jeudi, 18 août 2011
Missions célestes (Part II)
Si vous êtes dans un abîme de sécheresse et d'impuissance, allez vous abîmer dans le coeur de Jésus Christ qui est un abîme de puissance et d'amour, sans vous embarrasser à goûter la douceur de cet amour lorsqu'il lui plaira.
L'Abbé CUCHERAT : propos attribués à Marguerite Marie Alacoque, extrait du livre quatrième, chap.X, "Emplois de la bienheureuse", in "Histoire populaire de la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque et du culte du Sacré coeur de Jésus", éditions Baratier et Dardelet, 1878.
Pure folie, par cette canicule que de vous forcer proposer à lire un sujet aussi douloureux que si peu estival, c'est vraiment aimer se faire du mal pardonnez mon insistance, en attendant de revenir à des thèmes plus légers, je tiens, par un souci de cohérence qui ne s'explique pas, à poursuivre ce long chemin de croix, et aborder avant l'orage un second volet de ces missions célestes, dédiées au culte du Sacré Coeur, en évoquant encore quelques exemples (pas tous) qui précédèrent Marguerite-Marie AlaCoque dans cette fidélité ardente toute dévouée au Coeur de Jésus.
Après Sainte Lutgarde, nous citerons un saint beaucoup plus doux et plus connu dont les textes magnifiques, il faut bien le dire, sont encore lus et admirés de nos jours, Saint François d'Assise, lui aussi, rappela au monde l'expressive image des plaies du "sauveur". D'ailleurs, ce n'est pas seulement St François, mais tout un ordre religieux qui, au Mont Alverne, à l'est de la Toscane, fût appelé à l'adoration et à la garde du Divin Coeur. De Saint François lui même je ne reproduirai que trois petites strophes d'un de ses cantiques d'amour traduites mot à mot, j'ose espérer que vous apprécierez la simplicité de ces voeux d'une beauté encore bien troublante :
Serre-moi bien tendrement,
Baise mon côté :
Pour toi je suis blessé
De la tête aux pieds
Regarde un peu et vois
Où le réduit l'amour :
J'ai le coeur transpercé
Par une lance ...
Mon coeur désire ton coeur
Tu me vois d'amour languir ;
Hâte-toi de venir à moi,
Livre moi ton coeur.
Autre élu que nous avons choisi, un disciple du Patriarche d'Assise, est Saint Bonaventure (surnommé "Le docteur séraphique"), né en Italie en 1217 ou 18 ou 21 (?) mort à Lyon en 1274, a lui aussi dans sa vie et ses écrits, distillé le parfum de la dilection. Extraits choisis.
Un jour, s'approchant du coeur de Jésus, il s'écria :
Ô aimable plaie ! c'est par vous que je suis entré et que je suis arrivé jusque dans les entrailles les plus intimes de la charité de Jésus christ, c'est là que je fais ma demeure [...] Là je trouve une si grande abondance de consolations que je ne puis l'exprimer. Ô aveuglement des enfants d'Adam, qui ne savent pas entrer en Jésus-christ par ses plaies sacrées ! voilà la félicité des anges qui nous a été ouverte et on néglige d'y entrer. Croyez-moi, hommes aveugles, si vous saviez entrer dans Jésus par ces sacrées ouvertures, vous y trouveriez non seulement une demeure et une douceur admirable pour votre âme mais encore un doux repos pour votre corps [...] faites en l'expérience, et vous y trouverez un trésor de toute sorte de biens. Voilà la porte du paradis ouverte [...] entrez-y donc ô âmes fidèles ! voilà votre époux qui par un excès de son amour vous a ouvert son côté afin de pouvoir vous donner son coeur.
