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mercredi, 28 décembre 2011

Orea Phone

Devance tout adieu, comme s'il se trouvait derrière
toi, à l'instar de cet hiver qui va se terminer.
Car entre les hivers, il est un tel hiver sans fin
qu'être au-delà de lui, c'est pour ton coeur l'être de tout.

RAINER-MARIA RILKE : extr. "Sonnets à Orphée" (1922)

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Sans doute existe-t-il une histoire de la vocalité qui se confond contre toute espérance, à l'histoire des mondes unis ensemble. Une épopée originelle perdue puis retrouvée, par les mondes que nous fabriquons, rêvons, et que parfois, un bref instant, nous augurons.

Le mythe d'Orphée nous touchera toujours avec force puisque Orphée est la figure incarnée de la vocalité et que la voix jouit d'un statut ambivalent, innocente, ou malfaisante immatérielle, ou incarnée. Orphée est bien cette voix qui fît remonter Eurydice des enfers, mais si la voix parvint à Eurydice par la force d'un chant, c'est que Orphée chanteur était aussi musicien.

Pourrait-on imaginer un chanteur dont la voix ne s'adresse à rien ni à personne ? Peut-être en existe-il un ou deux, qui toucherait le vide des choses, comme autant le vide des êtres. Il serait là, sans doute en soliloque comme déjà en enfer.

Et cette voix dont le son reviendrait toujours à ses oreilles, finirait par ne plus être perçue par son corps, glisserait doucement de l'auto-affectation jusqu'à l'auto-altération.

Il est permis de penser que Orphée chanta pour susciter la coïncidence, ou plus exactement faire coïncider sa voix avec celle d'Eurydice, et cela ne sera pas, comme on l'imaginait une manière de fusion, mais une manière de révélation, pour faire émerger :

 "Ce qui veut naître de moi par toi" 

http://www.youtube.com/watch?v=KCYcWpMDWLQ&feature=re...

Citation de fin de billet, Paul Valéry, in "Les cahiers".

Photo : Ciel vu d'un arbre, je ne me souviens plus lequel exactement, photographié, là bas , près de Saint Cyr, (loin des enfers).

© frasby 2011.

dimanche, 04 décembre 2011

Porté par la chose faite

Comment saturer ce qui est déjà saturé ?

danger.pngComment répondre ? Il y aurait soit trop à dire, (on aurait l'air embarrassé), ou rien, pas grand chose mais il se peut que ce "pas grand chose" prenne les dimensions de la montagne la plus inaccessible.

Il se peut, à l'exemple de Bram Van Velde, qu'il y ait une discipline assez serrée qui oeuvre par nécessité dans l'obsession de dépasser les limites de chaque ouvrage afin d'accéder à une forme de discernement, (un poète dirait illumination) qui s'atteint peut être, ou jamais, par des chemins simples ou sophistiqués, ces lieux communs, je vous les livre assez banals, ce sera encore exprès, tels que souvent on les entend un peu partout, on les surprend, pour signifier qu'il faut sans doute se noyer, se cogner longtemps (au delà, ça deviendrait informulable) et ne rien céder aux injonctions plus raisonnables qui rendraient à la vie sa tranquillité et glisserait la pensée dans un confort, mais cela c'est sur le papier qui n'est pas qu'en papier évidemment...

A la volée, dans un bazar urbain, (en vrai, au figuré) au milieu d'une file d'attente assez endurante, je tombe sur un journal qui reproduit un tableau de Bram Van Velde. Ce tableau me relie à un autre ouvrage remarquable, que l'on vient de me prêter, un texte publié chez Fata Morgana en 1978 réédité chez POL : une rencontre de Charles Juliet avec Bram Van Velde où l'écrivain demandait au peintre

- Pourquoi  peignez vous ?

La réponse dût tomber aussi claire pour le peintre qu'elle fût troublante pour l'écrivain

- Je peins pour tuer le mot.

C'était la même raison qui nous avait poussés à choisir la musique, d'un support à l'autre, me revient une autre phrase, un passage fulgurant où Bram Van Velde réfutant un pilier d'une philosophie enracinée se faisait affreusement lumineux, c'est par l'oxymore volontaire que je bouclerai la boucle tout en laissant la boucle ouverte, sans rien résoudre, ni espérer, ni enfermer après quoi toute messe ne pourra se dire, exactement comme on avait prévu de s'en persuader. Je cite :

 

Je pense donc je suis de Descartes est de la foutaise. Il faut dire  : Je pense donc je m'écroule.

 

Bram Van Velde entretien avec Charles Juliet 1979 by editions POL. Ecouter : un instant fulgurant, rarissime, une voix en état de grâce...


 

Text : by frasby, thème, livres et documents sonores proposés par Paul.

Remerciements : à "Raidi pour", présent, disponible, qui discrètement participe, déploie nos pistes de lectures et autres tentatives, insufflant aux thèmes choisis ici, (ou là bas), un mouvement, qui ne pourrait se contenter de débats et de livres.

Photo : Haute tension, début de décollage. Le danger inévitable ? Le danger en voie d'anéantissement ? A chacun sa lecture. 

© P./ frb/ Rp  2011.

vendredi, 02 septembre 2011

Où sont les femmes ?

Excédé de dégoût, à moitié asphyxié, Durtal voulut fuir. Il chercha Hyacinthe, mais elle n'était plus là. Il finit par l'apercevoir auprès du chanoine ; il enjamba les corps enlacés sur les tapis et s'approcha d'elle. Les narines frémissantes, elle humait les exhalaisons des parfums et des couples - l'odeur du sabbat ! lui dit-elle à mi-voix les dents serrées.

