Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

dimanche, 11 janvier 2015

2015 : ça ne suffira pas, mais il faut essayer...

455_0206k.jpg

  

Nota : Le street-art rend hommage en "free style" aux victimes des attentats du 7 Janvier 2015, aux dessinateurs, à ceux qui restent qui vont tenter de continuer, à défendre leur plus libre expression possible, aujourd'hui, mais aussi pour la suite du monde, j'aimerais (I have a dream) que le mouvement in situ de la rue, (re)donne un sens, si ce n'est à tous à quelques uns, (sans naïveté évidemment), je ne sais pas si "je suis Charlie", (je m'en fous un peu) mais je sais que je soutiens de tout coeur, les créateurs, ceux qui restent, je les admire, et j'espère que nous les soutiendrons, encore après, ainsi que toutes les formes d'expression, quand l'émotion spectaculaire, se délitera peu à peu, c'est là, que ça risque d'être "coton", mais bon... Foin du noirte horizon !

Merci à eux.

Merci à ceux du "Canard enchaîné" qui eux aussi ont subi, subissent encore à ce jour de très sérieuses menaces, ils ont désiré absolument, ne rien réduire de leur ligne éditoriale, un soutien aux confrères, like Libé, "terre d'asile", pas sans risque, et ce, sans la bénédiction du pape, (Flanchouai, mît bémol, ravi qui dans sa bulle... continue ses voyages, ajoutant à la bonne eau bénite, l'huile sur le feu sacré versée dans tous les encriers, ce qui ne va pas, (il me semble), apaiser, ni aider les forces communes et individuelles à se ré-accorder, (couac) ni la création déjà très fragile, et encore plus fragilisée, depuis ces infamies, ni l'expression encore libre, juste armée de pinceaux, d'instruments de musique ou de plumes (sur la commode, et plus ...) des créateurs chenapans, et des gens entrés en résistance, avec une grande tristesse, une immense détermination à ne rien lâcher, rien, nada, nothing, autant que nous le pourrons,  même si cela paraît naïveté, s'exprimer sans craindre pour sa vie et celle des gens qu'on aime, si possible, doit être, la moindre des choses, autant que nous vivrons...

J'ois, pleinement, ce jour la bonne chanson "mourir pour des idées", par la bénédiction universelle du mécréant frère Georges qui fuyait les cortèges. Un grand salut à Luz, à Riss, et tous leurs camarades pour la suite, et la une du Charlie, malicieuse, excellente, la bande des Charlie, vraiment très courageuse, puissent-ils vivre, longtemps et qu'un jour on arrive enfin à comprendre leur langage et à leur foutre la paix, tirer sur un canard avec des armes de guerre, ne peut guère être justifié, par "des limites" à imposer au rire, qu'il soit de "bon goût" ou non, la bien-pensance, la religion, les puissants personnages (réels ou s'imaginant tels) n'ont rien à limiter à personne sinon leurs propres craintes, leurs fantasmes de domination, ces violences intérieures passées à l'extérieur sont bien antérieures aux dessins des Charlie. Les caricatures ont toujours existé. Mon parti-pris vu d'une lorgnette, d'abord celle du dessin, puis, de l'expression, de la création en France, je précise, les enjeux politiques étant très complexes, là encore, il y a beaucoup trop d'inquiétudes, de langages de cultures que moi même je ne comprendrais pas. Mais je ne suis pas certaine que la censure pour quiconque, y compris des personnages qu'on exècre, soit le moyen le plus efficace pour défendre la démocratie, ses belles idées de liberté et tout ça. Ici, dans tel contexte il me semble que tout créateur, qu'il soit écrivain, poète, musicien, peintre, clown, etc ce jour et sans autres illusions, doit se tenir au plus près de ses camarades créateurs (de ceux qui désirent se rallier) pour défendre ce dernier rempart face à l'impuissance générale qui vient greffer sur nous, la peur, cette peur que nous n'éprouvions pas à l'origine, et qui n'est pas de notre désir, peur que l'horreur ne creuse en nous encore plus silencieusement le sentiment de voir gagner l'ignorance, la vengeance, la lâcheté, la sottise, la perfidie, nos failles personnelles également, ce jour en question, pire même que la censure : l'autocensure qui vient déjà, viendra, forcément, insidieuse si l'on se met à craindre pour son intégrité physique qu'une idée soit très mal comprise. 

Celui qui s'exprime met son univers au partage, une fois lâché son dessin, sa musique, ses écrits, etc... appartiennent aussi à qui les reçoit, celui qui livre l'expression de son imaginaire peut toujours s'expliquer, présenter des excuses si lui-même conçoit que cela est peut-être "trop", il accepte la contestation, ou bien il la refuse, ou l'offensé s'en remettra aux procédures, ultimes limites mais jamais, un individu qui s'exprime ne devrait craindre pour sa peau et mourir pour cela, toute forme d'expression reste libre aussi à celui qui va l'interpréter, en prolonger les idées, ou les dévoyer voir les anéantir, mille lectures seront possibles, on le sait, cela a toujours été, mille malentendus, c'est le risque inhérent à tout homme qui s'exprime, quel que soit ses idées, une idée se combat avec des idées, jamais avec un arsenal de guerre, foin de banalités, et phrases des plus naïves qui seront toujours à redire face au pire et au plus sordide des malentendus, jamais vu en France, ni concevable avant ces attentats, exaltation de la morgue, de l'obscurité qui ronge en dedans le coeur même du vivant, les créateurs et les gens, tous les gens ont le droit non seulement civique, mais le droit naturel de s'exprimer, les limites (et tant pis aujourd'hui pour le pape) c'est le droit d'en débattre et même de s'engueuler, mais si cela advient sous menace d'armement, ou quelque autre intimidation idéologique, l'homme mourra d'asphyxie dans son repli, sa peur de l'ouvrir parce que la peur, est la première et la plus vulnérable des émotions, et tous les prédateurs le savent. Si demain, comme aujourd'hui un individu pense qu'il va risquer sa vie en s'exprimant et cela, par malheur cela, est arrivé et si (avec des si) progressivement cette emprise devenait acceptable. Nous ne serions plus rien.

Je crains le pire, et comme chacun, sidéré, je manque de mots pertinents ou impertinents, je ne crains pas de m'exprimer, ce jour sans aucune éloquence, je crains juste qu'un jour la menace devienne plus prégnante que la libre expression de chacun, par là, que toutes ses intentions singulières se pervertissent sournoisement sous le poids de cette pression, ce qui existait larvé déjà, bon. Ces attentats laissent un peu pantelants sur le bord du chemin, mais il fût "consolant" un jour de pouvoir partager mille différences avec tous les êtres qui avaient décidé de marcher en respectant toutes les nuances, qu'on soit Charlie ou non, on pouvait n'être que soi, solidaire et vivant ce jour avec les autres, sans s'aveugler de tout, et c'est bien de se dire que cela un jour a pu exister puissamment sans autre embrasement dramatique, in situ. 

