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vendredi, 01 janvier 2016

Notre rêve

 

C'est comme un chant d'Avril au milieu de l'hiver, un parcours d'innocence qui porte en lui le notre, ses erreurs, ses travers, ses obstacles, et la dérive des sentiments inévitable ou évitable (à vous de la voir venir...) jusqu'au retour logique de la simplicité des sources qui tiennent les êtres humains en amitié, en amour, donc en vie. 

C'est là que peuvent s'ouvrir - tout à l'inattendu- des chemins étonnants, et que des êtres humains qui semblaient empêtrés se délivrent. C'est une ligne de fuite comme celle d'une fresque tendre qui se trame hors des mots, histoire de raviver les couleurs (un film en noir et blanc, tu parles de couleurs ! et pourtant, et pourtant...)

c'est une poésie rare que la réalité n'aime pas, ou semble, toute empressée qu'elle est, peu soucieuse d'entretenir, bien que le cinéaste Otar Iosseliani passant outre, dans sa liberté personnelle, nous la restitue toute entière comme un parfum d'Avril perdu, et malicieusement retrouvé, Iosseliani, suscite l'admiration de très grands (de l'immense Tarkovski à cet éternel jeune premier et génial Pierre Etaix qu'il fait apparaître dans son très récent film, "Chant d'hiver", avec Rufus le magnifique), c'est enfin une histoire chaotique qui pourrait faire la nique (si l'on peut se la permettre et pourquoi s'en priver ?) au delà des cortèges, à la terrifiante et sinistre année précédente.

C'est une histoire banale d'humains, des tout petits débutants qui doivent cohabiter entre eux (on sait tous que c'est pas facile !), c'est enfin une bonne tranche, traitée avec délices, dans un état de grâce qui pourrait vous offrir un de ces happy end qu'on ne se refuserait pas, si c'était dans la vie.

Et pourquoi ne pas la vivre encore, s'il est possible, cette vache et chienne de vie, un brin poétiquement ?

Pour ouvrir cette année 2016, ce n'est pas un hasard (si hasardeux) d'en venir au "muet", un petit film comme une carte de voeux animée par une partition sonore inouïe et des images au grain de toute beauté, une folie douce portée par toute l'irrévérence de ceux qui aiment la vie, j'espère qu'elle viendra à vos sens, comme un conte, un instant enchanteur.

Je vous souhaite une très belle année 2016,

en remerciant de tout coeur, les amis les plus proches, ceux de toujours, ceux croisés sur la toile, de loin et de plus près ainsi que les lecteurs encore nombreux, dont quelques uns fidèles, (j'en suis toujours agréablement étonnée, même si je ne le dis plus trop), merci aux bienveillants, à ceux qui ne relient pas les ragots infondés, et peaufinent les correspondances auxquelles je finirai par répondre un certain jour - quand la paix sera revenue, ici, (je n'ose plus l'espérer, mais ce serait peut-être un début et qui sait ?), pour l'instant, je ne suis plus connectée, une option désirable (le bazar par la fenêtre, pour l'image, peut charmer) offrant une parenthèse (celle-ci assez réelle) qui va se prolonger, remisant au placard le petit nécessaire et son bug de courrier ... Enfin, toutes mes excuses aux personnes dont j'ai pu recevoir récemment les courriers, qui arrivent plus ou moins, la plupart, sur un mode différé, tant qu'il existera des boitiers-camarades, et des cyber-cafés, avec un peu de patience, on pourra peut-être s'y retrouver ? ... no promesses...

 

en attendant, cueillez, cueillez, le chant D'Iosseliani...