J. K. HUYSMANS in "Là bas" (1892), éditions P. Cogny, GF- Flammarion, 1978.

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Le pape Innocent VIII ayant envoyé deux moines enquêteurs en Allemagne, leur recherche sur l'extension de la sorcellerie donna naissance en 1486, à un rapport intitulé "le Malleus Maleficarum" ( ou "le Marteau des sorcières"), un traité des dominicains allemands Henri Institoris (Heinrich Kramer) et Jacques Sprenger, publié à Strasbourg en 1486 ou 1487. Il s’agit pour la majeure partie du texte d’une codification de croyances préexistantes, souvent tirées de textes plus anciens comme le Directorium Inquisitorum de Nicolas Eymerich (1376), et le Formicarius de Johannes Nider (1435). L'invention de Gutenberg permit de diffuser le manuel à grande échelle pour l'époque et l'ouvrage connut de nombreuses rééditions (au moins 34 entre 1487 et 1669, période principale de la chasse aux sorcières et des polémiques qu'elle suscita).  A l'époque, les femmes étaient surveillées par leur mari ou par le prêtre, car leurs mœurs et leur moralité étaient "naturellement" douteuses. Leur sexualité effrayait les hommes d'autant plus qu'il leur était impossible de la comprendre. Comme l'écrivait Jean Delumeau dans "La peur en Occident", la femme a toujours été diabolisée, les phénomènes de chasse aux sorcières ont traduit cette conviction d'une collusion "naturelle" entre la nature féminine et le monde des ténèbres. Ce sont encore les femmes, livrées à elles-mêmes, qui développèrent la médecine par les plantes, car les médecins à cette époque ne se préoccupaient pas de les soigner. Ces pratiques renforcèrent l'idée qu'il fallait s'en méfier et les femmes firent rapidement l'objet d'enquêtes lors de passages d'inquisiteurs dans les villes et dans les villages. Pendant longtemps la défense des "sorcières" était d'affirmer qu'elles étaient folles et irresponsables, leurs bonnes connaissances des plantes, étant la preuve certaine qu'elles n'étaient pas si simples d'esprit… Pour citer quelques chiffres, on accusa de sorcellerie, entre 1606 et 1650, 31 % d'hommes pour 69% de femmes au Luxembourg, 13% d'hommes pour 87% de femmes en Wallonie. Dans une autre étude, sur 155 cas, 105 sont des femmes ; parmi elles, 32 ont plus de 50 ans, 7 ont moins de 20 ans (dont une enfant de 8 ans et 2 adolescentes de 13 ou 14 ans ). Ce fameux livre, le "Malléus Maleficarum" connut un immense succès et devint une référence quasi obligatoire pour tous les procès en sorcellerie, car il décrivait scrupuleusement ce qu'était une sorcière, ses caractéristiques, et comment la contraindre à avouer ses crimes. En exerçant leur affreux ministère, les inquisiteurs et chasseurs de sorcières, se croyaient non seulement investis d'une mission divine mais ils appliquaient à la lettre les élucubrations écrites dans "Le Marteau des sorcières".

Le fantasme de la nature diabolique de la femme est revenu en force au XIXèm siècle, une période très marquée par la misogynie, et plus précisément la gynophobie que Michel Viegnes (qui a inspiré ce billet) évoque aussi dans son texte "Gynophobia" ou "La peur du féminin dans le récit fantastique" (paru dans les cahiers du Gerf N°6 en 1999 (messieurs n'inversez pas les trois derniers chiffres, de grâce!). Pour les auteurs post-romantiques qui sont majoritairement des hommes, la femme signifie "l'autre", par excellence, d'autant plus inquiétante qu'elle est irrésistible. Salomé devient un grand mythe fin de siècle et la peinture multipliera les représentations ténébreuses de la femme. Le scientisme n'est pas en reste, bien au contraire, l'autorité de Charcot cautionne également d'une toute autre manière, l'appréhension de la femme comme un être porté vers l'irrationnel, l'animalité et surtout l'hystérie (maladie qui hanta ce XIXèm siècle autant que sa littérature), à l'époque on était persuadé que l'hystérie était un mal uniquement féminin, peut être à cause de cette racine du mot ("utérus"), or, on sait aujourd'hui, (les impressionnantes hystéries féminines étant de nos jours, plus rares), que les hommes peuvent aussi souffrir d'hystérie. Ce ne sera qu'assez tardivement, en 1928, avec Dostoïevski et le parricide, que la question de l'hystérie masculine sera abordée pour la première fois dans toute sa dimension analytique. Cela fera peut être l'objet d'un prochain thème ici, mais le sujet est très délicat, en attendant revenons à nos "dames diaboliques" de la fin du XIXem, à cette gynophobie, que certains auteurs (cependant aimés par nous autres, les péronnelles), ne dissimulèrent pas dans leurs récits. Joris Karl Huysmans par exemple, créera une première onde de choc dans sa bible du "décadentisme" : A rebours" (qui se distance du naturalisme de son maître E. Zola sans toutefois en rejeter les méthodes), amorcera l'esprit de "Là bas". Dans "Là bas", Huysmans se met en scène lui même sous les traits de Durtal, un célibataire, écrivain qui travaille à une biographie de Gilles de Rais. Cet alter ego subit les assauts d'une admiratrice passionnée, oyez le nom qui possède si j'ose dire tout son pesant d'obscurité la dame s'appelle Hyacinthe Chantelouve, elle propose à Durtal de l'introduire auprès du chanoine Docre, un prêtre catholique voué au culte de Satan. Durtal se laisse séduire par la proposition, se donnant pour excuse qu'il doit en naturaliste "sérieux", étudier le satanisme contemporain pour mieux saisir celui du Moyen Âge. Il assiste donc à une messe noire qui dépasse en hystérie, tout ce qu'il a pu imaginer et la tentative de séduction qui s'en suit, le révoltera tout à fait. Extrait choisi (gynophiles s'abstenir):

Et elle se déshabilla, jeta par terre sa robe, ses jupes, ouvrit toute grande l'abominable couche, et, relevant sa chemise dans le dos, elle se frotta l'échine sur le grain dur des draps, les yeux pâmés et riant d'aise ! elle le saisit et lui révéla des moeurs de captif, de turpitudes dont il ne la soupçonnait même pas ; elle les pimenta de furies de goule et, subitement, quand il pût s'échapper, il frémit car il aperçut dans la couche des fragments d'hostie (1)

- Oh ! vous me faites horreur, lui dit-il ; allons habillez-vous et partons !

Plus loin ...

- A bientôt , fît Mme Chantelouve d'un ton presque timide, lorsqu'elle fût déposée à sa porte.

-Non, répondit-il ; il n'y a vraiment pas moyen de nous entendre ; vous voulez tout et je ne veux rien ; mieux vaut rompre ; nos relations s'étireraient, se termineraient dans les amertumes et les redites. Oh ! et puis après ce qui vient de se passer ce soir, non, voyez-vous, non !

Et il donna son adresse au cocher et s'enfouit dans le fond du fiacre.

Je vous épargne quelques notes sur le "Salomé" de Oscar Wilde et le moment de rencontre monstrueuse de Salomé avec son désir, mais je glisserai pour le plaisir (des images), un petit baiser nécrophile (à son lecteur chéri) :"The Climax", d'Aubrey Beardsley qui illustra, à merveille ce Salomé. En espérant que ces messieurs n'iront pas soupçonner en toutes les dames les penchants diaboliques d'une Salomé ou d'une Chantelouve, et que nos dames... Nos dames, rien du tout, les dames elles font ce qu'elles veulent et puis c'est tout.

Nota (1) : Les fragments d'hostie dans la couche de la Chantelouve n'étant pas dans les habitudes de Monsieur et Madame Toutlemonde, (nous on préfère les miettes de pain au chocolat), c'est en fait que la dame (a t-on idée ?) avait cachée l'hostie dans son intimité afin quelle soit profanée (l'hostie) lors du coït, mais cela fût sérieusement noté par Huysmans d'après une documentation authentique sur les pratiques courantes du satanisme.

Nota (suite): Ces notes de lectures sont tirées de divers textes choisis et présentés par Michel Viegnes, dont la plupart, extraits du livre "Le fantastique", paru aux éditions Garnier-Flammarion en 2006. Voir l'article ci-dessous :

http://www.fabula.org/revue/document1245.php%20

Photo : Ceci n'est pas une mante religieuse (c'est pas du tout pareil, si vous doutez cliquez sur l'image plus haut, qui ne signifie pas que sous chaque sauterelle se cacherait une mante religieuse, (si ça peut rassurer, Fernand, François, Paul et les autres). Ceci n'est pas une cigale non plus, ni une étoile de mer, c'est une sauterelle du Nabirosina tout ce qu'il y a de plus affectueux, photographiée sur son brin doux d'Août, au début du mois Septembre.

