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jeudi, 25 juin 2009

Se perdre

"Voici ce que j'ai constaté d'autre: les uns aux autres nous ne trouvons plus rien à nous dire. Pour s'agréger chacun doit exagérer sa médiocrité: on fouille ses poches et l'on en tire à contrecoeur la petite monnaie du bavardage: ce qu'on a lu dans le journal, des images que la télévision a montrées, un film que l'on a vu, des marchandises récentes dont on a entendu parler, toutes sortes de ragots de petite société, de révélations divulguées pour que nous ayons sujet à conversation; et encore ces insignifiances sont à la condition d'un fond musical excitant, comme si le moindre silence devait découvrir le vide qu'il y a entre nous, la déconcertante évidence que nous n'avons rien à nous dire; et c'est exact."

BAUDOUIN DE BODINAT. Extr "La vie sur terre". Editions, Encyclopédie des nuisances. 1996.

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Nous poursuivons "La vie sur terre", deuxième volet de cet ouvrage au style rarissime de Baudouin de BODINAT que j'ai découvert récemment, et l'été si exubérant en platitudes et autres frimes, aux terrasses des cafés, ne peut qu'inspirer cette sorte d'hibernation, dans la lecture dirai-je, de ces pages lumineuses à force de regarder les ombres pour ce qu'elles sont. Je lus d'abord de BODINAT, à l'ombre, dans une de ces tavernes chauffée à bloc par ces jours qui n'en finissent pas, tandis que mon oreille traînait à saisir à cette table jouxtant la mienne, les élucubrations culturelles d'un dindon entouré de jeunes filles à la fois belles et ordinaires. Je vous reparlerai du dindon qui ne loupa pas un sujet de "bonne" conversation et  se sachant écouté, remonta le volume d'un ton pour parler à la fois de MONTAIGNE, d'ANTICHRIST, et de MICHAEL, sans oublier PINA et le neveu du président, le tout ponctué d'un rire bête et chantant. Donc, nous le retrouverons ce dindon, (un jour), qui laissait dépasser de la poche militaire d'une saharienne à la fois chic et déglinguée, un exemplaire du Monde plié en quatre.

Le Monde plié en quatre... Cétait bien ça.

Il n'y avait plus qu'une chose à faire, partir d'ici et loin. Mais quelle autre destination à part la terre ? A Perrache, comme je n'ai pas l'âme meilleure que ce dindon (contrairement à ce que je voudrais faire croire), j'ai voulu photographier quelques bougres qui se battaient pour David Guetta enfin je veux dire un CD de David Guetta volé à Virgin Megastore. Un vigile est venu me dire que si je prenais des photos à cet endroit, il me saisirait l'appareil. ("La vie sur terre" ?). Je lui ai répondu "mais de quel droit ?", il m'a emmenée devant un panneau placardé dans le centre (on dit "stratégique") de la gare, et m'a montré l'affiche où il est bien noté en lettres microscopiques, que je n'avais pas le droit de prendre en photo ce lieu-là. J'ai laissé partir le vigile. Je me suis penchée contre la rambarde pour regarder d'en haut passer les gens qui descendaient prendre le métro. ("La vie sous terre"?) J'ai vu passer un homme avec le Monde sous son bras. Et j'ai pris la photo quand même.

Le monde sous son bras. Ah ah !

La vie sous terre, La vie sur terre. Et, déconcertante, l'évidence...

Histoire à suivre ...

Nota: Ce blog étant antidaté toutes les incohérences dûes à des faits n'ayant pas encore existé sont considérées comme normales, d'autant que rien ne nous interdit, pour l'heure de les anticiper.

Photo: Du hall commercial précédant la grande allée menant à la gare de Perrache. L'espace où l'on va prendre métros et bus vu d'en haut, à la manière d'une caméra de vidéosurveillance. Lyon Juin 2009.© Frb

Commentaires

« J'ai vu passer une forme avec le monde sous le bras. » C'est une phrase que j'aurais aimé avoir écrite. Mais je suis heureux que ce sois vous. Merci. Bien que nous ne trouvions plus rien à nous dire, selon Bodinat, j'aime quand ceux que j'aime disent des choses que je comprend.