 

mardi, 04 décembre 2012

Nous et autres

La vie est-elle seulement faite de morceaux qui ne se joignent pas ?

grace h.jpg

Nous aurions tant aimé pouvoir les assembler afin d'en trouver une forme reconnaissable, nous avons recollé un peu, quelques jointures à la surface qui se décomposeraient au moindre souffle. Nous y avons appliqué des mots comme des baumes, la terre tenait bon sous nos pieds mais nos pensées étaient plus mesurées. Nous tentions d'esquiver ces parterres qu'il faudrait toujours écraser pour se tenir ici, debout dans la lumière. Nous regardions les feuilles rétrécir, l'or de l'automne virer aux bruns foncés, une vase légère déliait les passages des boutiques. Les ponts devenaient utilitaires. Nous n'irions plus nous attarder à contempler les flots. Sous l'eau encore limpide, rien ne nous promettait que ces flots pouvaient encore rouler jusqu'à la mer. C'est là bas une force contre laquelle nous n'avons pas eu le courage de nous opposer, nous sommes entrés dans les formes prévisibles de la parole, le bruit gagne. Quelques voix nous séparent et nous ne pouvons rien réparer. 

  

Photo :  La disgrâce. Parc de la Tête d'Or © Frb 2012.

dimanche, 04 décembre 2011

Porté par la chose faite

Comment saturer ce qui est déjà saturé ?

danger.pngComment répondre ? Il y aurait soit trop à dire, (on aurait l'air embarrassé), ou rien, pas grand chose mais il se peut que ce "pas grand chose" prenne les dimensions de la montagne la plus inaccessible.

Il se peut, à l'exemple de Bram Van Velde, qu'il y ait une discipline assez serrée qui oeuvre par nécessité dans l'obsession de dépasser les limites de chaque ouvrage afin d'accéder à une forme de discernement, (un poète dirait illumination) qui s'atteint peut être, ou jamais, par des chemins simples ou sophistiqués, ces lieux communs, je vous les livre assez banals, ce sera encore exprès, tels que souvent on les entend un peu partout, on les surprend, pour signifier qu'il faut sans doute se noyer, se cogner longtemps (au delà, ça deviendrait informulable) et ne rien céder aux injonctions plus raisonnables qui rendraient à la vie sa tranquillité et glisserait la pensée dans un confort, mais cela c'est sur le papier qui n'est pas qu'en papier évidemment...

A la volée, dans un bazar urbain, (en vrai, au figuré) au milieu d'une file d'attente assez endurante, je tombe sur un journal qui reproduit un tableau de Bram Van Velde. Ce tableau me relie à un autre ouvrage remarquable, que l'on vient de me prêter, un texte publié chez Fata Morgana en 1978 réédité chez POL : une rencontre de Charles Juliet avec Bram Van Velde où l'écrivain demandait au peintre

- Pourquoi  peignez vous ?

La réponse dût tomber aussi claire pour le peintre qu'elle fût troublante pour l'écrivain

- Je peins pour tuer le mot.

C'était la même raison qui nous avait poussés à choisir la musique, d'un support à l'autre, me revient une autre phrase, un passage fulgurant où Bram Van Velde réfutant un pilier d'une philosophie enracinée se faisait affreusement lumineux, c'est par l'oxymore volontaire que je bouclerai la boucle tout en laissant la boucle ouverte, sans rien résoudre, ni espérer, ni enfermer après quoi toute messe ne pourra se dire, exactement comme on avait prévu de s'en persuader. Je cite :

 

Je pense donc je suis de Descartes est de la foutaise. Il faut dire  : Je pense donc je m'écroule.

 

Bram Van Velde entretien avec Charles Juliet 1979 by editions POL. Ecouter : un instant fulgurant, rarissime, une voix en état de grâce...


 

Text : by frasby, thème, livres et documents sonores proposés par Paul.

Remerciements : à "Raidi pour", présent, disponible, qui discrètement participe, déploie nos pistes de lectures et autres tentatives, insufflant aux thèmes choisis ici, (ou là bas), un mouvement, qui ne pourrait se contenter de débats et de livres.

Photo : Haute tension, début de décollage. Le danger inévitable ? Le danger en voie d'anéantissement ? A chacun sa lecture. 

© P./ frb/ Rp  2011.

lundi, 01 août 2011

La nuit venue

Tout ne revêt-t-il pas, dans ce qui nous exalte, les couleurs de la nuit ? C'est elle, maternelle, qui te porte, et tu lui dois ton entière splendeur. Tu te serais dissipée en toi-même, perdue dans l'espace sans fin, si tu n'avais été par elle contenue, enserrée en ses liens pour devenir chaleur et faire, en flamboyant, naître le monde.

