lundi, 09 février 2009
Comme un lundi ( place Tabareau )
Place Tabareau : le lundi est comme un dimanche. Et le dimanche, comme un mardi qui ressemble presque au mercredi qui s'annonce comme un vendredi avec de grands airs de samedi. Et puis après, ça recommence : la semaine des quatre jeudis. Avec la boule au singulier à quelques centimètres du pied, ou longtemps réchauffée dans la paume. Qu'il neige ou pleuve, rien n'arrête le bouliste de Tabareau (ou du clos Jouve), homme de terrain, traçant des cercles du bout de son soulier. Quotidiennement accaparé, qu'il brume ou grêle, il se pose là, en bras de chemise, sur ses terres réservées, pendant que les autres sont à la vente dans des locaux surchauffés à 25° ou consument leur vitalité (Zut, je vais encore me faire des ennemis), en chemises rayées, cravates unies (et réciproquement), au magasin Zilli, ou devant des écrans d'ordinateur dans l'air climatisé d'une banque, évaluant des devis ou le nouveau tarif de la carte "Bang bang"... Que savent ils de la vie ? S'ils ne savent pas faire rouler dans la terre des villes, la grosse boule argentée plus rutilante, plus scintillée que celle des boîtes de nuit ?
Chaque jour est une fête. Chaque jeu, une petite oeuvre désirante du corps et de l'esprit, le seul "travail" qui aurait dû se concevoir pour l'homme, dans la continuité des jeux d'enfants suivant l'évolution logique des billes; où le cancre aurait son bon droit d'être aussi bon, voire meilleur que les autres. Bon ou pas bon, quelle importance ? Puisque ce n'est qu'un jeu... Et la bille grandirait, et la cour de récréation monterait au plateau, pour cette promotion suprême : devenir boule à Tabareau. Et le petit garçon troquerait son fond de culotte contre un bras de chemise, des bons godillots, parce que les boules c'est beaucoup d'allers et venues, un labour inutile laissant mille traces au sol, diffusant les bruits graves, un peu sourds mais toujours cliquant du métal de la ronde amie qui expire après haut vol. Et le bouliste de Tabareau, même s'il n'aime pas être déconcentré, il aime bien, je crois devenir cet acteur que les filles regardent, quand elles promenent leur chien, juste derrière la haie, et jettent un oeil discret au joueur, (son héros), dont le modèle de lundi aurait dû être adopté depuis des lustres par tous, comme une voie royale visant au bonheur de l'humanité. Quoique là vraiment... J'émets quelques réserves, car la boule lyonnaise n'ayant toujours pas réussi à opérer une fusion convaincante avec la starissime pétanque, je ne doute pas qu'elle aurait aussi refusé le projet -voie royale- même au nom du bonheur universel. Décidément, la boule est buissonnière d'esprit, c'est bien là son secret. La boule n'est pas une voie royale. Elle ne le sera jamais. Mais ses lundis s'en vont pointer de façon si voluptueuse, qu'on serait tenté de penser le contraire...
Et pour varier les perspectives, je vous invite à découvrir, une rêverie issue des "Chroniques du sud," que Ficelle nous a gentiment communiquée en direct de son terrain de jeu préféré. Quelques regards croisés, non prémédités, sur nos amis joueurs de boule et de pétanque : De "L'Expérience du désordre à "Certains jours", le chemin mène toujours au boulodrome. Ce beau récit sur le jeu de pétanque, est vivement recommandé par la maison, et se lit sans modération :
Retour à Lyon sur billet du même thème à quelques variations près :
http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/01/27/ep...
Photo: La place Tabareau à son apogée + six légendaires boules lyonnaises vues de près + quatre pieds de bons joueurs. Photographiés un lundi sur le plateau de la Croix-Rousse, en parallèle du grand boulevard et pas très loin de la mairie. Lyon. Février 2009.© Frb
05:58 Publié dans Certains jours ..., De visu, Impromptus, Le monde en marche, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
Commentaires
Personne n'a jamais parlé du "travail de la boule" comme vous ! De la bille à la boule, je n'y avais même pas pensé, pourtant...! Allez-vous vous y mettre ?
Écrit par : gballand | lundi, 09 février 2009
@g balland : Etymologiquement la boule relève de l'oeuvre pas du travail ;-) Et si la boule se met au travail elle court à son déclin bref ... Vu que j'ai un gros passé (pouf pouf quelle vantarde!) dans le milieu de la bille sur bac à sable, j'espère que ça m'aidera à être acceptée dans celui de la boule. Mais je m'y suis mise, il y a quelques étés à la boule ... A Tabareau by night, quand nos boulistes étaient couchés et que la canicule rendait fou, on faisait bien des tournois sauvages. De là à vouloir égaler la dextérité des champions, j'en suis loin. Oui, je vais m'y mettre humblement ;-))
Écrit par : frasby | lundi, 09 février 2009
Ah quel jeu ! Je m'y suis mise aussi, du côté de la Provence. Et quand dans le village, il y a ce tournoi qui dure 3 jours, je reste fascinée les 3 jours sur le boulodrome… J'avais écrit aussi un petit billet là-dessus, comme vous admirative (ça doit être dans Les chroniques du Sud)
Écrit par : ficelle | lundi, 09 février 2009
@ficelle : Admirative, bien sûr, surtout quand on ne comprend pas toutes les règles, il y a de la magie dans les gestes du bouliste (chevronné ;-). Ravie que vous soyez boulophile;-) aussi.
Du côté de la Provence, c'est la pétanque non ?
Mais ce mot "boulodrome", il est trop bon ;-) Un tournoi qui dure 3 jours (là c'est le grand huit!)
Et votre billet, vous avez encore le lien ? Vous m'autoriseriez à vous lier à cette aventure ?
Écrit par : frasby | lundi, 09 février 2009
Oui, on dit pétanque, mais boules aussi. Et boulodrome, c'est le nom du "stade" (le vélodrome à marseille pour le foot).
Pour le lien, le voici (et vous comprendrez comme nous sommes toutes les deux plus poètes que boulistes) :
http://lexperiencedudesordre.hautetfort.com/archive/2008/08/03/c-est-un-joueur-de-petanque-dit-elle.html
Écrit par : ficelle | lundi, 09 février 2009
@ficelle: oui on dit "boulodrome" pour les deux je crois, pétanque et boules.Mais à Lyon, c'est les boules; pas la pétanque, on est d'accord ? ;-)) Et le footodrome à Marseille c'est pour le vélo ?
J'ai bien aimé Marseille, j'y suis allée une fois, quel bazar, quel bordel ! mais je n'ai pas vu de boulistes, ni de types en Marcel avec des canotiers;-). Sinon, je ne connais qu'un bar qui n'existe pas : "le mistral" tenu par Roland Marci (et Mélanie ah ! ah !)
Bon j'ai lu votre billet, vous êtes bien plus bouliste que moi, et très poète, je suis épatée, je le passerai bien en haut si vous me le permettez... Super! ces petits regards croisés sans préméditation (ni spoliation de part et d'autre) comme une rencontre inattendue , j'adore ça. Merci beaucoup !
Écrit par : frasby | lundi, 09 février 2009
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