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lundi, 12 mai 2014

Secret life

Au-delà de ce qui arrive ou n'arrive pas, l'attente est magnifique. 

ANDRE BRETON

pays de neige b.jpg

 

On trouve un silence très troublant dans le Rivage des Syrtes de Julien Gracq où une antique lagune baigne dans l'attente à la lisière des mondes, dans le silence, une forme d'énonciation plus évidente:

 

 

Le silence est témoin absolu.

 

 

 

Photo: A la lisière des mondes (et des merveilles...).

 

 

Très loin d'ici.© Frb 2014

samedi, 26 mai 2012

Chut... !

Les bruits associés au jour sont toujours interdits la nuit, les femmes par exemple, ne moudront pas le grain après le crépuscule [...] 

MARY DOUGLAS : "The Lele of Kasaï" in "African Worlds : Studies in the cosmological Ideas and Social Values of African Peoples", London 1963.

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Dans son livre remarquable, "Le paysage sonore" R. Murray Schafer a longuement expliqué que l'intérêt véritable d'une législation contre le bruit ne résidait pas dans son degré d'efficacité, depuis le Déluge a -t-elle jamais porté ses fruit ?"  S'interroge-il... Même si nous savons, en revanche, que cette législation permettait d'établir des comparaisons entre les phobies sonores des diverses époques et sociétés. Les sons proscrits ont toujours eu une puissante résonance symbolique. Les peuples primitifs, par exemple, conservaient précieusement leurs sons tabous et Sir James FRAZER dans  son ouvrage monumental intitulé "Le Rameau d'Or" (1890-1915), consacre un chapitre entier, à ce sujet. Il raconte qu'il existe des tribus où la terreur empêche de prononcer le nom de certains peuples, le noms des ennemis  ou ceux d'ancêtres défunts. Ailleurs, prononcer son propre nom comporterait le danger de priver un individu de ses forces vitales. Proférer ce son, le plus personnel, soit-il, serait comme tendre la nuque à l'exécuteur...

Sur le plan des pratiques anti-bruit, plus curieux sont les rituels de certaines tribus qui réservent par crainte de la colère divine, la production de certains sons à des périodes temporelles précises (cf. plus haut, le texte de Mary DOUGLAS ici, la suite) :

Les bruits du travail semblent créer des relations dangereuses entre le village et la forêt. Les jours ordinaires, les esprits dorment au plus profond des bois et ne seront pas dérangés, mais les jours de repos ils sortent et approchent parfois du village. ils seraient furieux d'entendre des coups frappés dans la forêt ou des martellements dans le village.

L'habitude chrétienne d'observer le silence pendant le Sabbat ne doit pas être étrangère à cette origine. Traditionnellement, les sons tabous, prononcés de façon sacrilège, sont toujours suivis de mort et de destruction, cela est vrai du mot hébreu Yahvé. En France, les textes liturgiques n’utilisent pas la vocalisation Yavhé, mais elle apparaît dans les traductions de la Bible - qui ne sont pas normatives pour la liturgie - ou des chants. D'après une argumentation scripturaire, le document affirme : 

"L’omission de la prononciation du tétragramme du nom de Dieu de la part de l’Eglise a donc sa raison d’être. En plus d’un motif d’ordre purement philologique, il y a aussi celui de demeurer fidèle à la tradition ecclésiale, puisque le tétragramme sacré n’a jamais été prononcé dans le contexte chrétien, ni traduit dans aucune des langues dans lesquelles on a traduit la Bible."

Les chrétiens revendiquent la possession de plus de vingt quatre mille prétendus "originaux" de leurs Saintes Ecritures en version grecque, et pas un seul parchemin ne fait mention de Jéhovah.

Idem pour le chinois Huang Cheng (cloche jaune) si ce terme se trouve proféré par un ennemi  il peut (dit-on) causer l'effondrement de l'Empire ou de l'Etat. Les Arabes avaient beaucoup de mots pour Allah qui possédaient les mêmes redoutables pouvoirs, (ils se prononcent dans un souffle) : Al-Kabid, Al Muthill- Al Mumit, et quatre vingt dix-neuf autres encore.

Ensuite il y a bien sûr d'autres mots tabous dont la prononciation semble sacrilège comme dans certaines manies plus ou moins graves ou autres  névroses obsessionnelles, par exemple une personne ne pourra pas prononcer ou entendre le mot "Maladie", persuadée que le simple fait de sortir le mot de sa bouche serait un risque d'attraper cette maladie, ou de la transmettre, cela plus subjectif...

On pourrait se demander quels sont les sons tabous unanimement reconnus, et inspirant la crainte dans notre monde contemporain. La réponse n'est pas si évidente. R. Murray Schafer mentionne la sirène de la défense civile, que toutes les cités modernes connaissent bien, mise en réserve pour le jour fatal, où son cri unique sera suivi par le désastre. Il y en existe sans doute d'autres, même si nos rituels avec Dieu ou les divinités sont un peu plus discrets que ceux de nos lointains ancêtres ou tribus des forêts, il est certain qu'un lien profond unit, lutte, contre le bruit et son tabou, car dès l'instant où un son figure sur la liste des proscrits, il lui est fait l'ultime honneur d'une toute puissance. C'est la raison pour laquelle les plus nombreuses et plus mesquines interdictions de la communauté resteront à jamais inefficaces.