NOVALIS (1772-1801) : "Hymnes à la nuit", éditions Mille et une Nuits, 2002.

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Ici nous devenons invisibles, mais si vivants. Un pas de plus enrobe, nous regardons courir au ciel des astres doux, mêlés à cette force, elle retourne au soleil le moulin à paroles où rien ne peut se dire à temps. Nous avons tant parlé, la parole si sûre d'elle ouvrait des trappes, les refermait, se dévidait au milieu du courant tuant l'ennui par un désordre qui soufflait dans le vent d'autan des aquilons, mais c'était encore du vent sur le vent... Et moi semblant humaine je devinais la haine que tu ne disais pas, elle conjurait la mort dans l'apparente joie qui méprise la joie. L'écho surveillait nos paroles. A qui parlions-nous de si loin sans plus nous écouter ? Harcelés par des forces ; un vieux guerrier ingrat nous opposait sa loi, il effaçait le sens à mesure que le son progressait. Notre expression abattait des troncs creux il n'y avait rien de plus triste que cette matité, les véhémences impersonnelles de l'orgueil gagnaient le jeu énoncé par le maître, nous demeurions au point mort dans notre citadelle à demi-effondrée, quelques jours à peine suffiraient pour la voir disparaître. Tu enterras tes perroquets au fond de la forêt, tu arrosas des hellébores qui ne pourraient jamais renaître,  tu les avais peut être brûlés un jour ou par ennui comme l'enfant aime frotter ses jouets sur les boîtes d'allumettes, comme l'enfant est heureux de créer pour la première fois le feu. Le feu courait sur moi et tu t'en réjouissais - ou bien c'est encore le soleil, qui devient simplement mauvais - A ce point onéreux, la voix transformait nos forces en faiblesse, plus nous parlions plus nous hâtions la possibilité d'un accident, lequel eût lieu il y a longtemps. Nous répétions à l'infini les vers de celui qui nous avait tant aimés et trouvés enlacés dans une chambre au milieu de la nuit :

Es-tu capable de me montrer un coeur à jamais fidèle ? Et ton soleil possède-t-il les yeux de l'amitié qui sachent me connaître ? Saisissent-elles, tes étoiles, ma main tendue de désir ? Me rendent-elles en retour la pression de tendresse et la parole caressante ? De ses couleurs l'as-tu parée, de ce contour léger, - ou bien est-ce la Nuit qui donne à tes atours un sens plus haut et mieux aimé ? Quelle est la volupté, quelles sont les délices offertes par ta vie, qui balancent les ravissements de la mort ?

Ici devenus invisibles, peut-être possédés, aurions nous tenu la promesse que tu me fis un jour ? Un jour sans prévenir, elle exigera son dû. Ce sera par hasard, quand nous serons certains que les fantômes s'égarent aussi loin que nos vieux sous ces pierres, là bas, profondément enfouis : "ci gît, les morts !" qu'ils y restent ! et bien non, justement. Quand tu paraîtras impeccable, mon visage te rappelera ces amusantes caponnades et le tien me demandera pourquoi j'ai désiré te fuir sans expliquer ni chercher à savoir lequel de nous deux est ce jour le plus mort. A présent, les fruits pourris de cette abondance gèleront nos coeurs au non-lieu d'une forêt évidant le désastre par la sève qui descend puis monte à l'intérieur des arbres, sans collision, dans des cernes annuels, la récente sève qui monte et descend sans répit, ce territoire restera nôtre, tel la peau criblée d'ocelles d'où tu arrachas nos prénoms par ta lame sans tendresse dans l'écorce encore tiède plus solide que la peau. Ici, on entend le halètement d'une bête siamoise, elle court sous les fougères, cherche d'autres bêtes à dévorer, jadis inoffensive, la faim l'a rendue si ogresse que cela nous remplit d'amertume et la parole de l'homme dit encore le contraire.

