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dimanche, 07 octobre 2012

Les errances du modèle (II)

Rien ne nous advient que revêtu de notre âme : nous n'y reconnaissons qu'à la longue ce que nous avons appelé...

Joë BOUSQUET cité par les "Esprits Nomades" dans une page à découvrir intégralement  ICI.

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Ce départ nécessite une lente préparation, un matin il se lèvera trop tard et laissera tout aller : le bol, le sucre, la petite cuillère. Les choses en cours subiront un obstacle.

Il laissera de travers, la toile cirée parfaite, avec ses fruits pêle-mêle répétés à l'identique: un raisin une pomme deux cerises au milieu des triangles, des carrés alternativement disposés en quinconce. Depuis le temps qu'il les compte, c'est une distraction coutumière au petit déjeûner, compter et recompter. Quand il aura tout compilé, il se dira que Suzanne, sa femme a des goûts de merde. Un raisin, un carré deux triangles deux cerises et la pomme entre deux, tous les jours identiques ça recommence sans bouger: un raisin un carré deux triangles deux cerises et la pomme entre deux, tellement identiques.

Ca fuit, ça se dérègle, ça altère son esprit. Il est la pomme cirée entre deux cerisiers, il est le raisin dont la colère se cache sous des figures géométriques. C'est décidé, maintenant, ce non, il peut lui obéir.

Non, il ne passera pas l'éponge pour nettoyer les miettes et ranger les mets qu'on rassemble chaque jour autour du compotier.

Non, il n'effacera pas le coulis échappé des tartines fondues de Plantafin ; et la pomme, entre deux, il ne va pas la regarder toujours comme le symbole des goûts de merde de Suzanne, elle rêvait d'une maison propre et nette comme on en voit à la télé, ça accentuait ses manies de cocooner pour l'embellie de ses fleurs de ses fruits. Il avait installé ses bases dehors, il allait et venait, une bêche à la main, sommé d'entretenir les fleurs, les fruits, le chien.

Suzanne, tous les samedis, va choisir des tissus à l'hyper du textile, depuis toujours elle porte un soin méticuleux à rajouter pour la maison, "quelques petites bricoles", comme elle dit. Il ressent la vague sensation d'une course incontrôlable, Suzanne doit éprouver un état de manque, à courir après des tapis de bains, des séries de coussins, des traversins... Rien ne lui semble assez doux pour eux. Est-ce de sa faute à lui, ce besoin impérieux qu'elle a de rajouter des objets afin de les mettre en valeur avec d'autres objets ? Ca lui donne l'impression, qu'il ne peut déjà plus trouver sa place, s'imposer parmi eux, il n'est plus maître en sa maison. Il observe Suzanne, décorer le salon il n'osera mettre un frein à cette obstination dont le perfectionnisme ne saurait endurer le moindre reproche.

Plus le temps passe, plus ça fleurit chez eux, ça fruite dans tous les coins, la couette est envahie de pommes, de noisettes, gonflant des housses assorties aux rideaux, giroflées, coquelicots, tout s'emboîte et leurs corps dans ces goûts n'apaisent plus leur faim...

C'est juré, à partir d'aujourd'hui, il n'utilisera pas la lingette au citron qui absorbe les taches de café sur le bord blanc du bol, un seul geste suffirait. Non, c'est non. Il ne respirera pas ce goût de Paic qui lui rappelle l'odeur âcre de la tarte-citron-maison du café-restaurant-snack "Croqu' vit'" où il mange tous les jours de midi quinze à midi quarante-cinq avec ses trois collègues, Barnier Chaumette et Thomasson, six mocassins, logeant des animaux sur des chaussettes, trois paires de jambes traînant des fruits sur leurs caleçons.

Il suffira de claquer la porte, d'enfiler des bottes de cow boy, un grand chapeau un fusil, tirer dans le tas, et allez boum ! ou plus simplement, dénicher des chaussures anglaises, des trotters en daim souple assez sobres. Il faut se tenir prêt, afin d'aborder l'étape nécessaire d'un ravissement qui consiste à ne pas se rendre.

Pas aujourd'hui. Et pas demain. Il faudra supprimer aussi l'obsession de survie, le loyer, les crédits, cette dépression qui n'en n'a jamais l'air, aucun signe extérieur de désordre. Une "dépression larvée", il a dit le docteur Mollon en prescrivant le Lexomil et des boîtes de Tardyferon. Le docteur Mollon, il secoue toujours sa tête piriforme quand il veut donner un conseil, il prend un air confidentiel anticipant au mieux toute forme de contestation. Il a dit en se râclant la gorge: - "vous devriez faire du jogging, monsieur Moinon, vous inscrire dans un club d'Aquagym, j'en connais un très bien sur l'avenue Blaise Cendrars juste en face du Bricomaton".

Assis au bord de la table d'examen, il songeait au poète et sa main retrouvée qui remuait le ciel, pour faire un bras d'honneur par delà les persiennes aux flots bleus du club d'Aquagym. Il faudrait bien un jour que quelqu'un le sorte de ce traquenard, ou qu'il s'y colle lui-même avec un tel cafard, il croiserait peut-être un cas de figure similaire dans un forum sur internet.

