samedi, 14 novembre 2009
La musica ideal (Part II)
"En même temps que nous aspirons à explorer et à apprendre, nous exigeons que tout reste mystérieux, inexplorable, que la terre et la mer soient tout à fait sauvages, inconnues, insondées par nous, parce qu'insondables. Nous n'avons jamais assez de la nature."
H.D. THOREAU. Extr. "Walden ou la vie dans les bois" traduit de l'américain par G. Landré Augier. Editions Aubier 1981.
Après avoir passé 18 mois à étudier les mystiques orientales (la philosophie indienne avec GITA SARABHAI en partant des références d'Ananda K. COOMARASWAMY, "la transformation de la nature en art" et s'être interessé à la philosophie chrétienne médiévale notamment aux traités du penseur allemand hérétique et mystique du XIV em s. Maître ECKHART) ; John CAGE lit avec intérêt les écrits de C.G. JUNG qui soulignent la tension entre les parts conscientes et inconscientes de la personnalité. John CAGE entrevoit par la musique le moyen de ressouder ce qui a été divisé, de dépasser un état de dualité qui peut nuire à un authentique équilibre mental.
"La fonction de la musique comme toute autre occupation salutaire n'est-elle pas d'aider à remettre ensemble ces parties séparées ? " (John CAGE -1948-)
En fréquentant la poésie de l'orient, CAGE s'interroge sur l'attitude du compositeur occidental vis à vis de l'acte de création. Il se déclare franchement embarrassé lorsqu'il constate qu'il a consacré la plus grande partie de sa vie musicale à la recherche de nouveaux matériaux. Cette quête du nouveau lui apparaît symptômatique de l'espèce de fuite en avant de notre culture qui consiste à se projeter sans cesse vers des horizons inconnus. De vouloir exploiter sans cesse de nouveaux territoires. Peut être est ce (pense CAGE), parce que notre culture ne possède pas la foi dans ce qu'il nomme "Le centre paisible de l'esprit". Cette question, le compositeur la méditera et l'abordera musicalement dans les "Sonatas et interludes" (méditations sur les émotions permanentes de l'Inde, qui tendent précisément vers la tranquillité).
Ces émotions sont rangées en premier groupe de 4 associé au blanc : l'héroïsme, l'érotisme, la joie et l'émerveillement. Le deuxième groupe de 4 lié au noir comprend : la crainte, la colère, le dégoût et la douleur. La neuvième émotion n'est associée à aucune couleur. il s'agit justement de la tranquillité, laquelle possède cette qualité de transparence, de non-obstruction qui émerge de la conception "Cagienne" du silence.
Et l'on se prend à rêver de voir surgir entre les flots quelques pianos à touches grises...
Sources : John CAGE par J. Y. Bosseur (suivi d'entretiens avec D. Caux et J.Y. Bosseur). Editions Minerve 1993.
Photo : Variation pour un fleuve tranquille. Vue sur la troisième berge du troisième fleuve. Quelquepart entre Rhône et Saône, là où l'eau est aussi transparente que son promeneur... Lyon. Novembre 2009. © Frb
23:18 Publié dans A tribute to, Art contemporain sauvage, Balades, De la musique avant toute chose, De visu, Mémoire collective, Objets sonores | Lien permanent
Commentaires
Si bel hommage aussi aux pianos aqueux...
Écrit par : JEA | vendredi, 20 novembre 2009
@JEA : Merci ! cela dit (je prêche là où je n'ai pied)
car les pianos à huile sont plus rigolos que les pianos à eau (pouf pouf)
Pardonnez moi il est tôt et je n'ai pas encore bu de café ceci explique cela d'un peu rudimentaire... ;-) figurez vous que
je cherche désespérement un piano à café ( ;-O !)
Écrit par : Frasby | vendredi, 20 novembre 2009
Contactez Boris Vian pour le piano à cocktails !
Écrit par : Cactus | vendredi, 20 novembre 2009
@Cactus : Comme je n'ai toujours pas trouvé mon piano à café, un piano à cocktails, l'heure s'y prête, j'y songerai, c'est une bonne idée ! quoique dans la foulée je me demande si je ne vais pas contacter aussi le père Huysmans aussi pour passer commande d'un petit orgue à parfums !
Écrit par : Frasby | vendredi, 20 novembre 2009
@Cactus (bis) : J'ai lu votre billet sur "Irène" chez vous. Magnifique ! Mais je n'arrive pas à vous poster le commentaire
(un bogue un bug un binz, enfin bon, ça veut pas. Donc je vous remerciepour "Irène", ici. Au cas où vous repasseriez...
Écrit par : Frasby | vendredi, 20 novembre 2009
en écoutant la « sonate iv » de J Cage
ça se brise à peine sorti
de l’œuf du Silence ….
mais ça se recompose ou ça tente de …
ça se tatonne pour s’extraire sans
trop vouloir s’en
extraire pour de bon ça
reste à comme une lisière…
à force d’essayer de …
ça finit par …
ça bruisse comme …
ça ne cesse de se briser …
coquilles vides éparses
qui cachent l’œuf …
(note visuelle les yeux fermés ) il « pleusine »
Écrit par : hozan kebo | vendredi, 20 novembre 2009
@Hozan Kebo : vous nous mettez aux anges Hozan avec cette satanée sonate IV notée visuellement les yeux fermés !
