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samedi, 10 juillet 2010

Argh ! (Pan-art ?)

L'homme écrit sur le sable. Moi ça me convient bien ainsi ; l'effacement ne me contrarie pas ; à marée descendante, je recommence.

JEAN DUBUFFET : extrait de "Prospectus aux amateurs de tout genre". Editions Gallimard (1946).

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Nous prenons appui dans le vide, nous lui donnons un autre nom, nous transformons les arbres en sculptures mobiles émiettables. Nous leur donnons un autre nom. Nous augmentons ainsi la valeur du monde. Ce leurre coule mollement, comme du jus de cerise sur un caraco blanc. A la faveur des guignes, doucement nous évoluons. Des fabrications nous émondent, on croirait qu'elles rendent invincibles. Cette erreur est insoupçonnable. Nous exhibons des mines radieuses entre deux précipices. Un chant infiniment poreux, nous guide, que rien n'effleure, d'aucune façon, nous sommes tels que nous sommes, pareils à des éponges. Ces bestioles nous avalent, nous recrachent puis nous parent d'une lucidité intenable. Nous touchons des régions glacées, éloignées des mondes vivants. De là nous espérons recomposer les plus beaux chants. Des chants d'Amour, de retrouvailles... Nous cherchons des superlatifs pour aborder les continents, incapables d'aller au bout. Il n'est nulle place en nous qui ne soit pas poursuivie d'ombres. Nous haïssons ces fantômes puis nous les infligeons à ceux que nous aimons. Nous pensons prétendre là, à l'immoralité. Une oeuvre attend son heure, son élan, ses métamorphoses. Nos corps se voilent, apprennent les danses orientales

"Danser est le fin mot de vivre et c'est par danser aussi soi-même qu'on peut seulement connaître quoi que ce soit : il faut s'approcher en dansant"(1)

Le Saïdi, la guerrière, qui attire la terre, fait valser la misère du monde, avec ses sauts de jambes et ses jeux de cannes. La musique émet des bruits variables, secoue son tremolo, les corps vibrent à l'assaut d'un rythme qui augmente, accélère le rythme cardiaque. Nous affichons la modestie avec une rage émouvante, un modus vivendi gît au coeur du mirage. Nous ne supportons pas de subir la moindre réflexion. La réflexion est pourtant notre grâce. Nous sommes des artistes au coeur pur, véridique, il nous importe de créer "ce qui ne se fait pas forcément", adjonction d'un rayon de mots nouveaux, abandon des règles des trois unités, etc... L'expérience se détache peu à peu de notre mémoire.

Ici le verbe est vulnérant, la caresse hypnotique. Je suis des yeux le mouvement d'un étranger qui me parle et me cloue sur le front un rubis à tête de phénix. Le ciel vire au gris anthracite, une lueur blanche dans les cheveux, me donne des airs d'enfant idiot. L'imprudence allume une mèche qui met tout à feu et à sang. Pourvu que ciel brûle ! nous posons des verrous magnétiques comme jadis on posait des lampes de sûreté dans les mines à charbon, courons grimés à l'authentique, une question inconnue taraude, sans visée et sans nom, des masques aux sourires monstres remplacent la fureur d'autrefois ; il nous vient parfois une grimace mais toujours nos éclats nous trompent. Nous déroulons des séries de rubans multicolores pour distraire quelques habitants. Notre âme jadis si peu disposée à se corrompre émet maintenant des sons de batterie de cuisine, de placards à balai. Tout pour le mieux dans un monde fait à notre image. La démarche est précieuse tout autant qu'implacable. Nous devenons des Dieux vivants. Nos têtes coupées s'enfoncent lentement dans le sable... Notre réalité commence à cet instant.

(1) Jean Dubuffet : Extr. de "Prospectus et tous écrits suivants".

Photo: Un fragment de fresque éphèmère portée sur deux ou trois édifices vue au coeur de la nuit, une fois, (une seule, hélas !), Montée de la Grande Côte, effacée dès le lendemain. Mille excuses à l'artiste, (parisien, il me semble (?), graffeur fou, inspiré, je n'avais pas de quoi noter son nom, je ne sais pas si la signature en était seulement lisible dans la nuit, il me semble avoir retenu, parmi d'autres, le nom du plasticien Yves Koerkel qui exposait de source sûre, sur ce mur également, mais je ne peux pas confirmer (vraiment navrée), que ce grand dessin noir sur blanc soit de lui, si quelqu'un en sait plus, tout renseignement est bienvenu, sinon je tâcherai de me renseigner ici ou là, chez les "spés du street art" et autres copains graffeurs. Sait-on jamais ? En attendant de peut-être, préciser, je transmets toutes mes félicitations à l'artiste pour la belle sauvagerie in situ. Photographiée en remonte-pentes (de la Croix-Rousse), entre la rue Leynaud et la Burdeau à Lyon au printemps 2010. © Frb.