Enfin, pour conclure un de ces nombreux chapitres sur le paysage sonore, nous suivrons R. Murray Schafer dans son cheminement, pour affirmer avec lui que le pouvoir absolu, est le silence. Comme le pouvoir des Dieux est d'être invisible. Vrai encore que le mot "Silence" est d'une incroyable douceur à prononcer et semble une source à entendre d'un genre d'allitération proche glissant sans heurt, clairement mise en espace, comme le fût, le plus implacable "Silenzio" de JL Godard hurlé au mégaphone, dans le film "Le Mépris" suivant la logique, du "Camera" et "Motore", rythmant la réalisation du film, le mot "Silenzio" non seulement referme le film mais rend les acteurs à la vie, laissant le spectateur seul en plein ciel devant le visage d'une statue, porté par la musique de G. Delerue."Silenzio" n'est pas le silence, c'est la fin du mépris. Le silence. Ce n'est que par lui et pour le trouver que peut se clore toute réflexion sur les sons dignes de ce nom.

 

 

Sources bibliographiques :

R. MURRAY SCHAFER in "Le paysage Sonore" éditions JC Lattès, 1979,

Sir James FRAZER in "Le Rameau d'Or" (Manuel d'étude des croyances et civilisations antiques en 12 volumes), édition abrégée, P. Geuthner, 1923.

Photo : Variation pour une oreille et son silence, un léger flou artistique émanant d'une vraie sculpture posant pour Paul sur le plateau de la Croix-Rousse à Lyon entre le Grand Boulevard et la place Tabareau, pas loin de la rue Denfer, (Rochereau). Cette mystérieuse oreille monophonique privée de corps installée sur une place minuscule intrigue énormément ceux qui la croisent. Je ne connais toujours pas le nom de l'artiste (nous cherchons) qui a crée cette oeuvre emblématique, que personnellement j'aime beaucoup puisque le son m'importe plus que l'écriture et l'écoute me parait plus intéressante que la parole, je sais juste que l'oeuvre a été portée près de ma rue le jour où j'envisageais à la fois d'emménager dans ce quartier et de me remettre à la musique, détail personnel de peu d'intérêt, quoique le mot "Oreille" n'est pas sacrilège au regard d'une fascination plus vaste pour tout ce qu'elle garde au secret. Cette incongruité urbaine invite à plus d'un titre car je rêve souvent à cette oreille (de marbre ? Non.) écoutant patiemment les murmures des passants et gardant précieusement les bruits de la rue dans sa pierre, elle n'en dira rien à personne, jamais, c'est assez consolant, pourtant il me semble qu'en jouant de cette oreille  comme d'un instrument elle pourrait sonner divinement et peut être nous rendre les murmures de la ville. Oreille muette comme une tombe, prenons de la graine au contact de cette silencieuse qui nous happe par sa discréte présence et l'entière confiance qu'elle inspire...

Remerciements à Paul pour la photo et pour m'avoir prêté son "Rameau d'Or" ce n'est pas une métaphore, rien que de la culture et si c'était une métaphore, je n'en soufflerai mot car je ne doute pas que l'autocensure m'interdirait d'écrire ici ces mots qui ne vont pas dans la bouche d'une fille élevée chez nos droites religieuses. Ces dames avaient, si mes souvenirs sont bons inscrit au tableau une liste noire d'une vingtaine de mots à ne pas prononcer au sein de l'institution même pendant la récré, la gresso vecha de Soeur Marie-Claude, punissant de six heures de colle (sciences physiques, al spoela!) accompagnées d'un vigoureux tirage d'oreille, tout élève qui aurait proféré les mots tels : patuni, dreme, noc, ulc, cireh, troufe, beti, bredol, etc etc... Mais, fermons ce moulin à paroles ! Nos oreilles sont de Lyon pas de Loué, nom de diou nom de non !

©Paul-frasby 2012

vendredi, 04 novembre 2011

Sound of silence

Un claquement de doigt, un bruit de tonnerre :
et il ne reste du monde extérieur qu'un silence sans fond,
un silence qui ruisselle sur nous
comme un torrent vigoureux et bienfaiteur…

Jack KEROUAC

sound of nb.jpg

Tant que le particulier illustrera le thème du silence entendu par l'homme occidental, jouant contre lui même et contre un désarroi ; on ne pourra pas reconnaître, à ce point délicat, nos limites. Ou simplement les limites de nos capacités d'écoute, il est vrai qu'on ne nous a pas spécialement appris à considérer  le silence ou bien on l'aura fait sans trop de nuances, sous forme d'abord (ça commence à l'école) de discipline puis ensuite comme une chose assez floue n'étant au fond qu'un phénomène qui viendrait toujours s'opposer au bruit, au mieux un espace de relaxation, des choses du genre, etc...  L'abandon où le silence déplacerait la perception au delà, (ou dans l'intervalle d'une musique), c'est différent, nous jetterait, à peine plus loin et déjà nous nous sentirions menacés.

