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lundi, 12 avril 2010

Un rien s'ébruite

"Tout dormait comme si l'univers entier était une vaste erreur"

FERNANDO PESSOA : "Le livre de l'intranquillité". Editions Christian Bourgois 1999.

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Les objets m'échappent des mains. Toute parole me semble insolite. Le mot n'a rien à dire, rien d'essentiel. Il accumule l'inécoutable, l'inentendu ou l'inaudible. Doucement, je reprends la musique. Un fil mène aux lèvres serviles, au "Souvenir de chair", à "L'archéoptéryx". Tous, titrant le moment de quelques pièces acousmatiques de mon bon maître.

"L'archéoptéryx signifie "aile ancienne" en grec. De la taille d'un pigeon, cet oiseau était malhabile au vol. Ses doigts dotés de gros ongles lui permettaient de s'agripper aux arbres et aux rochers. Il est probable que l'animal passait beaucoup de temps dans les arbres s'aidant de ses griffes, de ses pattes puissantes pour grimper jusqu'au sommet. Il pouvait alors planer de branche en branche. Il semble aussi que l'archéoptéryx n'était pas capable de se percher de manière stable et qu'il avait besoin de courir pour atterrir. Il avait un bec et des dents pointues, utiles pour attraper ses proies. D'abord vu comme un oiseau, (théropode maniraptorien), qui se serait débrouillé pour "bricoler" tout un système lui permettant de voler, on dit (et nul n'en sera plus instruit), qu'on ne sait pas vraiment ce qu'il fût. On le considère plus souvent aujourd'hui comme un dinosaure et on dit que ses plumes, héritées d'autres dinosaures, mais d'un tout autre usage, ont été recyclées pour le vol à la suite de tentatives répétées ou d'un évènement inconnu (!)".

La bête fascine, je la vois s'agripper gauchement d'arbre en arbre. Je viens à la forêt comme d'autres loin de la plage, draguent les requins blancs. Un souvenir de chair près des arbres. Je touche l'écorce tiède d'un conifère comme si elle contenait déjà des milliers d'aiguilles fossilisées. Sur la plus grosse branche du cerisier en fleurs, l'archéoptéryx me surveille. A côté et partout, des milliers d'années remuent l'air, dans ce silence que j'imagine comme à la perfection, (à force de vivre en ville sourde et bavarde comme tant d'autres). Ce monde criblé de sons, je dois le reprendre à zéro. Il est dédale brûlant et "retour en arrière pour aller de l'avant", me dis-je. Sur la plus grosse branche du cerisier en fleurs, l'archéoptéryx lit dans mes pensées. Je suis un perroquet. Je repète bêtement ce que j'ai lu la veille. "Pour aller de l'avant ?". Je le vois ricaner... Quel avant ?

Photo : L'archéoptéryx du Nabirosina, tout simplement. Avril 2010. © Frb.

Commentaires

avant-garde, avant-première, avant-scène... que d'aventures !

Écrit par : JEA | dimanche, 25 avril 2010

@JEA : Pourquoi pas ? Après tout ! ;-)

Écrit par : frasby | dimanche, 25 avril 2010

Comme le temps n'existe pas, y a pas d'avant y a pas d'après, y a juste ce qui se passe à l'instant où ça se passe... Une impression de temps, oui, bien sûr que nous l'avons, mais ce n'est que le temps que nous transportons avec nous... Un peu comme le sens des mots qu'on imagine à chaque fois qu'on utilise les sons... Ceux qui parlent de l'amour de la langue, par exemple, m'ont toujours amusé— ils croient vraiment à cet assemblage de sons qui n'ont que le sens qu'on veut bien leur prêter... Ce qui est sûr, c'est que la langue française est devenue une "langue de bureau" qui s'éloigne de plus en plus de sa vocifération première, de ses grognements primitifs... et elle meurt doucement, loin des cavernes et des ruisseaux, de la poussière et des nuées.
Me suis un peu éloigné du sujet. Comme d'hab. :)

