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lundi, 02 mars 2015

L'étang

 Il y en a qui vont 

Vers l'entrée pour voir

Si c'est possible. 

 

GUILLEVIC : "Du Domaine", éditions Gallimard 1977. 

 

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Lyon, un après midi dans les brumes au dessus de l'étang.

 

Photo: © Frb 2015

lundi, 18 octobre 2010

Avalanche

La recherche de l'intensité veut que nous allions d'abord au delà du malaise.

GEORGES BATAILLE, extr. "La littérature et le mal" (à propos de "La sorcière" de Jules Michelet), éditions Gallimard 1957.

avalanche_0093.JPGTout t'épuise. C'est cela qui resplendit, le déplacement de toutes tes vies jusqu'au plus grand flou possible ; la confusion entre les joies dilapidées et le pic hormonal normal, comme si l'impression nette de toutes tes expériences avait nourri pendant longtemps un but sans fondement véritable. Le flou et tous ses avantages, abhorrant tes antécédents, les trouble, dénude un fil étrange qui menace à présent ton ouvrage. Tu vois pousser des tulipes au milieu de ta maison. Tu perds la boule puis tu pars en haillons marcher sur une plage et tu sens tout le sable et le sel ronger le cuir de tes souliers. Il te faudrait de l'imprudence pour allonger la dulcinée au milieu du salon, dans ce feuillage exubérant, la regarder s'étendre sur tes pieds nus réchauffés par l'amour, tes pieds tout neufs. Elle s'aveugle à tes pieds. Tu es une idole immortelle. Tu grandis. C'est cela qui réchauffe, elle resplendit en toi. Tu dis que les herbes sont plus hautes quand elles repoussent à l'intérieur, entre les murs ou aux plafonds, nul ne te contredit, oui, c'est logique tout ça. Et tu tapes en cadence, ta petite chanson. Une pelle, un rateau dans tes mains, sur ton ventre accroché, le jouet tient par un ruban aux couleurs de tes mondes, tu tapes sur un seau aussi rond qu'un tambour, et tu chantes à tue tête sans te soucier du faux. Les notes avenantes cristallisent tout ce qui reste à goûter de silence ; la dulcinée se couche dans l'herbe folle parmi les tulipes floues dessinées par les monstres qui pressent dans la nuit des tubes de couleurs chaudes. Les jaunes de cadmium coulent sur les végétaux leur conférant d'artificielles callosités en forme de pétales de rose. Les bulbeuses prolifèrent entre les lianes nouées de lierre, et toi tout enlacé d'amour, tu sens quelque chose comme une pierre qui te coule au fond, un point fondu dans ton système, une drôle de solitude. Il reste une question que tu n'arrives pas résoudre, cela ne finit jamais, ça te venait déjà quand tu vivais sous terre. Tu demandes à la dulcinée, elle qui ne t'écoute jamais, elle qui t'aime sans rien dire, qui te veut immortel, à la manière de ces rois embaumés, les pharaons. Tu la couvres d'énigmes puis tu fais voyager sur son corps l'excès fantômatique revenu des sables, tu tamises et verses grain par grain ton sel. L'évènement, tu le passeras sous silence, il se couchera sur ta chanson qui resplendit toujours et mutile constamment tes sens. Enfin, il y a ces gens qui reviennent chercher leur dû. Des montagnes de sel entourent la plage, tu entends. Quand elle respire c'est encore leur respiration, il remontent la pente où tu les as laissés pour morts, par négligence, parce que c'est humain d'oublier. Tu les vois, ils sont flous, ils sont là, ils s'amusent et remuent dans ta tête des flaques d'eau miraculeuse avec leurs doigts, leurs sales doigts qui se mêlent, à chaque fois, c'est pareil, plus tu les noies, plus ils remontent.

Photo : Flou urbain (et humain ?). Dans ma rue, quand la nuit tombe, toutes les fenêtres fondent, c'est ainsi. Photographié à Lyon, quelque part à Croix-Rousse, par un beau soir d'Octobre, (le nom de la rue restera sous scellés). Frb © 2010.

mardi, 10 août 2010

Le minuscule

Au pied du mur. Une falaise de craie, une paroi droite. La route stoppé là, au pied.
Des jours.
La paroi reste. On devient plus léger.
A force, le mur ne surprend plus.
On se dit qu'il fallait bien s'attendre à quelque chose comme ça.

ANTOINE EMAZ in "Caisse claire", éditions Points Seuil, 2007.

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L'âme atteinte, trop soudainement peut-être, au pied du mur, nous prend et nous sommes sidérés par les beautés anciennes. Il faudrait boire la pluie, il faudrait vivre sous la neige pour ne pas s'affamer, s'ensorceller de songes broutant le diamant en ces noces où l'image d'une trempe rituelle ne peut tout à fait s'effacer. La brutalité vient, après le dit de l'aime, une de la pire espèce, qui pousse à reculer, celle qui croit tout donner et reprend tout, prend l'aise, construit des bétaillères pour celles du genre de haine. La maladresse insiste jamais ne disparaît. On ne s'amende plus, l'avenir se délite peu à peu, à présent, plus vite que le passé. On porte la mort en bouquet façon dandy, rose ou pourpre. Fièrement, on se démet. Et les oeillets fanés dans les vases romantiques, n'inspirent plus le moindre regret. Après avoir chéri on s'étend tête froide sur la pierre polie des carrelages. Le son est celui de mille cloches briquées comme des casserole en cuivre qui résonnent en façade. Nous serons exhibés demain ou en Septembre.... Qu'il est doux de verser l'amour fou, ou la haine sous les yeux des indifférents ! fièrement on se pavane. On tire presque gloire de ses peines. Lamento affligeant déguisé en pure joie. Il suffirait pourtant, qu'un doux hasard, du genre humain lève le voile, et nous révèle inconsolables, cela serait moins désolant. On aimerait ce hasard. On plongerait à nouveau. On goûterait l'ornement, le velours, les emphases, celles qui visent plus haut, plus loin que l'insatiable. On se réchaufferait. On inviterait la lune, les étoiles dans les chambres. Elles nous lécheraient les pieds. Un jour, l'offense par accident, à nouveau viendrait nous reprendre. On serait consommé. On reconvoquerait les fantômes et puis on les rassemblerait tous sous la même chair exactement au même endroit. Eternel recommencement...

Photo : Visage humain candide ou effaré. Sculpture civile clunisoise, vue en façade d'une ancienne riche demeure. Cluny. Août 2010. © Frb

lundi, 03 novembre 2008

Comme un lundi (Gris Bonnet et Bonnet gris)

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Elle est étrange cette petite usine de la rue Bonnet à Villeurbanne, toujours fumante, au milieu de friches, cachée derrière des arbres, dans sa tôle ondulée. On s'étonne qu'un tel lieu soit encore en activité. Il y a ici un mélange de vieille ville et de campagne triste, et jamais on ne voit aux heures de pause, sortir des ouvriers (qu'on imaginerait bien avec une gamelle en fer à la main, et le visage embarbouillé) mais non, personne et rien . Qu'est ce qu'on fabrique là ? nul ne le sait... Quel est le combustible qui épaissit le ciel à cet angle de rue méconnu, stratégique ? Quelle est l'âme qui nourrit ce feu?  Est-ce la même qui hante la nuit, le clocher de la charité et s'en revient le jour couvrir d'un épais voile cette rue fantômatique ? Certains signes ne trompent pas. Comme l'a toujours écrit "L'esprit des lieux": il n'y a pas de fumée sans feu ...