Il y a beaucoup de gens isolés, dans les villes, et partout beaucoup de gens qui n'ont pas la culture, encore moins la parole, ils se sont exprimé ce jour là, nous avons vu cela, émouvant et sans frime, sans exagération, ce n'est pas rien et ne peut se décrire, je crois qu'il ne faut pas mépriser le pas des hommes et des femmes qui se mettent en marche, même un seul jour, même si cela fût orchestré, comme l'émotion - dit-on - peut-être, ce mouvement est issu d'un paradoxe et de contradictions mais beaucoup in situ n'était pas dupe, je crois, en tout cas nous n'avons pas, avec mes amis, ressenti à Lyon, ce que nous ressentons d'ordinaire dans une foule, et qui nous met si mal à l'aise, cette espèce d'injonction béate, marcher suffisait, pas obligé de "suivre" tout et n'importe quoi, foule vivante, visages tristes, sourires éblouissants, et des mots d'un instant toutes raisons différentes, les pas étaient splendides, chacun prouva sans doute à sa façon que l'émotion personnelle n'était pas, seulement réductible à un réflexe conditionné, et cela fit une belle, une magnifique journée.

Le scepticisme de chacun s'est perçu, également, l'inquiétude de l'après, la tristesse mais aussi la fragile espérance d'un jour réconfortée par cette marche, lente, mesure de l'humain, de milliers d'êtres humains ensemble qui s'aident à se relever d'un choc épouvantable, c'est d'un monde trop sensible pour être traduit encore avec des mots, du moins pas pour l'instant.

Nous entrons dans l'après, dans le "rien ne sera comme avant", peu importe pour l'instant qui trame ceci cela, quel machins, quels salauds... avaient tramé cela avant, on lit déjà partout un tas d'insanités, l'hypocrisie des "grands" de ce monde, on la connaît, ok, c'est à ce point délicat de devoir, à présent défendre individuellement (et commencer par ça) ce qu'on est déjà soi, ensuite collectivement, défendre une liberté d'expression violemment touchée, désormais ensanglantée, ce n'est plus la même liberté, (déjà bien malmenée depuis pas mal de temps) mais nous savons que cela est possible pourtant de la défendre encore, on ne peut pas décider autre chose que tenter, comme on marche pour ne pas se coucher, l'expression nécessaire d'une respiration, telle la marche ouvre au souffle précieux de la chaleur humaine, des personnes profondément choquées, tristes et gaies, de toutes parts ont donné une réponse, sur l'instant, la plus intelligente qui soit, cette réponse ne peut-être réductible aux observations, à distance, ni aux analyses plus subtiles, elle concerne un instant, un bref passage du temps, même si nous resterons sur nos gardes, longtemps, moins nombreux, c'est certain, et sans trop d'illusions, pour la plupart, je crois, lucides là bas ou ici, face au choc terrifiant, devant un grand saccage de vies humaines, on sait que  la parole tournera un peu en rond, encore un temps, et qu'il ne sera pas possible d'oublier l'évènement, que l'éloquence ne masquera que ce très lourd malaise qui nous serre le coeur encore à cette heure, quand nous pensons aux attentats, aux victimes, à ceux qui restent, comme l'info, ne cesse pas depuis ces attentats, là bas et ici, elle tourne encore en boucle embrouillant l'acuité des petits nains que nous sommes, à tenter de s'informer écouter, regarder, et essayer de comprendre, pour rester dans le vif, sans autres considérations politiques H.O donc la tentative d'une marche nous réveille c'est un essai troublant, devenu inouï, qui ne suffira pas. La cohue devant les maisons de la presse, j'en discute souvent avec le marchand de journaux de mon quartier ces jours-ci, si ça nourrit les petits canards qui étaient boiteux avant, tant mieux, s'il faut du sang pour les nourrir ça reste sidérant.

J'aimerais (encore rêver, on peut ?) que la réalité de cette marche nous donne une force réelle pour porter preuve après, que cet imaginaire vive ainsi qu'il nous préserve encore, épargne, s'il se peut, les mômes qui gambadent insouciants, pour que nous préservions leurs rires, ce monde à eux, leurs rires cons comme on est, et leurs blagues à Toto, qui font les mômes radieux, comme ce pigeon de Dieu rejetant son pique-nique sur la veste du président, grain de sable, pure pralin, rire de Luz, poésie de l'instant, du mauvais goût peut-être ? Qu'un fou rire en plein coeur d'une cérémonie solennelle, soit aussi important, un détail disproportionné, face aux crimes monstrueux, oui, sûrement, c'est bien bête que de tenir encore à l'imagination qui galope librement et pour ce tout venant, respectueux de nous, en cette sale époque, où la vie peine rudement, (dit comme ça, ma bonne dame ! ouh ben !) ....

Comme je n'ai jamais eu trop le goût d'exalter le néant, ni ici ni ailleurs, malgré le doute, ni folie des grandeurs du paradis, ou de l'enfer, exalter juste la vie, comme elle vient, certains jours, d'expression singulière, qui se partage ou non, sans occulter ce qu'elle a de bizarre et fragile, espérer que la création paradant au travers s'y amuse et de temps en temps qu'elle vous amuse peut-être ou non, que les idées s'expriment sans vigiles ni cerbères, ce n'est pas un voeu pieux, mais un désir humain pour ne pas que toute âme  finisse dépossédée par ces valeurs autoritaires, les obscurantismes, leurs remèdes, à craindre des coups de bâton, mourir pour ça, mort physique ou mentale, qu'on soit croyant ou non, ça tue les forces vives, par avance, d'y songer. Ici, nous jouons, nous marchons, et nous rions de tout, des winners, des losers des détails, des horreurs, ainsi de nos échecs, rire de tout vaut toujours mieux qu'un cynique ricanement qui tourne encore à vide sur le vide, négation même de l'autre comme une mort en dedans que les gars de Charlie ne défendaient jamais, avec leurs dessins "gratinés", desfois cheap, desfois "trop" mais aussi très "chiadés", leur critique qui n'épargne personne, même pas eux, a poursuivi l'ouvrage d'une autre génération de l'après 68, portant l'expression d'une contestation sur une société qui n'en pouvait plus de ses frustrations.