Écrit par : mon chien aussi | dimanche, 25 avril 2010

@Mon chien aussi : Quel com ! superbe ! merci à vous ! (allez ! je vous cite !) : "Un peu comme le sens des mots qu'on imagine à chaque fois qu'on utilise les sons" . Et même, si vous avez l'impression d'une douce digression, vous êtes en plein coeur du sujet quoique vous en disiez. Ceux qui parlent de l'amour de la langue souvent (à mon oreille, only) sont des gens qui surtout, s'écoutent parler. L'amour de la langue, je suis bien d'accord avec vous, ce n'est encore qu'une formule, un de ces trucs fourre-tout qui permet de encore de remplir l'espace ou de tout ramener à nous mêmes. Nous avons sans doute cette culture. Ce pli difficile à défaire. S'approcher au plus près des sons ("inouis"), je ne parle pas de musique, modifie la notion du temps, je ne saurai comment l'expliquer, d'autant que l'oreille humaine ne perçoit les sons que dans une certaine plage de fréquences, donc nous restons très handicapés (j'imagine que c'est idem pour toute perception du temps), il est un moment où nous butons sur nos propres limites et il nous faut ou inventer ou discourir) mais je m'égare, n'est ce pas ? Enfin il me semble que l'homme "moderne (?) (aux oreilles coupées) est toujours observé par les sons, même quand il croit les posséder. et le temps dans ça ? Euh... Il m'échappe comme d'hab . (On cause, on cause... Et les heures passent ! ;-)

Écrit par : frasby | dimanche, 25 avril 2010

le saviez vous ? le seul "descendant" avéré de l'archeopteryx est le colibri

concernant la citation de ce cher Pessoa : m'étonne de sa part ce "comme si" ! il savait pertinemment que l'univers était effectivement une "vaste erreur" (même si , de temps en temps, par faiblesse - très humaine au demeurant - , nous faisons "comme si" ce n'était pas le cas : devant un cerisier en fleurs par exemple

Écrit par : hozan kebo | dimanche, 25 avril 2010

@ Hozan Kebo : Le colibri ! une évidence !
Comment ai je pu oublier de le dire à nos lecteurs chéris ? Suis je si tête en l'air ? Ou bien ai je cru que le lecteur (plein de sagacité) allait de suite le remarquer. En outre, le colibri a son petit caractère tout comme l'archéoptéryx, autrement dit = il faut pas leur marcher sur les pieds à ces deux là, sinon ça barde vilain ! Enfin voilà, c'est vrai que ce "comme si" chez Pessoa étonne. Je l'ai pourtant tiré du livre. Peut être est ce un arrangement du traducteur (qu'on ne balancera pas). Tant les "comme si" et les "quand même" n'étaient pas des mondes de ce bon Fernando.
Enfin devant les cerisiers en fleurs je vous l'accorde, personnellement je ne pense plus à rien et devant les cerisiers en fruits je vous raconte pas (y'a pas de "comme si" qui tient) il suffit de grimper sur l'échelle, n'est ce pas ? On en reparlera au mois de Juin si ça vous dit.
En attendant merci pour le bon grain. Mes amitiés, si vous le voyez, à ce cher archécolibryx !

Écrit par : frasby | dimanche, 25 avril 2010

Bonjour Frasby.

Bigrement intéressantes l'intervention de Mon chien aussi et la réponse que vous lui avez adressé.

Ecrivant, je suis à chaque fois surpris quand je relève cette singularité pour le moins "inouïe" : le son contamine le sens qui contamine le son (et inversement).

Exemple : je perçois une différence fondamentale, et pour tout dire absolue et définitive, entre "Je n'aime pas la bière" et "Je n'aime pas la bière, cette boisson effervescente et fermentée". Dans le deuxième cas de figure, on remarque en effet le surgissement de l'idée de vie (effervescente, le mot bière évidemment) et de l'idée de mort (fermentée) - la portée des phrases suivantes s'en trouvera donc modifiée... -, sans parler de la combinaison sonore qui rend vraiment l'effet d'une bonne blonde, ou brune, ou rousse, que l'on verse dans un verre.

Enfin bref.

Écrit par : Chr. Borhen | dimanche, 25 avril 2010

Chère Frasby, une bonne brune, ou blonde, ou rousse, dans un cerisier en fruits, entre un archéoptéryx du Nabirosina et un colibri du même Nabirosina, faut choisir : monter à l'arbre ou boire, et glou et glou et glou.

Ravie de revenir par chez vous, chère Frasby. Sonne boirée, je vous ambresse.

