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lundi, 11 octobre 2010

Out of the blue

Nous vivons dans l'envers du monde, le monde véritable du feu est sombre, palpitant, plus noir que le sang : le monde de lumière où nous vivons en est l'autre côté.

D.H. LAWRENCE in "L'homme et la poupée". Extr de "Amant et fils - L'homme et le poupée - L'amant de Lady Chatterley- Nouvelles". Editions Gallimard 1992.

IMG_0044.JPGGagner la limite de l'écho. S'étonner que partout des gens luttent pour quelque cause. Marcher à côté d'eux sans bruit. Compter les collines innombrables aux flancs légèrement érodés. Savoir encore courir. Courir après.

Assouvir sous la pluie les délits, cacher sa plainte. Se faire ombre délicate. Courtiser les poètes. S'enflammer, en aimer un seul. Se laisser vivre. Rouler sous la banquette ou en Rolls sur les Champs Elysées. Abuser d'alcool polonais. Goûter aux drogues artisanales. Perdre pied. Devenir incompréhensible. Chercher la sagesse dans le sport. S'engoncer dans une veste en cuir. Fuir les gens. Tout bazarder.

S'embarrasser d'une incartade. Mépriser l'art. Etre rongé de palissades. Epancher toutes ses doléances au comptoir d'un café avec des inconnus idiots, à moitié ivres, n'éprouver aucune honte précise à cela ou les éprouver toutes. Faire le cadet de ses soucis des exagérations d'autrui. Se contenter de peu. Choisir des journées simples. Opter pour des prières extravagantes devant les stalagmites, les stalagtites qui coulent goutte à goutte à la voûte des souterrains.

Naviguer en eaux troubles. Se pourvoir d'une méthode carrée. Chercher l'autre dans un parc parmi les aliénés. Ne pas le reconnaître. Le voir et le trouver changé. Revenir écoeurée du monde. Abhorrer la chimie. Avoir envie d'administrer à certains diplômés (pas tous) de la "médecine de l'âme" (soit-disant), les mêmes traitements qu'ils préconisent pour leurs patients, les regarder devenir légumes avec le sentiment d'une vengeance légitime et du travail bien fait. Eviter l'alvéole. Se faire pendre juste après le combat. Hésiter entre la retraite à plus de 60 ans ou une fin choisie parfaitement anticipée. Chercher la voix d'un autre qui s'inflige des châtiments. Se sentir impotent face à qui perd le nord. Trouver le panneau des départs. Echapper vite.

Fuir la voix de son maître. Se faire livrer des roses par un serviteur qui oublie la chose confiée, et soudain sans que vous ne le sachiez, se met à vous dominer par mégarde. Offrir au tout venant ses rêveries intimes. Eviter toutes les malveillances. Compter les jours. Les ranger dans des cases, cocher les cases avec une craie. Faire chou blanc d'une fraîcheur matinale dans un bocage microscopique. Protéger la fine fleur rosée par l'aube qui dévore la lune. Ouvrir la porte sur le confort tout familial enguirlandé d'offrandes des Noël indécents. Craindre le père Fouettard puis Janvier sous le gel. Ecraser de ses propres mains quelques colonies de limaces glissant sur les reins d'une statue qui brûle au jardin botanique. Se gaver des fêtes à outrance, goûter l'hypocras couchée sur les marches anciennes de la maison de Thérèse, dans la chambre de Marguerite, vestale du Sacré Coeur et d'un mal plus ou moins sacré. Craindre les papillons de nuit. Leur ressembler.`

Croire que les déserts renforcent la mémoire. Enjôler les aspects prouvant que la matière peut réellement soutenir la forme. Affiner le caillou, le caresser sans y penser tout comme on caresserait le crâne d'animaux tombés des falaises. Partir un crayon sur l'oreille, reconquérir le lieu, la formule peut-être. Se croire porteur de panacée universelle, pourvu d'un don extra lucide, répéter les mots à la suite qui conjurent l'endeuillement. Rouler au milieu des rosaces dans les régions tempérées de l'ancien monde. S'hybrider par la toute puissance du père, du fils, du Saint Esprit. Devenir solitaire en marche, rêver les yeux fermés sur un fil agiter ses bras au bout d'une ficelle. Se faire femme et poupée. Acheter un seul fruit au marché, le poser sur une table parfaitement nettoyée, se l'approprier, comme le faisait Michaux, jadis avec sa pomme :

"Je mets une pomme sur ma table. Puis je me mets dans cette pomme. Quelle tranquillité !"