Nous avons, mes amis et moi-même, de la génération de Charb, bénéficié de ce vent de liberté, nous l'avons beaucoup contesté, et nous l'avons aimé, sans être des inconditionnels, de tous les opus de Charlie Hebdo, nous sommes les enfants des pionniers de cette mouvance libertaire, un souvenir dilettante de la contre-culture en France plutôt rare de trouver cette presse-là avant eux, qui pût parfois nous concerner, nous étions vers les 12 à 15 ans égarés dans les années-fric, la petite province encore poujadiste s'épouvantait à nous voir lire, Reiser, Cabu, sans oublier le feu prof Choron qui traînait dans les chambres des grands frères des copines, Hara kiri mort Charlie Hebdo occupa cycliquement les cours ennuyeux, glissé sous les bureaux, acheté par un et lu par tous, à pouffer de rire sur des dessins qui passaient de main en main (sous le bureau, sous le manteau) et faisaient grinçer joyeusement les chaises austères de notre respectable école, lors des cours de dessin catholique, enseignés par la polyvalente Melle Pugeolles, au collège St Marie, les enfants pré-ados bécassons que nous étions (et vieux bécassons, nous restons) payèrent cher en interminables heures de colle (vous me copierez 100 fois - "je ne dois pas lire Charlie Hebdo" ou du genre, tours de cour les mains sur la tête, confisqués, les revue "cochonnes", j'exagère à peine c'est pour dire : Charlie Hebdo n'était pas du goût de tout le monde, ces lectures engagées, rigolotes émancipèrent sans qu'on s'en rende trop compte, notre créativité fulgurante, et nous dessinâmes à notre tour, (les revues confisquées, il fallait bien essayer autre chose), nous avons compris bien plus tard que les contestataires d'une époque à nos yeux révolue, nous avaient ouvert l'esprit et libéré de pas mal de trucs, un terrain fertile s'est ouvert en mille autres différents, pas banals pour les voies de la création, et surtout l'expression qui s'y développait en roue libre.

Bon, jusque là, dit, à chaud on serait presque tous d'accord. Anecdote très compassionnelle. Alors que nous marchions. Grosse surprise de croiser place Bellecour notre bonne Melle Pugeolles, complètement amnésique, épanouie, rayonnante dans son nouveau tee-shirt "Je suis Charlie" enfilé à la vrac sur sa même robe chasuble (beige-grenat) accompagnée par le redoutable Monsieur Bouchard, responsable du martinet et du fouet à l'école "Notre Dame" en 1976, revenu lui aussi en tee-shirt XXL "je suis Charlie", super-sympa. Moralité : y'en a pas. Que ceci reste une belle histoire, de bravoure hyper-love et sans rancune of course. A part ça...

Nous sommes des êtres doux, vulnérables, nous sommes beaux et grotesques, nous sommes petits et fiers, nous sommes faiblesse de notre époque, nous sommes forts de notre naïveté, de nos défauts de nos lâchetés, de nos questions, de notre maladresse à ne savoir nous exprimer mieux, nous sommes les gens du siècle munis de notre intelligence, (relative) de nos lacunes (champs inexplorés), de notre liberté de pensée, de nos erreurs, de notre langage fourbu de culture, d'inculture, de nos inspirations irrégulières, d'un savoir faire très libre, nous précis, nous gentils, nous très approximatifs, nous multiples, identiques, nous, nous, nous...  Comme disait un monsieur dans la rue : "on bricole, on n'a que ça pour vivre", Vivre, ouais, ouais  pas mourir. Nous ne mesurons qu'à court terme, toutes les conséquences de nos gigues*- ["Sous toutes ses formes, la gigue exerce une fascination peu commune sur la population locale; par sa virtuosité, son accord parfait à la musique, la finesse de ses mouvements et l’énergie qu’elle déploie*"] ; la violence, les hybridations de nos drôles de machines qui permet de mondialiser le Charlie, avec tous les drapeaux en berne, n'est pas le moindre de nos soucis, le spectre effrayant d'un monde sécuritaire (pour notre bien) nous fait, froid dans le dos, l'administration de la peur vient comme une hantise au coeur de la vie brève, nous tentons quelque chose sans promettre, parce qu'on ne peut pas ne rien tenter un peu à notre échelle, et nous aurons encore besoin de réconfort.

Ce billet a été corrigé (pas très bien mais tant pis) signé et approuvé de tout coeur par Melle Pugeolles, qui nous a présenté ses excuses, lors d'un très beau discours, elle nous a demandé pardon de nous avoir injustement infligé - bien à tort- des heures de colle pour avoir lu Charlie Hebdo, qu'elle trouve aujourd'hui formidable, bien autant que ses créateurs. Acte de contrition, à coeur, espérance, forcément sublime.  Amen.

   

Photo: Tant que...

Tant que les murs ne seront pas muets. Un signe fort, en pochoir, saisi le lendemain du choc, sur la Montée de Grande Côte  à  Lyon.

mercredi, 26 octobre 2011

Au mieux l'aphocalypse...

la faute à qui (liss 2).jpg

 

     Words, or words.

 

 

Photo : Le H nuit à l'orthographe ou hante peut être "l'esprit des murs". Le nouveau visage de l'apothéose photographié en bas des pentes de la Croix-Rousse, entre les rues René Leynaud et René Burdeau un graff (ayant fauté ? A qui la faute ?) surtout, nargue l'ancienne église des oratoriens, dite église St Polycarpe (mais jamais Pholycarpe), et sa paroisse, toute dédiée à Saint Irénée (auteur d'un traité contre les hérésies, tiens donc !) et surtout dédiée à Saint Pothin ou plutôt Saint Photin pénétrant dans le corps d'un graff  ou graph ? Et quel grafph ! mais non, mais non ! phaut pas de "H" à Saint Photin  !... Mais si, mais si !

©  Frb 2011.

mardi, 29 mars 2011

Des fourmis plein la tête (part 1)

A propos de quelques questions recueillies au hasard dans les livres et dans les magazines...

Pour consulter la part 2 des fourmis plein la tête vous pouvez cliquer sur l'image.Fourmis T0041.JPG

