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mardi, 30 décembre 2014

On rentre à la maison

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Le psychologue - et a fortiori le philosophe - donne peu d'attention aux jeux des miniatures qui interviennent souvent dans les contes de fées. Au regard du psychologue, l'écrivain s'amuse en fabriquant des maisons qui tiennent dans un pois chiche. C'est là une absurdité initiale qui situe le conte au rang de la plus simple fantaisie. En cette fantaisie, l'écrivain n'entre pas vraiment dans le grand domaine du fantastique. L'écrivain lui-même, quand il développe - souvent bien lourdement - son invention facile, ne croit pas, semble-t-il, à une réalité psychologique correspondant à de telles miniatures. Il y manque ce grain de songe qui pourrait passer de l'écrivain à son lecteur. Pour faire croire, il faut croire. Vaut-il la peine, pour un philosophe, de soulever un problème phénoménologique à l'occasion de ces miniatures "littéraires", de ces objets si aisément diminués par le littérateur ? La conscience - celle de l'écrivain, celle du lecteur - peut-elle sincèrement être en acte à l'origine même de telles images ? À ces images, il faut bien cependant accorder une certaine objectivité, du fait seul qu'elles reçoivent l'adhésion, voire l'intérêt, de nombreux rêveurs. On peut dire que ces maisons en miniature sont des objets faux pourvus d'une objectivité psychologique vraie. Le processus d'imagination est ici typique. Il pose un problème qu'il faut distinguer du problème général des similitudes géométriques. Le géomètre voit exactement la même chose dans deux figures semblables dessinées à des échelles différentes. Des plans de maison à des échelles réduites n'impliquent aucun des problèmes qui relèvent d'une philosophie de l'imagination. Nous n'avons même pas à nous placer sur le plan général de la représentation, encore que sur ce plan il y aurait grand intérêt à étudier la phénoménologie de la similitude. Notre étude doit se spécifier comme relevant sûrement de l'imagination. Tout sera clair, par exemple, si, pour entrer dans le domaine où l'on imagine, on nous fait franchir un seuil d'absurdité. Suivons un instant le héros de Charles Nodier, "Trésor des fèves", qui entre dans la calèche de la fée. Dans cette calèche, qui a la dimension d'un haricot, le jeune homme entre avec six "litrons" de haricots sur l'épaule. Le nombre est, ainsi contredit en même temps que la grandeur de l'espace. Six mille haricots tiennent dans un. De même quand le gros Michel entrera - avec quel étonnement ! - dans la demeure de la "Fée aux miettes", demeure cachée sous une touffe d'herbe, il s'y trouvera bien. Il se "case". Heureux dans un petit espace, il réalise une expérience de topophilie. Une fois à l'intérieur de la miniature, il en verra les vastes appartements. Il découvrira de l'intérieur une beauté inférieure. Il y a là une inversion de perspective, inversion fugitive ou plus prenante, suivant le talent du conteur et la puissance de songe du lecteur. Sou- vent trop désireux de conter "agréablement", trop amusé pour aller à fond d'imagination, Nodier laisse subsister des rationalisations mal camouflées. Pour expliquer psychologiquement l'entrée dans la demeure en miniature, il évoque les petites maisons de carton des jeux d'enfant : les "miniatures" de l'imagination nous rendraient tout simplement à une enfance, à la participation aux jouets, à la réalité du jouetL'imagination vaut mieux que cela. En fait, l'imagination miniaturisante est une imagination naturelle. Elle apparaît à tout âge dans la rêverie des rêveurs nés. Précisément, il faut détacher ce qui amuse pour en découvrir les racines psychologiques effectives. Par exemple, on pourra lire sérieusement cette page de Hermann Hesse publiée dans la revue Fontaine (n° 57, p. 725). Un prisonnier a peint sur le mur de son cachot un paysage : un petit train y entre dans un tunnel. Quand ses geôliers viennent le chercher, il leur demande "gentiment qu'ils attendissent un moment pour que je puisse entrer dans le petit, train de ma toile afin d'y vérifier quelque chose. A leur habitude, ils se mirent à rire, car ils me regardaient comme un faible d'esprit. Je me fis tout petit. J'entrai dans mon tableau, montai dans le petit train qui se mit en marche et disparut dans le noir du petit tunnel. Pendant quelques instants, l'on aperçut encore un peu de fumée floconneuse qui sortait du trou rond. Puis cette fumée se dissipa et avec elle le tableau et avec le tableau ma personne"... Que de fois le poète-peintre, dans sa prison, n'a-t-il pas percé les murs par un tunnel ! Que de fois, peignant son rêve, il s'est évadé par une lézarde du mur ! Pour sortir de prison tous les moyens sont bons. Au besoin, à elle seule, l'absurdité libère.

GASTON BACHELARD : extr. "La poétique de l’espace", Presses Universitaires de France, 2004. 

 

Légende : Il existe à un jour de marche du pays de neige un hameau qui s'appelle "la demeure" et ceux qui vivent là, sont des êtres irréels.

 

Option : Si, la maison n'était pas à votre goût, on en a d'autres qui manquent pas d'air, (voeux officieux, à cliquer dans l'image).

 

Villa Alcestia, là bas © Frb Dec.2014

mardi, 10 décembre 2013

Descendre

La brise, ... elle sent ce soir, un peu la menthe.

JULES LAFORGUE extr. "Nuage" in "Les complaintes et les premiers poèmes", édition établie par Pascal Pia, Gallimard 1979.

 

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Nous avons laissé faire. Le vent seul à présent pourrait dire s'il restait quelque chose à montrer...

 

Mais qui de nous admettrait cette idée, jusqu'à croire - croire vraiment -  qu'un seul mot pourrait se former sur du vent ? 

 

 

Photo : ce dont on ne peut parler...

 

 

Là-bas: © Frb 2013

dimanche, 16 juin 2013

L'abolition des privilèges

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Ailleurs © Frb 2013

mardi, 20 novembre 2012

Etat des lieux

Pas de fluctuations possibles, d'écarts brusques, d'arrachements, de rapprochements imprévus, de soudaines fusions. Chacun ici est à sa place. Une place que rien ne peut lui faire perdre.

NATHALIE SARRAUTE in "L'usage de la parole", éditions Gallimard 1980.

 

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Nous étions invisibles nous devenons absents. 

Nous prenons la distance nécessaire.

  

Photo : Un matin d'automne au pied du mont St Cyr.

 

 Là bas © Frb 2012