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lundi, 12 mai 2014

Secret life

Au-delà de ce qui arrive ou n'arrive pas, l'attente est magnifique. 

ANDRE BRETON

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On trouve un silence très troublant dans le Rivage des Syrtes de Julien Gracq où une antique lagune baigne dans l'attente à la lisière des mondes, dans le silence, une forme d'énonciation plus évidente:

 

 

Le silence est témoin absolu.

 

 

 

Photo: A la lisière des mondes (et des merveilles...).

 

 

Très loin d'ici.© Frb 2014

vendredi, 14 août 2009

Peindre

"Quand j’ai fait un beau tableau, je n’ai pas écrit une pensée. C’est ce qu’ils disent. Qu’ils sont simples ! Ils ôtent à la peinture tous ses avantages. L’écrivain dit presque tout pour être compris. Dans la peinture, il s’établit comme un pont mystérieux entre l’âme des personnages et celle du spectateur. Il voit des figures, de la nature extérieure ; mais il pense intérieurement, de la vraie pensée qui est commune à tous les hommes : à laquelle quelques-uns donnent corps en l’écrivant ; mais en altérant son essence déliée. Aussi les esprits grossiers sont plus émus des écrivains que des musiciens ou des peintres. L’art du peintre est d’autant plus intime au cœur de l’homme qu’il paraît plus matériel ; car chez lui, comme dans la nature extérieure, la part est faite franchement à ce qui est fini et à ce qui est infini, c’est-à-dire à ce que l’âme trouve qui la remue intérieurement dans les objets qui ne frappent que les sens. [...]"

EUGENE DELACROIX Journal mardi 8 octobre 1822.

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Quelques années plus tard en 1956 exactement, Yves KLEIN dans son atelier, ouvre une page du journal de DELACROIX, il tombe sur quelques lignes :

"J’adore ce petit potager, ce soleil doux sur tout cela me pénètre d’une joie secrète, d’un bien-être comparable à celui qu’on éprouve quand le corps est parfaitement en santé. Mais que tout cela est fugitif, je me suis trouvé une multitude de fois dans cet état délicieux, depuis les vingt jours que je passe ici. Il semble qu’il faudrait une marque un souvenir particulier pour chacun de ces "moments". (E.D.)

Cette page du journal de DELACROIX imprègnera durablement l'univers d'Yves KLEIN, qui parlera à propos de sa recherche artistique, d'"états-moments". La marque de ces "états-moments" de la chair, il la tient par les empreintes arrachées aux corps de ses modèles, la marque de ces "états moments" spirituelle, il la tient aussi par ses monochromes, mais tient-il la marque des "états moments" de la nature ?

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Elément de réponse et conséquences de quelques notes du journal d'un vieux peintre se prolongeant quelques années plus tard, sur le carnet d'un autre peintre :

"Je bondis dehors et me voilà au bord de la rivière, dans les joncs et dans les roseaux. Je pulvérise de la couleur sur tout cela et le vent qui fait plier les fines tiges vient les appliquer avec précision et délicatesse sur ma toile que je présente ainsi à la nature frémissante, j’obtiens une marque végétale. Puis il se met à pleuvoir une pluie fine de printemps ; j’expose ma toile à la pluie et le tour est joué. J’ai la marque de la pluie ! une marque d’événement atmosphérique [...] Je travaillerai même, je crois, non plus avec des couleurs, mais avec la transpiration des modèles mêlée de poussière avec leur propre sang peut-être, la sève des plantes, la couleur de la terre, etc., et le temps fera tourner au bleu monochrome I. K. B. les résultats obtenus. Le feu est bien là, aussi, il me faut son empreinte !" (Y. K.)