Depuis des siècles, nous devons nous contenter de cela, et bien après celui de Galilée, nous en éprouverons un vertige, c'est le même qu'autrefois. La contemplation du silence absolu de l'homme occidental, redoutant ses ténèbres, on le sait au moins depuis Pascal que le silence est négatif et toujours effrayant. La formule est indémodable :

Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie.

Ce genre de cri à peine audible apparût lorsque l'infinité de l'espace fût enfin révélée via le télescope de Galilée. Bien plus tard, par goût de la recherche, pour l'expérience, on enferma des êtres humains dans des pièces parfaitement insonorisées. Ceux qui entrèrent pour la première fois  en sont ressortis tellement effrayés, qu'ils crurent avoir été enfermés un court instant dans un cercueil. Cette hantise ancestrale revenait, ils ne pouvaient s'en alléger même en sachant, touchant la preuve qu'il ne s'agissait que d'un artifice, une expérience fort brève, ils savaient raisonnablement qu'une pièce isolée (cf. l'expérience du caisson d'isolation sensorielle) ne se refermerait jamais de la même manière qu'un cercueil. Malgré cela, d'instinct, ils pouvaient encore éprouver cette frayeur, de rester là, vivants en présence de la mort, "retenus" pour l'éternité, fermés à l'intérieur. Ce serait la pire mort, comme nous revient, parfois au milieu de la nuit, cette peur superstitieuse (l'enfant ne l'ignore pas), d'être enterrés vivants et de racler ses ongles contre le bois sans que jamais personne ne nous entende hurler. Le silence pourrait-il provoquer cela ? (Rassurez vous, je n'ai pas la réponse).

Ceux qui ont expérimenté les premiers, ces pièces insonorisées ont décrit leur sensation en sortant, (cela une fois au moins, leur traversa l'esprit qu'on pouvait les lâcher et les laisser mourir seuls, là dedans, comme jetés au néant d'où ils ne sortiraient jamais). Toujours pour l'expérience, on leur demanda de parler à l'intérieur de cet espace, il était question de savoir comment ils entendraient le son de leur propre voix, parfaitement isolée du reste du monde, comment tout cela s'écoutait. La plupart ont relaté que lorsqu'on parle dans cet espace, le son semble tomber directement des lèvres au sol, et les oreilles ont encore du mal à capter l'éventualité qu'il pourrait y avoir, au même moment autrepart toujours de la vie sur terre. Quelque chose bruisserait-il à l'extérieur de ce lieu isolé ? Tous ont eu quelques difficultés à l'admettre tant qu'ils n'étaient pas sortis de la pièce. Lorsque John Cage entra pour la première fois dans une pièce insonorisée, il entendit pourtant deux sons : l'un aigu, l'autre grave. Il relate :

Lorsque je le décrivis à l'ingénieur du son responsable, il m'expliqua que le son aigu était celui de la tension de mon système nerveux, le grave, celui de la circulation de mon sang.

John Cage arriva alors à la conclusion suivante, un manifeste qui ne manque pas de toupet :

Le silence n'existe pas.

Il y aura toujours quelque chose pour produire un son. Lorsque l'homme se place au centre de l'univers, le silence ne peut-être considéré que comme approximatif, jamais comme absolu. C'est à partir de cette révélation d'abord éprouvée in situ, que John Cage intitulera avec humour son excellent  livre  "SILENCE", désirant surtout attirer l'attention sur le fait que pour l'homme moderne, l'usage de ce terme se doit d'être encore ironique. Avant John Cage, on pourra trouver chez Edgar Allan Poe, déjà l'esquisse de cette idée dans "Al Aaraaf", il écrivait :

Le calme, nous l'appelons silence qui est le mot le plus simple de tous.

Il faudrait ajouter que la négativité du silence a fait de ce silence dans l'art occidental, l'élément le plus chargé de virtualité parfois obscurément/ confusément, tout dépend, (sujet peut-être à suivre). On pourra scruter ce silence et le revoir à l'avantage, l'enseigner autrement que par toutes sortes d'idées reçues (insignifiant , négatif, vide, absence, néant, négation, lâcheté, camouflage, fuite, discipline, etc...) quand on s'apercevra peut être que ce silence est en très grande partie, perdu : essayons de retrouver dans une ville par exemple, ce silence respectable et vital et l'on se heurtera d'évidence, à une sorte de peine elle aussi perdue. Cet art du silence ne semblant toujours s'envisager comme enseignement véritable qui pourrait considérer le silence comme une valeur équitable à toute forme de conversation ? C'est un regret, le silence contient sans doute hors du cadre, une liberté qui dépasse nos conversations (que cela soit dans la communication avec les autres ou dans nos tergiversations mentales, peu ou pas communicables). Le silence inapte à trouver un alphabet connu qui nous convienne, nous réunit pourtant, au moins autant que la parole aura le pouvoir de créer recréer des liens sans avoir forcément à se liguer contre le silence.

