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vendredi, 03 avril 2009

Tandis que nous fleurtons...

"...Non plus ton parfum, violier
Sous la main qui t’arrose,
Ne valent la brûlante rose
Que midi fait plier..."

PAUL-JEAN TOULET "Contrerimes"

cerisiers_en_fleurs.jpg

Le Désenchantement maître mot de P.J.TOULET parle son langage propre et commande le choix des mots des "Contrerimes", il y a du RONSARD chez TOULET, souvenez vous  du poème : "Mignonne, allons voir si la rose..." dédié à Cassandre :

" Donc, si vous me croyez, mignonne,
Tandis que vostre âge fleuronne
En sa plus verte nouveauté,
Cueillez, cueillez vostre jeunesse :
Comme à ceste fleur la vieillesse
Fera ternir vostre beauté."

Ainsi, comme chez RONSARD, toutes choses aimées sont niées au profit d'une seule mais la plus éphémère. telle la "Brûlante rose que midi fait plier" dans le poème de TOULET, et qui n'est autre ici, qu'une fleur de pommier à l'existence encore plus brève... Rien ne subsiste solidement des sentiments, des objets, des amours... Toutes ces choses qui intéressent le coeur ou la curiosité de l'Homme un temps...Et P.J. TOULET Rapproche les images, les magnifie, tirant de la contemplation de la nature ses plus belles comparaisons, harmonisant les gestes d'une créature aimée avec le décor et tissant des liens émouvants entre l'humain, le végétal, le féminin, les paysages... Le tout, perçu, ressenti simultanément sur le seul plan de l'imagination. Une comparaison seule mène tout à l'unité. Le poète coordonne les choses après avoir redonné à chacune son exacte valeur. Exemple : Il n'y a plus au jardin, une fleur épanouie, sur le plancher, un gant tombé là ; il n'existe plus que ce gant qui fait penser à "un pétale de fleur". Les choses sont pourtant bien reçues une à une, mais c'est le charme P.J. TOULET de nous les restituer toutes ensemble.

On sait depuis HERACLITE que notre vie s'écoule comme un fleuve, HORACE délicatement, BOSSUET plus pompeusement ont fait des eaux courantes le symbole de nos destinées ; ce thème est aussi récurrent dans "Les Contrerimes".

"Le temps passe et m'emporte à l'abyme inconnu,
Comme un grand fleuve noir, où s'engourdit la nage"
(Coples, LIII)

Mais P. J. TOULET en tire maintes variations faisant pleurer les arbres, les fontaines, les fleurs ... Faisant chanter les adieux à toutes les espèces de liquides pour évoquer (nous rappeler peut-être ?) cette fuite éperdue de tout ...

Il arrive aussi que les images, au lieu d'invoquer l'invincible glissement du temps, résistent au contraire à cette fatalité, pour fixer en un sublime éclair, l'émotion de l'instant. En cet art, TOULET est aussi virtuose pour laisser goûter aux mortels, une minute de félicité qui ne saurait pas s'entendre autrement que dans une parfaite étreinte avec la nature. Contrerimes baroques, pourrait-on dire, déjouant la stabilité dans ce constat un peu amer qu'il n'est rien de très saisissable sous le soleil. En dépit de la forme solidement resserrée et fermée sur elle-même, les images fulgurantes de la poésie de Toulet en font des pièces ouvertes :

"On descendrait, si vous l'osiez
d'en haut de la terrasse,
Jusques au seuil, où s'embarrasse
Le pas dans les rosiers"
(Contr. ; LI)

Un instant ici est fixé. Mais le bruit peut continuer. "Le pas dans les rosiers". Et les silences seront portés au compte de la poésie...

Source (notes de lecture) : "PAUL-JEAN TOULET qui êtes vous ?" par P.O WALZER. Editions "La manufacture. 1987.

Photo : Fleurs au verger du Marquis de Montrouan aux premiers jours du printemps. vues dans le brionnais près du chateau de Montrouan (le bien nommé). Avril 2009. © Frb.

Commentaires

Ça n'a rien à voir. Voici quelques contrerimes célèbres. Des diamants.

La sottise, l’erreur, le péché, la lésine,
Occupent nos esprits et travaillent nos corps,
Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.

Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ;
Nous nous faisons payer grassement nos aveux,
Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,
Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches.

Sur l’oreiller du mal c’est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

C’est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !
Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l’Enfer nous descendons d’un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.

Ainsi qu’un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d’une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

Serré, fourmillant, comme un million d’helminthes,
Dans nos cerveaux ribote un peuple de Démons,
Et, quand nous respirons, la Mort dans nos poumons
Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.

Si le viol, le poison, le poignard, l’incendie,
N’ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins
Le canevas banal de nos piteux destins,
C’est que notre âme, hélas ! n’est pas assez hardie.

Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,
Dans la ménagerie infâme de nos vices,

Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !
Quoiqu’il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,
Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde ;

C’est l’Ennui ! — l’œil chargé d’un pleur involontaire,
Il rêve d’échafauds en fumant son houka.
Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat,
— Hypocrite lecteur, — mon semblable, — mon frère !

C.Baudelaire

Écrit par : Marc | dimanche, 05 avril 2009

Il y a du Ronsard mais aussi du Verlaine pour la fluidité et la musicalité...