Photo © Frb 2011

mardi, 30 août 2011

Du peu qu'on ne sait dire...

Je suis long à prendre des déterminations, à quitter des habitudes. Mais quand les pierres, à la fin, me tombent du coeur, elles restent pour toujours à mes pieds et aucune force humaine ensuite, aucun levier n'en peut plus remuer les ruines. Je suis comme le temple de Salomon, on ne peut plus me rebâtir.

FLAUBERT extr. d'une "Lettre à Louise Colet" datant du 6 juin 1853.

du peu qu'on ne sait dire,passé,présent,été hiver,mondes réels,mondes virtuels,correspondances,gustave flaubert,louise colet,pérégrinations,errances,digressions,espaces,inanité,solitude,isolement,multitudeSa mémoire recensait un peu tout ce qui remuait dans l'ombre, d'autres brassaient sur des écrans les nouvelles du soleil à venir, ça donnerait au milieu de Septembre une illusion de feu dans la lumière. Le vieux, il racontait hier, que "lorsqu'on voit sortir le museau des taupes, c'est toujours signe de mauvais temps". En attendant, l'été finissait, éclairant toute chose et même les yeux si parfaitement éteints de nous autres les promeneurs, qui prenions l'ocre pour du jaune, et l'herbe brûlée pour du foin. Ceux qui ne remarquaient rien craignaient juste que la fraîcheur du soir porte en elle les tourments aux heures les plus sombres, tout le dépressionnisme des jours qui précèdent la rentrée des classes, et s'installe longtemps à l'avance, ils redoutaient les nuits noires, de longues nuits où se bousculaient les fantômes, cela réveillait les chagrins qui se figeaient par les brumes au matin. Partout on savait qu'on allait vers une saison plus triste, chaque année c'était toujours comme à la fin, toujours les mêmes célébrations. On revivait la fin du monde une fois l'an, partout où grossissaient les ombres si démesurées qu'elles semblaient pouvoir annuler en chemin, toutes les illuminations de l'été.

Les vieux buvaient encore sous les platanes, on voyait sur leurs gueules la chaleur qui remonte par les tonneaux de vin. On attendrait qu'il pleuve, ou qu'il vente pour rentrer les bacs à géraniums et les chaises de jardin. Ici, du tonnerre de Juillet on s'en souvenait, par delà les décombres, il avait fait grand bien, balayant les anciennes demeures où le malheur frappait toujours, la foudre était tombée sur le grand chêne rouge, cette fois, il n'en resterait rien. On parlait d'un malheur ici, on espérait encore que la force du vent puisse détruire en même temps le souvenir funeste de ces gens qui portaient le malheur avec eux, trop sûrs d'eux-mêmes pour qui la cruauté semblait une force à offrir en modèle ravivant la faiblesse d'en finir avec nos faiblesses, mais on n'en soufflait mot, ce qu'il restait d'embarrassant, venait comme une maladie qui courait encore dans le ciel et l'on se sentait vaguement étranger, tâchant de se protéger au mieux de ces gravités trop humaines qui creusaient des tombes en dedans. Que n'auraient-ils pas fait, ces ambitieux, pour obtenir l'assentiment du plus grand nombre ? Hélas, ils l'obtenaient. Ils parlaient à tort à travers et les autres écoutaient, attrapés par les belles formules, des mouches attirées par le miel et ces semblants d'amour qui venaient flatter par défaut le manque. Aucun des spectateurs ne saurait dire si la source d'un tel amour n'était pas remplie de poison. On ne pouvait plus répondre aux questions, miel et poison, c'était dans l'air. C'était là notre vie présente, on en ferait un commerce égal à nos fausses compassions. On ne pouvait ni juger, ni s'y plaire, on écoutait en prenant garde de ne pas se trouver happés par la trop vive lumière que des ombres moins prévisibles écraseraient un jour en passant.

Sous la toile aguicheuse patiemment ouvragée, il y avait des doublures, des motifs piqués de frelons, un tissu cachant la vermine, des peaux de bête qui sait ? Et les monstres grimés allaient comme des loups de légende, poser cette caresse aux carrefours où des colporteurs faisaient feu de tout ce qui restait. Jusqu'au bistro d'en face on retrouvait les moues les mêmes, depuis des siècles, des créatures obscènes des chapitaux romans et des masques de plâtre. Les femmes aussi, elles portaient leur silence en dessous, à force de devoir endurer toute la boue que les hommes éconduits avaient dû déverser sur elles. Sous des coiffes impeccables et les fausses dentelles, elles pouvaient ressembler tantôt à des sorcières, tantôt à la Sainte Vierge, dont le visage, sans aspérité révélait une férocité naturelle qui faisait douter de leur sainteté, on ne pouvait plus dire si leur joie apparente était une peine ou leur peine un rire plein de méchanceté, de rancoeur ravalée jusqu'au sacrifice pour leurs mères elles mêmes sacrifiées. Aucune image, ni aucun livre n'avaient osé clairement nous dire si cela était faux ou vrai.

On marchait quelques kilomètres plus haut, la terre couvrait de souvenirs l'histoire de ces conquérants courageux. On retrouvait émerveillés les premiers écrits des trouvères, ceux du jeu de parti sous le palefroi d'un chevalier, dans les formules abolies on prenait soin de s'abolir ainsi, tout alentour allait aux pas de ces anciens poètes-guerriers partis un jour forcer les portes de la terre. On appréciait encore le charme des fenêtres à meneaux, on se promenait dans les chapelles où sous les voûtes en berceaux, on pleurait seul mais tranquille. Après s'être isolé par cette apaisante lumière, on se retrouvait dans la rue d'une ville, on se sentait perdu, vendu, défenestré, redirigé à contre-coeur vers ces nouveaux commerces où plus un seul humain ne pourrait bientôt choisir d'aller seul sans se trouver brusquement isolé, (encore qu'il reste à préciser, la différence à la fois intime et infirme entre la solitude et l'isolement). Ce nouveau monde nous forcerait-il à appartenir, (qu'on le veuille ou non), à quelquechose d'infiniment plus désarmant que la solitude ou que l'isolement ? Oui, et sans grâce, pour l'heure on se sentait presque obligé d'en accepter l'exubérance, et sa loi, cette inanité.