L'esprit peu formé par les sons, abordera d'une moindre écoute ce qui  est pourtant une invitation, ("sound of silence"), on vivra trop souvent le silence comme une agression et replets de notre éducation, il sera toujours préférable, (à notre entendement et par confort), de le couvrir de bruits. Sans toutefois l'affirmer avec certitude, il me semble que ce n'est pas le silence qui serait trop à craindre aujourd'hui, mais davantage la valeur positive qu'on accorde généralement aux bruits (plus souvent encore à l'importance de nos conversations) ; ou à cette pensée qui ne sait se retenir quand elle ne peut plus librement osciller (cf. Paul Valéry), entre le sens et le son, et vient imposer avec assurance une incessante réinjection de nappes taraudantes produisant un bruit de fond, enivré de lui même, cela pour parer, on le pense, à l'angoisse éternelle décrite en peu de mots par Pascal et bien d'autres.

On ne redoutera jamais assez la pensée qui ne se fiant qu'au pouvoir des mots, (réfutant le silence et croyant démasquer en lui un ennemi), ne fait que révéler les limites de sa perception. Tout cela, n'est pas condamnable car, presque rien à ce sujet ne nous aura été appris. Nos apprentissages se font avec l'image, l'image et les conditionnements reviendront toujours au galop (le bon sens près de chez vous) quant à prétendre qu'ils découleraient d'un "naturel" est une autre question. Les enfants évoluent au commencement de leur éducation avec les livres d'images, mais c'est assez idiot de rappeler qu'avant de regarder des images, l'enfant prit sa forme définitive dans un refuge à peu près silencieux (et à peu près sonore), paradis perdu bienheureux pour certains, mystère incommensurabe pour d'autres, bref, ce fût toujours un silence (comme l'entendait John Cage) qui prépara de longs mois le petit d'homme à être propulsé (bruyamment) dans un monde de bruits.

Sommes-nous en train de perdre jusqu'à la notion de silence ? De perdre le silence tout court. C'est possible, ignorant au regard de notre savoir présent (et de nos sociétés recevant de plus en plus d'outils destinés à la perception) ce que le silence contient en informations. Tout semble prêt aujourd'hui pour encore plus le recouvrir. Mais je ne ferai pas de prosélytisme, quand déjà parler du silence est en soi une aberration, bien que ce billet ne traite pas de silence, exactement, (puisqu'il n'existe pas) mais d'un certain déséquilibre qui se crée à toujours construire sa pensée à partir d'une opposition.

Enfin, pour terminer, ("Sound of silence", étant un thème inépuisable), il pourrait y avoir tant de développements que l'embarras du choix dans ce désordre, me poussera paradoxalement encore vers la musique et puisqu'il faut choisir, j'aurais une pensée pour Anton Webern qui composa, (on pourrait le croire), avec une gomme, et mena dans sa création musicale, le silence à sa beauté la plus extrême, une recherche artistique patiente, on pourrait dire, jusqu'au bout du silence ? Peut être... Ironie encore, quand on sait que sa vie s'acheva dans la détonation d'un fusil. Est ce la détonation qui se donne d'ordinaire naturelle contre le silence ? Oui, et non. pour ce cas c'est une triste méprise. A quelques détails près, on dit qu'Anton Webern le soir du 15 Septembre 1945, sortit sur la terrasse de sa maison d'accueil pour fumer un cigare, et  apprécier la nuit. Oubliant le couvre-feu, il fût tué par une sentinelle américaine, par erreur, "Et pan !", il en fût fini de la belle écriture à la gomme. L'esthétique novatrice d'Anton Webern fut souvent comparée aux petits haïkus japonais dont certains auteurs devaient mourir plus volontiers d'ivresse et de noyade par inattention en désirant (c'est un exemple) toucher la lune dont le silence épousait les glougloutement d'un lac ou le reflet gourmand d'une rivière un peu (trop ?) profonde.

De Webern à Kerouac (en passant par le pont au dessus de l'eau où vont les objets flottants silencieux (poissons, algues, origamis, bref, ces haïkus qui ne l'ont pas encore ramenée) il n'y a qu'une passerelle qu'on franchira je l'espère, cette fois sans distorsions, ce blog s'adresse aussi, on ne l'oublie pas, aux lecteurs ou amis en majorité silencieux, qui manifestent sans qu'on en ait la "preuve" (a-t-on besoin de preuve ?), une présence et participent, en silence... Il se peut que parfois sans aucun point d'appui, (et sans flagornerie), on ressente étrangement les mutiples formes de cette participation, improbable enchantement d'un art pourtant réel, de la présence qui ne se dit... Le silence n'a rien d'une bonne planque, il n'a pas tant besoin de se trouver à l'étiquette, verrouillé de définitions, n'étant pas strictement ou ceci ou cela, il ne s'opposera pas non plus à la parole qui n'a jamais trop de difficultés à le réduire à néant ou à le déprécier (le contraire moins envisageable ne se ferait qu'au prix inestimable d'une certaine dépossession). Voici, après ces papotages, la perle tournoyant sur une goutte de pluie, fermant la boite à camembert de la petite crèmerie, les porte-voix et nos boudoirs se trouveront légérement balayés, (une seconde, c'est très peu), par l'oreille du grand voyageur.