Écrit par : Marc | vendredi, 03 juillet 2009

En réalité, le vigile n'était qu'un poète égaré à Perrache, de son vrai nom "Virgile", camouflé sous la banalité attristante d'un uniforme mais cherchant des inspirations nouvelles. Quand il vous quitta, dépassait d'une de ses poches Le Monde entier (ou presque) et roulé en boule car ce vigile l'avait confisqué à un incertain Galilée...

Écrit par : JEA | vendredi, 03 juillet 2009

" Et pourtant, elle tourne. " C'est à se demander.
Baltha

Écrit par : Baltha | vendredi, 03 juillet 2009

@JEA : C'est bien chouette ça ! (Figurez vous que je me suis bien retenue de broder quant à donner un autre R au vigile et voilà que vous vous y mettez !!! sauf que
Galilée j'aurais pas pas pensé !!! Mais évidence !!!
(surtout caché dans un uniforme ! Vous n'avez peur de rien mais qu'aurait il pu faire d'autre à notre époque ?)
D'ailleurs vous donnerez peut-être une idée lumineuse à tous nos poètes, puissent ils vous lire un jour ( et que fleurissent sous l'uniforme les âmes bucoliques ! ) Merci à vous !

Écrit par : frasby | vendredi, 03 juillet 2009

@baltha : oh vous savez, on ne fait que ça, se demander
Mais le schmilblick n'est pas plus avancé

Écrit par : frasby | vendredi, 03 juillet 2009

@Marc : Merci ! En fait, c'était plus qu'une forme, c'était un homme ;-) aussi incroyable que cela puisse paraître ! mais vous avez raison ça paraît sous forme d'une forme sur la photo.
Vous avez remarqué que cette médiocre photo ressemble (et c'est un peu voulu quand même), à une image de caméra surveillance ? Virgile caché sous l'uniforme, Frasby transformée en caméra surveillance... JEA en révisionniste (Je vous demande pardon JEA c'est juste pour la bonne cause)
Vous comprenez toujours Marc ? Oui, je suis sûre que oui !
Comme quoi il doit bien rester 2 ou 3 formes dans des coins qui auront toujours des choses à se dire. Immense note d'espoir isn'it ?

Écrit par : frasby | vendredi, 03 juillet 2009

@ JEA en révisionniste...

Vous savez (on retient cette formule comme pour s'excuser auprès de la personne dont on sait qu'elle ne sait pas),
sur deux autres blogs, ces mots m'ont été réservés, mais sans humour :
- "clown raclure communautariste... plouc et m'as-tu vu
suspect... raciste ordinaire juif révisionniste... promoteur de la Shoah..."
et même sur une République des Libres, par sa responsable, une comparaison avec ... "Mengele" pour avoir eu le malheur de rappeler qu'il ne fallait pas non plus jouer avec les trois génocides du XXe siècle !!!
Après de telles lectures, reste à se perdre dans un labyrinthe à ne pas partager.