Lentement, on verrait se tramer les éclats de ces petits mondes, un mirage pour chaque chambre, cela nous donnerait-il la somme d'une totalité encore insuffisante ? Des vies où nous ne serions plus ni assez seuls ni assez libres pour réfuter nos dépendances. Cette nouvelle religion était si expressive, si idéalisée, que par mégarde on s'y logeait comme rien, galvaudant nos secrets, jusqu'à ceux qu'on avait juré de ne jamais trahir, pétri par cette masse, embarqué, on acceptait d'y étaler maintenant nos amitiés pareilles aux marchandises, pourvu que nous soit accordée, un court instant, ce peu de reconnaissance qui nous "fait", celle qu'on croit toujours mériter ; comme si tout était histoire de "mérite". Pour quels égards encore, serions-nous prêts à nous laisser "choisir" ? Envisagerions-nous aussi naïvement l'idée que la seule valeur défendable à ce jour fût encore la liberté d'expression ? (de chacun, bien évidemment), une fiction parmi d'autres, tout comme l'intelligence (du coeur ?) que mon ingratitude ne me permettra jamais d'exalter à si bon compte, mais ce regret inconsolé trouvera peut-être plus de sérénité à savoir qu'il est plus facile de montrer ce qu'on n'a pas, que de se regarder au miroir de ses propres contrefaçons.

Bientôt, il y aurait des courses pour chaque histoire, de compétition en compétion, des preuves au transfert de ce mal, le retour de toutes sortes de préventions, maldonne organisée pour le bien du grand nombre : retour de la morale, prise en charge de l'expression de nos forces diminuées et toutes les trahisons de nos plus grands espoirs seraient à mesure consommées. Il y aurait l'oubli de ces merveilleuses constructions, l'écroulement des cabanes pour d'autres garanties, plus solides, tout cela permettrait de nouveaux paysages. On construit déjà les maisons. On met aux loisirs tant de pages, au catalogue quelques balises et des combinaisons pour grimper dans les arbres, le retour à la vie sauvage encadrant les nouvelles colonisations. Il nous paraîtra encore délicat de poser autour de ces miasmes des bâtons d'encens parfumés. Ou bien, on ira dormir dans la crasse, par les ruines volées, imparfaites, un instant détaché de tous, scrutant le vide omni-présent dans la nuit qui vient à rebours et sous la bonne étoile qui nous relie aux trois mille autres, visibles à l'oeil nu, peut-être choisira-t-on de ne pas voir, de n'y puiser que le néant, l'immense empire impénétrable ou le noir à portée, cependant il faut toujours un peu choisir, quoiqu'on en dise ... On cherchera encore ce qu'il y aurait de charme à vivre, pas plus que le présent, pour tout le peu qu'on sait, intraduisible. On cherchera.

Photo : Si l'hiver vient comme un mouton, il s'en ira comme un dragon dit un ancien proverbe hivernal. Mais ce pays n'est pas l'hiver et la bête n'est pas le cerbère du temple de Salomon, c'est juste un doux fauve pétrifié par le temps, saisi là haut sur la montagne, on ne le trouve que si on le cherche, il est caché par les buissons près des cailloux sous lesquels remontent les légendes anciennes comme celle d'un trésor qui se trouvait enseveli sous une pierre tournante, dans ce monde, (le notre) la bête garde encore de nombreux souterrains, je vous ramènerai peut être un (certain) jour quelques extraits de ces  légendes encore vives qui viennent de la Montagne de Dun, dominée par une minuscule chapelle. J'ai sous les yeux les notes de trois érudits de ces mondes (Mr Jean Virey, les abbés Paul Muguet et Henri Mouterde), qui ont narré dans un ouvrage admirable, paru en 1900, l'histoire de "Dun. Autrefois, aujourd’hui". Rien à voir avec notre monde... Petite promesse, peut être à suivre...

Photo: © Frb 2010.

dimanche, 28 août 2011

Sur la tombe de Marcel Duchamp

Pour éviter tout malentendu, nous devons répéter que ce "coefficient d’art" est une expression personnelle "d’art à l’état brut" qui doit être "raffiné" par le spectateur, tout comme la mélasse et le sucre pur. L’indice de ce coefficient n’a aucune influence sur le verdict du spectateur.
 Le processus créatif prend un tout autre aspect quand le spectateur se trouve en présence du phénomène de la transmutation, avec le changement de la matière inerte en œuvre d’art, une véritable transsubstantiation a lieu et le rôle important du spectateur est de déterminer le poids de l’œuvre sur la bascule esthétique.
 Somme toute, l’artiste n’est pas seul à accomplir l’acte de création car le spectateur établit le contact de l’œuvre avec le monde extérieur en déchiffrant et en interprétant ses qualifications profondes et par là ajoute sa propre contribution au processus créatif. Cette contribution est encore plus évidente lorsque la postérité prononce son verdict définitif et réhabilite des artistes oubliés.

MARCEL DUCHAMP : in "Duchamp du Signe", éditions Champs Flammarion, 1994.

Duchamp post mortCF9089.jpg On pourra se demander en passant où sont les artistes ? On trouvera peut-être la réponse soit en creusant un peu, soit en se couchant voluptueusement sur la dernière résidence (secondaire) de Marcel Duchamp. Marcel Duchamp, (c'est écrit), aimait placer le spectateur dans la peau du flâneur à cette exception près que le désir de celui-ci, de contempler petit à petit les transformations du monde,  tout livré à son propre désir lui soit retourné brutalement par l'indifférence que l'objet suscite en lui. Cette chose n'est plus regardée / mais on sait qu'elle existe. Pour la grande question vous pouvez frapper à sa tombe, (ci-dessus), au delà des questions il s'y trouvera peut-être encore une présence ? ...

Photo : Qu'y a t-il après le ready-Made ? Ou comment regarder l'oeuvre en face ? Une boîte verte cette fois sans épitaphe, (ni moustache). A première vue, ceci est bien la tombe de Marcel Duchamp (et des siens) on la trouve désormais dans tous les bons cimetières, on peut même la fleurir avec une rose. Rose parce que Rose... (Je vous en prie... ) ! à moins que le lecteur (pas si dupe) préfère remplacer le foulard de RHozan-Muttkebo par un mouchoir et ni vu ni connu le spectateur entourloupera l'artiste. Certains jours le cimetière boscomarien se transforme en sanctuaire dada, le grand verre de Duchamp vire en petit vert du champ, (merci Marcel Vermot) Il existe une autre tombe (où est la vraie ?) qui se trouve à Rouen, sur laquelle on peut lire (et cliquer) :

 

"D'ailleurs c'est toujours les autres qui meurent".

 

 

 

Photo © Frb 2011.

vendredi, 26 août 2011

Où va la rentrée ?

Poésie de l'anodin.

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Photo : Les affaires reprennent. Les images parlent d'elles mêmes. Les décors sont de Pier et Sol, merci à eux.

© Frb 2011.

mercredi, 24 août 2011

Où vont les feuilles ?

Un rêveur uni à la vie des songes interroge l'insignifiant. On réunirait aisément des documents sur l'anxiété subtile des feuilles mortes. Mais puisque celles-ci ne sont pas encore mortes, Permettez que je vous les cueille avant que d'autres ne les rechantent.

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Nota : Comme on ne peut répondre à la question, sans d'abord se demander "où vont les fleurs ?", (Elles vont dans certains jours, bien sûr !) vous pouvez réviser vos classiques ci-dessous :

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/08/06/le...

Photos : Pour les doux de la feuille, bien de quoi s'éventer encore. Des feuilles, des feuilles, encore des feuilles, photographiées dans les fourrés  forêts du Marquis, là bas, au plus profond du Nabirosina.

