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dimanche, 22 août 2010

Intermezzo

Subitement, un matin, j'en ai marre. Je me demande quoi, somme toute ? Un peu d'amitié ce n'est pas le diable ! je suis je crois impressionné par les déserts gris que nous traversons et par le mauvais temps qui arrive.

JEAN GIONO : "Les grands chemins"; Gallimard (1951)

De profundis4.JPG

Je suis à la place du promeneur, presque gaie comme mille autres. A cet endroit du bon côté de la terre. D'ordinaire, je vis en ville sur des ponts, avec les patineurs. Peu à peu, j'ai appris à me fondre parmi les citadins. Le nombre m'indiffère. Quand je désire me fausser compagnie, je reviens au pays. La brume descend sur les demeures. Chaque jour qui décline perd des secondes de soleil. Bientôt viendront les heures d'hiver et les crépuscules orangés. Je reçois des cartes postales de dolmens, de menhirs, des Albères et du Vallespir. Des amis sont partis à pieds, chercher sur des vitraux l'empreinte de l'ancien paradis. Ils marcheront jusqu'à l'automne. J'ai reçu des nouvelles des vergers d'Amérique, du hongrois de Bretagne (?), de la fiknun' Golsone, de notre vieil Alphonse qui se morfond vers Saint Point, et de mon ami Paul, au cimetière marin. D'autres amis encore passeront par ici, à l'improviste, peut être, avant de rejoindre Paris. Pendant que les uns reviennent d'autres s'en vont. Quand les uns se retrouvent d'autres nous abandonnent. Par la maudite Golsone, ici on a trop de grenouilles, à part ça, les personnes, elles sont plutôt gentilles. C'est bête comme chou cette idée de gentilles personnes, quand on y pense. En ville, on y pense cinq minutes, on boit un verre, deux verres, etc..  Ca va, ça vient, on s'oublie, après tout. Contre la maudite Golsone, le gris berce nos routes, une table abondante, entourée de quelques uns, est bien plus chou que bête, on y revient encore. Ensuite il faut rentrer. Marcher longtemps tout seul. Diable ! on se dit "toute cette amitié manquera bien". Ici on s'empale sur le son des cloches. Dieu prend toute chose. Dieu régule les peines, Dieu est amour, Dieu est une autre haine. Le bulletin paroissial a publié trois pages sur le départ du père Panier, ils ont fait un pot au village, il y avait des grenouilles partout qui parlaient de l'humilité. Ce sont les mêmes qui chaque après midi, tantôt chez l'une, tantôt chez l'autre, s'occupent à faire courir des bruits sur les uns et les autres. J'ai croisé Madame Jeanne Mouton revenant de sa prière. Si j'oublie de lui dire bonjour, je serai brûlée demain à l'aube. Je salue Madame Jeanne Mouton. - "Bonjour, Madame, vous allez bien ?" - "Très bien !, Et vous ?" - "Ca va ! au revoir Madame !"

Au bout de deux heures de marche, on oublie ces gens là, et on s'oublie soi même. On devient le coin de terre, la ronce à contourner. En oubliant, on se retrouve, au milieu des vaches sous des sons de cloches inoffensives qui descendent jusqu'aux hameaux où là bas des hommes passent leur journée à pêcher dans l'étang. On traverse une autre grande terre, je croise un paysan, juste un hochement de tête, suffira à  l'approbation du temps, du vent et des saisons. Je coupe à travers champs. La lumière me déplace déjà vers l'autre monde. J'arrive à ce point du pays où plus aucun obstacle ne complique l'esprit. La nuit tombe trop tôt, je n'ai pas vu l'heure. Nous changeons de pays. Le silence est de profundis. Nul ne règne en aucun pays, tout est las, mais ma joie demeure.

Photo : A travers champs, ciel et terre. Esquisse d'un crépuscule à Châtenay Sous Dun, deux heures après la pluie. Nabirosina. Août 2010.© Frb

Commentaires

la vie de tous les jours, dans un village d'antan pas si tranquille que ça, où les murs ont des yeux et des oreilles !!!