Qui suis je la nuit ? Pourquoi le chaos est-il si fascinant ? Est-il nécessaire d'être attentif ? Est ce que tout compte ? S'adapter mais à quoi ? Si 38 allumettes forment 15 carrés, en retirant 6 allumettes comment procéder pour obtenir 9 carrés ? Qui fait quoi, dans la maison ? Jean Mallot sera-t-il  le prochain président des français ? A quoi servent les passions si on ne peut les dire ? Que fait cette dame dans mon manteau ? L'outrance est-elle drôle ? Etes-vous informés sur le ptz ? Etes vous chat, tigre ou chien ? Qu'est ce que le polyphème ? Connaissez-vous le jeu de triominos ? Y-a-t-il parmi les lecteurs un garçon bricoleur qui s'y connaitrait en plomberie ? Doit-on s'en remettre à l'absurde ? Etes vous jaloux ? Pour ou contre le thermalisme ? Est ce qu'on peut se battre correctement à l'intérieur d'un système qu'on dénonce ? Qui coupera la tarte ? Quel est le compte qui ne peut jamais avoir un solde créditeur ? La mémoire peut-elle se contenter du travail de l'historien ? Comment faire pour qu'on ne me pique pas  l'homme que j'aime ?  L'art nous détourne-t-il du réel ? Qui me donnera la preuve que j'existe ? Pourquoi les léopards ont-ils des tâches ? Ecrire quoi ? Etes vous candidat au coup de foudre ? Suis je plus visible qu'audible ? Si vous étiez une pomme de terre, laquelle seriez vous ? Qu'est ce qu'une corne de gatte ? Sachant  que pour écrire les numéros de pages d'un journal qui a 12 pages on utilse 15 chiffres, Combien utilise-t-on de chiffres pour écrire les numéros de pages d'un livre de 1001 pages ? Comment apprivoiser l'ennui ? Met-on un trait d'union à sens dessus dessous ? Comment faire pour faire chauffer les chapatis si l'on n'a pas de gaz ? L'ai-je assez aimé ? Pourquoi les anglo-saxons mettent-ils des majuscules partout ? Faut-il rattacher l'enfant majeur étudiant au foyer fiscal ou déduire une pension alimentaire ? Peut-on se passer du nucléaire ? Le bruit blanc véhicule-il un sens ? A partir de quel âge est-on vieux ? Le rap et le tag peuvent-ils être de l'art ? Connaissez-vous la recette du "Piof" ? Que devient mon poing lorsque ma main est ouverte ? Existe-t-il des êtres qui pensent ailleurs que sur la terre ? Les gens moqueurs sont-ils méchants ? Quelle est la différence entre l'ebe et l'ebidta ? Le dégoût est-il une forme d'attirance ? Peut-on aimer toute la vie quelqu'un qui ne vous aimera jamais ? Le néant est il toujours absolu ? Les rillettes sont-elles des fruits ou des légumes ? Doit-on revoir ses ex ? Qui sont les "vrais gens" ? Les idées chevillées au corps viennent-elles du cerveau ou du corps ? Qu'est ce qu'un transcendant satrape ? Où finit le système solaire ? Doit-on dire "je vous serai gré" ou "je vous saurai gré" ? L'épithélium 26 est-il bon pour le capiton plantaire ? La nature est-elle dégoûtante ? Faut-il obligatoirement agir pour se sentir utile ? Comment dessaler une poitrine de porc ? Que pensez vous apporter à notre société ? En quel honneur la femme pourrait-elle se prétendre l'égale de l'homme ? Aimeriez vous vivre au val d'Aoste ? Les vérités mathématiques constituent-elles le modèle de toute vérité ? Si je viens en voiture est-il possible de me garer sur la place ? Qu'est ce qu'une illusion populaire ? Pourquoi malgré toute ma bonne volonté je n'arrive pas à me téléporter ? Quelle est la valeur d'un franc en euro ? Qu'est ce qu'une question philosophique ? La cravate est-elle démodée ? Le seïsme japonais a-t-il modifié la durée du jour ? Quand vous souriez en téléphonant, vous téléphonez à qui ? Où va l'eau ? Pour ou contre la télé-médecine ? Avez-vous une démarche ? Peut-on refaire sa vie à 65 ans ? Que font-ils de notre argent ? Comment appliquer un syllogisme à la vie pratique ? Pourrait-on espérer des moments meilleurs si on ne les avait pas perdus ?  Existe-t-il une théorie générale des questions ? Oui ? Non ? Pourquoi ? What else ?

Photos : Des bestioles sur fond gris rasent les pâquerettes (hors champ ou hors-chant) quelque part (je ne sais plus où exactement) du côté de la forêt Morand, dans le 6em arrondissement de Lyon. Pas sûr que les nettoyeurs aient laissé vivre les deux castors. Seules resteront les questions. Pourquoi certains jours les fourmis ressemblent à des castors ? Pourquoi ne dit-on pas des castors plein la tête ? Etc.. Etc...

©Frb 2011.

samedi, 15 janvier 2011

Persévérance

Il faut imaginer Sysiphe heureux

IMG_0130.JPGIMG_0129.JPGIMG_0130.JPGIMG_0129.JPGIMG_0130.JPGIMG_0129.JPGIMG_0130.JPGIMG_0129.JPGIMG_0130.JPG

 

Photos : Le pied du mur insiste et signe, heureusement les injonctions sont roses. Elles ont été photographiées dans une rue des pentes à Lyon (j'ai oublié son nom) menant au sommet de la colline qui travaille évidemment  (un peu de la coiffe et du pinceau). Il manque peut être la girafe (?) elle n'est pas loin, (au parc de la tête d'Or exactement, avec les Watusis), on la sortira peut-être au printemps, si il fait beau. © Frb 2010.

dimanche, 18 juillet 2010

Rubans

Le train de nouveau le veau spectacle de la tour du beau je reste sur le banc qu'importe le veau le beau le journal ce qui va suivre il fait froid j'attends parle plus haut des coeurs et des feux roulent dans ma bouche en marche et des petits enfants dans le sang [est ce l'ange ? Je parle de celui qui s'approche] courons plus vite encore toujours partout nous resterons entre des fenêtres noires.

TRISTAN TZARA, extr. "Vingt-cinq poèmes" achevé d'imprimer en 1918 chez J. Heuberger pour la Collection Dada, Zurich, Zeltweg 83.

urubu0033 bis.jpg

La glace a pris le pouls du coeur des frondes. La forêt maculée de sang et peuplée d’exploiteurs d'enfants est sauvée par ce point qui mène à la caverne où l'autre, un transhumant, trace des lignes sans cesse. Dans sa main un fusain, dans l’autre une palette, il sème des pigments bleus où mûrissent des hommes à tête de chiens, de veaux. Il chrome les parterres d’éclipses et de comètes, renverse toutes les encres pour camoufler l'îlot qu'on dit de rêve sur lequel s'inviteront un jour des créatures d’un autre temps, peut-être. Aux veines capiteuses des peintures, s’emmêlent le délié fin des lianes, les coquillages et leur poison. On effleure des bambous haut de plus de vingt mètres. On ne rembourse rien. On ne revient jamais. Le voyage est gratuit pour chaque volontaire. On le couche dans l'herbe, on le nourrit de baies. On l’emmène dans les mondes où il vivait naguère, lécher les gouttes de rosée sous les draps qui sèchent au soleil, embaumés des étreintes, des voluptés d’hier... Vanilles, préciosités, notes d'ambre, aldhéhydes. La rivière est couleur de menthe acidulée. On le trempe, on le baigne. A ces ébauches molles se mêle un joug épais comme celui d’une plaie fondue sur l’épiderme. L'être vain se refait. On le peint sur la pierre. Et les corps n’y résistent pas. Ils perdent leur substance, roulent dans l'avalanche. Déconstruits enfin, purs, on effacera la trame de tout leur mouvement, la mémoire et les charmes. On anéantira définitivement le mystère. On fera retomber ce pan. Sur la ligne où va le courant, un autre vient, trace des lignes sans cesse. Dans sa main un fusain, dans l'autre une palette. Il chrome les parterres d'éclipses et de comètes, puis sculpte des squelettes dans les plis de ces pierres qui revivent enfin, gorgées de sel et d'eau. L'aubaine s'acquitte bien, jouxtant les fausses plinthes. Ce ruban dès demain s'enroulera sur lui même.

Photo : Petite complainte de mon obscurité (la complainte de Tristan est un petit peu plus grande) ou crucifixion (?) en presqu'île, entre la Tupin et la Ferrandière. Ex quartiers chauds devenus chouïa sibériens. Graff bleu sauvage, ou peut-être sacrifié anonyme dessiné à l'arrache, entre les nuits, le jour. Photographié au début de l'été 2010 à Lyon. © Frb.

lundi, 12 juillet 2010

Des fourmis plein la tête (part 2)

A propos de quelques questions recueillies au hasard dans les livres et dans les magazines...