Pour l'heure il ne peut rien en dire, il longe les murs, jusqu'à la pharmacie, il creusera son trou dans la file, tirera un tiquet d'une machine pour obtenir un numéro. C'est comme à la boucherie dans les grandes pharmacies, il y a du nouveau : on prend un numéro, un pharmacien parfois se poste à côté de la machine pour réciter les numéros, le client sait alors exactement quand c'est son tour, le pharmacien ne dit plus "à qui le tour ?" Il crie juste très fort "364!" "365 !" et ainsi de suite. Il n'y a plus de chaos, 365 tours pas plus de trois minutes par client, à la sortie c'est toujours la même chose, après avoir attendu très longtemps, et payé poliment, il cherchera une poubelle, et hop ! hop ! hop ! il jetera le bromazépam dans les réceptacles à produits recyclables qui ont fini par prendre une place phénoménale dans la ville, ultime acte de bravoure après quoi la planète pourra bien endurer une ou deux explosions, son âme étirant l'étincelle, invitera les constellations à libérer les animaux qui vivent dans les chaussettes une vie pareille à la notre.

Pendant que le Docteur Mollon a essayé de lui expliquer pourquoi il fallait faire le test gratuit de dépistage du cancer du colon, en quoi cela était un acte responsable ;  lui, il sentait que l'irresponsabilité, dans son cas serait un acte d'amour inouï. Mais il ne toucherait pas un mot de la fable au Docteur Mollon quand celui-ci traquant les larves dessous la dépression, jugerait "bon" de lui prescrire un séjour d'un mois, à la maison de repos des Tanches. Lui, n'a pas osé dire qu'il  préférerait un séjour au bord d'un étang, dans une petite maison, entourée de roseaux. Il devenait peu à peu le héron.

- Moi des Tanches ? [...] moi Héron ? Mais pour qui me prend-on ?

La petite idée jouerait encore sous conditions. Il restait un tas de choses à régler. Dernier caprice en date. Suzanne voulait un chat. Un chat sur un coussin, juste pour l'affection. Il n'avait rien contre les chats, mais cette fois c'était non. La petite idée consistait à marcher vers ce non, tranquillement, sans se fâcher, sans causer aucun mal, rien qu'un non radical ouvrant le phénomène au plus grand horizon, un non, qui aurait l'apparence d'un vrai non, et qui serait, au contraire, une approbation totale au monde, sans rien en conquérir, en demandant pardon à tous les animaux.

Ca flottait comme un rêve entre le sentiment de bonté qui aurait dû faire de lui l'être le plus adoré au monde et la sensation personnelle de devenir un  vrai salaud  s'apprêtant à commettre  un acte inavouable, où l'exil balançant son pôle magnétique entre des corps étrangers infiniment plus désirables que celui de Suzanne, inaugurerait bientôt un état de transformation si brutal que ceux qui l'avaient tant aimé ne pourrait jamais pardonner.

Ce serait comme un jet de pierre, un frisson entre la peur de perdre pied et le souffle qui la délivre. Le modèle dériverait vers cette dimension où basculent tous les phénomènes, il ne laisserait que le souvenir d'une pointure taillée dans le cuir, un détail qui perdrait peu à peu son prestige, Le sol changé en petits pas grandioses, le modèle roulerait sa mécanique comme n'importe quelle machine se met à broyer les graviers les larguer derrière elle, jusqu'à ce que la route les disperse sans plus de différence. Il y aurait une étincelle juste avant l'embrasure et l'imminence de l'arrivée ne serait plus un problème pour lui.

 

A suivre ...

 

 Nota : Notre modèle devenant de plus en plus interchangeable, vous pouvez explorer ses multiples facettes en cliquant dans l'image.

 

Etat des lieux : Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé ne serait que pure coincidence, toutefois cet inventaire (ou démarque) d'objets domestiques, m'a été inspiré par une scène de rue  fascinante d'un déménagement en forme de montagne d'objets familiers représentant des années de vie, de deux personnes dont je n'ai vu que la silhouette de loin. Un aperçu de quelques minutes d'une densité presque aussi effrayante que ces objets qui nous possèdent peut-être chez nous, à l'identique, si par hasard un certain jour, il nous venait l'idée saugrenue de les entasser dans une rue...

 

Photo : Ascension du modèle croissant incognito dans la ville, une procession saisie au corps à corps, sur le grand escalier mécanique de la station Charpennes, menant à la place Charles Hernu anciennement Place de la Bascule à Villeurbanne.

 

Sortie métro  © Frb 2012

vendredi, 07 septembre 2012

Chauve et rude

En 1956 dans "Les cocus du vieil art moderne" Salvador Dali dont l'admiration pour Gaudi ne s'est jamais démentie annonçait la venue d'une architecture "molle et poilue"...