 Photos : © Frb 2011

samedi, 06 août 2011

Où vont les fleurs ?

Je vous convie donc à voir seulement. Je vous prie de tout oublier à l'entour ; de ne rien espérer d'autre ; de ne regretter rien de plus.

VICTOR SEGALEN, extr. "Peintures", éditions gallimard, 1983.

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Doc Watson § David Grisman : "Summertime"
podcast

Photo : Où vont les fleurs ? Question.

Pigments et parfums naturels ou balade au jardin un matin d'été doux.

© Frb 2011.

vendredi, 05 août 2011

Affinités

A quoi bon les poètes en temps de manque ?

affinités,lokenath bhattacharya,eaux troubles du gange à l'aveyron,henri michaux,poésie,orient,occident,instantané,poésie bengali,lokenath bhattacharya par marc blanchet,notes de lecture,extrait choisi,questions,à quoi bon  les poètes,émerveillement,pierre alechinsky,correspondances,prolonger

"Pour moi la poésie, puisqu'il est question de cela, n'est ni une question, ni une réponse. C'est impertinent sans doute de parler de sa propre expérience dans ce domaine. C'est un moment que je célèbre, moi gourmand et insignifiant. Quelle sorte de moment est-ce ? C'est le seul moment qui représente la totalité du temps, l'un qui n'a pas de second. L'important n'est pas que je sois ou non de conséquence - ce serait ridicule de présenter la chose de cette façon  prétentieuse - mais l'important c'est le moment lui-même et le fait que par la médiation d'un tiers, moi ou un autre, tous deux aussi anonymes l'un que l'autre, ce moment se célèbre lui même.

Je reviens donc à mon acte. Oui je le célèbre, dans la souffrance et l'extase. Mais limité comme je suis, je ne peux le célèbrer éternellement mais seulement en instants, clignotements de mon temps terriblement morcelé, alors que je suis à bout et priant toujours pour une prolongation".

LOKENATH BHATTACHARYA (1927-2001).

Extr. "Eaux troubles, du Gange à l'Aveyron", ("A propos de la parole poétique"), paru chez Fata Morgana en 1995, recueilli dans l'ouvrage excellent (que je vous recommande vivement) :"Lokenath Bhattacharya par Marc Blanchet" (lui même poète, essayiste, photographe), éditions Jean-Michel Place en 2001.

Nous reviendrons un (certain) jour sur les textes et poèmes de Lokenath Bhattacharya écrivain bengali remarquable, érudit, traducteur d'auteurs français (Rimbaud, Descartes, Romain Rolland, Molière, Sartre, Char) et grand mélomane, sans doute le plus traduit en France depuis Tagore, que Henri Michaux fit découvrir aux lecteurs européens dès 1976. L'écriture lumineuse, mystérieuse de L.Bhattacharya, n'est pas sans profondes affinités avec celle d'Henri Michaux, directe, simple, émerveillée, Bhattacharya se définissait lui même comme "Le cousin bengali d'Henri Michaux". En lisant les deux auteurs parallèlement, les ramifications, les témoignages de leur pudique correspondance, on est assez troublé par l'évidence de cette rencontre. L'écriture de Bhattacharya est violente, charnelle, évoluant toujours dans un univers aussi craintif que fervent, lui même a défini les écrivains comme les enfants gâtés du langage. Extrait choisi :

Si la langue n'existait pas, ces écrivains, qu'est-ce qu'ils auraient pu faire ?  Rien du tout ! Moi aussi, je suis un enfant gâté du langage : je parle beaucoup trop du silence - qui est une chose essentielle pour moi. Mais le silence, on ne peut pas l'expliquer.

"Créer un chemin dans le vide" est une chose qui existe autant pour Lokenath Bhattacharya que pour Henri Michaux, tous deux ont des sources d'inspiration communes, entre autres, la chambre, les chemins (le vide bien sûr), les débris, une curiosité sans limite, et les dessins de Michaux inspireront à L. Bhattacharya un étonnant ouvrage "Sur le champ de bataille des dessins de Michaux" où le texte écrit en Bengali (traduit par France Bhattacharya) fait subir une transformation aux formes proposées par Michaux, donnant à chaque tache un nom, engendrant un dialogue à distance entre deux artistes issus de cultures différentes, les textes dépassent la simple interprétation en roue libre, ils puisent très au delà dans les mythes indiens, la danse, les musiques, les prières toute leur inspiration pour peser les enjeux de la vie et de la mort, (le champ de bataille, donc) lutter contre ces rythmes que tout semble opposer jusqu'à trouver un apaisement progressif jusqu'à l'union ou la révélation d'une parole devenue fertile. (champ de désir ? Peut-être). Autre affinité que nous partageons ici avec Bhattacharya, un certain parti pris artistique, ses paroles ne sont ni une posture, ni un effet de style : le goût de sa quête insatiable, sa recherche jamais satisfaite l'a toujours confronté à la limitation de l'humain, qu'une vie entière n'aura pas suffi à instruire. Autre extrait choisi :

Moi, j'écris ainsi, parce que je suis ignorant [...] On a finalement des visions qui ne sont pas si spontanées. Elles sont dictées. À quoi bon essayer ensuite de se présenter comme un intellectuel, un grand monsieur quand on est rien !

A noter, un autre ouvrage admirable, qui se parcourt avec délectation, fruit d'un lien artistique entre Lokenath Bhattacharya et Pierre Alechinsky, l'oeuvre s'appelle "Fleur de cendres" :"Une encre de chine au pinceau parée de cendre", vraiment beau. Hélas, je crains que cet ouvrage soit difficile à trouver, quoique en cherchant bien... Sinon vous pouvez ouvrir (les yeux fermés et grands ouverts) les autres livres de Lokenath Bhattacharya, tous éblouissants.

Vous trouverez une piste bibliographique, en lien ci-dessous :

http://www.librairiedialogues.fr/personne/lokenath-bhatta...

Ici, encore une passerelle d'Orient à Occident :

http://www.wmaker.net/shanti/Un-poete-Indien-amoureux-de-...

Photo : Acacias vus sur la route boscomarienne. Des formes végétales musicales, légèrement orientales, (du moins ai-je dû un instant les imaginer telles... Ou bien c'est peut-être que j'aimerais contempler l'acacia versifié en poème bengali ?). J'ai choisi l'acacia parce qu'il en existe 1 500 espèces à travers le monde, alors qui sait si elles ne pourraient pas un jour, elles aussi, se croiser ?

Photo : © Frb 2011.

mercredi, 04 mai 2011

Jardins secrets (une histoire presque fleur bleue)

Toutes les couleurs s'accordent dans l'obscurité.

FRANCIS BACON

Si les roses vous fatiguent, cliquez sur les 2 images on vous donnera des tulipes à la placerose yellow.JPG

Elle a les couleurs de la fleur au printemps. Les yeux bleus comme le ciel, noir dedans. Elle court à lui dans sa tête, se prépare devant un miroir entouré de roses pompon, dans une chambre remplie de poupées de chiffons et d'oursons en pâte d'amande.