Pour consulter la part 3 des fourmis plein la tête vous pouvez cliquer sur l'imageIMfourmis19BB.jpg.

Sommes nous certains ou non d'une réalité matérielle extérieure ? Le gaullisme a-t-il encore un avenir ? Manies tu bien ta souris ? Qui est Gaëtan Mouche ? Qu'est ce qu'un amortissement dégressif ? Suis je responsable d'autrui ? Où se jette la Meuse ? La croyance est-elle une faiblesse d'esprit ? Faut-il brûler Anna Uméni ? Le forex est-il rentable ? Le futur existe-t-il déjà ? Pour ou contre les abrasifs ? Faut-il avoir peur des astéroïdes ? Qui occupe le poste 4 ? De combien faut-il réduire le temps de cuisson entre un four traditionnel et un four à chaleur pulsée ? Que pensent les hommes des femmes qui couchent le premier soir ? La pataphysique est-elle une science ? Peut-on vivre plusieurs vies en une journée ? Lorsqu'il n'y a plus rien à faire que faites vous ? L'anxiété est-elle une maladie ? Pourquoi attendre demain ? Est ce que beaucoup remercier n'est pas encore une façon de demander ? L'arme est-elle l'ennemie de son maître ? Comment connaître le périmètre d'un triangle équilatéral qui est dans un hexagone de 4cm de coté avec la propriété de Thalés ? A qui se confier ? Qu'est ce que la rancune ? Quelle est la date précise de la foire de la petite angevine à Beaupréau ? L'asthénosphère est-elle respirable ? Peut-on comparer le cerveau de certaines personnes à un grenier ? Quelle est la limite de l'amour ? Quelle mer baigne la France à l'ouest ? Qu'est ce qu'une galerie marchande conceptuelle ? Un homme peut-il faire l'amour plusieurs fois par jour après cinquante ans ? Comment procéder pour que mon hamster doré puisse faire de la roue sans renverser la cage ? Qui êtes vous pour me parler sur ce ton ? Etes vous achluophobe ? Ou se trouve la sonde lambda ? Pour combien je vous en mets ? L'âme est-elle la meilleure partie de nous même ? Où trouver des épingles à chignon vintage ? La sobriété des dirigeants sera-t-elle un critère pour retenir les prochains lauréats de notre trophée ? Seriez vous prêt à manger des insectes s'ils étaient bien cuisinés ? Qu'y a t-il donc de changé à ma situation ? Peut-on aimer quelqu'un qui est toujours absent ? Est ce qu'on peut habiter le temps ? Avez vous fait la vaisselle ? Pourrais je me faire tatouer la Joconde grandeur nature sur le visage ? Qu'est ce que l'immaturité affective ? Dans une usine de futons, puis-je être sûre de passer à côté d'un lit sans ciment ? Désirez vous un petit apéritif avant que nous passions à table ? Qu'est ce qu'un trésor de sapience ? Peut-on apprendre à un vieux singe à faire d'autres grimaces ? Sommes nous faits l'un pour l'autre ? Que voulez vous dire exactement par "faire des tranches" ? Tout être humain a t-il obligatoirement besoin de tendresse ? Le passé est il comme de la poussière ? Où trouver du parchemin végétal ? Doit-on punir les gens qui n'aiment pas le travail ? Notre conscience existe-t-elle avant d'arriver dans un corps ? Mes oies pondent dans la mare que faire ? Quelqu'un pourrait il venir m'aider à installer mes étagères ? Savez vous bien mentir ? Pourquoi avez vous fait la vaisselle ? Que représente pour vous le chiffre 476 ? Qui sont les vrais fous ? Le nouveau passeport biométrique est-il acceptable ? Quarante mille est ce assez ? D'où provient le fait qu'un robinet, ouvert à moyenne pression, est bruyant ou silencieux ? Ce qui est inséparable peut-il rester longtemps séparé ? Peut-on penser sans image ? Peut-on s'aimer sans se comprendre ? Qui façonne les objets ? Pourquoi l'arbre ne pourrait-il pas s'appeler Plouplouche et Plouploubache quand il a plu ? L'écrivain a t-il la langue chargée ? Sommes nous nécessaires ? Peut-on faire une oeuvre avec un os de sèche ? Quand avez vous fait la vaisselle pour la dernière fois ? Comment casser la logique dualiste ? Les années lumière seront elles nos meilleures années ? Le pire est-il caché ? Lorsqu'un système est totalement désordonné, a-t-il atteint son maximum d'entropie ? Comment se retrouver ? Le bonheur se vit-il nu ? L'inconscient est-il infini ? Suis je plusieurs ? A qui appartiens tu ? A quelle heure dois-je faire sonner le réveil ? Qui décide ? De quoi parlions nous ? Vous pouvez répéter la question ? Plaît il ?...

(A SUIVRE...)

Photo : Des bestioles sur fond bleu rasent les murs du côté de la rue D'anvers pas très loin de l'excellente Galerie Roger Tator, dans le 7em arrondissement de Lyon, photographiés en Juin 2010.© Frb.

mardi, 04 mai 2010

Mes nuits sans Oscar Wilde

"On devrait toujours être légèrement improbable".

OSCAR WILDE in "Aphorismes". Editions Mille et une nuits. 1997.

IMG_0114.JPG

Là bas la nuit remue, ici elle est muette. Dans le hameau de Philippe J. il y a des pommiers des poiriers et des haies. "Comment peux tu aimer les haies toi qui écoutais "Man machine" ? Comment peut on tomber si bas"?. M'a t-on dit alors que la nuit s'étendait sur chaque chose et nous trouvait déjà tous à moitié ensevelis. La nuit fait tourner les électrophones, on me reparle du passé de ce temps où l'on "s'amusait", tous au réduit bien rabotés, il se peut que nos années folles, à flamber des sticks, à trinquer, furent juste celles du mortel ennui, cette nostalgie a fait école. Vingt ans, trente ans après, la déglingue fait encore rêver. Ô temps bénis ! tous les gri-gris ont fait école. La mère de famille de 40, de 50 ans même, gentiment décoiffée en ressortirait son kilt en zèbre. Une larme versée sur l'autre mouture du Cabaret Voltaire et puis dandinant son popotin entre zèbres et damiers elle irait vider le lave-vaisselle.

Ils sont anciens, ils ne tiennent pas la nuit. Ils travaillent le lendemain. ils portent le fruit d'un vieux bazar comme la grande histoire de leur vie Ils osent affirmer haut et fort "qu'il ne s'est rien passé de bien depuis". De bien ? Et depuis quand ? Sommes-nous venus sur terre pour savoir ce qui se ferait de mieux depuis ? La qualité n'est à personne. L'avant-garde est derrière. La nuit revient. Le charbon se frotte à l'alcool, d'autres n'en boiront plus jamais, épuisent la paire de hanche d'une bouteille de Perrier. Tout baigne.