Ainsi une ère anthropophagique s'approche, effrayante, en apparence seulement. Elle obéit à d'anciennes paroles (effrayantes, aussi, à la lecture seulement : "Prenez et mangez, ceci est mon corps ...". Il y a de la contraction (dans l'ère ?) et des passages où l'espace neutralise le temps. Dans sa recherche de la liberté de l'esprit et de la chair, Y. KLEIN écrit encore : "ll faut être comme le FEU en soi dans la NATURE ; savoir être doux et cruel à la fois, savoir se CONTREDIRE. Alors, alors seulement l’on est bien de la famille des PRINCIPES D’EXPLICATION UNIVERSELLE."

C'est à dire, (l'image est de KLEIN, lui même) : "se sentir proche de la famille du ver, tel ce ver qui fait des trous dans le gruyère, qui fait le vide autour de lui et qui avance, et mange mange, il rencontre aussi des trous qu'il contourne, parce qu'il faut bien vivre. Un jour il n'y a plus de gruyère parce qu'il a tout mangé il n’y a plus que le grand vide" :

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"Il est alors lévitant, libre, heureux dans l’espace, mais un instant seulement, puis il tombe tout naturellement sur un autre fromage" ...

Vous me direz, quel rapport avec DELACROIX ?

Aucun. Apparemment... ;-)

Source : Texte de Yves KLEIN 1960.

Un autre bleu plus beau que bleu et que KLEIN ne réfuterait pas est à contempler au delà de ce lien (cliquez absolument ;-)

http://kl-loth-dailylife.hautetfort.com/archive/2009/08/2...

Photos : 1/ Paysage vu d'un chemin de terre, à quelques km du Mont St Cyr. 2/ Mont St Cyr vu d'un champ. 3/ Ciel doux. Nabirosina. Eté 2009. © Frb

samedi, 07 mars 2009

Vérité du mensonge

" Et devant cette petite toile qui a l'intention prétentieuse d'imiter la nature vraie, on est tenté de dire : ô homme que tu es petit. Puis aussi "qu'un kilo de vert est plus vert qu'un demi-kilo" (1) (...) Puis comme un kilo de vert est plus vert qu'un demi-kilo, il faut pour faire l'équivalent (votre toile étant plus petite que la nature) mettre un vert plus vert que celui de la nature. Voilà la vérité du mensonge. De cette façon votre tableau illuminé d'après un subterfurge, un mensonge sera vrai puisqu'il vous donnera la sensation d'une chose vraie (lumière, force et grandeur), aussi variée d'harmonies que vous pourrez le désirer. Le musicien CABANER (2) disait que pour donner en musique la sensation du silence, il se servirait d'un instrument de cuivre donnant une seule note aigüe, rapide et très forte. Ce serait donc l'équivalent en musique, traduisant une vérité par un mensonge."

PAUL GAUGUIN : extr "Second séjour en Océanie" in "Oviri" ou "Ecrits d'un sauvage". Editions Gallimard 1974.

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(1) Cette phrase "Un kilo de vert est plus vert qu'un demi-kilo" est attribuée à P. CEZANNE et notée par P. GAUGUIN lui même, dans le chapitre "A propos de la perspective" toujours extrait du livre "Oviri". Lisez plutôt :

" Et comme on lance un pet pour se débarrasser d'un gêneur,  Cézanne dit avec un accent méridional :"un kilo de vert est plus vert qu'un demi-kilo". Tous de rire : il est fou ! Le plus fou n'est pas celui qu'on pense. Ces paroles ont un autre sens que le sens littéral de la phrase. Et pourquoi leur expliquer le sens rationnel ? Ce serait jeter des perles aux pourceaux."