Belle journée !!!!;-)

Écrit par : patriarch | samedi, 28 août 2010

@Patriarch : Je vous ai répondu ce matin même mais il semblerait que le courrier ait été mangé en cours de route peut être par un lygosome rubané perdu dans les tuyaux ? http://patriarch.free.fr/?p=1379
ou une de nos commères vorace ? Enfin ,oui, vous avez raison, il faut bien partout quelque ombre au tableau, casser un peu cette image idyllique des campagnes. Les cancaneries ici sont parfois effrayantes, et le bouche à oreille plus rapide que le ouèb. En ville les gens manquent un peu de temps pour s'occuper de la vie des autres mais pour parer ils achètent,"Voici voilà, gala et Paris truc" et au final, comme dit un proverbe de chez nous: "c'est bien partout Vendenesse".
Je vous souhaite une belle journée aussi. Merci à vous !

Écrit par : frasby | samedi, 28 août 2010

On devient le coin de terre, la ronce à contourner.

sans ramasser les mûres ?????? deux seaux cueillis ce jour d'hui de ces "vraies richesses" (mais quel boulot ensuite pour les transformer en delectabilissime "gelée" )

Écrit par : hozan kebo | samedi, 28 août 2010

"Un peu d'amitié, ce n'est pas le diable !" :

Belle balade à travers champs, ciel et terre, Frasby amie !
Heureux nous sommes d'y retrouver les Albères et le Vallespir, les vergers d'Amérique (on en croquerait!) et le Hongrois de Bretagne. D'y saluer l'ami Paul. D'y contourner les grenouilles de la Golsone et du Dunet et d'y croiser des vachissimes avec des pieds en fourchette.

Non Frasby, nous ne traverserons pas des déserts gris (qu'il grisassent sans nous !) ; ce sera le toujours beau temps pour notre vaisseau rempli d'amis. C'est Marc qui l'a dit. Et vous savez bien que quand Marc dit quelque chose...

Écrit par : Michèle | samedi, 28 août 2010

@Chimèle : C'est vrai quand Marc a dit quelquechose...
il parait (on l'a vu) que tous les fruits du vaisseau (qui est plus verger que fantôme) en ont le rose qui monte aux joues. Les framboises deviennent émouvantes, les mûrons rajeunissent, la Golsone s'enfuit sans demander son reste (Vade rétro ! la Golsone !), l'Hozan a mis sa toque, et touille la gelée avec les pieds de la vache d'à côté en fourchettes, selon une coutume bien de chez nous. Tout cela sous nos yeux ébahis, et bien sûr, j'en oublie... Nous ne traversons pas que les déserts gris, nous les contournerons comme on le fait avec la ronce. La bonne fée du grand mouvement brampunique a dit " ce sera toujours beau temps pour notre vaisseau rempli d'amis" c'est la fée qui l'a dit ! (et ce sera mieux que la maison bleue, je vous le garantis) enfin bon. Tout le monde sait que quand la bonne fée du grand mouvement brampunique dit quelquechose... ;)

Écrit par : Frasby | samedi, 28 août 2010

@Hozan kebo : Ah la mûre ! on en revient toujours à ça ;) Deux seaux ! vindiou ! j'ai l'air finaude avec ma petite écuelle qui fera juste un dessert minuscule pour deux ou trois bébés pinsons pas trop goinfres. Bon, j'avoue, sans ramasser la mûre ! d'ailleurs ça serait pas bien logique littérairement je veux dire, ça voudrait signifier que si je deviens la ronce, donc je deviens la mûre (par alliance) pour contourner la ronce, et si on suit bien comme il faut le fil de la narration il faudrait je me mange (!;-O!) au risque de faire passer les braves habitants de nos régions et nous mêmes, pour des sauvages sanguinaires et à moitié débiles, non ! tout cela serait insensé, littérairement, j'veux dire. Bon, abordons les choses sérieuses, voulez vous ? au diable la littérature ! dites nous dont comment que vous la faites votre gelée de mûrons, si délectablissime, que nous ne mourrions pas idiots ;-)

Écrit par : Frasby | samedi, 28 août 2010

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