Extr. du "Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugements suivi du livre des bizarres" par Guy BECHTEL et J.C. CARRIERE, éditions Robert Laffont 1981.

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Molle et poilue ?

Une seconde entrevue en rêve...

Point de bâtisses poilutes ni barbutes (ou moustachutes) en nos contrées hélas ! dans nos rues pleines de grues nous attendrons encore...

La preuve est un peu là, baladée par l'image. Comme tout se clique en ce bas monde et que c'est jour de travaux pratiques, je me suis bêtement amusée avec l'aide de notre architecte patenté Jean-Pierre Disagne® (concepting in postcards § home-graphism and Cie) à essayer d'agrémenter ces modestes propositions de quelques aménagements "tendance" (la tendance-attitude) paraissant épouser au plus près la forme de l'habitacle, vous trouverez donc des intérieurs à notre collection (peu maline et chouïa arbitraire, je l'admets) en cliquant sur les échantillons de cet échafaudage rien que du fonctionnel, propre sur lui, uniformément glabre.

 Avertissement: ce billet partant du réel, il peut se situer parallèlement dans un monde de fiction, comme l'écrivait Martin Winckler : "Si les événements décrits dans ces pages semblent plus vrais que nature, c’est parce qu’ils le sont : dans la réalité, tout est moins simple. Cela dit, même lorsqu’elles ne sont pas délibérées, les ressemblances avec des personnes ou des événements réels sont, probablement, inévitables" par mesure de prudence je rajouterai qu'elles ne sont pas si mal intentionnées qu'on pourrait le supposer. Sur ce sujet, nous battons les barres et les blocs, comme on dit battre la campagne, pour le reste, nous ne sommes pas de taille. Amen ! 

 

Lignes directes  :

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2008/08/20/l-...

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/09/22/pr...

Propositions d'ailleurs :

http://fr.academic.ru/pictures/frwiki/78/Newark-ohio-long...

http://www.bienchezsoi.net/diaporama/images/maisons-bizar...

http://laouilfaitbonvivre.l.a.pic.centerblog.net/ck9x355p...

Propositions d'ici:

Malhonnête: http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/09/28/le-duplex-de-malevitch.html

ou honnête: http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/08/16/on-rentre-a-la-maison.html

 

Photos : Lyon rive gauche + Villeurbanne quartier Charpennes, une balade où l'espace déjà rempli se remplit à vue d'oeil un peu partout ici ou là, extrait en forme d'échafaud d'échafaudage des (plus ou moins) nouveaux habitacles urbains...

 

Lyon § + © J.P.Disagne® / frb 2012.

lundi, 20 août 2012

Roman-photos

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 Photos : fragments d'une balade loin du monde qui est aussi, dans ce village, un beau voyage à travers temps. Ici nous sommes au XIem et début du XIIem siècle, pas très loin de Cluny, berceau de l'occident, au coeur de la pierre romane avec ses tons sublimes, sa blondeur envoûtante aux reflets d'une civilisation qui semble étrangement contempler la notre et même croiser nos préoccupations, (changement de siècle, confrontation à la violence,  à la crainte, relations avec les images et les formes,  fragilité de l'Homme, quête de spiritualité). Photographiés cet été, ce ne sont que quelques détails extérieurs de l'église de Bois Ste Marie ;  hélas, je n'ai pu, accéder à certaines sculptures en façade, que j'aurais beaucoup aimé vous montrer, mais l'église étant actuellement en cours de restauration, ce jour là tout n'était pas accessible, ainsi nous serons un peu privés de quelques curieux modillons, en attendant d'y retourner l'année prochaine sans doute... toujours à propos des curieux modillons (et autre "green man"), vous trouverez un petit éclairage perso :  ICI.

 

Liens et autres éclairages sur thème :

Pour découvrir en images d'autres lieux où l'art roman peut se visiter, le site universitaire du Boston College est une excellente source:

http://www.bc.edu/bc_org/avp/cas/fnart/arch/romanesque_ar...

Le circuit des églises romanes du Brionnais, en un regard qui peut même s'agrandir:

http://cep.charolais-brionnais.net/pages/roman/circuit3.htm

Une bibliographie très intéressante et vivement conseillée (peut accompagner le parcours) :

http://mydas.ath.cx/bourgogneromane/biblio.htm

 

Nota : Pour le jeu de l'été, (il en faut un, c'est comme à la télé), un intrus s'est impunément glissé dans notre roman-photos, le malheureux a dû se tromper d'époque. Le lecteur plein de sagacité saura-t-il le trouver ? On est au Moyen-âge, il n'y a rien à gagner sauf peut-être un séjour au royaume éternel, mais la recette de l'hypocras sera malgré tout offerte à tous les participants, (qu'est ce qu'il ne faut pas faire de nos jours... :)

 

Bois Ste Marie © Frb 2012

jeudi, 21 août 2008

Politique de civilisation

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Quand les images vous regardent .

Propagande de civilisation :  ICI + "gardiens d'hier et d'aujourd'hui"  ICI