(2) CABANER ou plutôt JEAN DE CABANES dit ERNEST CABANER (1833-1881) fût un compositeur, pianiste, poète, qui mît en musique des poèmes de CHARLES CROS dont le fameux "Hareng saur". Il écrivît ses propres poèmes dont "le pâté" et en composa aussi la musique. Personnage excentrique, figure de la bohème, Ernest CABANER cotoya les impressionnistes au café Guerbois (qui est devenu je crois, magasin de chaussures aujourd'hui - quoique ce serait encore à revérifier - situé jadis au 9 rue de Clichy, fréquenté par MANET, DEGAS,CEZANNE, RENOIR, PISSARO entre autres... Edmond DURANTY et ZOLA, pour les érudits), CABANER fréquenta également le salon de NINA DE VILLARD et le cercle des zutistes, pour lesquels il trouva un local à "l'hôtel des étrangers" où il travaillait comme barman. Il accueillit A. RIMBAUD chez lui quelques temps. A ce propos, il fût souvent mentionné que le poème "Voyelles" devait beaucoup à l'enseignement musical d'ERNEST CABANER, à son chromatisme ou "audition colorée". Il faut dire que CABANER apprenait le piano à RIMBAUD à "l'hôtel des étrangers". Ca ne s'invente pas ! Pas plus que ne s'invente le poème qui suit, appelé "sonnet des sept nombres", signé E. CABANER, dédié à son ami A. RIMBAUD. Jugez plutôt, de l'influence + que probable des "sept nombres" sur les "voyelles" :

"Nombres des gammes, points rayonnants de l'anneau
Hiérarchique, - 1 2, 3 4 5, 6 7 -
Sons, voyelles, couleurs vous répondent car c'est
Vous qui les ordonnez pour les fêtes du Beau.

La OU cinabre, Si EU orangé, DO, O
Jaune, Ré A vert, Mi E bleu, Fa I violet,
Sol U carmin - Ainsi mystérieux effet
De la nature, vous répond un triple écho,

Nombres des gammes ! Et la chair, faible, en des drames
De rires et de pleurs se délecte. - O L'Enfer,
L'Aurore ! La Clarté, La Verdure, L'Ether !

La Résignation du deuil, repos des âmes,
Et La Passion, monstre aux étreintes de fer,
Qui nous reprend ! - Tout est par vous, Nombres des gammes ! "

Ami de CEZANNE et de nombreux autres peintres, E. CABANER ne séparait pas tant les disciplines. Comme A. RIMBAUD, il cherchait un langage complet, universel. Sa méthode: il coloriait les notes et leur attribuait le son d'une voyelle. Mais la méthode est plus ancienne elle date du XVIIem siècle, elle fût imaginée (à l'usage des débutants) par le Père CASTEL, inventeur du clavier oculaire. La méthode fascina RIMBAUD par l'entremise de CABANER via CEZANNE et le Père CASTEL résumant tout : sons, parfums, couleurs... Ainsi naissent les  "Voyelles"...

Photo: "Les sons et les parfums tournent dans l'air du soir" sur la Colline et plus encore, les couleurs du mur de l'Alma se traversent comme un pont. Mise en forme dynamique des surfaces, les fresques ont été réalisées sans trucages, dévalant la pente, par d'étroites friches, elles longent un petit escalier, bordé de longues herbes jusqu'à deux rues plus bas. Le fragment de quartier, ainsi se transforme, par le mouvement secret de graffeurs surdoués (merci à eux), en une improbable galerie d'art contemporain sauvage où il fait bon tendre l'oreille pour contempler ce mur de sons, écouter la tonalité glissant sur le dessin, mêlés à la trame ordinaire des bruits et mouvement urbains.

Couleurs. Un mur qui ne ment pas. Vu rue de l'Alma, (qui en plus de ses fresques possède un des plus beaux panorama qui soit), situé sur le plateau de la Croix-Rousse, à Lyon. Fin Février 2009. © Frb

A écouter dans un tout autre monde, quelques correspondances urbaines, un brin freestyle, comme les fresques et les voyelles  :

http://www.youtube.com/watch?v=TYa7furgQsA&eurl=http:...

dimanche, 06 juillet 2008

Liste de commissions

commissions.jpgLa liste de commissions de Nathalie Sarraute. CLICK