Une douceur encore bien mystérieuse... Et parce qu'il me faudra vous présenter la première Marguerite, qui précéda de quelques siècles notre illustre Marguerite nabirosinaise, je ne reproduirai pas ici les effusions d'amour de Saint Bonaventure envers le Divin Créateur, dont certaines sont plus ardentes encore, vous les retrouverez, parmi ses écrits, si vous en êtes curieux. A retenir qu'il fût un grand prédicateur, et grand adorateur du Coeur de Jésus. Mais honneur aux dames chrétiennes douces ou rudes pénitentes, comme cette Marguerite de Cortone qui inspira des écrivains et mériterait un long billet bien que ce ne soit pas écrit dans le ciel, je glisserai entre-temps quelques pages moins sacrées lunaires ou païennes, telles des intercalaires variant la ritournelle, avant de vous parler de Marguerite de Cortone et qui sait ? Peut-être même de Sainte Angèle de Foligno. Mais pour boucler la boucle, avant que vous ne fassiez vos ablutions je ne fermerai pas ce billet sans laisser à la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque, tendant son coeur vers vous autres, mes biquets, agneaux, de vertu en vertu, le soin de vous adresser le dernier mot. Voilà qui est dit. Sera dit...
Cent fois je me suis étonnée comme Dieu ne m'anéantissait pas après tant de fautes, comment quelques grandes qu'elles fussent, il ne me privait pas de sa présence. Mais il me la rend si terrible, lorsque je lui ai déplu en quelquechose, qu'il n'y a point de tourment qui ne me fût plus doux, et auquel je ne sacrifiasse plutôt mille vies, que de supporter cette divine présence et paraître devant la sainteté de Dieu ayant l'âme souillée de quelques péchés.
Ensuite nous chanterons.
Photo : Statue du Sacré Coeur photographiée à l'entrée du Parc des chapelains à Paray le Monial. Le Seigneur vous montre lui même ce coeur d'or...
Photo © Frb 2011.
08:25 Publié dans A tribute to, Arts visuels, Balades, De visu, Le vieux Monde, Mémoire collective, Pépites | Lien permanent
Commentaires
Est-ce le Sacré Coeur du chemin du Rosaire ?
Il a dû y avoir un moulage commun, répliquant celui de Montmartre, qui est majestueux.
Écrit par : solko | mardi, 23 août 2011
Intéressante excursion dans le monde du DIVIN ? on dirait un voyage commenté vers COMPOSTELLE; je viens de relire "les raisons dans l'histoire" de HEGEL; il explique bien je trouve les différentes façons de traiter l'histoire; ta façon de procéder doit en faire partie....
bonne continuation
Écrit par : alex | mardi, 23 août 2011
@Alex : Excursion, oui, ces billets sont d'abord des déplacements, partant de connotations géographiques, et puis j'ai glané des livres populaires anciens curieux et passionnants, partant du principe qu'on peut aussi aborder des thèmes en lesquels on ne croit pas forcément, je trouve assez fascinants ces "mondes" mystiques, à l'éclairage de notre temps, c'est peut être interessant, de procéder aussi par contrastes, enfin, je ne sais pas trop, j'essaie... Mais tu sais, ici ce n'est rien que de la fragmentation, une sorte de puzzle dont les pièces sont éparpillées comme des petits bouts de pages déchirées qu'on peut encore relier si on veut avec d'autres petits bouts de papiers, le lecteur il fait ce qu'il veut, j'avais déjà évoqué ces sujets il y a 2 ans, une boucle qui ne se boucle pas, on revient sur nos pas, en regardant la même chose mais en changeant légérement d'emplacement je ne crois pas avoir une démarche "sérieuse", à part donner à voir, un court instant, très partiellement. Hegel je n'ai jamais lu un bouquin de lui en entier, mais quand il écrit que rien de ce qui est humain ne lui est étranger, ça me plaît beaucoup... "Voyage vers Compostelle", je ne connais presque pas mais la route de Compostelle passe pas loin d'ici (La voie de Cluny, Vezelay,et même chez la bienheureuse Marguerite), comme quoi tu es pile sur la voie divine :) Merci à toi Alex, (bon grain, bon jour !)
Écrit par : frasby | mardi, 23 août 2011
@Solko : Bonne question, je n'avais jamais fait le rapprochement, maintenant que vous me le dites, c'est vrai qu'il lui ressemble étrangement, en beaucoup moins majestueux que celui de Montmartre. Moulage commun, je ne sais pas, je suis désolée, Solko, sur ce coup là je n'en ai pas la moindre idée, mais je peux toujours essayer de me renseigner, sans toutefois promettre... Si vous apprenez quelque chose de votre côté, je serai ravie d'être un peu "éclairée"...