 

 

Le son du silence
est toute l'instruction
Que tu recevras

 

 

Photo :  Vestiges (extrait) rencontrés à Cluny (fondée en 909 ou 910), une image simple perdue à la fin de l'été, où le silence roulant encore entre les pierres suggére les figures béates ou les grimaces des sculptures créees par les artisans anonymes du Moyen-âge. Leur parole se fige là, au secret, fidèle à celle des moines recopiant les prières. Ici la clarté et des ombres, le silence profond de l'édifice secoué aux heures ouvrables par les exclamations des touristes, et parfois du vieux rire de la révolution venant avec fracas presque tout démolir, (vingt cinq ans de démolition d'abord tonitruante puis étonnament silencieuse), le bruit et le silence tout entiers confondus, et plus loin, qui sait ? Le frémissement d'une plume d'oiseau ouvragerait les fleurs d'un chapiteau qui se dore au soleil, garde peut-être sous les pierres, la mémoire impossible des voix qui n'ont jamais pu revenir. Photographié, cet été de cette année là.

 

©Frb 2011.

dimanche, 27 mars 2011

Prélude aux secrets de la création

Je fais mon oeuvre comme je dois, comme je puis, voilà tout ce que je peux vous dire.

Claude DEBUSSY  (mais ceci n'est pas une oeuvre de Claude Debussy)


 

 

vendredi, 30 octobre 2009

Haute fidélité

"Il fût tiré de sa méditation par un grincement venant de la remise. C'était la girouette qui tournait sur le toit. Et ce changement de vent annonçait une pluie diluvienne".

THOMAS HARDY : "Far from the madding crowd". Editions : Oxford university press, 2002.

clefs.JPG

La campagne est généralement plus hi-fi que la ville. (Il y a deux termes, hi-fi et lo-fi). Dans l'environnement hi-fi, le signal bruit est satisfaisant. Le paysage sonore hi-fi est celui dans lequel, chaque son est clairement perçu en raison du faible niveau sonore ambiant. Dans un paysage sonore hi-fi les sons se chevauchent moins fréquemment. On a chez Alain FOURNIER dans "le Grand Meaulnes" plusieurs exemples, d'images qui donnent précisément une idée de l'acoustique de la campagne française à son époque : "Le bruit d'un seau sur la margelle du puits et le claquement d'un fouet au loin". Le calme d'un paysage sonore hi-fi, permet donc d'entendre plus loin, de même qu'un paysage rural offre généralement des panaromas plus vastes. La ville a réduit les possibilités d'audition et de vision opérant ainsi l'une des modifications les plus importantes de l'histoire de la perception. Dans un paysage sonore lo-fi, les signaux acoustiques individuels, se perdent dans une surabondance de sons. Il n'est plus réellement possible d'entendre un son clair. La perspective, dans une cité moderne, s'évanouit à un carrefour. La distance est abolie, seule reste la présence car il y a des interférences sur tous les circuits. Les sons ordinaires devront être de plus en plus amplifiés. Dans un paysage sonore hi-fi, le moindre changement peut transmettre une information vitale ou intéressante, l'oreille humaine est en alerte comme celle des animaux. Dans la nuit silencieuse, la vieille dame paralysée d'un récit de TOURGUENIEV entend les taupes creuser sous la terre. "C'est bon signe, n'y pensons plus" se dit-elle, mais ces bruits lui rappellent aussi le poète, GOETHE, l'oreille collée au sol :

"[...] Que mon coeur sent de près l'existence de ce petit monde qui fourmille parmi les herbes, de cette multitude innombrable de vermisseaux et de moucherons, dans toutes formes, que je sens la présence du tout puissant qui nous a crées à son image [...]" (Extr. GOETHE, "Les souffrances du jeune Werther).

De près comme de loin, l'oreille répond avec une sensibilité de sismographe. Du temps où les hommes vivaient très souvent isolés ou se regroupaient par petites communautés, les sons ne se gênaient pas les uns les autres. Chacun restait au sein d'un halo de silence, et le berger, le bûcheron, le paysan, savaient lire dans le paysage, le moindre changement.

Vous aussi, (grâce à certains jours), vous pouvez comme en pleine campagne écouter la chouette hulotte chanter depuis un grand arbre (tout en surveillant le passage du moindre petit mulot. Pas vous, voyons ! la chouette ! quoique...). Pure Hi-fi par ICI.

Ou découvrir le chevreuil (capreolus capreolus), monologuer dans la forêt sous les grands feuillus : ICI encore.

