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vendredi, 01 octobre 2010

Nuit et jour (Part II)

Voici des cerveaux voici des coeurs
Voici des paquets sanglants
Et des larmes vaines et des cris
Des mains retournées
Voici tout le reste pêle-mêle

PHILIPPE SOUPAULT  extr. "Une heure" in "Georgia-Epitaphes-Chansons et autres poèmes", éditions poésie Gallimard, 1984.

Night and day en musique c'est possible ! si tu cliquesOCTOBER0025.JPG tout devient possible, ah mais!

Le jour brûle chaque seconde. Du haut des vieilles tours, le pied sur un téléphérique suspendu entre les nuages, des coupe-vent ensorcellent les mouvements sur les places. On regarde des campements abstraitement du sommet des collines. Toutes les étoiles de mer sont entrées dans la ville avec les ventouses de la pieuvre, des venins de serpents, des paroles gluantes s'invitent sur le petit écran, créent des objets pour la souffrance du peuple. Les merles moqueurs sifflent pavane, décomplexion, en habits d'outre tombe. Le soir m'attache à des heures lentes, au mal qu'inventa un poète médecin dans la lumière brumeuse des marécages devenus lac au fond duquel une tête dort. J'entre dans le quatrième monde trainant au cul des plumes d'indiens comme autant de bris de casseroles. J'entre dans la piscine d'une rue noire de monde, toutes les étoiles de mer rient des tubas, et mes palmes me font une démarche embarrassante. Le soir m'attache à des heures lourdes et me prive des apéritifs en plein ciel au onzième étage circulaire d'une demeure accueillante où les bambous touchent le ciel, j'y croise un ami de longtemps et ses femmes folles de plumes, acousmatisées par une grande machine à Cythère, je monte tous les étages à pieds, redoutant les pannes d'ascenseur, recolle, dans la solitude le O au E pour qu'une banalité fasse Œuvre. Je me prive de ces apéros pétillants de champagne teinté de grenadine que nous prenions à la même heure qui marquait minuit en plein jour et midi aux nocturnes d'une fête médiévale du côté de la Grosnes. Déjà s'enfuit la grâce par les volutes informes, un consumé léger de cigarettes longues. Les arômes du tabac un peu roux, virginien, le taux de nicotine et de goudrons m'effacent. Ces volutes effleurent les affiches où se courbent des silhouettes parfumées de Coco, armes de séduction massives, les phéromones de Calvin Klein, l'ylang ylang, la guerlinade aphrodisiaque devenue synthètique ; les femmes sont vêtues de velours sous lequel la peau saigne, on taguerait là, une fine entaille, pour la fragilité du nu. Le jour brûle la petite caissière de l'hyper-Rion de Vaise. Une porte claque, à peine prononcerions-nous une phrase, que l'on nous accuserait de tout. La même porte re-claque sans cesse. La caissière mange son Bromazépam en cinq minutes de pause comme autant de petits bonbons dont la saveur absente rendrait la douleur de l'agneau, par de beaux cris d'égorgements bien douce en doublure de manteau. La nuit dépose juste à côté des pyjamas à rayures en pilou, de la guêpière affriolante ; les panoplies de Tarzan,et de Jane, et des tenues de combat puissantes, des collections de sabres, les amoureux s'escrimeraient, estoc et taille, vertu martiale, chaque phase d'arme tuerait l'un et l'autre un peu plus chaque jour. Le jour suivant les voix seraient roses comme des fleurs, nous ne parlerions que de la pluie et du beau temps. Et j'irai slalomer sur les places avec une bicyclette d'enfant entre les beaux manifestants qui refusent à l'autre la démence de sacrifier leur vie à la valeur travail. La nuit brûle un à un, chaque meuble dans chaque maison. Des lits rouleaux s'enroulant sur eux mêmes se transforment en lit papillons. Quelques amants se brûlent les ailes à trop s'y attarder. Des têtes roulent tout comme au temps de la terreur et on les porte en haut d'un pique. Toutes nos vies se trouvent à louer, les plus douces à brûler ou à pendre. Le soleil décline doucement. Il y a toujours dans la journée, un moment où tout meurt. Le moment où il nous plairait de croire en tout bouleversement est davantage celui de nos fatigues, ou bien est ce le sentiment que tout disparaît quoiqu'on fasse. Une gomme au bout d'un crayon, un doigt frôlant la touche "Erase" et voici la disparition sous un ciel gris, on avance sur les vacances de la Toussaint qui bientôt refleuriront les tombes. Le soleil s'éteint trop tôt, écrasé des poumons malades d'October et d'anciennes tuberculoses de Tristan, et de son batracien


- Un crapaud ! - Pourquoi cette peur,
Près de moi, ton soldat fidèle !
Vois-le, poète tondu, sans aile,
Rossignol de la boue... - Horreur ! -


Tout près d'ici les brésars font l'Icare, le vent écaille l'écorce aux branches des platanes d'un jardin public où des enfants un peu crétins râclent leur fond de culotte sur de ridicules balançoire en plastique très ergonomiques, sous l'oeil mou de parents mutés en larbins d'angelots. Ici on ressent le danger d'appartenir au monde, on lit des feuilles aux devantures de mille bureaux immobiliers, l'ulcérant sourire au gardol de l'agent du siècle 21, on ressent l'insécurité des pavillons à vendre, ces affaires à saisir à proximité des périphéries avec vue sur des raffineries en grève, et on reste songeur devant le tampon rouge qui tamponne la chose comme "Vendue". Rouge sang, toute vendue comme nous. On ressent le danger, on se prend quasi frêle à remuer ces boites où gisent de vieilles photos de parents jadis amoureux se tenant par la taille devant les tamponneuses. Le vent court dans nos cheveux, sans chapeau ça travaille, et du chapeau quand même. Si, un jour nous allions sans vélo, ce qui est bien sur inadmissible, des petit vélos noirs nous aguicheraient quand même et nous les laisserions tourner dans nos têtes noires jusqu'à la débandade. Un mécanisme infernal tout caché ferait dériver un manège et tout cela porterait encore un nom de maladie. Le jour brûle les souterrains. Un monsieur fait la sérénade à une dame dans une jonque sur le fleuve Rhône jaune et noir comme les amours de ce mal aimé de Corbière, comme la syntaxe chaotique du batracien, ce boiteux qui hurle à la lune avec 4 rimes au lieu des 2 traditionnelles. EL(e) - OA - IER 2 tercets avec rime suivie ER + 2 rimes embrassées OMBR(e) - IF. Œuvre au Œ accolé mais sans âme sŒur.

Un chant dans une nuit sans air...
La lune plaque en métal clair
Les découpures du vert sombre ...
Un chant ; comme un écho, tout vif,
Enterré, là, sous le massif...
- Ça se tait : Viens, c’est là, dans l’ombre..."


Photo : Le petit cheval blanc et le chevalier blanc, à la conquête des jours et des nuits, parcours étoilés de l'automne. Vu en fin d'après-midi du côté tonkinois de la cité de Villeurbanne au jour 1 d'October. © Frb 2010