vendredi, 07 novembre 2008
Nos sociétés
"Nos sociétés n'explosent pas dans un cataclysme, elles pourrissent lentement, inexorablement. Elles ne se suicident pas, non plus, comme cet empereur perse sur un bûcher, vaincu par quelque héros, ainsi que le voulait Delacroix. Seuls les hommes se suicident, puisqu'ils découvrent, seuls des êtres vivants, l'idée de la mort, et l'on ne peut guère admettre qu'agirait comme le croient les poètes - et quelques savants - une pensée collective autonome. Non, nos sociétés se décomposent d'elles-mêmes, parce que l'énergie créatrice, la croissance sans limites, l'agressivité- supériorité de l'homme sur la matière ne sont pas infinies, et que, ici et là, dans la durée, de multiples civilisations, partout sur la planète se sont trouvées à bout de souffle. Pourquoi la nôtre jouirait-elle d'un inconcevable privilège ?"
Jean DUVIGNAUD . Extr. "La ruse de vivre". Actes Sud 2006 .
Une inscription sobre et concise sur un angle d'atelier jouxtant le cours Vitton, dans le sixième arrondissement de Lyon.
Autre aperçu, autre pensée et autre mur pour toujours la même société. Petit rappel ICI
Photo: Novembre 2008 ©.
23:01 Publié dans Actualité, De visu, Le nouveau Monde, Mémoire collective, ô les murs ! | Lien permanent
Commentaires
C'est drôle, cette homophonie "nos sociétés", "no société". Je n'arrête pas de corriger mes élèves et étudiants (ouh, corriger, vilain mot...) qui répètent comme des anes "notre société" en leur disant que la société ne leur appartient pas et qu'ils doivent apprécier les subtiles nuances de la détermination en disant "la société" et non pas "notre..." Jamais il ne m'était venu à l'esprit de leur conseiller de dire dans leurs copies "no société". Il faut organiser des sorties scolaires pédagogiques cours Vitton, dans le 6éme arrondissement de Lyon...
Écrit par : solko | samedi, 08 novembre 2008
@Solko: je suis ravie que vous releviez la note homophonique... C'est vrai que la société est loin de nous appartenir , néanmoins je compte sur vous pour la sortie scolaire pédagogique, (avec le goûter , les gourdes, les serviettes en papier) Nous pourrions peut être à cette occasion monter une société extrasolkolaire pédagogique avec homophonisation à tous les coins de rue: ce serait vraiment "notre société" qui nous appartiendrait à nous, et vous pourriez ainsi cesser de réprimander vos élèves, ils pourraient dire "votre société",vous pourriez même leur proposer d'investir pour que ce soit la leur enfin la notre ...
Ils ont l'air bien vos cours, je peux m'inscrire ?
Écrit par : frasby | samedi, 08 novembre 2008
Ah Solko, j'aurais été un bien mauvais étudiant.
"L'Etat, c'est nous!" disait Lénine... La propriété dans le milieu libertaire est anéantie, les pronoms possessifs qui perdurent ne peuvent être employés que pour désigner une totalité.
La société c'est une conception Alestienne du monde, c'est la grille qui d'emblée est mise entre vous (le désert) et le reste. Notre société, conception plus libertaire du monde.
Néanmoins, je doute que les étudiants et élèves s'approprient Lénine ainsi et le notre dans notre société doit plus correspond à "mon bahut", "ma maison" etc.
Merci Frasby pour ce texte de Duvignaud. Il faut croire qu'une société qui se corrompt depuis des décennies finira par s'autodétruire. Là, les spéculations vont bon train pour savoir ce qui repoussera. (voir le débat Lantier, Souvarine), idée de la purification dans le sang, la souillure, la pourriture.
Devons-nous toucher à tout ce qui est sale, répugnant, à tout le bas corporel pour avoir envie d'une certaine propreté?
Écrit par : Léopold | samedi, 08 novembre 2008
@Leopold : "Notre société - conception plus libertaire du monde"
je suis assez d'accord même si ma buse ne connaît pas la signification de "Alestienne" , il y a des jours où dans le domaine du vocabulaire - qui s'étend d'ailleurs bien au delà : je suis à l'ouest (alouestienne? on me plumera !)
Duvignaud, certes n'invente rien ,mais c'est toujours bien de relire ce qu'on sait, ce qu'on a toujours su, (peut être par expérience ?) (Entropie quand tu nous tiens ! )
Votre dernière question interesserait beaucoup des gens comme KIESLOWSKI, PASOLINI, LARS VON TRIERS, et même MICHEL FOUCAULT (j'en oublie, j'en oublie...)