Et enfin (un exemple parmi d'autres), découvrir qu'il n'y a pas une différence si énorme entre les très urbains Résidents et autres animaux des champs, des bois et de la ferme, dont notre sanglier : ICI enfin.

Sources tirées de : R. MURRAY SCHAFER: Le paysage sonore". Editions Lattès 1970. (A suivre...)

Autre lien puisé à la bonne source de R.MURRAY SCHAFER : http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/10/17/2f...

Photo: Au bout d'un chemin, une vieille maison, (côté grange ou remise). Vue au hameau dit "les clefs", longeant un étang du même nom (traversé entre les bruissements par de microscopiques insectes). Nabirosina. Octobre 2009. © Frb.

dimanche, 20 septembre 2009

Schizophonie

piano.JPGSachant que le préfixe grec "schizo" veut dire, fendre, séparer, et que "phôné" signifie voix (en grec), la schizophonie serait selon RAYMOND MURRAY SCHAFER, la séparation d'un son original de sa transmission ou de sa reproduction acoustique. Au départ, chaque son étant original, il ne se reproduisait qu'à un seul moment et dans un seul lieu à la fois, indissolublement lié au mécanisme qui le produisait. La voix humaine ne voyageait pas plus loin qu'à la limite permise du cri. Les sons impossibles à reproduire étaient uniques, inimitables. Ils pouvaient se ressembler comme les phonèmes d'un mot que l'on répète mais n'étaient jamais identiques. La preuve a été faite de l'impossibilité physique pour l'être le plus rationnel et le plus réfléchi à reproduire un seul phonème de son propre nom deux fois de la même manière, (si vous en doutez, mettez-vous à l'épreuve d'essayer, si un seul d'entre vous y parvient, je brûle ce blog et rejoins les bénédictine de Chantelle). Depuis l'invention des techniques électroacoustiques de transmission et de conservation, tout son, si infime soit il, peut être envoyé dans tous les coins du monde ou gardé sur un disque, bande magnétiques, fichiers son, etc... Nous avons dissocié le son de sa source, nous l'avons arraché à son orbite naturelle. Nous lui avons donné une existence amplifiée et indépendante. Le son de la voix par exemple, n'est plus lié à une cavité du crâne, il est bien libre de surgir de n'importe où dans le paysage sonore. Il peut jaillir de millions d'orifices dans des millions de lieux publics ou privés, ou être conservé en vue d'une diffusion postérieure.

"Nous n'aurions pas conquis l'Allemagne sans [...] le haut-parleur", écrivait HITLER en 1938. Nous savons aussi que l'expansion territoriale des sons post-industriels a servi les "ambitions impérialistes des nations occidentales". Le haut-parleur fût aussi, une invention impérialiste, car il répond au désir des autres par la voix. Tout comme le cri est porteur de détresse, le haut-parleur peut aussi communiquer l'angoisse. Je n'ose pas évoquer en détail, ce que les futurs paysages (impérialistes ?) nous réservent, encore une idée piquée aux artistes, sans vouloir jouer les rabats-joie, je me demande ce que ceci donnerait soudain multiplié à l'échelle d'une ville et toujours du point de vue du récepteur parcourant son paysage sonore... (So funny vraiment ?).

R. MURRAY SCHAFER, compositeur canadien né en 1933 (ne pas confondre avec Pierre SCHAEFFER), a publié en 1977 (Paru en 79 en France), un ouvrage "Le paysage sonore",  (Original :"The tuning of the world"), où il développe ce concept de "paysage sonore" (ou "Soundscape"), c'est là que se lit aussi pour la première fois ce terme de "Schizophonie" : "En forgeant ce thème de "schizophonie", j'ai voulu souligner le caractère pathologique du phénomène voisin de schizophrénie, je le chargeais même du sens d'aberration et de coupure de la réalité, en fait le massacre opéré par les gadgets Hi-fi, non seulement contribue à aggraver le problème Lo-fi mais crée un paysage sonore synthétique dans lequel les sons naturels sont de plus en plus remplacés par des sons artficiels et où les signaux qui ponctuent la vie moderne ne sont plus que des substituts fabriqués par des machines"...

Nota : Evidemment ce texte écrit en 1977, 78 pourrait encore se discutter, ou plus précisément s'ajuster en 2009, où l'environnement sonore s'est peut être encore densifié (tout autant que la schizophonie ? Question.). Par ailleurs, R.MURRAY SCHAFER, qui composa et enseigna, pût aussi mettre sur pied fin des années 60, (grâce à des subventions de l'UNESCO et de la Donner Canadian Fondation) : le "World Soundcape Project", un projet mondial d'environnement sonore, (rattaché à l'université Simon Fraser) consacré à l'étude des rapports de l'être humain avec son environnement acoustique. Ce nom même de "World Soundscape Project", résume à lui seul l'idée qui est au centre du projet : en dehors de nos sens, un "paysage sonore", n'a pas plus de réalité ontologique qu'un paysage "classique", mais le terme permet de désigner la façon dont les êtres perçoivent leur environnement. En tant que récepteur, il est admis que les individus agissent sur les sons " On part du principe que les individus agissent sur les sons dès qu'ils pénètrent dans un espace donné. Produit par l'homme le paysage sonore est la manifestation acoustique du lieu. Les empreintes sonores, analogues aux particularités d'un paysage sont des objets sonores uniques bien localisés. L'objet sonore fût bien décrit par Pierre SCHAEFFER comme "Un objet auquel peuvent s'appliquer nos sens et non un objet mathématique ou électroacoustique à synthétiser". Il s'agit de la plus petite particule autonome du paysage... mais de cela, je parlerai peut être un autre (certain) jour....