Commentaires

"Nous prenons appui dans le vide..."

Idée supérieure entre toutes, dont chacun devrait faire son credo. Tout n'en irait que mieux, je crois :)
Décidément vous cultivez le vertige avec bonheur ces temps-ci. Et la seconde citation comme un écho à des propos tenus "à l'étage" inférieur ajoute encore au "tissu" de nos sensations...
J'adore quand ça tout se relie :)

Écrit par : Jean | dimanche, 25 juillet 2010

@Jean : Votre art du commentaire est tel, que j'ose à peine répondre ;-). Toujours le mot juste, une perception très fine.
j'apprécie vraiment votre lecture vos réflexions, cela est un doux plaisir de vous lire. Oui, je cultive le vertige, avec bonheur (encore lui ;-) ? Bonheur, ce n'est pas si sûr, enfin disons qu'il me sidère, le vertige ! alors je fais une série, feu du vertige, (feu le vertige!) comme on fait feu de tout bois, comme le dit Dubuffet "A marée descendante je recommence", j'espère épuiser le sujet avant qu'il ne m'épuise (non, je plaisante, enfin juste un peu). Epuiser le vertige, c'est sûrement très présomptueux.Je ne pourrais assumer seule une telle responsabilité (sourires) En tout cas pour l'écho vous avez l'oreille absolue, en plus, j'aime beaucoup, beaucoup, cette idée, votre choix du terme, de "tissu", (Michèle dirait-elle que ça ourle ? ;-). "J'adore quand tout se relie" oui, moi aussi ! de toute façon, on peut bien se raconter que tout est séparé, tout se relie, n'est ce pas ? (cf. Rimbaud en avait fait son alphabet, enfin... Mille mercis, pour votre visite lumineuse. A très bientôt ici ou là, (ayant vaincu par deux fois les techno-cerbères, je reviendrai chez vous, avec un plaisir non dissimulé, (jamais deux sans trois...;-)

Écrit par : frasby | dimanche, 25 juillet 2010

@Jean (bis) : Si d'aventure, vous me lisez ici, c'est rageant. Les techno-cerbères m'ont encore refusé ce soir l'entrée de votre domaine, mais ça doit venir de "chez eux" comme on dit car je fais tout "bien comme il faut" et j'ai suivi scrupuleusement la notice de Michèle. Je suis au désespoir, pour l'heure je ne peux vous commenter, mais je ne lâcherai rien ! ;-)

Écrit par : frasby | dimanche, 25 juillet 2010

juste une question frasby
de qui est l'illustration?
merci

Écrit par : imagine | lundi, 26 juillet 2010

@imagine: Hélas! je sais pas, je l'ai d'ailleurs écrit à la fin de ce billet, c'est mon regret, si quelqu'un sait, j'accueillerai l'info, l'artiste le mérite mais j'ai pris ce graff en photo une nuit, où je rentrais d'une soirée, sans carnet ni stylo, il faisait sombre, je suis tombée complètement par hasard sur ces immenses graffs, noirs et blancs, il y avait des têtes de chiens au trait vif, d'autres dessins, tous très "prenants", sur une porte j'ai vu un minuscule petit papier vaguement collé ou punaisé (?) très abîmé avec le nom de l'artiste ( quasi illisible) un vague CV (illisible aussi) le tout difficile à retenir dans ces conditions, en (j'ai tenté de lire au briquet, c'est tout dire). Apparemment, j'ai cru comprendre que le graffeur était parisien (?) et qu'il n'en n'était pas à son premier coup d'essai. Pure rencontre de hasard, dès que j'en sais davantage, je vous le dirai, je le noterai en bas de ce billet. Désolée de ne pouvoir pour l'heure vous renseigner... (A suivre, peut être ?).

Écrit par : frasby | lundi, 26 juillet 2010

@imagine (la suite) : A propos de notre graffeur, après quelques recherches, dans ce que j'avais noté de mémoire, j'ai retenu le nom de Yves Koerkel, strasbourgeois d'origine, un plasticien qui travaille autour de l'image imprimée... Il y avait bien du Koerkel sur un des édifices de source sûre, que j'ai photographié également.
http://yveskoerkel.blogspot.com/
Mais comme je l'ai noté à la fin de ce billet, je ne suis pas sûre du tout que ce dessin soit de lui, j'espère que quelqu'un pourra nous renseigner enfin, de source sûre... (Encore à suivre).