L'homme, il s'est réveillé ventre à terre, sur la pelouse, sous le peuplier du jardin. Il a eu, (est ce un mauvais rêve ?), une vision de sa femme couchée dans le jardin la gorge ensanglantée. Il se demande quel est ce fou qui l'a jetée ici. Ce n'est bien sûr, qu'un mauvais rêve. Ici, la réalité est tout autre.

Des gens se pressent au portail, à présent. On voit naître une fine coulée rouge dans l'allée entre les bulbes parfumés de jacinthes et sous les premiers bourgeons d'un drôle d'arbre, on dirait des châtons qui pleurent. Une pluie de pollens, en fin d'après midi adoucit ce monde ordonné par des allées fraîchement ratissées. Il lui reste ce souvenir, celui d'une longue attente, celle du départ du jardinier qui ne cessait de ratisser les allées et ses nerfs n'en pouvaient plus de voir ce rateau dessiner des traits si parfaits sur la terre. Etait-il dans son rêve, ce son crissant, ces parallèles qui brisaient sa ligne de vie ? Roses comme les fleurs du printemps, au creux de sa main chevauchant la ligne de coeur d'une main étrangère de l'autre côté des collines, à l'est.

Etait-ce un souvenir ? Ou dans un cri, ce rêve qui l'aura renversé ventre à terre ? Quand il avait chassé le jardinier en le poussant violemment dans les roses à coups de pieds et qu'il s'était battu avec lui pour que le bruit des traits s'arrête. Ou bien, est-ce encore le visage bouleversé du jardinier qui l'avait sorti de son cri ? Il revoyait sa femme qui avançait sur lui, contournant soigneusement l'arbre à soie, elle marchait sur la santoline verte. Sa femme avec sa robe couleur lavande, ses cheveux fins comme des antennes, on aurait dit un papillon. Elle avait demandé d'où venaient les bruits. Il avait esquivé. Il avait peur des papillons, peur des questions, peur de la floraison de l'arbre à soie formant des plumets rouges feu dans son rêve. Il avait juré qu'il n'était pas là. Le jardinier a donné une autre version.

A présent, l'éclat des fleurs n'en finit pas de l'aveugler et le soleil précise les contours d'une colline, il est à l'ouest. Il voit la fenêtre de la maison où la jeune fille l'invitait de récréation en récréation, à soulever des mantilles, et la texture infime rebrassée des dentelles, morcellait ses jours, abrégeait ses nuits. Des milliers de semis fantômatiques maculaient de géantes hybrides les allées et les lignes du jardin étaient sans cesse à reconstruire, des chenilles multicolores couraient sur les euphorbes, le jardinier qui était phyllomancien parlait d'un malheur à venir. La nuit l'homme allait au jardin en cachette. La jeune fille, plus loin, plus libre, envoyait des signaux de fumée, et des mots qui se lisaient avec une torche. Ils sont allés à l'aventure. Il pensait que cela serait le caprice d'une nuit, une fantaisie de quelques jours, juste pour l'agrément.

Il se souvient. C'est vrai, il y en avait eu des dizaines, de rendez vous pour elle, hier, et chaque soir juste avant le coucher du soleil. Aujourd'hui un corps s'était affaissé repliant les pétales, une tête avait heurté la pierre, écrasé des milliers de roses, Une percée de couleur primaire sur fond mauve. Le jardinier préféra ne pas évoquer certaines choses.

Plus tard, L'homme ira se laver et ces choses partiront d'elles mêmes, au savon, dans l'eau chaude. Il mettra un costume de coton blanc léger, il ajoutera deux belles roses pompon à sa boutonnière. Une pour lui, une pour elle. Une heure, une petite heure seulement, arrachée à la ritournelle, pendant que sa femme se promène avec une vieille cousine tuberculeuse, vivace pareille aux cyclamens qui répandaient une odeur écoeurante sous la tête de sa femme entre les tombes jardinées, il ne sait plus à quelle heure ni dans quel cimetière. Il est sûr que c'était avant.

Le jardinier est là qui l'observe avec ses yeux d'indien piquants, toujours un peu mouillés, cette bouche qui murmure et ses gestes discrets, rituels, telle une atmosphère de douceur linéaire aux jardins de Shalimar et c'est tout le Pakistan qui semble maintenant s'accrocher au portail. L'homme demande à son jardinier : "dis moi, que veulent-ils, tous ces gens ?". Si nombreux, ils se pressent, des hommes et des femmes en colère et des plus grands, des soldats de plomb dans des combinaisons empêchent la foule de pénétrer au delà d'une certaine limite. Une coulée rouge, un flux dément de grenadine sur lequel sont penchés des tas d'inconnus qu'on tient à distance. Des gyrophares luttent contre la lumière...

Le jardinier ne répond plus. L'homme au milieu des fleurs se pose encore en maître du domaine, entre un ruisseau qui flambe et des collines allumées par une torche dont chaque soir au coucher du soleil une lueur semble absorber le halo sphérique de toutes les voies lactées de tous les univers qui peuvent s'imaginer quand on sort des jardins privatifs du périmètre solaire. Chassera-t-il encore l'étranger qui voit tout, sait tout et ne dit rien ? Son silence est pareil aux traits de son visage ratissé dans l'immobilité, droiture et loyauté des allées bordées d'ifs, de gestes répétés chaque jour à l'identique, rappelant le sommeil, pourvu qu'il vienne, revienne.

Tous ces traits, sur la terre, disparus, qui les a emportés ? Tout est rouge, ça revient. Les camions rouges, les ambulances et ces fourmis qui glissent lentement sur ses mains, éveillant par accoups un système nerveux central empalé sur des gouffres de friandises. Des colliers, des barrettes dorées, et des oursons éparpillés autour un lit, des mantilles qui flottaient dans un ciel étoilé. Et puis, hier, sans prévenir, la nuit entra dans la lumière.

rose yelloF0808.JPGLe ciel est rouge de la colère des foules. Rouge de l'impatience de la vérité qu'il faudra un jour dire. Rouge d'une colline embrasée à l'est, par une fenêtre à la lueur d'une torche, à la tombée du jour, pour la joie de céder aux excès sous tous les empires. Rouge du regret des fleurs exhalant l'odeur affolante de la mort, durant un court moment d'absence où toutes les valeurs se renversent. Il voit un corps dont le visage a été recouvert d'un linge et ce n'est pas l'épouse qui dort à ses côtés. Une coulée d'encre, ce petit lait à peine, déroulant l'épilogue, se cheville aux feuilles en rosette du chlorophytum dans ce hors lieu de l'homme et de la femme où quelquepart un rêve éveillé les promène entre présence, absence, rêve et réalité. Ils en viennent à se pencher dangereusement au bord d'une fenêtre. La maison est cernée d'ambulances, d'enseignes bleues, reflets violets de la douleur des antichambres. La maison est cernée de lueurs, de fleurs et de jouets. Comment traduire ce qu'en disent les sirènes lancinantes ?