Écrit par : frasby | mardi, 23 août 2011
http://www.qtbridge.com/pleinpot/gallery_pleinpot/Montmartre2.html
Il y a une parenté. Mais est-ce le point de vue ? On dirait que celui de Montmartre vient de rentrer de sous la pluie...
Si on cherche sur internet ou ailleurs les textes des dévotions au Sacré-Cœur on en trouvera d'étonnantes. Dont celle-ci :
Seigneur, enfermez-moi au plus profond des entrailles de votre Cœur. Et quand vous m'y tiendrez, brûlez-moi, purifiez-moi, enflammez-moi, sublimez-moi jusqu'à la satisfaction parfaite de vos goûts, jusqu'à la plus complète annihilation de moi-même. Amen.
Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955), Prière écrite à Ordos en 1923, in Hymne de l'Univers, Paris, Ed. du Seuil, 1961.
Écrit par : Marc | mercredi, 24 août 2011
@Marc : Merci, vous complétez fort à propos ces échanges et nos interrogations, j'ai vu les deux, celui de Paris (que j'avais oublié, c'est pas sérieux... enfin) dans mon souvenir il est plus majestueux que celui de Paray Le monial, votre photo semble confirmer aussi ce qu'en dit Solko, je n'ai trouvé aucun renseignement au sujet du moulage, dans aucun des bouquins que j'ai ici ni sur le net mais je connais (de vue) un historien qui a beaucoup étudié l'histoire de Paray le Monial, je le croise parfois chez des amis, à l'occasion je lui demanderai. Pierre Teilhard de Chardin c'est magnifique, en effet cet extrait est étonnant, merci de nous livrer aussi les références, je sais que P. Teilhard de Chardin a également approfondi sa réflexion sur le sacré Coeur dans une correspondance avec sa cousine Madame Teilhard Chambon, je ne l'ai pas lu, mais les extraits sont aussi étonnants, voici les références : Pierre Teilhard de Chardin, Lettre à sa cousine, "Genèse d'une pensée", Paris, éditions Grasset, 1961.
Epistolaire, donc, ça devrait vous intéresser, une petite devinette , je ne donnerai pas d'indice, savez vous comment se prénommait la cousine de Pierre Teilhard de Chardin ???
Au hasard ➛ Si toutefois il existe ➛ ( ahlala ! j'en dis trop ! ;-)
Écrit par : frasby | mercredi, 24 août 2011
Marguerite ? Marguerite Marie ? Mais ça serait trop demander au hasard.
Écrit par : Marc | mercredi, 24 août 2011
@Marc : Le hasard est gourmand, mais il ne faut pas trop lui en demander tout de même ! :)
Marguerite, donc ! mes félicitations !
Comme vous avez fait des recherches, ça mérite une petite récompense vous gagnez les clés d'un portail lequel,
il me semble pourrait bien s'adresser à vous http://www.teilhard.org/
Merci Marc.
Écrit par : Marguerite-frasby | mercredi, 24 août 2011
Mince, Duchamp a pris du champ?
Écrit par : Sophie | jeudi, 25 août 2011
Sophie : Ah merci ! un mot pour Marcel, ça le (me) console. C'est beau comme vous êtes studieuse ! vous êtes peut être la seule à l'avoir remarqué, quand je dis ça je dis rien évidemment (sourires), c'est le jeu, certains jours plus que d'autres, plus rudes que d'autres (oupf !) enfin ça me fait de la peine pour Marcel Duchamp (que j'aime follement pour plein de raisons). Il faut bien dire ce qui est, son beau texte n'intéresse pas. Marcel Duchamp et Tristan Corbière sont les deux mal aimés de ce blog je ne sais pourquoi. (on va dire que ça vient de moi) / Et plutôt que devoir endurer cette vérité cruelle je préfère ne pas voir ça... (admirez la tenacité !
cependant j'ai conscience que passer de Sainte Marguerite Marie A laCoque, à Marcel Duchamp était une idée à la noix ...
Écrit par : Frasby | vendredi, 26 août 2011
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