Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 30 septembre 2009

Impossible - possible

Jamais
Quand bien même lancé dans des circonstances
éternelles
du fond d'un naufrage ...

STEPHANE MALLARME : extr. "Un coup de dés"...

MOTS.JPG

Connaissez vous DIODORE CRONOS (ou Kronos) ? philosophe à peu près contemporain d'ARISTOTE, de l'école mégarique, celui là même qui nia l'existence d'un possible qui ne se réaliserait pas, et fit observer "qu'un possible qui ne deviendrait jamais réel serait contradictoirement impossible." DIODORE CRONOS se situe dans la tradition éléate et cherche comme ZENON (d'Elée) à nier dialectiquement l'existence du mouvement. En effet, si on admet l'existence d'atomes (indivisibles), ces atomes se trouveront en des lieux mêmes indivisibles et ne pourront se mouvoir ni dans le lieu où ils se trouvent (puisqu'ils le remplissent), ni dans un lieu différent (puisqu'ils n'y seront pas encore. Il n'y a donc pas de mouvement mais une mutation. Ou succession d'instantanés. Le même refus de la notion de virtualité ou de possibilité se retrouve dans un autre argument tout aussi fameux élaboré par DIODORE CRONOS qu'on appelle "argument du dominateur" : cette aporie veut prouver qu'il n'y a que du nécessaire ou de l'impossible, et elle fût en son temps approuvée par les anciens. A leurs yeux elle démontrait l'incompatibilité de plusieurs principes dont on s'accorde à trouver la présence dans les conditions d'un acte libre et que le "bon sens "est spontanément porté à tenir pour "vrais". Grosso modo en voici les 3 + 1 principes :

1) Le passé étant irrévocable, seul un événement futur peut être possible.
2) Un impossible ne peut pas être la conséquence logique d’un possible.
3) Il y a un possible dont la réalisation n’a jamais lieu, ni dans le présent, ni dans le futur.
4) Ce qui est, est nécessairement pendant qu’il est.

En réponse à cette question qui est celle de la nécessité ou de la contingence, les philosophes antiques ont donc élaboré plusieurs solutions mutuellement exclusives en procédant comme on fait en mathématique lorsqu'il s'agit d'accommoder un système d'axiomes démontrés incohérents. ils ont sacrifié l'un d'eux pour montrer ce qui leur paraissait imperturbable.

Il faut bien admettre que ce domaine est aride parce qu'il est celui de l'abstraction pure. Or si ces quatre principes lus séparément ne poseront pas le moindre problème à son lecteur, DIODORE, en parfait coupeur de cheveux en quatre des 3 + 1 principes, démontrera encore que ceux ci ne sont en réalité pas compatibles entre eux, leurs conséquences se détruisant les unes les autres. Donc pour sauver la cohérence de l'énoncé, il faudra renoncer à un de ces principes, au choix. Et là, où la démo de philo deviendra amusante c'est qu'une fois qu'on aura rejeté l'un des principes, on aboutira à des systèmes compétement différents. Certains de ces systèmes, il en est, dont ceux des Stoïciens, qui reviennent à affirmer une sorte de nécessitarisme universel dans lequel la contingence n'aurait plus aucune place ; entendez par contingence, la liberté humaine au sens usuel du terme. Dans d'autres solutions (celle d'ARISTOTE, d'EPICURE ou celle des sceptiques grecs), cette notion de contingence, de liberté humaine est réintroduite mais au prix du sacrifice d'évidentes règles logiques. Résultat des cogitations, d'un côté comme de l'autre, la pensée humaine est invitée à découvrir sa finitude.

Pour ceux qui seraient très curieux de n'en pas rester à la version édulcorée de "certains jours", il y a un livre d'où sont tirées ces minces notes, que je conseille à ceux qui ont assez de temps pour s'y pencher (l'écriture en est limpide mais la lecture un peu difficile) ; il s'agit de "Nécessité et contingence" de Jules VUILLEMIN paru aux éditions de Minuit en 1984. Et pour corser un peu l'affaire, nous finirons par des questions (un peu à la manière du koan zen, mais sans la position zazen, plutôt dans une posture pseudo-néogrecque (???), c'est à dire la tête haute mais dans les mains (???), après quoi il sera écrit que la colline ouvrira sa vogue aux marrons, où nous irons oublier tout cela, en sucrant goulûment les fraises dans la barbe à papa).