Il faudrait prendre une douche de toute urgence. Des ombres traversent l'homme, et partout ces grignotements dans sa tête, qu'il ne peut plus comprendre. Des doigts le montrent. Une main le prend. Des bouches grandes ouvertes le huent et le dénoncent. Des bras le traînent. Il pose sa tête dans ses mains et sa tête devient rouge. Les ongles de l'homme avaient griffé longtemps. Le jardinier a dû le confirmer devant tout le monde. Il fallait bien qu'il prouve son innocence. Partout ça ronge dans la terre, au dedans, dans les esprits ça remonte, à la surface on voit clairement les mains de l'homme et son visage qui semble ignorer tout, il ouvre des yeux d'enfant, traqué par des sifflets et couvert d'une étrange honte, celle qu'on lui fait, qu'il ne peut pas comprendre. Il voit la foule allumer l'incendie dans ses fleurs. Ce n'est plus le rêve. Quelque chose dans sa tête devient très encombrant. Et cette gamine, à l'est, qui l'espionne par un trou de serrure, le balade depuis des mois, ne cesse de lui ravir son existence, cela s'appelle du harcèlement. Il faudrait que quelqu'un la gronde.

Tout à l'heure, il se rendra, au coucher du soleil dans cette maison qu'il connaît aussi bien que la sienne. Il changera son plan et retrouvera sa vie d'avant, le foyer, les mains lestes de sa femme coupant les fleurs pour les coller à l'infini sur la tapisserie de leur chambre, cet ancien nid d'amour où se trouvent encore au chevet de deux meubles à tiroirs les mêmes livres tristes, deux réveils et des boîtes de Tercian. Il sera calme, même apaisant. Il ne portera pas de costume, pas de roses pompons à la boutonnière. Il aura un grand manteau noir il dira simplement: "C'est fini. On arrête". Il ne faudrait pas tout bousiller pour presque rien : sa maison son mariage et sa femme. Où est-elle ? Trois hommes en habits blancs descendent d'une fourgonnette.

Sur la colline à l'est, rien ne bouge. C'est l'heure clémente. Bientôt il y aura le coucher de soleil. Une jeune fille caresse ses cheveux, les roule en chignon fait de tresses et de boucles qu'elle libère, elle attache une barrette dorée, ajoute un collier de perles autour de son cou blanc, si transparent qu'on voit presque le coeur battre à travers les veines. La peau ne dit rien des milliers de fleurs bleues qui ont poussé sur elle, se sont mises écrire le premier des romans à l'eau de roses pompon pour petites filles méchantes, (femme de personne ou de nulle autre) ; elle ne sait rien des trames, des traits et des stries de leur monde, un phare de fleurs, des clôtures électriques dans le velours où des rondes un beau jour ont arrêté leurs sentiments, ceux ci ayant depuis si longtemps cessé d'être, ils peuvent renaître, intermittents, dans les entailles faites au contrat oui mais voilà. Elle attend. C'est l'unique attrait de ses jours, elle attend l'être aimé. Elle veut tout. Sa ferveur est profonde quand l'homme en costume blanc traverse les champs jusqu'aux collines pour apporter les roses et toutes les bonnes nouvelles.

Hier c'était une promesse, un pur instant d'égarement quand ne pouvant saisir ce corps il n'offrait que son ombre et dans une fraction de seconde seulement, il avait juré sur sa tête, peut être dans la lune ? Ou sur la terre, demain, qu'il serait un homme libre. Il ferait ça pour elle, l'impensable jusqu'à l'impossible. Ensuite, il serait avec elle toujours. Sa femme, un papillon, liquidée, au bout d'une épingle, ça ne l'effrayait même plus d'y songer, un long cou avec des antennes et puis ses ongles qui s'enfonçaient lentement dans la chair (à mains nues ou avec des gants de jardin, si possible). Ce serait un acte d'amour pur.

Il est presque neuf heures du soir, la jeune fille affine ses mantilles, glisse dans sa bouche amusante un petit ourson en pâte d'amande étirable à loisir. Elle regarde du côté de la maison de l'homme et tout en mâchonnant ce sucre qui l'aura fait grandir, elle voit un feu d'artifice tantôt rouge tantôt bleu et des lumières là bas, qui scintillent, des signaux lumineux, jamais elle n'en n'a vu autant. Dans ce grand halo blanc elle voit autant de preuves d'amour, comme dans ses rêves de petite fille, ouvrant le bal somptueux des princesses virevoltant dans des robes cousues d'or, une couronne de roses pompons sur sa tête assourdie des violons d'une valse un peu folle qui couvre le bruit lancinant des sirènes, les petites voitures, les fourgonnettes miniatures d'où sortent des petits bonhommes en panoplies de pompiers, de docteurs qui font avancer sur son coeur, les joies du carnaval et la bonté des fleurs dans un pays sorti d'une boîte de friandises en pâte d'amande pas plus grande qu'une boîte à chaussures.

Photos : Ces roses ne sont pas des roses pompons ni des roses bonbons mais des roses fraichement nées dans la grande roseraie du Parc de la Tête d'Or à Lyon (+ de 30 000 roses seulement) qui ne sortent pas d'une boîte de friandises... Quoique pour certaines, on dirait. Grande et petite roseraies à visiter, très vite, si vous passez ou vivez dans cette ville c'est une des plus belles choses à contempler en ce moment. Pur vertige de parfums et couleurs, qui ne se raconte pas, il faut voir, toucher, de près et même que ça se respire ...

© Frb 2011.

mardi, 29 mars 2011

Des fourmis plein la tête (part 1)

A propos de quelques questions recueillies au hasard dans les livres et dans les magazines...

Pour consulter la part 2 des fourmis plein la tête vous pouvez cliquer sur l'image.Fourmis T0041.JPG

