Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 13 septembre 2009

Comme un dimanche

"A peine eût-il descendu dans la cave, qu'on le vit agité par des mouvements convulsifs"

FELIX VICQ D'AZYR, (1748-1794). "Le danger des sépultures", cité par PHILIPPE ARIES in "Essais sur l'histoire de la mort en Occident du Moyen-Age à nos jours". Editions Seuil 1975.

crucifixion m - copie.png

Avant-propos : Ce billet est une suite, (pas tout à fait chronologique) tout autant qu'une variation sur un même thème, si vous avez loupé le début, vous le trouverez sur le billet "Comme un dimanche" daté du  06/09/2009.

On sait maintenant que dans la seconde moitié du XVIIIem s. l'opinion s'est émue des "dangers des sépultures", c'est même le titre d'un essai paru en 1778, écrit par F. VICQ D'AZYR, médecin bien connu aujourd'hui des historiens. Un recueil de faits divers qui démontrent le pouvoir d'infestation contagieuse des cadavres et décrivent aussi ces foyers de gaz toxiques qui se formaient dans les tombes. Certains enterrements célèbres dans les annales de ces premiers hygiénistes tournèrent à l'hécatombe.

Ainsi un jour chaud du mois d'Août 1744, un portefaix s'effondra, ouvrant le caveau des pénitents blancs de Montpellier, à peine eût il descendu à la cave, qu'il fût pris d'un malaise brutal, le frère pénitent qui voulût lui porter secours échappa de justesse au danger. "A peine eût-il saisi l'habit de portefaix qu'il perdit la respiration". On le retira à demi-mort. Bientôt il reprit ses sens mais il lui resta une espèce de vertige et d'étourdissement, signes avant-coureurs des mouvements et des défaillances qui se manifestèrent un quart d'heure plus tard. "Ses troubles heureusement disparurent par le moyen d'une saignée et de quelques cordiaux, mais il fût longtemps pâle et défiguré et il porta depuis, dans toute la ville, le nom de ressucité". Deux autres pénitents tentèrent de sauver le malheureux portefaix qui était toujours au fond de la cave, inanimé. Le premier pénitent se sentant suffoquer eût le temps de faire signe qu'on le retirât. Le deuxième, plus robuste fût victime de sa force et de son audace : "Il mourût presque aussitôt qu'il fût descendu [...] chacun alors comprit, à quoi il s'exposait et personne ne désirât plus se risquer à une telle tentative malgré les exhortations les plus pressantes du clergé".

Source : Philippe ARIES  "Essais sur l'histoire de la mort en Occident du Moyen-Age à nos jours".

Même lien, à props de Philippe ARIES : http://bruegel.pieter.free.fr/aries.htm

Photo : Est-il mort ou tente t-il doucement de revenir à la vie ? ce Christ couché à nos pieds et dépouillé de sa croix. Etrangement mis à terre, bras clouées à la pierre, poings rageusement serrés. A terre encore, se trouve, presque à l'endroit de la blessure, et glissant tout le long du corps, une mousse tellement improbable qu'on la croirait miraculeuse, (s'il nous venait encore la certitude de quelques miracles sur terre...). Le temps d'une seconde, l'illusion trouble un peu, et nous surprend encore en flagrant-délit de superstition... Cela comme la feuille noire gisant sur un bitume hanté par les vivants, tout aussi bâtés qu'insoucieux. Ces choses porteront simplement le doux nom de mystère. Je ne saurai rien vous dire de plus. Photographié au Cimetière de Bois Ste Marie, au milieu de l'été 2009. © Frb

Commentaires

Avec le progrès des connaissances en anatomie, on a précisé que les clous de la Passion étaient certainement fixés plus bas, dans les poignets, que les représentations de peinture ou de sculpture ne le montrent...

Écrit par : Nénette | lundi, 21 septembre 2009

Avec ces cimetières encerclant les églises, se préparaient des fuites de gaz naturel procurant un éclairage public certes incertain et fantaisiste mais bien avant les réverbères...

Écrit par : JEA | lundi, 21 septembre 2009

Ca me fait tellement rire les annales des hygiénistes que je prends la porte directement :o))

Écrit par : Anna de Sandre | lundi, 21 septembre 2009

"personne ne désirât plus se risquer à une telle tentative malgré les exhortations les plus pressantes du clergé".

ce genre de phrases (promis juré) me comble d'une aise que je dirais : "pataphysique" (notamment parce que j'aime assez "extrapoler" et m'imaginer quelques unes de ces "tentatives telles" )

Écrit par : hozan kebo | mardi, 22 septembre 2009

@Nénette : Ah bon ? Mais alors d'où viendrait cette presque unanime illusion d'optique dans toutes ces représentations
de la crucifixion ?
(J'ai l'impression de vous poser la question du super banco du jeu des 1000 francs,
Vous laisserez vous tenter, Nénette ? Il n'y a à gagner qu'une immense estime générale...)