Mais avant la récréation, révisitons une dernière fois "l'argument du dominateur", le passé est irrévocable affirme-t-il, or, parmi les évènements passés, on peut se demander quelle considération particulière porter sur l'inattendu lorqu'il est advenu ? s'agissait-t-il d'un possible mal déterminé avant qu'il n'arrive (manque de jugement, de connaissance ?)  ou bien d'un évènement impossible à prévoir qui n'avait aucun statut modal lié à la possibilité ? réponse au cas par cas sans doute, je vous laisse méditer tout ça, au frais. Certes, nous avons généralement tendance à estimer les évènements passés comme nécessaires, s'ils sont advenus n'est il pas qu'ils devaient nécessairement advenir ? Question. Seul peut-être notre manque de lucidité pourrait expliquer que nous n'aurions pas saisi, à ce moment là, la nécessité de telle ou telle occurrence évènementielle lorsqu'elle est survenue... Bref et puisque il ne s'agit que de jouer, lançons encore un dé. Si celui-ci marque le six, le coup ne cesse pas d'avoir été aléatoire. La proposition qui affirmerait que notre six sorti au dé est nécessaire ne serait pas tout à fait juste, mais l'évènement semblerait bien irrévocable. Et pourtant rien n'indique que ce même évènement ait été contingent. Imaginez mainenant, que ce dé se mette à rouler sous la table : Comment prouver qu'un tel imprévu aurait pu ne pas arriver ?

Sur ce je tire ma révérence, le dernier Jean-louis MURAT est sorti depuis quelques jours, c'est évidemment une pure merveille, qui a pour titre "Le cours ordinaire des choses", (Ah ! ah ! quelle ironie !). Adieu Diodore ! Bonjour Jean Louis. "Falling in love again".

Tout le reste étant littérature...

Photo : Autre question sous les pas, doublée d'un pochoir lumineux, arrachée dans la marche, en remontant la colline du côté de la rue de Flesselles. Pas très loin de l'immeuble aux 365 fenêtres, dont pas une, a dit DIODORE n'a été posée par hasard. Vue à Lyon par une nuit ordinaire de Septembre 2009. © Frb.

Commentaires

Superbe pochoir !
Dommage que je n'ai pas le temps ces jours-ci de parcourir la Croix-Rousse en quête de streetart. Pas eu le temps non plus de lire ce billet (mais je reviendrais). Parcouru seulement…
Je confirme que le dernier Murat est excellent !

Écrit par : kl loth | vendredi, 09 octobre 2009

Pardon : je "reviendrai" (le futur, pas le conditionnel !)
C'est dur le matin, c'est pas mon heure…

Écrit par : kl loth | vendredi, 09 octobre 2009

malgré notre sortie matinale, mes neurones sont encore en sommeil !! Bonne journée.

Écrit par : patriarch | vendredi, 09 octobre 2009

Si lisses, les mots, pas sages, les pas, épices des plats, épicéas

Écrit par : Nénette | vendredi, 09 octobre 2009

@kl-loth : oui ! superbe pochoir, et là je n'étais pas en quête de street art, je rentrais chez moi dans la nuit noire quand soudain une illumination...
Ce billet est un des plus tarabiscoté qui se trouve sur ce blog ;-))
Alors même si tu ne le lis pas, je ne t'en voudrais absolument pas ;-)
Tous les derniers Murat sont excellents ! je suis quand même allée écouter celui ci en entier. Il est majestueux de bout en bout.
De toute façon entre Murat et moi comme tu sais déjà: c'est du sérieux (;-))
Merci pour tes impressions. A bientôt !

Écrit par : Frasby | vendredi, 09 octobre 2009

@Patriarch : Ravie de vous saluer quand même...
Bah je vous comprends ! C'est pas un billet pour les mâtines ça !
Et même le soir , je crois que ça ne serait pas votre tasse de thé, ce genre de billet
mais si vous voulez patienter un peu, dans quelques jours je vous emmènerai à la vogue. On oubliera tout ça ;-)
Bonne fin de journée à vous.

Écrit par : Frasby | vendredi, 09 octobre 2009

@Nénette : Si lisses les mots mais pas les questions, qui se mêlent aux pas, heureuses nos semelles à crinières de Lyon ;-)
(épicés pas ?)