Écrit par : JEA | vendredi, 03 juillet 2009

@JEA : Il est clair que si j'avais su tout cela (mais je n'ai pas cette puissance de pouvoir absolument tout lire - ce qui se passe sur les autres blogs, surtout,) donc si j'avais SU , tout cela, je ne vous aurais pas "taxé" (pour de rire) de "révisionniste" (light) (un mot qui ne fait pas rire, et au vu de ce que vous me dites, je comprends. Mais m'étant transformée moi même en caméra de vidéosurveillance (light), j'ai pensé que vous ne seriez pas trop affligé ou touché par l'humour que je reconnais d'un goût superpoidslourd (de ma part ). Je vous prie de bien vouloir m'en excuser.
Je me taxerai tout à fait de "révisionniste (light) moi même à savoir que si l'humour de ce com' de grosse maline en sabots vous gênaît , j'ai le pouvoir de le supprimer tout de go sans que cela ne me gêne le moins du monde. Tout cela pour vous dire encore le plus sérieusement du monde que tout ce qui touche ce style de polémique, de blog à blog, les injures et autres querelles d'intention m'ont souvent laissée fort perplexe. Même s'il s'agit de défendre avec passion certaines idées. Généralement on n'en sort pas. A défaut de labyrinthe c'est l'impasse. Le blog n'est pas à mon sens un lieu de règlement de compte. J'ai eu un jour ici des commentaires de haine purement raciste, je ne les ai pas passés, en avisant par un mail personnel, les deux interessés qui aujourd'hui n'apparaîtront plus jamais ici. Se perdre d'accord ! mais pas à l'insu de son plein gré ;-)

Écrit par : frasby | vendredi, 03 juillet 2009

Savez-vous, chère Frasby, que sur les toits de la gare de Perrache, il y a deux "jardins" improbables, l'un côté "Rhône" et l'autre côté "Saône", et que, de ces deux endroits, on maîtrise tout, on voit tout ?

Écrit par : Chr. Borhen | samedi, 04 juillet 2009

@Chr Bohren : Mais bien sûr que je le sais !!!Me croyez vous tombée de la dernière pluie ? C'était même un endroit rêvé pour les RV amoureux (vous savez avec ces inouis qu'on rencontre dans les trains ;-)
Et aussi jardin improbable, où nous avons fait de bien belles séances de photos jadis
Il avait aussi aux étages la fameuse salle Mermillon qui donnait des concerts électroacoustiques gratuits. Cela n'existe plus c'est bien dommage !
Mais le jardin oui, il y est encore ! vous me donnez d'ailleurs l'idée d'y retourner, il faudrait montrer ça quand même !
Merci de revenir souffler à l'oreille quelques lieux improbables, ce jardin, je l'avais presque oublié ... Et pourtant quelle merveille !

Écrit par : frasby | samedi, 04 juillet 2009

les uns aux autres nous ne trouvons plus rien à nous dire.
lis-je dans la citation de B de B

mais est-il forcément indispensable de "se dire" des choses
et des choses "importantes" (comme il est implicitement suggéré dans la dite citation)
on peut aussi se taire en compagnie de quelqu'un
on peut aussi se contenter d'un "va faire beau aujourd'hui je crois" ou d'un "vous pourriez me dire où sont les toilettes s'il vous plait ? " et ajouter "merci" (en souriant si possible et si il n'y a pas urgence impérative de se rendre à destination)

Écrit par : hozan kebobo | lundi, 06 juillet 2009

@Hozan Kebo(bo?) :se taire en compagnie de quelqu'un c'est encore avoir quelque chose à se dire, il me semble
Je crois que ce qui est suggéré dans cette citation ce n'est pas de ne pas avoir à se dire quelque chose d'important.
d'abord c'est quoi ? quelquechose d'important ?
C'est de n'avoir plus rien ...

Ce serait plutôt le fait que le spectacle (la communication et ses techniques) sous toutes ses formes de diffusion se sont substitués à l'humain. (pas complètement mais bien assez)
Ensuite rien ne dit dans ce texte (ou dans ses extensions) que demander son chemin soit une chose si stupide. Je pense que B de B imagine que son lecteur pourrait comprendre le sens très précis du verbe "dire" dans le contexte de sa critique. Mais, je ne sais pas tout, pour savoir il faudrait lui poser la question.
"rien d'important à se dire" serait plutôt, peut être la perte du sens, quelque chose de plus difficile à expliquer que l'importance d'un contenu.
Mais, vous avez raison,demander son chemin ça a du sens si j'ose dire ;-))
Est ce suffisant ?
Bonne soirée à vous.

Écrit par : frasby | lundi, 06 juillet 2009

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