Écrit par : frasby | mardi, 22 septembre 2009

@JEA :Seriez vous en train de nous suggérer une autre façon de "s'allumer" , qui pourrait aussi s'appliquer à la lutte contre le réchauffement climatique. ("C'est dans les vieux pots ... etc ...")
Pour des villes illuminées aux feux follets ! Doit on créer une pétition ? Ou bien plus sympathique, organiser une collecte de vers luisants ?
A nous de choisir !

Écrit par : frasby | mardi, 22 septembre 2009

@Anna de Sandre : Prendre la porte ? comme c'est dommage ! Votre pseudo ne semblait pas tant s'opposer à ce style de rubrique... J'ose un peu espérer que n'avez pas lu, quelquepart que je m'appliquerais à défendre ces thèses ;-)
Cela dit j'aime le son du nom de Vicq D'azyr , qui sent un peu l'alcool de menthe, l'eau de mélisse, rien à voir avec les fuites de gaz éclaireuses délicieusement décrites par JEA...

Écrit par : frasby | mardi, 22 septembre 2009

@Hozan Kebo : Ah ? vous aimez l'extrapolation ?
Moi aussi... ;-)

Écrit par : frasby | mardi, 22 septembre 2009

Eh bien, je ne sais pas... il faut regarder du côté de l'histoire de l'art, et aussi se dire que toute représentation est subjective et relative à la culture dans laquelle elle émerge. Qu'un artisan sculpte au XIIè siècle un crucifix, il le fera selon les canons de son époque. Au XIXème on voulait savoir la vérité objective... chercher sans doute du côté de Renan, je ne sais plus comment s'appelle ce courant de pensée, le positivisme je crois, avec Comte. Oh, là là, comme mes souvenirs sont poussiéreux... Dites, Frasby, on a un bel été indien, n'est-ce pas ? Bien à vous

Écrit par : Nénette | jeudi, 24 septembre 2009

c'était quand même bien pratique la saignée. Evidemment, de nos jours, avec le nombre des consultations, le cabinet du médecin aurait vite fait de puer l'abattoir...

Écrit par : choule[bnkr] | jeudi, 24 septembre 2009

@Nénette : J'adore votre idée d'artisan "qui sculpte selon les canons"... (à méditer, sans doute, serait ce de là, d'où viendrait tout le mal ?)
(..."De son époque", on n'est pas obligé de préciser, si ?)
Sur l'histoire du positivisme, Auguste Comte oui, est un positiviste ça c'est ce qu'on dit mais je maîtrise pas bien le sujet ...
Quant à Renan, j'ai lu assez peu, trop peu pour m'avancer mais j'aime bien cette phrase de Renan (histoire de recadrer les choses vite fait bien fait) :"Quand on se place du point de vue du système solaire, nos révolutions ont à peine l'amplitude de mouvements d'atomes." C'est vertigineux comme on aime ! Alors qu'est ce que ça peut faire que les clous du bon Dieu crucifié soient à 5Cm plus haut ou bas des poignets, après une phrase pareille ? ensuite il existe d'autres phrases qui pourraient tout bien décrypter, c'est sûr !
Sinon, oui ! on a bel été indien, je vous ai déjà répondu là haut, Si vous saviez comme je désespère ... ;-)

Écrit par : frasby | jeudi, 24 septembre 2009

@choule [bnkr] : Le mot "saignée" m'a toujours fascinée...
Cette sorte de panacée universelle.
Une migraine (allez hop ! on va vous faire une saignée)
Une jambe cassée (Ou on vous coupe la jambe + une petite saignée, pour la route. Une scarlatine ? (allez !) une petite saignée et on n'en parle plus ! etc...
Quant à votre réflexion sur la médecine moderne euh ... oui, vu le nombre de consultations, certes ! mais vous ne trouvez pas que saignée ou pas, certains cabinets de medecins puent quand même l'abattoir ?
Si je puis me permettre...Je trouve que la saignée, desfois c'était + franc ;-))

Écrit par : frasby | jeudi, 24 septembre 2009

Les commentaires sont fermés.