Écrit par : frasby | lundi, 26 juillet 2010

merci pour toutes ces infos ;)
bonne journée

Écrit par : imagine | lundi, 26 juillet 2010

@imagine: De rien , elles sont pour l'heure incomplètes, et pas 100% sûres mais le lien de yves Koerkel est à visiter...
A suivre donc ... Je suis allée me promener chez vous cette nuit, j'ai trouvé ça bien chouette, très joli domaine. Et toujours comme chez Jean, impossible de commenter, damned !
bonne journée à vous

Écrit par : frasby | lundi, 26 juillet 2010

Pour les commentaires, vous devriez essayer "Anonyme", c'est le plus simple :)

Écrit par : Jean | lundi, 26 juillet 2010

@Jean : Bon, oui, j'veux bien, si vous le dites ! mais z'hélas ! je crois que j'avais déjà essayé "anonyme" et c'était pareil, ô rage ! peut être ça ne fonctionne pas la nuit ? C'est idem pour "mon chien aussi" un blog que j'aime bien, que je n'ai pu commenter qu'une seule fois avec exactement les mêmes manips, puis vous (ô desespoir ! ça commençait si bien) et hier "imagine".
Je suis damnée, j'vous dis ;-)) Quoiqu'il advienne, je vous remercie pour votre aide. je ne lâcherai rien ! j'y retournerai !
ni vu ni connu (:-O!) dans l'anonymat le plus complet. Persévérance ...

Écrit par : frasby | lundi, 26 juillet 2010

oui "créer ce qui ne se fait pas forcément" mais il faut du talent justement et le sens de la provocation donc j'aime!!!
fascinante cette main j'hésiste entre harpiste et étrangleur...
merci pour cette découverte...à bientôt Frasby je suis dans les valises juste un peu le temps de m'apitoyer sur ce pauvre Bébert avant de partir...

Écrit par : catherine L | lundi, 26 juillet 2010

@Catherine L ; Pauvre Bébert regarde la mer, cela pourrait être le début d'un poème, ou d'une chanson d'été très triste.
A quoi pense ce pauvre Bébert ? que de Mystères ...
Je n'avais pas remarqué ce côté harpiste de la main. Très juste. Pianiste aussi ! à l'attaque de quelque compos de Rachmaninov. (Rachmaninov avait de très grandes mains ;-)
je ne vois qu l'ombre de l'étrangleur, et sa main qui avance pour broyer ce qui déjà n'est qu'ombre. Je pensais aux crocs de certains rapaces dans les contes d'enfant, qui lâchent leur proie vivante en plein vol, je pensais à ces mains maléfiques qui se baladent dans le film sous forme de gant ou d'ombres encore, de Clouzot, "les diaboliques http://www.youtube.com/watch?v=QdiybpH6wEQ feature=related.
Merci pour votre oeil affûté et vos appréciations. Je vous souhaite de bonnes vacances, un bon voyage, et de belles mise en boîte. Ne laissez pas Bébert tout seul ! emmenez le avec vous ;-) A très bientôt !

Écrit par : frasby | lundi, 26 juillet 2010

Le verbe est vulnérant, le ciel sidérant et Frasby fatale, frasquassante, fracassante...

Écrit par : Michèle | mardi, 31 mai 2011

@Michèle : Fatale ? oh non ! (j'aimerais bien troupant, être comme Gani Ollol Badigri (dans "Netro made de Rapis :)
cf (citation de Dosamiquo) via le pètoe Vitroc H.
("Belle tu sais !" :), tafale à trom; tafaléti ! tafum !
masi je m'égare, phrases cassées, frascassante vous trouvez ? Vosu têses beni glidunente, impossible de relire ces vieux textes, (cf Obileau " le moment où je parle est déjà loin de moi"), ej en sias slup oiqu senper, ah si ! que le verbe est bien vulnérable... Cela dit, vous mes pattez Chimèle, je vous remercie, seriez vous (pra sarhad) la célèbre exploratrice matelotte montagnarde, qui traverse le temps et l'espace et l'antimatière en passe-muraille sans avoir besoin de butelolie d'ygoxène ? Une drang Pan-Arpenteuse en quelques torses ? C'est un dno du cile, inocybrale, vous le vasiez ? :)

Écrit par : frasby | mardi, 31 mai 2011

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