Revivre toutes les formes de la cruauté. Devenir deux, et m'adonner à vous, tandis que votre esprit repose, loin du monde, après tout. Vous dormez, quelqu'un veille, et vous fait croire que les déserts sont des univers pour vous, qu'ils vous protégeront désormais de tout accident regrettable. Devenir une friandise émiettée dans un autobus, assourdie par les cornemuses d'un groupe de manteaux écossais. Sentir sous la pluie de vraies hallebardes tomber et retomber. Se dire qu'on aimerait que quelqu'un nous explique la théorie du météore minuscule, comment le dinosaure a pondu un jour un archéoptéryx, pourquoi les feuilles des églantiers ont cinq à sept folioles elliptiques. Espérer mettre fin au débat qui agite la science sur la question. Parler de déréglement climatique avec le commis du pépiniériste et sentir le dérèglement tout court, nous pendre au nez. Penser à l'unique seconde d'il y a 160 millions d'années, en période jurassique à l'époque où l'océan venait tout juste de se former. Regarder l'automne avancer.

Craindre une collision dangereuse, une glissade sur des feuilles mortes, des peaux de banane dans l'escalier. Courir en cette ville infestée de d'hérétiques. Convoquer en soi les mensonges, les vérités de l'argenture. Songer à ces gens à traiter qui subissent un grand lessivage pour le bienfait de leur mental puis après avoir été dégraissés, polissés rentrent chez eux l'âme amollie, balayée des passions. Se cuivrer, se chromer, s'oxyder jusqu'au drame. Recouvrir tout le fonctionnel pour lequel nous sommes dévoués, tout le sens d'exister. Se perdre au grand supermarché devant les bouchons noirs des bouteilles de curaçao. Se dire qu'on aimerait bien que quelqu'un nous explique d'où vient ce bleu.

 

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Photo : Un verbe qui se mouille à la pluie d'October photographié en début de soirée entre les échaffaudages d'un chantier au quartier du Tonkin à Villeurbanne. © Frb 2010

Commentaires

Tout ça la même journée ! Ou en une heure à peine, out of the blues... Je vous retrouve et vous ai suivi presque partout. J'ai eu un peu de difficulté avec les Noëls indécents à cause du confort familial tout enguirlandé.

Écrit par : Marc | jeudi, 21 octobre 2010

@Marc : La même journée, en une heure à peine, vous croyez ? :)
C'est vrai que je m'étais un peu perdue, et je m'y retrouve aussi, d'ailleurs je sentais bien que quelqu'un me suivait, c'était donc vous ? :) m'en voilà rassurée. C'est vrai que le confort tout familial enguirlandé ça peut gêner mais sommes nous obligés de tout suivre ? :)
Merci de votre visite. Bonne soirée

Écrit par : frasby | jeudi, 21 octobre 2010

C'est vrai que nous ne sommes pas obligés de tout suivre. En suivant, de toutes façons, je prends des chemins qui vont, qui viennent et qui nous ramènent. Ce que je voulais surtout exprimer, c'est que c'était bon de vous retrouver ici. Sur la ligne du risque.

Écrit par : Marc | vendredi, 22 octobre 2010

Tu sais, cela me faire rires cette histoire de 60 ans, car à part les gars qui en 66 ou 67 ont commencé à bosser à l'âge de 14 ans, peu de personnes pourront l'avoir à cet âge. Alors laissons ces gens l'avoir à 60 ans, car aprèst ce sont les années de cotisation qui vont "faire" l'âge de la retraite. C'est stupide aussi de faire la réforme de l'impôt après toutes ces réformes, c'est avant qu'il fallait le faire, mais Monsieur ne voulait pas.... Et puis après 2012, s'il reste aux harnais, elle passera à la trappe, comme le reste..