Quelquechose a chuté de si haut au cours d'une vulgaire ascension au plus vulgaire sommet, du plus somptueux paysage, je n'ai fait que saisir ce que la nuit daignait m'offrir jusqu'au jour désuet de la parade où tu me jetas à ces chiens. Sais-tu au moins ce qu'ils m'ont fait ? Vas donc, et dors tranquille, si tu vis, tu n'en sauras rien. Sauf si quelque rébus vient docile, en esquisser l'indice, au non-lieu d'une forêt que tu aimes, dont tu as besoin. Des figure enterrées remontent à la surface, pleurent la nuit font des ronds dans les flaques. Des petits cailloux ricochent déjà à nos fenêtres, ils sont là comme l'été on regardait les "demoiselles" flirter sur les flots des étangs, sans un bruit. C'est la nuit, elles reviennent, quand tu dors, quand ton rêve violente ces mille femmes qui hier, t'adoraient, devenaient infidèles sans raison, au non-lieu remplissant ton sommeil d'une haine et de toutes les salopes que les hommes ne savent pas comprendre. Rien n'existe sauf l'oubli dans la nuit qui hantera sans cesse. La tienne est semblable à la mienne, plus limpide que l'aurore, humide, parfois, c'est un oreiller d'herbe, d'où l'on contemple des comètes troussant les voiles d'une caravelle tandis que tu recouvres d'encre ces points d'or, purs aimants. Crois-tu les effacer vraiment ? Nos songes auront forcé longtemps des huis pour n'arriver à rien, ce rien retient en impatience l'effroi entre l'homme et la femme, dans la petite maison en papier qui s'envole sur l'aile d'une demoiselle du genre Zygoptéra pas plus grosse que mon doigt caressant tes cailloux dont le coeur bat encore. Là, juste sous ta fenêtre, à deux pas de nos bois quand ta vie va ranger sous forme de sérénade la même chose à toute heure, un masque de carnaval, un loup sur tes yeux enchanterait, il affame. Une musique fine bouclera le sillon, la pavane portant l'anagramme, ainsi finira la chanson, le temps de faire le tour d'un arbre, de goûter las, le saignement, la sève pourpre paraît dans l'entaille de ta douce et diurne balade. Crois-tu au pouvoir de la danse ? Un homme seul marche dans une forêt, ses pas sont ceux du loup de légende, ses songes la nuit, ont inventé un rythme indéchiffrable dont aucun musicien, pas même un virtuose, ne pourrait arriver à bout.

Nota :  Le second extrait (en caractère gras dans le texte, est aussi extrait des "Hymnes à la nuit" de Novalis.

Photo :  L'orée du bois du Marquis de...  (il ne veut pas qu'on le dise on va dire que c'est "mon" Marquis). Un petit chemin, juste avant d'entrer dans la nuit, lumineuse... Vu, quelquepart  entre le Mont St Cyr et le Mont ...  Euh  ? (Je ne me souviens pas, on va dire que c'est le Mont Marquis...)

©  Frb 2011.

mardi, 22 mars 2011

Court circuit

Toujours... Toujours il faut que j'aille dans les rues... Et je sens toujours quelqu'un derrière moi... C'est moi même... Et il me suit.

PETER LORRE dans "M le Maudit" de FRITZ LANG, 1931

ombres002.JPGIl est riche de ses actes, il écrit son nom il l'accole aux gens qu'il croise, et cela est sans conséquences, il ne va pas, il ne se contente pas du peu. Il ne prend pas la page blanche pour le début, c'est sa fin, il l'arrange, s'y rajoute, continue l'existence jusqu'à cette stabilité qui l'insupporte, un monde imaginé par tous ceux qui ont précédé, semblables à ceux qui suivent, des tas de gens, des têtes dont il n'a rien à dire. Un niveau machinal, des relations interchangeables à l'infini, il compose à ce jeu un grattage, il ne gratte pas, il se déchire.