Avec mon sécateur dans notre appartement, je taille les haies de Philippe J. Je dois lui rapporter au hameau très précisément lundi une haie presque parfaite. Georges allongé sur le tapis, me demande "Où as tu trouvé ce chat ?" "Mais quel chat ?  Mon pauvre Georges, c'est bien triste comme tu déraisonnes, à ton âge tu devrais arrêter." Georges insiste, "Oui, un chat il parait qu'il miaulait sous la pluie". A quelques mètres un peu plus bas, le Cendrars de la tante Yvonne griffe chez Léon, "les dernières colonnes de l'église". Le temps d'écorcher les consonnes. Georges me dit que le chat est parti. "Où a t-il pu aller ?". Pourtant j'aurais juré qu'il se plaisait chez nous. Mais Georges rectifie. "Chez nous c'est pas ici". "Ah bon.". Il est 2H37. Les amis de Georges n'ont pas rappelé, Oscar surtout on l'attendait. Il y a grosse bringue au Macumba de Craponne avec l'orchestre "Décontraction" et les "Crazy boots" reformés. Se pourrait-il qu'on nous oublie ? Je prends le "Libé" d'un vieux lundi, j'épluche des pommes, sur la photo de Sarkozy. Philippe J. Sarkozy font des reflets sur le génépi, des flots verdâtres irisés d'or. Georges me dit qu'il faudrait que je finisse de tailler la haie avant que le jour se lève ou au plus tard lundi. "Tu sais bien que ce lundi t'as ton cours de frisbee". "Tu as raison". Mais je pense en moi même que tailler une haie, c'est davantage un boulot d'homme. La tête prise dans un rayonnage, je cherche un truc qui commencerait par Art. Art Blakey, Art Tatum... Peut être Art Zoyd. Ca serait bien pour se donner du courage. Art ensemble of Chicago et nous voilà sonnés des cloches. On s'offrirait bien une virée dans un gros tas de coussins à franges. Mais le temps presse.

IMG_0115.JPG

"Sur l'autre versant orienté au midi il paraît qu'il n'y a pas un arbre". Georges a lu ça derrière la carte postale d'Ernest, avant de goûter une toute nouvelle boisson dont l'effet paraît il dure plusieurs heures. Il s'agit pour lui d'atteindre l'autre versant et de revenir. Maintenant il traverse le salon assis sur son éléphant blanc. Il me  demande "ça te gêne pas ?. "Pense tu ! moi ça m'est complètement égal". Mais c'est peut-être plus embêtant pour les voisins du dessous. Les Ducorchet, Guy et Annie, ceux qui ont collé un village schtroumpf sur leur porte d'entrée et quelques décalcomanies autour de leur sonnette, des dinosaures, principalement. Georges me dit que les gens sont hyperbizarres aujourd'hui. Il a raison. Ils ne veulent pas admettre qu'on fasse du bruit au dessus de leur tête. "Peut-être qu'ils n'aiment pas mon éléphant blanc ?" Georges s'assombrit (je sens que ça lui fait de la peine), je le console. "C'est quand même moins pire qu'un effraie". Tu te souviens Juin 1953 ? Quand Philippe J. est venu chez nous, avec son effraie sur l'épaule ? Les Ducorchet à leur fenêtre, ils faisaient une de ces tête !". Je me souviens. Philippe J. avait composé un poème. Son effraie l'inspirait. "Philippe J .était assis là , exactement là où je suis. Sur cette chaise là, dans cette même cuisine". Georges m'écoute, perplexe. Il paraît médusé, m'interroge toujours. " Tu te souviens de ça toi ?". "Ben ouais !". "Mais permets moi de te signaler qu'en 53, t'étais pas née". "Et alors ? Qui ça gêne ?".

Je reprends mon souvenir, au point je l'avais laissé, j'en suis à la moitié. Ca coincide exactement avec la moitié de ma haie. Ce poème, Georges, dis je, tout continuant de cisailler des feuilles sèches, je vais te dire, tu vas pas me croire, eh ben... Sur les 8 phrases qui le composent, 3 seulement voient leur fin coïncider avec celle d’un vers. Les enjambements sont multiples. Pas moins de 9 enjambements sur 15 vers. C'est pas super ça ? Qu'est ce que t'en dis  ?". Georges m'embrasse, me trouve exceptionnelle. Il me demande, "Et ce poème, tu le connais ?". "Je le connais par coeur pardi ! Prête moi ton éléphant deux secondes, allez ! viens près de moi que je te le récite." L'effraie, c'est vrai, ça se mérite et ça mérite d'être assis bien plus haut que sur une chaise pour le dire, pour l'écouter. Nous nous installons tous deux tant bien que mal sur le dos de la bête. "maintenant, Georges tais toi. S'il te plaît, écoute ça" :


La nuit est une grande cité endormie

où le vent souffle... Il est venu de loin jusqu'à

l'asile de ce lit. C'est la minuit de juin.

Tu dors, on m'a mené sur ces bords infinis,

le vent secoue le noisetier. Vient cet appel

qui se rapproche et se retire, on jurerait

une lueur fuyant à travers bois, ou bien

les ombres qui tournoient, dit-on, dans les enfers.

(Cet appel dans la nuit d'été, combien de choses

j'en pourrais dire, et de tes yeux...) Mais ce n'est que


l'oiseau nommé l’effraie qui nous appelle au fond

de ces bois de banlieue. Et déjà notre odeur

est celle de la pourriture au petit jour,

déjà sous notre peau si chaude perce l’os,

tandis que sombrent les étoiles au coin des rues.

 

