lundi, 20 août 2012
Roman-photos
Photos : fragments d'une balade loin du monde qui est aussi, dans ce village, un beau voyage à travers temps. Ici nous sommes au XIem et début du XIIem siècle, pas très loin de Cluny, berceau de l'occident, au coeur de la pierre romane avec ses tons sublimes, sa blondeur envoûtante aux reflets d'une civilisation qui semble étrangement contempler la notre et même croiser nos préoccupations, (changement de siècle, confrontation à la violence, à la crainte, relations avec les images et les formes, fragilité de l'Homme, quête de spiritualité). Photographiés cet été, ce ne sont que quelques détails extérieurs de l'église de Bois Ste Marie ; hélas, je n'ai pu, accéder à certaines sculptures en façade, que j'aurais beaucoup aimé vous montrer, mais l'église étant actuellement en cours de restauration, ce jour là tout n'était pas accessible, ainsi nous serons un peu privés de quelques curieux modillons, en attendant d'y retourner l'année prochaine sans doute... toujours à propos des curieux modillons (et autre "green man"), vous trouverez un petit éclairage perso : ICI.
Liens et autres éclairages sur thème :
Pour découvrir en images d'autres lieux où l'art roman peut se visiter, le site universitaire du Boston College est une excellente source:
http://www.bc.edu/bc_org/avp/cas/fnart/arch/romanesque_ar...
Le circuit des églises romanes du Brionnais, en un regard qui peut même s'agrandir:
http://cep.charolais-brionnais.net/pages/roman/circuit3.htm
Une bibliographie très intéressante et vivement conseillée (peut accompagner le parcours) :
http://mydas.ath.cx/bourgogneromane/biblio.htm
Nota : Pour le jeu de l'été, (il en faut un, c'est comme à la télé), un intrus s'est impunément glissé dans notre roman-photos, le malheureux a dû se tromper d'époque. Le lecteur plein de sagacité saura-t-il le trouver ? On est au Moyen-âge, il n'y a rien à gagner sauf peut-être un séjour au royaume éternel, mais la recette de l'hypocras sera malgré tout offerte à tous les participants, (qu'est ce qu'il ne faut pas faire de nos jours... :)
Bois Ste Marie © Frb 2012
02:42 Publié dans Arts visuels, Balades, De la musique avant toute chose, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective, ô les murs ! | Lien permanent
vendredi, 05 août 2011
Affinités
A quoi bon les poètes en temps de manque ?
"Pour moi la poésie, puisqu'il est question de cela, n'est ni une question, ni une réponse. C'est impertinent sans doute de parler de sa propre expérience dans ce domaine. C'est un moment que je célèbre, moi gourmand et insignifiant. Quelle sorte de moment est-ce ? C'est le seul moment qui représente la totalité du temps, l'un qui n'a pas de second. L'important n'est pas que je sois ou non de conséquence - ce serait ridicule de présenter la chose de cette façon prétentieuse - mais l'important c'est le moment lui-même et le fait que par la médiation d'un tiers, moi ou un autre, tous deux aussi anonymes l'un que l'autre, ce moment se célèbre lui même.
Je reviens donc à mon acte. Oui je le célèbre, dans la souffrance et l'extase. Mais limité comme je suis, je ne peux le célèbrer éternellement mais seulement en instants, clignotements de mon temps terriblement morcelé, alors que je suis à bout et priant toujours pour une prolongation".
LOKENATH BHATTACHARYA (1927-2001).
Extr. "Eaux troubles, du Gange à l'Aveyron", ("A propos de la parole poétique"), paru chez Fata Morgana en 1995, recueilli dans l'ouvrage excellent (que je vous recommande vivement) :"Lokenath Bhattacharya par Marc Blanchet" (lui même poète, essayiste, photographe), éditions Jean-Michel Place en 2001.