Source : R. MURRAY SCHAFER : "Le paysage sonore". Editions J.C Lattès. 1979.

A écouter sur Arte radio : "Une rue à l'oreille de MURRAY SCHAFER" (de Anthony Carcone) où le compositeur M.S. commente le paysage sonore d'une rue parisienne, en ambiance et en anglais : http://www.arteradio.com/son.html?22427

Photo : Paradoxe de la schizophonie: le piano muet de l'avenue Salengro, tandis que partout les rues et les murs bruitent... Vu à Villeurbanne en Septembre 2009. © Frb.

dimanche, 17 mai 2009

Mur du son

"Un son de silence à l'oreille surprise"

EDGAR ALLAN POE, "Al Aaraaf"

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Comme un dimanche ...

Il était autrefois des sanctuaires protégés où tous ceux que le bruit avait épuisés se retiraient pour retrouver la paix de l'âme. Ce pouvait être au fond des bois, en pleine mer, ou sur les pentes d'une colline, (qui ce jour, ne travaillait pas). On levait les yeux vers le ciel. On sentait une pluie à peine et l'on se trouvait intérieurement désarmé, (en plein milieu de l'esplanade), par l'intensité du silence. Ce silence venu d'en haut entrait en partition sur le mur d'à côté. Et la couleur tangible, le signe vertical semblaient jouer horizontalement avec cette suite molle de nuages et réciproquement. A en perdre la notion du temps et de l'espace. Une pluie tout à fait silencieuse. Du moins, on pouvait croire... Mais sur la partition sans cesse harmonisée de la surface parfaitement carrelée qui bordait l'escalier, quelquechose nous prouvait encore que le silence n'existait pas. Ca devenait une certitude. Pourtant les oreilles avaient du mal à capter le son. Quel son ?

Y avait-il encore une vie sur terre ?

Le vide venait ici comme un ancien message; arrêté quelquepart en occident, pur extrait du monde persan venu de chez DJALAL AL-DIN RUMI, à la recherche de ce point "où la parole est sans lettres ni sons" :

"Garde le silence comme les points de l'espace, car le roi a effacé ton nom du livre de la parole".

Plus loin on aurait pu voir des bédouins assis en cercle, silencieux, sur l'herbe des jardins. En cercle silencieux... Mais voilà, le silence n'existait pas. C'était juste le calme qu'on appelait silence. Car même obscurément, même sous la pluie discrète. Même très confusément. Le silence était son et l'on ne pouvait rien en dire...

 

Jeese Glass and Rod Summers "Silence forever"

podcast

 

Pour voir le mur sans le son; cliquez ci-dessous :

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/02/11/in...

Photo : Mur partitionné par l'averse. Vu ce dimanche sur l'esplanade à quelques pas du haut plateau de la Croix-Rousse à Lyon. Mai 2009. © Frb.

jeudi, 12 mars 2009

Chanson à boire de la misère du monde

Déjà le vin fait signe dans la coupe d'or
Mais ne buvez pas avant que je ne vous chante une chanson !
Le chant du souci
vous sonnera dans l'âme comme un rire clair
Quand le souci approche,
Déserts sont les jardins de l'âme,
La joie, le chant se fanent meurent
Sombre est la vie, sombre la mort...

GUSTAV MAHLER. Extr : "Le chant de la terre" d'après un poème de LI BAI in "La flûte chinoise".

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Le "Chant de la terre" est l'avant-dernière oeuvre achevée de Gustav MAHLER, cette "symphonie avec voix", marque pour son compositeur un retour à la vie après une série de drames personnels. Dureté de la condition humaine, besoins essentiels de l'homme, consolation. Les thèmes abordés touchent au plus proche de humanité. Le recueil de poèmes chinois "La flûte chinoise" que Theobald POLLACK, ami de MALHER lui fît découvrir, n'est pas une oeuvre littéraire, plutôt une compilation construite à partir d'éléments divers mais MAHLER y trouva l'inspiration et la force de s'engager dans un nouveau projet. Choisissant, quelques poèmes, il les réarrangea et composa à partir de cette source, l'une des plus sublimes musiques que l'on puisse imaginer. "Le chant de la terre" composé de six poèmes articulés, les thèmes abordés (dont certains d'entre eux, rappellent étrangement ceux d'Omar KHAYYAM) sont : l'oubli dans le vin, la vanité de la vie, le poète observant un monde où il n'est déjà plus, la superficialité de la beauté et de l'Amour, la petitesse de la condition humaine face à un monde éternel, la douleur de l'âme cherchant l'oubli et le repos. Les titres et thèmes dans l'ordre de la composition s'agencent ainsi :  1) "Das Trinklied vom Jammer der Erde" ("Chanson à boire de la douleur de la terre"), 2) "Der Einsame im Herbst" ("Le Solitaire en automne"), 3 ) "Von der Jugend" ("De la jeunesse"), 4) "Von der Schönheit" ("De la beauté "), 5) "Der Trunkene im Frühling" ("L’Ivrogne au printemps"), 6) "Der Abschied" ("L’Adieu"). G. MAHLER n'était pas écrivain, mais il a trouvé le ton juste, sobre, une simplicité, qui rend plus poignante la douleur de l'Homme. Son "chant", c'est le poème de la condition humaine, du détachement des apparences qui rejoint l'éternité de la terre...