"Alors ? Ca le fait ? Non ? ". Georges répond, "Ben, punaise !". Il est 4H40. Ma haie est presque terminée. Le chat est revenu, Georges a replié son éléphant, et ni vu ni connu. Guy Ducorchet fait sonner son réveil. On entend pleurer ses gamins. Le jour va pas tarder. Notre peau est si chaude, profitons. Georges dit "j'en reviens pas de l'effraie comme c'est chouette". Georges est drôle et j'aime rire. En bas on entend les klaxons, c'est les potes qui rappliquent du Macumba de Craponne, d'en bas ils nous crient de descendre. On voit un vieux punk de 44 ans avec une crête rose sur la tête, agiter ses bras joyeusement. "V'nez ! v'nez (qu'il dit), il y a une "after" au Palace de Couzon, les "Crazy Boots" vont faire un boeuf avec les 'Trashy Dolls", un truc unique, putain de ta mère !  le tout remixé par D.J Cooking en Vijing, et puis y'aura des performers, des activistes, des artistes d'avant-garde qui organisent une orgie dans une piscine remplie de ketchup et de bière, c'est gratuit, c'est interactif. Allez v'nez ! c'est le truc qui faut voir en ce moment". J'ai fini de tailler ma haie. Il est temps de nettoyer le sécateur. Demain j'appelerai Philippe J. pour savoir à quelle heure je peux aller au hameau. Je lui porterai sa haie. Je pense même que j'irai à vélo. On entend de loin le pote à crête, siffler brailler, Ricky klaxonne. Tous les copains, en perfectos, santiags, et débardeur fluos, dont certains cinquantaine bien sonnée, se font tourner le rhum au goulot, agglutinés dans les voitures. "Une after ! ah putain !" on y va ? vous suivez ?". Georges crie de la fenêtre "ok ça roule ! on arrive on vous suit". Il me dit "Ferme moi vite cette fenêtre !". Il est 6H00. Annie Ducorchet hurle sur ses gamins. La porte à schtroumpfs et dinosaures claque et reclaque sans cesse. On entend entre les cloisons, l'indicatif de RTL (ça fait au moins cent ans que c'est le même). Un nuage de cendre. Sarkozy, la retraite, Sarkozy et la dette... Déjà les premiers camions des poubelles. Je goûte une pomme. "Finalement j'aime mieux la Granny Smith que la Royal Gala, et toi ? Qu'est ce que t'en penses ?". Georges acquiesse distraitement tout en relevant notre courrier mail. Il lit grosso modo tout haut. "Joachim est au bord du Tibre il dit que "les flots tordus ondoient". "C'est tout ?". "Ouais, à part ça il a vu un torrent avec des flots écumeux, il t'embrasse". "L'effraie de Philippe J. a fait trois petits. Tu les verras quand tu lui porteras sa haie." "Ah ouais ? Super !". Je me demande comment exactement on appelle le petit de l'effraie. "Tu le sais toi ?". Georges ne sait pas, il dit que c'est le dernier de ses soucis. Il poursuit l'inventaire: "Oscar s'excuse, il avait une rhino, c'est pour ça qu'il n'est pas venu cette nuit." Je dis " Ah ça c'est con". "Oui c'est très con". Je ramasse les épluchures qui trainent sur le nez de Sarkozy. Georges me prend la main. "Et si tu nous faisais une tarte Tatin ma chérie ? "Les étoiles sombrent entre les rues". Je mets un disque des Redwood Plan. "Oui, mon amour, va pour une tarte Tatin!".


THE REDWOOD PLAN :"Something to prove"
podcast

 

Photos : "Soyons" (photo 1). "Réalistes" (photo 2). Graffs vus dans l'impasse jouxtant ma propre maison (quel toupet!).  Lyon. Croix-Rousse. Mai 2010. © Frb.

samedi, 30 mai 2009

Mai 2664 ???

MAI 2664.JPGPour terminer le mois de Mai : une vraie note d'espoir :

NOUS FERONS LA REVOLUTION EN MAI 2664 ! (camarades !)

Le temps de digérer 68, (Mai 1968 !), de laisser couler l'encre, l'eau sous les ponts, nos amours, la Seine, la Saône, de réecouter Grateful Dead, Le temps de lire tout Philippe Bralo, Le temps de se refaire un hénné. Le temps de replanter les cerisiers ...

Je vous donne donc rendez-vous en Mai 2664, sur la place où vous savez. On va tout faire péter, on va leur montrer qui on est . (Heureusement que je ne sais pas compter, sinon je ne sais pourquoi ce billet aurait quelquechose de désespérant...)

Mais je ne sais pas compter. Donc tout va bien.

Photo: Objet posant devant son graff, le tout comme un présage. L'avenir se lit au coin de la rue, arrêtons de chercher notre avenir dans la boule de cristal, "tout est là, petit scarabée"(c.f Kung Fû) "Pour comprendre il suffit de regarder" (disait le vieux marchand chinois qui me vendît mon Mogwaï). Enfin quoi ! un graff, une bière, c'est toujours ça et quelques plans sur la comète vus de notre objectif (gnomique), sur un mur de la rue René Leynaud à Lyon en Mai 2009.© Frb.

jeudi, 26 mars 2009

Où est le mal ?

"Où me laissé-je emporter, insensé que je suis ? Pourquoi marcher à l'ennemi la poitrine découverte ? Pourquoi me dénoncer moi- même ? L'oiseau n'enseigne pas à l'oiseleur les moyens de le prendre ; la biche n'apprend pas à courir aux chiens qui se jetteront sur elle. Que m'importe mon interêt ? Je poursuivrai loyalement mon entreprise et donnerai aux femmes de Lemnos * des armes pour me tuer"

OVIDE. Extr: "Laisser croire aux amants qu'ils sont aimés" in " L'Art d'Aimer". Société d'édition "Les belles lettres" 1960.

co mercredi.JPG

"L'Art d'Aimer" d'OVIDE (un petit peu détourné), a fortuitement croisé une image problématique au coeur de la presqu'île près de ces petites rues qui bordent Saint Nizier (et son église de style gothique flambloyant). Ce quartier fût jadis, celui des dames aux moeurs légères qui offraient aux messieurs en l'échange de quelques francs anciens et nouveaux, toutes sortes d'illusions, des plus sophistiquées aux plus élémentaires... Certains d'entre-eux, me raconta Christine, (une pute affranchie, tapinant dans sa rue mais aussi, excellente voisine de palier à cette époque désormais révolue), ne venaient que pour s'asseoir à côté d'elle, ressentir la chaleur humaine et écouter quelques mots doux, qui, pour un tarif un petit peu plus élévé, pouvaient être murmurés jusque dans l'oreille ! Certaines de ses collègues, moins compatissantes, surtout moins affranchies, laissaient les bougres dans l'escalier, et n'acceptaient de recevoir que les gars pour la bagatelle, à l'abattage, vite fait, bien fait. Il était sans doute plus compliqué pour elles d'offrir à leurs clients un mensonge habillé, écouter ou parler, juste cela, plutôt que de coucher sans la moindre empathie au prix d'une prestation choisie. C'était donc, Christine cette doyenne, "affranchie au grand coeur", qui recevait les malheureux ; dont certains exigeaient qu'elle leur fasse des... promesses, tarifées bien sûr et jamais tenues. D'autres encore, les mal mariés, les esseulés, abandonnés, venaient la "consulter" (certains même, une fois par semaine, comme chez la coiffeuse ou le psy) pour être simplement consolés. Cela leur suffisait. Et puis ils repartaient heureux, de quoi "tenir" quelques jours, ou un très court instant, peut-être, s'imaginer, aimés... Enfin , c'est ce que nous racontait Christine, une fois sa journée terminée, tandis qu'elle nous offrait le thé, dans cette chambre à la fois miteuse et coquette, au plafond délavé orné de frises adhésives en forme de roses, dans cette pièces à l'odeur indéfinissable, dont les fenêtres qui fermaient mal avaient été camouflées, par de jolis voilages organza floqués fleurs où mille secrets d'Amour et de misère humaine semblaient peser plus lourd que toute la fornication, les vices, ou simplement le sexe, en ces vagues virées éphémères... Fin de partie croisée, digression pour OVIDE : "Laisser croire aux amants qu'ils sont aimés"...