Nous reviendrons un (certain) jour sur les textes et poèmes de Lokenath Bhattacharya écrivain bengali remarquable, érudit, traducteur d'auteurs français (Rimbaud, Descartes, Romain Rolland, Molière, Sartre, Char) et grand mélomane, sans doute le plus traduit en France depuis Tagore, que Henri Michaux fit découvrir aux lecteurs européens dès 1976. L'écriture lumineuse, mystérieuse de L.Bhattacharya, n'est pas sans profondes affinités avec celle d'Henri Michaux, directe, simple, émerveillée, Bhattacharya se définissait lui même comme "Le cousin bengali d'Henri Michaux". En lisant les deux auteurs parallèlement, les ramifications, les témoignages de leur pudique correspondance, on est assez troublé par l'évidence de cette rencontre. L'écriture de Bhattacharya est violente, charnelle, évoluant toujours dans un univers aussi craintif que fervent, lui même a défini les écrivains comme les enfants gâtés du langage. Extrait choisi :
Si la langue n'existait pas, ces écrivains, qu'est-ce qu'ils auraient pu faire ? Rien du tout ! Moi aussi, je suis un enfant gâté du langage : je parle beaucoup trop du silence - qui est une chose essentielle pour moi. Mais le silence, on ne peut pas l'expliquer.
"Créer un chemin dans le vide" est une chose qui existe autant pour Lokenath Bhattacharya que pour Henri Michaux, tous deux ont des sources d'inspiration communes, entre autres, la chambre, les chemins (le vide bien sûr), les débris, une curiosité sans limite, et les dessins de Michaux inspireront à L. Bhattacharya un étonnant ouvrage "Sur le champ de bataille des dessins de Michaux" où le texte écrit en Bengali (traduit par France Bhattacharya) fait subir une transformation aux formes proposées par Michaux, donnant à chaque tache un nom, engendrant un dialogue à distance entre deux artistes issus de cultures différentes, les textes dépassent la simple interprétation en roue libre, ils puisent très au delà dans les mythes indiens, la danse, les musiques, les prières toute leur inspiration pour peser les enjeux de la vie et de la mort, (le champ de bataille, donc) lutter contre ces rythmes que tout semble opposer jusqu'à trouver un apaisement progressif jusqu'à l'union ou la révélation d'une parole devenue fertile. (champ de désir ? Peut-être). Autre affinité que nous partageons ici avec Bhattacharya, un certain parti pris artistique, ses paroles ne sont ni une posture, ni un effet de style : le goût de sa quête insatiable, sa recherche jamais satisfaite l'a toujours confronté à la limitation de l'humain, qu'une vie entière n'aura pas suffi à instruire. Autre extrait choisi :
Moi, j'écris ainsi, parce que je suis ignorant [...] On a finalement des visions qui ne sont pas si spontanées. Elles sont dictées. À quoi bon essayer ensuite de se présenter comme un intellectuel, un grand monsieur quand on est rien !
A noter, un autre ouvrage admirable, qui se parcourt avec délectation, fruit d'un lien artistique entre Lokenath Bhattacharya et Pierre Alechinsky, l'oeuvre s'appelle "Fleur de cendres" :"Une encre de chine au pinceau parée de cendre", vraiment beau. Hélas, je crains que cet ouvrage soit difficile à trouver, quoique en cherchant bien... Sinon vous pouvez ouvrir (les yeux fermés et grands ouverts) les autres livres de Lokenath Bhattacharya, tous éblouissants.
Vous trouverez une piste bibliographique, en lien ci-dessous :
http://www.librairiedialogues.fr/personne/lokenath-bhatta...
Ici, encore une passerelle d'Orient à Occident :
http://www.wmaker.net/shanti/Un-poete-Indien-amoureux-de-...
Photo : Acacias vus sur la route boscomarienne. Des formes végétales musicales, légèrement orientales, (du moins ai-je dû un instant les imaginer telles... Ou bien c'est peut-être que j'aimerais contempler l'acacia versifié en poème bengali ?). J'ai choisi l'acacia parce qu'il en existe 1 500 espèces à travers le monde, alors qui sait si elles ne pourraient pas un jour, elles aussi, se croiser ?
Photo : © Frb 2011.
23:30 Publié dans ???????????, A tribute to, Arts visuels, Balades, Correspondances, Mémoire collective | Lien permanent