Merci de votre lecture et décryptage...
Écrit par : frasby | samedi, 08 novembre 2008
"Notre société", syntagme dérivé de "notre entreprise" (jargon libéral) Pire que "ma maison", voyez = envahissement de la sphère du public par le domaine privé, les marques, les autoroutes vendues, par exemple, et bientôt les espaces publics et la gestion des contredanses. Notre société. Booouuuarkk ! Et puis je vous rappelle que la société et l'Etat c'est différent. Pour Hannah Arendt, nous sommes en naissant dans "la" société des nouveaux arrivants. Notre vocation n'est pas de "posséder" le monde, mais d'y "séjourner". Vaste programme. Si vous ne voulez pas que la société vous possède, c'est peut-être la condition : ne pas chercher à s'en saisir, tel Alceste sur un banc.
Écrit par : solko | samedi, 08 novembre 2008
@Solko ... Il va vous répondre c'est sûr ...
Et moi je suis d'accord avec tout le monde ;-)) dans ma conception alouestienne du monde (de "Mon monde" qui n'est pas "notre société")
... et celle plus pirandellesque du " A chacun sa vérité")
Gestionnaire de contredanses c'est un drôle de métier comme expert ...
"Ma maison , ma pipe, mon mari, ma femme, ma corsa c'est tout moi, ma danette, mon agenda"
comment vous dites (bouaaaaark ?)n'est ce pas déjà au langage qu'il faudrait s'attaquer ? ou bien s'asseoire par terre et puis regarder.
Heureux qui comme Alceste au banc de "notre société"...
Écrit par : frasby | samedi, 08 novembre 2008
Sauf que pour Lénine et les libertaires (attention le "et" est primordial) l'Etat tend à être désinstitutionnalisé autrement à dit à devenir une société.
La société est possédée, peut-être que tenter de se l'approprier c'est tenter un exorcisme. Mais là, je réponds à l'affirmative au "faire" du Que faire? Alceste est dans la négative. Alceste est lucide, Alceste est sceptique et l'Histoire dit oui à Alceste.
A Frasby : Pardon, coquille Alestienne voulait dire AlCestienne. Etre à l'Ouest n'est pas du tout un problème au contraire. Rosa Luxembourg s'est engagée dans la politique par amour pour un homme, (évidemment ça n'a pas marché comme toujours mais elle l'a toujours aimé). Peu de temps avant d'être battue à mort, elle écrit à cet homme combien elle le maudissait en gros ppur l'avoir amené à la politique, pour avoir découvert cela. Rosa Luxembourg avait un rêve intime : être à l'ouest et un rêve "sociétal" : la révolution.
L'intime est toujours le plus heureux!
Écrit par : Léopold | lundi, 10 novembre 2008
@Leopold... Oui la société est possédée (encore une note Dostoievskienne ... ?)
Alceste serait il sur son arbre comme Diogène dans son tonneau (quoique ce n'était pas un tonneau, certains disent une jarre...) ce qui n'empêche pas le charme de l'adage alcestien
"ôte toi de mon soleil" mais je m'égare
Alcestien c'est bien ! (j'aurais pu deviner tout de même !)
mais Alestien on peut le garder , un néologisme qui sera "votre propriété" (je plaisante ;-) en tout cas pas du vol !
L'histoire de Rosa Luxembourg est très belle.... par amour
"battue amor"...
(A préférer l'intime ???)
S'il n'est pas qu'une cruauté...
Écrit par : frasby | lundi, 10 novembre 2008
NO SOCIETY La ville de Lyon, et bien la ville des frères Lumière, marquer la vie par des images, par des pensées ou par son écriture - en plus le graff est d'une très belle écriture, la calygraphie est sans tache -appliquée
Jack NYC
Écrit par : jack NYC | lundi, 10 novembre 2008
@jack NYC : C'est vrai, la ville depuis quelques temps s'exprime beaucoup sur les murs ( preuve qu'elle en a besoin,sans doute) En fait, la municipalité n'est pas super d'accord avec le principe des graffs, il y a donc comme jamais à Lyon , un front de résistance assez obstiné... Vous avez raison de noter l'écriture très belle de ce graff , ce qui m'a m'étonnée à première vue c'est que le trait y est calme on sent que le graffeur a pris son temps, tranquillement, et il y a forcément un petit décalage entre le sens et la calligraphie, qui donne un charme étrange à ce tag.
Merci pour votre commentaire . Excellente soirée à vous.
Écrit par : frasby | lundi, 10 novembre 2008
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