Bonne journée;

Écrit par : patriarch | vendredi, 22 octobre 2010

@Patriarch : Savez vous que tout ça me dépasse complètement. Depuis que j'ai vu le sommet de l'arche sur un timbre chez vous, ça me donne envie de monter dessus pour voir plus loin desfois que... Après 2012, s'il reste, qui ? Lui ? Ah non ! pas ça !!! :))

Écrit par : frasby | dimanche, 24 octobre 2010

Compter les verbes qui se mouillent à la Vodka La Żubrówka et au Curaçao, les ranger dans des cases.
Mettre fin aux ébats de la science avec les commis des pépiniéristes, les ranger dans l'autobus.
Craindre les roses livrées par des limaces à l'âme amollie, les ranger avec les églantiers à folioles elliptiques.
Croquer la panacée universelle, la ranger dans le désert.
Caresser les manteaux (et mentaux) écossais, les ranger en forme d'impôts sous les cornemuses.
etc., etc.
La belle journée à vous, Fratsby la Magnifique !

Écrit par : Michèle | samedi, 23 octobre 2010

@Michèle : Je laisserai les autres ranger, je suis lâche et surtout bien trop bordélique :) (je vous mets un petit sourire de Jean, surtout à ne pas ranger !). La panacée universelle rangée dans le désert ça va nous faire un chouette avenir ça ! Michèle si c'est votre programme, je demande une audience spéciale, c'est pas possible ça ! vous comprenez :) (je vous remets un petit sourire de Jean, pour le dessert, pas le désert hein !)
Les mentaux écossais (ou les mentaux écossaient ?) ça fait du monde à la cantine (dans le genre fin des haricots euh , écossais les haricots, bien sûr !) (non, je ne bois Michèle ! je vous jure que que je ne bois pas (et jamais de curaçao pur !) je bous parfois plus que je ne bois mais ça rend bien plus ivre
et c'est quoi cette histoire d'impôts ? Impôts, Impôts ? Mais on n'a pas ça en rayon à certains jours ! ce mot porte malheur ! des cornemuses oui ! ça on en fait ! en veux tu en voilà, autant que vous z'en voulez (en carton, en papiers, je vous en mets combien ? C'est pour manger tout de suite ? Pardonnez mes égarements, il y a trop de beaux CRS dans cette ville avec des grandes bottes jusqu'en haut des cuisses, humm ! des boucliers dorés, des cornes de buffles, des flash (ball) in the night, ah Chimèle ! tout ce prestige de l'uniforme, là qui nous vient d'un coup je me demande si ça ne me tourne pas un peu le ciboulot,
Il faudrait traverser la guerre comme Tzara au temps du Cabaret Voltaire, ou avec le sourire de Jean à la vogue, ni trop rangé, ni trop dérangé. Et cela serait tout sauf un ordre...
Cremi de trove quigaminef édiftéli fée Chimèle ! :))

Écrit par : frasby | dimanche, 24 octobre 2010

J'ai oublié d'ajouter le sourire de Jean à la fin de ma liste, car bien sûr, tout ça est très sérieux :)

Écrit par : Michèle | samedi, 23 octobre 2010

@Chimèle : bien sûr que tout cela est très sérieux ! Ah mais !
on n'est pas des ... hein ! manquerait plus qu'on soille pas sérieux
comme dirait Pennequin je cite: " Ah non ! non ! non !" :)

Écrit par : frasby | dimanche, 24 octobre 2010

@Marc : Tout à votre honneur, je sais que vous n'êtes pas un suiveur, et c'est tant mieux. Seriez vous un croisé, par hasard ? :)
(je vous ai déjà croisé quelque part, il me semble non ? :))
"Chemins qui vont qui viennent et nous ramènent"
Nous sommes d'accord. Merci à vous, c'est très agréable pour moi de vous lire aussi sur la ligne du risque, il est déjà mouillé (par la piou du lion), moi je n'ai pas l'étoffe des grands aventuriers, le risque se mouille à ma place, ce n'est pas très héroïque, j'avoue...
Mais si vous vous y retrouvez, j'en serai heureuse de toutes façons . Belle soirée à vous.

Écrit par : frasby | dimanche, 24 octobre 2010

comme dirait Pennequin je cite: " Ah non ! non ! non !" :)

J'adore !

Écrit par : Michèle | lundi, 25 octobre 2010

@Chimèle : C'est très spirituel n'est ce pas ? :))
Je pense que Pennequin ne m'en voudra pas. Quoique je m'avance un peu je crois. De toute façon après l'avoir confondu avec son frère Serge, et d'autres incidents calamiteux de cet été, je suis grillée dans à peu près tous les cercles des pouêts pouêts, alors un peu plus un peu moins... :)

Écrit par : frasby | lundi, 25 octobre 2010

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