Écrit par : Michèle | dimanche, 25 avril 2010

@Michèle : Oh mais c'est tout choisi ! je monte à l'arbre ! vous savez bien que c'est au terme de grandes ascèses que l'on peut devenir animal (archéofrasbyx ;-O!) cette idée de grimper à l'arbre! me plait beaucoup + que celle de rouler sous le cerisier (Ce n'est pas notre ami Alceste qui me pourrait me contredire, mais peut être Chr. Borhen, serait pas hyperd'accord ). Aucun dilemme pour ma pomme ! Je monte à l'arbre ! Je disais récemment à un ami qu'avec la quantité d'alcools qui s'écrit sur ce blog, j'allais finir estampillée pochtronne (et les commentateurs aussi). En ce qui me concerne, Dear Chimèle ! c'est l'alcool qui me fascine, pas de le boire ! (pointronanfo !), cela dit si vous nevez à Nyol, un ourj ou un rosi, je vosu ferai toûger cette petite eau de vie de cerise qui glougloute à cette reuhe dans le drang syrtème de mes alambics nabirosinais, à monsi que vuso ne frépériez que trone ima Kloso 1er ne vuso atenrîne dans une de ces vaternes cruci ourssienne dont il a le creset et vuso roffe quelques fillettes dromorées (chanbles ou ogrues) iqu(hic) vosu trondren beni pompette, on invitera Trichsen Borophe iqu (hic) amènera ses bèrises... (lis not ed sec romeus loussids sec globeurs ! masi ej en xuve sap tuoto véréler). Nevez à Nyol! Limèche! et vosu-z'y revrez ! A prat ça susi varie de vous rile élagement ! j'arode sov monélogises .Boirne sonnée, buite nonne, crémou z'a vie ! je vous emnabirosinasse !

Écrit par : frasby | lundi, 26 avril 2010

@Chr. Borhen :Merci à vous. Après votre "Enfin bref" nous sommes comme tenus en haleine... Je dirai même que vous nous affamez! assoiffez. Vous auriez pu continuer des pages entières, vous savez... ! (bon ... euh ). Entre blonde brune ou rousse vous êtes un sacré cachottier (tandis que je me lamente de manquer de temps ou de le maîtriser si mal pour aller m'ébaubir, chez les blogs des amis, (donc que je suis au regret de ne pouvoir aller les lire autant que j'aimerais), on m'apprend... ("quelqu'un m'a dit" ;-O!). Enfin disons que j'ai des indicateurs zélés, des sacrés rapporteurs, et je voulais vous remercier vraiment, votre billet, m'a fait un de ces effets .... Enfin , J'irai vous le dire chez vous, (finissez votre verre, et glou et glou, j'arrive!) Votre commentaire ici, est griffé, signé, superbe ! (allez je vous cite c'est comme irrésistible): "Le son contamine le sens qui contamine le son (et inversement)". C'est encore plus inoui chez les inuits (je ne blague pas) côté sens et sons eux ils tiennent le flambeau. Je vous en reparlerai cet été plus tranquillement, quand sirotant des bières effervescentes et fermentées sous les ombrages frais et chaleureux, de "la quiétude", le va et vient du sens et du son nous chatouillera l'esprit ... (Mais je m'égare ! encore ! ah zut !). Je pensais à cette autre phrase (rien à voir avec votre boisson effervescente et fermentée mais bon, s'il faut parler de sens (et de son ), j'ai envie de poser là, cette bonne phrase qui dit : "Le vent souffle autour de la maison", n'est ce pas une phrase abominable ? Qui manque bien franchement d'inoui ? Et de sens et de son... Qui nous dira, en effet, où est la différence entre le vent et le souffle ? (je veux dire au niveau du sens et pis pas mal au niveau du son. Non ? Qu'en pensez vous ?) voili voilou.
Je ne reviendrai pas, sur les combinaisons sonores de la blonde, de la brune ou la rousse, que l'on verse, et qui sont sans rapport. Enfin bref...