(transcrite de mémoire la tête dans les cordes à piano )
C'est écrit,
ce n'est pas écrit
c'est écrit
ce n'est pas écrit
c'est écrit ce n'est pas.
C'est.
http://www.youtube.com/watch?v=VYsx5Di3bso
Écrit par : Frasby | vendredi, 20 novembre 2009
Bonsoir, Frasby ! :-)
La recherche de Cage (et votre texte subtil et clair) m'intéresse tout particulièrement. Je suis toujours, a contrario, très étonnée de la conception musicale de ce pays étrange qu'est la France, si peu "rythmique" (au sens "tripal" du terme) : les Français, je le pense sincèrement, n'ont pas "d'oreille", dans l'ensemble (cela se voit à leur incapacité à prononcer l'anglais, parfois), et ne "swinguent" pas fabuleusement bien ; je ne parle pas des musiciens, mais du public, encore assez formaté aux marches classiques - voir le succès des histrions qui se contentent de l'éternel couplet-refrain-couplet... ad lib.
Bref bref...
Merci pour ce bel éclairage.
Écrit par : Sophie K. | vendredi, 20 novembre 2009
* m'intéressent, pardon.
Écrit par : Sophie K. | vendredi, 20 novembre 2009
@Sophie K. : Bonsoir ! Merci d'apprécier et surtout merci pour votre point de vue que je partage tout à fait (même si mon swing à prononcer l'anglais est encore pire que celui de... François Fillon (;- O!), je n'en suis pas si fière remarquez ! c'est de la faute à melle pugeolles ma prof d'anglais qui nous a fait apprendre par coeur "yellow submarine" (ah ! ah ! un trop grand traumatisme !) Mais attention !!! warningue ! si nous parlons de musique, et d'oreille, ce n'est pas pareil ;-) . C'est vrai, je crois hélas que vous avez raison, il y a beaucoup trop de gens dans ce pays qui n'ont pas d'oreille voire pire ! sont ils à moitié sourds ou presbyacousiques ? je me demande. En fait il n'y a pas de culture de l'oreille (du son) dans ce pays, en France c'est quand même grave, elle existe, certes ! mais elle a du mal à survivre, au milieu des histrions comme vous dites, quand on entend que Yannick Noah est le chanteur préféré des français (;-O ! 'on aurait pu avoir une très belle culture des sons, très affinée, très libre pourtant (regrets) c'est quand même Pierre Schaeffer et son solfège expérimental qui a auguré la musique concrète en France en 1948, et il y avait des ateliers de recherches fabuleux, avec des gens qui semblaient idéaux pour aider à ouvrir l'oreille du petit peuple (Pierre henry, Michel chion, Luc ferrari, Parmegiani , F Bayle et j'en oublie), cela n'interesse qu'un tout petit nombre très mordu mais tout petit. Le compositeur joue dos tourné au public , c'est le pied ! Personne qui gesticule sur scène et vous agresse avec des costumes de scènes atroces (du style "Johnny) eh bien non , le français lambda n'apprécie pas ! il lui faut du criard, visuel, sonore, mais voir surtout ! faut pas que ça "swingue", mais faut que ça "pète". Faut qu'il puisse se rappeler du refrain.
le problème c'est peut être qu'en France, on ne sait pas trop encore comment on fait fonctionner l'oreille sans les yeux (je ne sais pas aileurs ???) mais regardez les inuits !!!
Je rigole (un peu) pour ne pas en pleurer, c'est trop piteux. Sinon: à propos de ce texte même, je n'ai pas eu tellement d'efforts à fournir, puisqu'il s'agit d'une sélection de notes lectures extraites d'un livre de J. Y Bosseur sur Cage qui est tout à fait clair et n'a pas besoin d'être réecrit , j'ai donc fait quelques choix et c'est tout, pas grand chose. Et c'est Bosseur qu'il faut féliciter, plutôt...d'ailleurs ce livre est passionnant, je vous le conseille. Bref bref ... Merci encore, je vous souhaite une bonne soirée... Pas grave, les fautes ! Un décret est sorti, elles sont autorisées dans la cuisine ;-))
Écrit par : Frasby | samedi, 21 novembre 2009
Hahaha ! Merci Frasby ! ;-))
Écrit par : Sophie K. | samedi, 21 novembre 2009
@Sophie K :Oh mais de rien, je ne fais qu'enfoncer des portes ouvertes !
(Avec mon gros bélier virtuel )
Sauf pour les fautes dans la cuisine, c'est pas pour me vanter mais c'est un décret épatant, n'est ce pas ?... ;-))
Écrit par : Frasby | dimanche, 22 novembre 2009
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