Écrit par : Rosa | dimanche, 05 avril 2009

Oh! Mais je ne l'avais pas vu c'uilà!
(Oh Jais le pe valais ma nu luiça!)

Enfin Paul-Jean l'avait técri cre jois, sur l'autrelif... Aussi valai-je lu... Mais la othop piont du outt... Qui est jolitrès elle issau...
Cermi, traimenv'...

Écrit par : tanguy | lundi, 06 avril 2009

Ah puis fleurter, un mot à rêver tout un dimanche, terrible piège! Fuyons! (vabrement)

Écrit par : tanguy | lundi, 06 avril 2009

@Rosa ... oui du Verlaine ... aussi bien entendu (j'espère qu'on en reparlera) J'ai des promesses non tenues qui s'apprêtent à percer le toît de ma maison tant il y en a (donc je n'ose plus promettre ;-) normalement un prochain billet sur Toulet ...(mais pas tout de suite)
Verlaine ! evidemment ! vous faites très bien de nous le rappeler, surtout qu'on l'aime beaucoup, ici le vieux Paul !
merci à vous !

Écrit par : Frasby | lundi, 06 avril 2009

@Tanguy : Merci (il y a des billets cachés comme ça que je laisse au bon soin du lecteur)
(au son boin du treulec ;-)
Par contre je me demande si mes fleurs beiges (plus haut)
ne sont pas des fleurs de ciresiers... (et c'est douleur de l'ognirer)
De quoi faire hurler tous les bonatistes mais ce ne sera pas la première fois que le bonatiste arévé me prendra en flagrant délit
d'ignaritude
(la tehon est mursoi elle est unissamable)
Merci pour vautés guanty moccentiares.
nob roujène à vuos !

Écrit par : Frasby | lundi, 06 avril 2009

@tanguy : j'aime beaucoup votre "fuyons vabrement" qui qui semble venu de 1789
à moins que cela ne vienne de Vable d'iglantène ?

Écrit par : Frasby | lundi, 06 avril 2009

@Marc : Mais si !!! cela à à voir, cela est à voir à lire
c'est sublime. je suis ravie que vous n'hésitiez pas à nous porter ici le poème en entier , le lecteur je l'espère s'y plongera avec la même volupté que je le fis (le fait ;-)
C'est tellement beau que je ne sais pas comment vous remercier...
"Une bonne chanson" peut être ???
pour vous, peintre des plus doux paysages (et des arbres fruitiers, bien sûr!) en votre lieu : "Epistolaire" (qui a bien un chemin de dame, Dame ! et de nombreux soleils à mes yeux:

"Le soleil du matin doucement chauffe et dore
Les seigles et les blés tout humides encore,
Et l'azur a gardé sa fraîcheur de la nuit.
L'an sort sans autre but que de sortir : on suit,
Le long de la rivière aux vagues herbes jaunes,
Un chemin de gazon que bordent de vieux aunes.
L'air est vif. Par moment un oiseau vole avec
Quelque fruit de la haie ou quelque paille au bec,
Et son reflet dans l'eau survit à son passage.
C'est tout.
Mais le songeur aime ce paysage
Dont la claire douceur a soudain caressé
Son rêve de bonheur adorable, et bercé
Le souvenir charmant de cette jeune fille,
Blanche apparition qui chante et qui scintille,
Dont rêve le poète et que l'homme chérit,
Évoquant en ses voeux dont peut-être on sourit
La Compagne qu'enfin il a trouvée, et l'âme
Que son âme depuis toujours pleure et réclame. "

Écrit par : Frasby | lundi, 06 avril 2009

En ce moment comme vous le savez,
peu de temps pour bloguer, mais de Toulet je ne serai jamais rassasiée. Je lis régulièrement les contrerimes
le meilleur euphorisant que je connaisse.

Écrit par : Rosa | mardi, 07 avril 2009

Une tristesse : le fleurt a disparu...

Écrit par : Rosa | mardi, 07 avril 2009

@Rosa : Je suis ravie de lire que Toulet n'a pas perdu avec le temps tous ses lecteurs... je veux dire,
qu'il ne soit pas tout à fait oublié
(car l'école nous garde bien de nous faire découvrir ce fôlatrant poète, qui personnellement me fait le même effet qu'à vous)

J'ose espérer qu'en lisant beaucoup de contrerimes vous retrouverez vigueur à poursuivre vos passerelles qui sont vraiment très chouettes (je ne vous dit pas cela pour flatter loin s'en faut ! reposez vous un peu
mais plizzzz;-) ne lâchez pas les passerelles !)

le fleurt a disparu c'est vrai , enfin il s'est fait grossier peut être, très commercial (force vente de soi-même= j'ai une horreur de ça
mais il ne tient qu'à nous ... ;-) Non ?
Enfin il reste quelques bleuets quand même . Benêts et benêtes bleuets dans ce monde de bruts...
Bonne journée Rosa. avec tous mes encouragements.
PS:
J'espère bientôt passer au Xhantines si ce n'est le 24, peut être le 30, qui sait ?

Écrit par : Frasby | mardi, 07 avril 2009

@Rosa : XANTHINES !!! Pardonnez moi...

Encore merci de vos petites visites ici.

Écrit par : Frasby | mardi, 07 avril 2009

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