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Il y a quelquechose de "soufi", dans cette quête du "chez-soi" et dans celle de l'ami (thème cher encore au poète persan, O. KHAYYAM et à certains orientaux). Composé lors de l'été 1908 "Das lied von der Erde" ("Le chant de la terre") témoigne d'un chemin immense parcouru vers la paix intérieure. Cheminement, peut être, car le bout du chemin ne sera atteint qu'un an plus tard avec la composition de la neuvième symphonie, sublime hymne d'Amour au monde et à la vie. Par sa forme de lieder avec orchestre (voix humaine mêlée à l'orchestre symphonique), par la beauté des textes, par cette couleur unique qui fait vivre la douleur tout près de la consolation, le "Chant de la terre" est une oeuvre absolue dont la beauté sidère. MALHER la qualifiait lui même de "symphonie" mais par prudence, il la nommait: "une malédiction de la symphonie". Ainsi le "chant de la terre" ne porta pas clairement le nom de symphonie. MAHLER, superstitieux, craignait d'aborder le chiffre 9, fatal aux compositeurs. BEETHOVEN mourût avant de mener à bien sa Dixième symphonie, BRÜCKNER n'eût pas le temps d'achever sa neuvième, et souvenez vous: SCHUBERT ! Comme l'écrivit A. SCHOENBERG en des propos qu'on croirait puisés chez LOVECRAFT :

"Il semble qu’il ne soit pas possible d’aller au-delà d’une Neuvième : celui qui s’y essaie doit quitter ce bas-monde. C’est comme si chaque Dixième Symphonie devait nous dispenser un message qu’il nous est interdit de recevoir, parce que nous ne sommes pas encore prêts. Ceux qui écrivent une Neuvième Symphonie se trouvent déjà trop près de l’Au-delà (...) Peut-être les énigmes de ce monde seraient-elles résolues si l’un de ceux qui savent pouvait écrire une Dixième Symphonie, mais probablement cela ne doit pas être.»

L'ensemble du chant de la terre, dure 60 mn environ, ce qui autoriserait l'appellation de "symphonie", au fond, c'en est une... Une "vraie fausse" symphonie. "Vraie-fausse" neuvième, qui restera pourtant inséparable de la vraie neuvième symphonie ;-). Peut-être G. MAHLER sorti vivant du "Chant de la terre" qu'il appréhendait tant, pût enfin créer sereinement sa neuvième symphonie sans y craindre ce mystérieux fatum touchant les compositeurs-musiciens ? Il acheva bien "le chant de la terre" puis, ensuite sa "neuvième symphonie, mais il ne  pût jamais assister à leur création. Il mourût le 18 mai 1910, et "Le chant de la terre" fût crée à Munich le 20 novembre 1911, (puis la "Neuvième, le 26 juin de l'année suivante) par Bruno WALTER.

Quant à "la Dixième symphonie"... Hélas !

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Ecouter un extrait du "chant de la terre" : ICI

ou encore un peu plus loin ci dessous: (Non seulement, pour les images), mais surtout pour la très émouvante voix de KATHLEEEN FERRIER (1912-1953), qui interpréta pour la première fois "Le chant de la terre" au festival d'Edimbourg en septembre 1947, sans parvenir à chanter l'Adieu, (le "ewig") "Eternellement... Eternellement" (dernier lied du "Chant de la terre") tant elle était bouleversée. Quand elle vint s'excuser auprès du chef BRUNO WALTER, celui ci lui répondit, "Si nous avions tous été aussi artistes que vous, nous aurions tous été en larmes comme vous". Elégance !

http://films7.com/videos/kathleen-ferrier-gustav-mahler-l...

Vous pouvez aussi découvrir KATHLEEN FERRIER sur le blog de Solko qui lui consacra en décembre 2008, un très bel article à lire sans modération:  http://solko.hautetfort.com/archive/2008/12/12/a-la-voix-...

Photos: Promenade entre terre et ciel au parc de la Tête d'Or, dans un matin d'hiver très gris. Lyon. Janvier  © Frb 2009.