Vu de loin, cela contraste avec la notion pour lui, incompréhensible de sympathie. Il élabore des figures qui de près ou de loin l'obsèdent par leur monotonie, il gratte et enterre tout dans son jardin, il rature des pages et des pages jusqu'à l'avènement d'une oeuvre d'art blanche, oeuvre purgée du sentiment, art de s'absorber dans l'espace, de recomposer le désordre avec les éléments. Il se met dans la peau d'un autre qui se trouve déjà dispersé. Le plus sûr de son initiative a déjà échoué. Il voit d'avance, une page qui manque juste au milieu du livre, une morsure au coeur de la toile, les fourches dans les cheveux des filles, un concentré déjà détruit qui contient à lui seul toute l'histoire du monde, celle des hommes et son destin à lui. Dans cette absence, il y a la voie lactée, la conquête de l'espace et l'embrassement d'une fusée avec une étoile filante, la réalité confondue dont il est pure trace,  reliant au ciel sa glaise, son fleuve et son métal, une situation de danger au terme d'un lent acharnement sans aucun but défini à l'avance.

Le cours du temps passe dans l'élasticité de journées indolentes. Aux aguets d'un langage détruit, entre les corps, des bêtes à grosse carapace ont promené sur leur dos, les dépouilles des hommes et des femmes, ceux qui n'ont pu survivre, le résultat grosso modo de toutes les guerres visibles ou invisibles, il ajoute un peu de son corps, qui meurt parfois petitement dans l'amour, se voudrait inspiré, goûtant une telle offrande, prêtant sa chair qui délivre du mal aux baisers de l'éphéméride. Il pourrait avoir honte à se faire aimer trop, sans pouvoir aimer trop lui même, ou aimant trop sa solitude qu'on dit incompatible avec l'amour. Ce on dit, est encore une foutaise. La petite idée se forme dans sa tête qui le taraude pour brûler ce qu'il reste d'obsession à oeuvrer, il voudrait contempler les petits matins, dans la joie de la course à pied, du basket ball, des descentes à vélo sans les mains, tout seul des jours entiers il joue entre des marques tracées sur le sol à la craie, et court sous un panier à essayer de réussir des doubles pas, à s'encourager dans le dribble, les mains apprenant la dextérité en compagnie de joueurs invincibles, qu'il imagine et qui n'existeront jamais. Chaque jour, lui vient de plus en plus d'adresse pour en finir avec le besoin de dextérité. Cela n'est qu'un mouvement dans l'espace juste pour oublier que la pensée peut fondre comme une savonnette. Il est cet enfant souple glissant sur une rampe d'escalier. Il parade le jour. La nuit, il pleure ce que le jour lui a volé.

Des guerres ravagent son écriture, cela engendre une sorte de poème héroïque, avec des idées monstrueuses qui chevauchent des idées sublimes, tous les mots il les plie à sa volonté dans le goût capiteux de répandre l'épuisement sur la terre, l'épuisement des êtres et des lieux jusqu'à qu'il n'en reste rien, ni dedans ni dehors, et la douceur va dans son regard, dans ses yeux bleus ou gris qui pleurent et cela fait comme une pluie de météorites plus loin, ailleurs, il verse l'alcool à brûler dans des fioles d'encre bleue ou grise, un petit feu court sur toute la surface d'une nappe, du genre toile cirée, juste au milieu, il y a un ilôt de cendre qui brille, il y voit une peau de chagrin grosse comme un pois cassé. "Pois cassé", les deux mots roulent entre ses doigts. Existe t-il encore une chose au monde qui ne puisse pas se casser? "Pois cassé", rien à faire, comment casser ce rien ? Les plus petits obstacles sont toujours les plus vains, il devra désormais lutter contre cette chose minuscule qui résiste, dont chaque jour il essaye de s'acquitter au mieux. Le combat à l'oeil nu paraît pourtant facile. Chaque jour il s'applique et chaque jour ayant échoué, après des heures passées, en bras de fer qui l'auront épuisé, il regardera le soleil se coucher, et se dira : "et merde !".

Photo: Une ombre demesurée qui précède ou qui suit on ne sait quoi, on ne sait qui, prise en flagrant délit sur les pavés aux alentours de la bibliothèque de la part-Dieu à Lyon. © Frb 2011.

vendredi, 26 septembre 2008

Perdre sa vie

murs-transv.jpg