Écrit par : Frasby | vendredi, 09 octobre 2009

ouh Frasby ! un vendredi soir !!!! après l'irrévocable poids de toutes les enclumes de la semaine écoulée !
j'ai imprimanté ton billet , l'ai lu , relu , et rerelu ! et macache wallouh, rien pigé ! rien de rien ! je viens de le passer à ma fille qui fait de (longues) zétudes de philo en lui disant : "tiens c'est pour toi !"
J'aurais pas dû , la v'la qui commence à m'embarquer dans Aristote qui etc etc .... Je lui dis : "euh tu m'expliqueras ça plus tard ...." . Lacheté évidente je le concède .
Je retiendrai la fin de ton billet : "tout le reste est littérature" : je crois que je vais en rester à ça , la (les ) littérature(s ).
Je me sens plus à l'aise dans ce "champ" là . (comme l'âne de mon voisin Jean dans le sien)

Écrit par : hozan kebo | vendredi, 09 octobre 2009

@Hozan Kebo : primo : Déjà, il faut pas dépenser son encre à imprimanté ces trucs là... (Vous êtes ouf mon ami !), moi même je n'ai pas d'imprimante, et suivez mon premier conseil, je ne m'en porte pas plus mal.
Deuzio: Fallait pas faire une fille ! vous savez comment sont les filles ? Les filles ça finit toujours à la faculté pis ça se fait entraîner par des gars qui pour les épater les emmènent dans des lieux malfamés où on fait de la philo, ensuite c'est l'engrenage, les filles reviennent à la maison, elles essaient d'expliquer à leurs vieux pères, le possible, l'impossible et après ça finit dans Schopenhauer, et les vieux pères qui sentent que les forces leur manquent se posent des questions sur le sens de leur vie (the meaning of life)et ils se mettent à imprimer n'importe quoi, c'est terrible ! ;-))
vous allez vous faire du mal tous les deux, pour une abstraction dont je m'amuse à moi même à essayer de tirer quelque utilité pour ma vie personnelle, que nenni, comme dit Madeleine Lacroix : "c'est pas ton Diodore à la noix qui va éplucher mes patates !"
En plus si votre fille trouve que ça tient pas debout (ce qui est possible ;-) même si le possible n'existe pas, j'aurai l'air de quoi ? moi ? Il faudra que je présente mes excuses à la naplète devant tout un parterre d'agrégés de philo ? Vous me voyez Hozan , m'excuser devant un parterre !
Terminusio : Ce qu'il fallait retenir, Hozan , voyons ! ;-)
c'est surtout que le dernier album de Jean Louis Murat vient de sortir et qu'au lieu d'abîmer votre imprimante, vous feriez mieux de l'écouter avec votre fille.
Ah la lala ! imprimer un billet pareil ! mais z' on n'a pas idée Hozan ! ;-) Enfin , puisque le mal est fait...
Santé ! "le cours ordinaire des choses" vous tend les bras saluez pour moi votre fille (et ne l'embêtez pas trop avec tout ça, laissez la vivre !
c'est mon deuxième conseil ;-)))

Écrit par : Frasby | vendredi, 09 octobre 2009

Les mots craies
créent
crayonnent
crécelles

Écrit par : JEA | samedi, 10 octobre 2009

Les mo(t)smagïques manquaient.
Les mo(t)s crées
craqueraient ?
Micros à cran.
Des craies...
Décrets.
Accros
au gris
D'octo brrr....

Les gros Nagras
Au grenier ?

Les petits encriers.
criaient

Mais en noms de
Crécelle

Celle qui crayonnait
Dans son carnet
aimait
Les Mo(t)s
Les Mus(ah!)ïques
lézards
d'ainés
aimants
rayonnant
sur Lyon
l'égaré.

Regrets.

Écrit par : Frasby | dimanche, 11 octobre 2009

Oui, haute voltige pour un matin… Pourtant on retient les questions. Et ce pochoir dans la rue.

Écrit par : ficelle | mercredi, 14 octobre 2009

@Ficelle : On ne retient que les questions, c'est bien la leçon
S'il fallait retenir le reste ... Ouhlala !
Et ce pochoir , un hasard sur ma route, mais lumineux !
Merci d'apprécier.
A bientôt !

Écrit par : Frasby | mercredi, 14 octobre 2009

Les commentaires sont fermés.