Écrit par : Frasby | lundi, 26 avril 2010

je me sens assez proche de l'archéoptéryx, une vague descendance sans doute, moi aussi je bricole depuis longtemps un système pour me maintenir à la hauteur, voler, difficile!! survoler tout juste, et ces doigts malhabiles que d'efforts inutiles depuis l'enfance... , enchantée cher archéo, si je peux me permettre cette familiarité ...
Catherine Ailes

Écrit par : catherine L | lundi, 26 avril 2010

Bonjour,
c'est vrai que ce tronc d'arbre couvert de mousse a des allures d'archeopteryx: 69 millions d'années! Comment on nous trouvera dans 69 millions d'ans ? . j'ai toujours eu une grande admiration pour les dinosaures celui là, il devait pas être loin de chine ,non? En tout cas c'est sympa de voir que nous avons lu sans doute les mêmes articles de journaux mais ton commentaire savoureux nous oblige à les trouver beau quelque soit la couleur de leur plumage et leurs habitudes culinaires... C'est sur que quand on n'a ni fourchette ni couteau et même pas un pierre aiguisée ;c'était compliqué de manger proprement , ou d'aller de l'avant, non?
amitié et bonne promenade....

Écrit par : alex | lundi, 26 avril 2010

@ Catherine Ailes: Enchantée, moi de même, vos visites ici colorent joyeusement le grand nid de certains jours comment faites vous ?). Seriez vous un de ces spécimens du genre "Archéoptéryx coloryx polymorphe pas pervers ? (eh! eh! je m'y connais ! je dirai même je m'y reconnais sauf que j'ai pas d'aïeul "coloryx"!) Tous ça pour dire que les descendances demeurent assez complexes, selon les scientifiques (il y a dans l'archéoptéryx une ligne directe de colibri comme on sait, une indirecte du hérisson, de la limace (c'est prouvé), un peu du paon (il faut bien, sauver la façade), un brin de ouistiti (pour ma part), un rien d'ourson (!), et un chouïa de hibou ( dit-on d'hibou ?), et peut être, qui sait ? quelque chose de l'élandin croisé licorne et enfin bref je vous laisse compléter la liste. Foin de la descendance ! il faut bien s'occuper de l'ascendance voire de la transcendance et oser la bricole, même viser la fignole (osons!) sur sa branche archéoptéryxophonique et c'est pas facile, enfin bon... Vous pouvez vous permettre toute familiarité (nous sommes cousines), vous avez toute ma sympathie, nous sommes à plaindre, et bien courageux nous autres descendants de... (fils et filles de ...). D'autant que chacun trouvera bien l'archéoptéryx à sa porte, il suffit d'ouvrir grand les yeux et ce n'est pas donné à tout le monde, seule l'élite... euh euh...= suivez mon regard (sans vouloir flagorner). >, je vous souhaite bien de la joie dans bricole. Et vous remercie, cousine, pour votre témoignage, qui en encouragera plus d'un.

Écrit par : frasby | lundi, 26 avril 2010

@Alex : Merci à toi ! Toujours à porter du grain à nos animals en voie de disparition ou de rareté, je dis "en voie", car ici de trop nombreux témoignages de descendants d'archéoptéryx, sont venus prouver de source sûre que l'animal (sous quelque forme qu'il soit réincarné (ou dégénéré, ;-O!) n'est pas éteint, (loin s'en faut!). Et puis cet arbre 69 (tu rigoles ?) 156 ! millions d'années (Ma), n'a pas des allure, ah je récuse ! crois tu qu'à certains jours nous nous contentons de "comme si", de postures ? - Non ! non ! non ! cet arbre couvert de mousse EST bel et bien un archéoptéryx véritable (pourquoi n'aurait il que des allures, Alex , veux tu me vexer ?;-). Fascination des théropodes ! Celui là a été découvert en Allemagne (mais il y a 156 millions d'années l'Allemagne et la Chine formait un même pays) donc on ne parlait pas de fourchettes à l'époque. Et nul n'a jamais dit que l'archéoptéryx mangeait avec des baguettes. C'est un fait. Heureusement que je viens révéler cette vérité historique ce qui fera se demander à nos lecteurs, lectrices (s'il en reste), pourquoi on nous l'a cachée si longtemps cette vérité . Tu as quand même raison de poser la question des ustensiles de cuisine et de les mettre en rapport avec toute possibilité d'évolution... Tes questions nous mettent au bord d'un gouffre insondable. Un grand vertige! Ce qui n'est pas pour me déplaire. puissions nous ne pas faire un seul pas en arrière. Bonne journée à toi, Alex ! bien amicalement.

Écrit par : frasby | lundi, 26 avril 2010

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