoire du vieux bonhomme

qui chante ses feelings
pour le génie
de la fille unschooling

à soir
j’vous ai conté
l’histoire du vieux bonhomme

qui chante ses feelings
pour le génie

de la fille
LIFE SCHOOLING

Pierrot
vagabond céleste

www.enracontantpierrot.blogspot.com
www.reveursequitables.com

www.demers.qc.ca
chansons de pierrot
paroles et musique

sur google,
Simon Gauthier, conteur, video vagabond celeste

merci
Pierrot, rêveur équitable du Québec

Écrit par : pierrot, ermite des routes | vendredi, 15 février 2013

@ pierrot, ermite des routes : bravo pour la song, j'apprécie beaucoup (la forêt d'Radow déjà à lire, ça fait rêver), et un grand merci à vous d'être passé par ici nous faire découvrir votre univers, avec un cadeau ça c'est chouette ! on va bien évidemment l'explorer...
vos semelles semblent si légères que ça donne envie de voyager. enfin, si vous passez par chez nous, n'hésitez pas à nous faire un petit signe, qu'on vienne à votre rencontre, avec d'autres songs ou poems si ça vous dit, vous êtes le bienvenu.

Écrit par : frasby | vendredi, 15 février 2013

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