Quant aux femmes de Lemnos * dit la légende, sous le règne de HYPSIPYLE (petite fille de DYONISOS), elles furent punies par APHRODITE pour avoir négligé son culte, la déesse offensée, les affligea d'une odeur insupportable, ce qui inspira aux maris le dessein de les abandonner. Les Hommes préférèrent suivre les belles captives de Thraces et les femmes de Lemnos (les lemniennes) indignées, se vengèrent à leur tour en faisant égorger une nuit, tous les Hommes de leur île. Sauf un ... Mais ceci est une autre histoire. Celle des femmes de Lemnos, nettement moins "fleur bleue" que la pourtant triste vie de Christine en sa presqu'île à Saint Nizier... Les deux sans correspondances spéciales; sinon vaguement l'Art d'aimer... Et si ce n'est pas de l'Art, qu'est ce que c'est ? ...

Photo : Collage à motifs symboliques, posé sur cette saleté de mal (et de mur) où le mauvais sang glisse, comme la bile noire dans tous les genres de mondes où vivent l'Homme et les Femmes. Géant carapacé d'armure, unique et fort portant sur une lame deux petites créatures nues, innocentes et fragiles (évidemment...)  A noter au passage le fameux coup de crayon ;) de l'artiste. Merci à lui. Vu à Lyon, je ne sais plus si c'est rue de la Fromagerie, de la Poulaillerie ou bien rue Longue, (encore 3 mondes assez distincts, baptisés sans chichis) ; au début du mois de janvier 2009. © Frb.

jeudi, 19 mars 2009

On croyait l'art à la masse mais non...

art rue.JPG

IMG_0071_2.JPG

"L'art est à la rue"... Et les artistes aussi !

Cela étant, je laisse au lecteur avisé le soin de la double lecture, la situation étant grave mais pas désespérée, n'est-ce pas ?

Photo : Les escaliers de la butte ( finale ?) sont désormais très rude aux miséreux (c'est à dire aux artistes et à tous les autres, les très nombreux...).

Des mots justes, croisés montée de la Grande Côte à Lyon. (Merci et bravo aux graffeurs). Un conseil aux balladeurs lyonnais, ou à ceux de passage : Pour bien voir cette série (car il y a série tout comme une banderolle), il faut marcher la tête en bas (encore plier l'échine, baisser les yeux, comme toujours) et, au niveau d'un petit mur, longeant une terrasse, presqu'en face du "Trokson" (qui fait bureau de tabac très tard, salle de concert parfois, avec accueil très chaleureux)... Tout en bas, donc, sur votre droite, vous trouverez "à la rue" un peu de rouge, un peu de bleu ,un peu de rouge, un peu de bleu etc... Mots bleus pour une alerte rouge, vus, à la remontée de la pente qui mène au bon plateau de la colline travailleuse, ce jeudi 19 mars 2009. © Frb

vendredi, 06 mars 2009

Boulangerie - Tapisserie

la boulangerie fait tapisserie.JPGLa boulangerie fait tapisserie les jours de fermeture.

Photo: Vieux monde et nouveau monde exposés en remix, sur une ancienne façade de la colline travailleuse. Quand la rue des Pierres-Plantées se prend pour le Bronx, mais ne mène pas ailleurs qu'au Boulevard de la Croix- Rousse, sans ses bruits de métiers mais encore sous la protection de feu l'inventeur Jacquard (en statue), d'un vieux manège, d'un gros caillou. Le tout hors champ, vous vous en étiez aperçus, j'espère... A découvrir toujours tout droit et toujours en montant... Lyon, mars 2009 © Frb.

mardi, 03 mars 2009

Les mots mystérieux...

IMG_0122.JPG

Vu sur un tout petit mur près des arrêts de bus, le long du fleuve Rhône, côté presqu'île : un ruban. Un tourment...

Photo: Lyon, à quelques mètres du pont Morand. Mars 2009.© Frb.

jeudi, 22 janvier 2009

Mine de rien...

IMG_0015.JPGCe qu'il fallait montrer (ou démontrer)... Certaines promenades se suivent et nous rassemblent, combinant imperturbablement la logique au hasard de notre présence. Notre lot ? Cela scotcherait net si nous n'étions pas saturés d'images plus séduisantes les unes que les autres (Ah ! les soldes!). Mais ce graff là, à croquer sans attendre; sorti du petit monde à la mine de plomb (le plus beau) d'un graffeur anonyme, dont le tracé manuscrit semble fragile, est particulièrement touchant vu d'une rue où tout s'inscrit officiellement en gros. Emouvant peut être aussi par la grâce de ces deux mots qui changent tout, ce chaleureux : "Allons amis"...

Après le crayon à papier, il faudrait bien songer à un "crayon à mur" ou comme le proposait ALEX à un retour des petites ardoises (avec craies) à disposition de tous, dans les rues ou plus précisément sur les murs. Je profite de la bonne aubaine pour dédier amicalement ce billet à Alex et son grain à moudre si cher à certains jours.

P.S : Alex, de notre "fief" de Lyon, nous transmettons ta proposition à monsieur le maire... S'il ne veut pas nous voir écrire sur les murs (et il ne voudra pas ), s'il trouve trop couteux "le plan ardoises de Lyon 2009", peut-être pourrons-nous lui proposer qu'il mette à disposition de son peuple, des feuilles volantes et quelques petits pots de colle ? Ca tombe bien il s'appelle "Colomb" (Et chez nous on ne prononce pas le b final). Prenons ça pour une injonction...  Tout de suite, là, maintenant ! Amis, allons...

Photo: Surface tout aussi fraternelle qu'une page écrite sur un cahier de brouillon. On imagine presque derrière ce mur, la table de multiplication classiquement jointe au verso des dits cahiers. Vu Rue Pizay dans la presqu'île de Lyon. Aujourd'hui. 22 Janvier 2009. © Frb.

samedi, 15 novembre 2008

Sacre bleu

revol.pngCalligraphie pastelle sur les pentes. La révolution de novembre appliquée aux couleurs tendres... Sur les pavés, le bleu du ciel. La plage est encore loin, mais les cerises du septième sel, elles, ne sont pas bleues. A VOIR ICI

Photo: Montée de la Grande Côte, Pentes de la Croix-Rousse à Lyon. Novembre 2007 ©.

Autres temps, music and words: ICI

Autres couleurs, un extrait du "Fond de l'air est rouge": ICIUn extrait de rétrospective, (du rouge encore, avec peut -être, rêve de maison bleue) : ICI

jeudi, 13 novembre 2008

le pouls d'Elsa

IMG_0079.JPG

A noter pour laisser une infime chance à cette Pauvre Elsa, que j'ai tronqué une partie de ce graff,  la phrase entière ne tenant pas dans l'objectif, elle vous en dirait une bien bonne, aux antipodes de celle là. (Que mes amis graffeurs me pardonnent!) Ceci n'est pas, pour autant un mea culpa ;-)

Photo: graffs et philosophie, montée de la Grande-Côte à Lyon. Novembre 2008 ©

A suivre billet ci dessous...

mercredi, 12 novembre 2008

Comme un mercredi ( tête au carré )

IMG_0081.JPGVu Montée de la grande-Côte à Lyon, un graff minimal transformant l'élément du paysage pour tirer au bout de sa flêche, un petit bonhomme clivé.

21st century schizoïd Man?