Qui suis je la nuit ? Pourquoi le chaos est-il si fascinant ? Est-il nécessaire d'être attentif ? Est ce que tout compte ? S'adapter mais à quoi ? Si 38 allumettes forment 15 carrés, en retirant 6 allumettes comment procéder pour obtenir 9 carrés ? Qui fait quoi, dans la maison ? Jean Mallot sera-t-il  le prochain président des français ? A quoi servent les passions si on ne peut les dire ? Que fait cette dame dans mon manteau ? L'outrance est-elle drôle ? Etes-vous informés sur le ptz ? Etes vous chat, tigre ou chien ? Qu'est ce que le polyphème ? Connaissez-vous le jeu de triominos ? Y-a-t-il parmi les lecteurs un garçon bricoleur qui s'y connaitrait en plomberie ? Doit-on s'en remettre à l'absurde ? Etes vous jaloux ? Pour ou contre le thermalisme ? Est ce qu'on peut se battre correctement à l'intérieur d'un système qu'on dénonce ? Qui coupera la tarte ? Quel est le compte qui ne peut jamais avoir un solde créditeur ? La mémoire peut-elle se contenter du travail de l'historien ? Comment faire pour qu'on ne me pique pas  l'homme que j'aime ?  L'art nous détourne-t-il du réel ? Qui me donnera la preuve que j'existe ? Pourquoi les léopards ont-ils des tâches ? Ecrire quoi ? Etes vous candidat au coup de foudre ? Suis je plus visible qu'audible ? Si vous étiez une pomme de terre, laquelle seriez vous ? Qu'est ce qu'une corne de gatte ? Sachant  que pour écrire les numéros de pages d'un journal qui a 12 pages on utilse 15 chiffres, Combien utilise-t-on de chiffres pour écrire les numéros de pages d'un livre de 1001 pages ? Comment apprivoiser l'ennui ? Met-on un trait d'union à sens dessus dessous ? Comment faire pour faire chauffer les chapatis si l'on n'a pas de gaz ? L'ai-je assez aimé ? Pourquoi les anglo-saxons mettent-ils des majuscules partout ? Faut-il rattacher l'enfant majeur étudiant au foyer fiscal ou déduire une pension alimentaire ? Peut-on se passer du nucléaire ? Le bruit blanc véhicule-il un sens ? A partir de quel âge est-on vieux ? Le rap et le tag peuvent-ils être de l'art ? Connaissez-vous la recette du "Piof" ? Que devient mon poing lorsque ma main est ouverte ? Existe-t-il des êtres qui pensent ailleurs que sur la terre ? Les gens moqueurs sont-ils méchants ? Quelle est la différence entre l'ebe et l'ebidta ? Le dégoût est-il une forme d'attirance ? Peut-on aimer toute la vie quelqu'un qui ne vous aimera jamais ? Le néant est il toujours absolu ? Les rillettes sont-elles des fruits ou des légumes ? Doit-on revoir ses ex ? Qui sont les "vrais gens" ? Les idées chevillées au corps viennent-elles du cerveau ou du corps ? Qu'est ce qu'un transcendant satrape ? Où finit le système solaire ? Doit-on dire "je vous serai gré" ou "je vous saurai gré" ? L'épithélium 26 est-il bon pour le capiton plantaire ? La nature est-elle dégoûtante ? Faut-il obligatoirement agir pour se sentir utile ? Comment dessaler une poitrine de porc ? Que pensez vous apporter à notre société ? En quel honneur la femme pourrait-elle se prétendre l'égale de l'homme ? Aimeriez vous vivre au val d'Aoste ? Les vérités mathématiques constituent-elles le modèle de toute vérité ? Si je viens en voiture est-il possible de me garer sur la place ? Qu'est ce qu'une illusion populaire ? Pourquoi malgré toute ma bonne volonté je n'arrive pas à me téléporter ? Quelle est la valeur d'un franc en euro ? Qu'est ce qu'une question philosophique ? La cravate est-elle démodée ? Le seïsme japonais a-t-il modifié la durée du jour ? Quand vous souriez en téléphonant, vous téléphonez à qui ? Où va l'eau ? Pour ou contre la télé-médecine ? Avez-vous une démarche ? Peut-on refaire sa vie à 65 ans ? Que font-ils de notre argent ? Comment appliquer un syllogisme à la vie pratique ? Pourrait-on espérer des moments meilleurs si on ne les avait pas perdus ?  Existe-t-il une théorie générale des questions ? Oui ? Non ? Pourquoi ? What else ?

Photos : Des bestioles sur fond gris rasent les pâquerettes (hors champ ou hors-chant) quelque part (je ne sais plus où exactement) du côté de la forêt Morand, dans le 6em arrondissement de Lyon. Pas sûr que les nettoyeurs aient laissé vivre les deux castors. Seules resteront les questions. Pourquoi certains jours les fourmis ressemblent à des castors ? Pourquoi ne dit-on pas des castors plein la tête ? Etc.. Etc...

©Frb 2011.

samedi, 12 mars 2011

Insubmersibles ?

Le premier grand cataclysme s'abattit sur la région d'Osaka à 5 heures 11, le 30 Avril. A 8 heures 03, la chaîne de montagnes Togakure explosa. Les regards du monde entier étaient fixés sur "la mort du dragon". Des dizaines d'avions appartenant à des télévisions de toutes les nationalités volaient au-dessus de l'archipel du Japon qui crachait du feu et des flammes.

 KOMATSU SAKYO : extr. "La submersion du Japon" (traduit par Masumi Shibata 1973) éditions Philippe Picquier, (coll. Picquier poche n° 128), janvier 2000.

Japan.JPGA propos du tremblement de terre du 11 Mars 2011 et du tsunami qui s'en suivit allant impitoyablement ravager les côtes de la région de Sendaï au Japon et meurtrir la population, je n'ai pu m'empêcher de songer au roman d'anticipation (très célèbre), datant de 1973, qui fît grand bruit à sa sortie et reçut même un prix. Le livre s'intitule (sans équivoque) "La submersion du Japon" il est signé Komatsu Sakyo. On ne sera guère surpris que le titre coïncide avec un drame récent, le Japon étant constamment menacé de séïsmes, l'histoire du pays si parsemée de catastrophes que même les enfants dès leur plus jeune âge sont éduqués à adopter certains comportements, face l'éventualité d'un désastre. Toute la culture japonaise est par ailleurs imprégnée de cette peur ancestrale de l'engloutissement. "La submersion du Japon" met en scène un Japon secoué par une recrudescence de tremblements de terre. Les températures deviennent anormales :

"Il avait fait si froid à la saison des pluies qu’on se serait cru en mars mais, aussitôt après, une chaleur intense apparut soudain et, ces jours derniers, on avait invariablement plus de 35°C. Des gens tombaient malades à Tokyo et à Osaka, et même certains succombaient. A cette chaleur extraordinaire s’ajoutait l’habituelle pénurie d’eau jamais résolue [...]"

Les volcans se réveillent, des fissures apparaissent au coeur des bâtiments, les secousses vont de plus en violemment accentuer la destruction. Pour ce qui est du récit même, nous suivrons au fil de ces pages, une équipe de scientifiques (géophysiciens), qui découvrent que certains îlots peu peuplés (ou pas du tout) ont complètement disparus, et pour cause ! ils ont été submergés. Les scientifiques enquêtent, plongent dans les fonds marins, et reviennent avec la conclusion, que le Japon sera englouti à très court terme. Alors que les derniers chercheurs étudient les probabilités d'une telle catastrophe, le gouvernement tente de sauver ce qui peut l'être encore. Ce scénario, déjà à l'époque, s'appuyait sur de nombreuses études scientifiques, les personnages y sont peu décrits, on ne s'attachera pas à leur psychologie, nulle intrigue spéciale ne tiendra le lecteur en haleine, aucun voyeurisme ne s'épanchera dans ce roman assez froid qui décrit des tractations entre politiciens et scientifiques, des manoeuvres secrètes, les doutes, les incrédulités, les prévisions pour évacuer la population, préserver la mémoire d'un peuple, sauver le patrimoine, l'évocation de toutes les négociations pour obtenir des territoires en Australie etc... Si le récit semble un peu traîner en longueurs, il abordait déjà des questions fort intéressantes.

- Qu'adviendrait-il si demain, le Japon (ou un autre pays) disparaissait ?

- Que deviendraient les habitants ?

- Comment procéder à l'évacuation de cent vingt millions de japonais ?

- Où les accueillerait-on ?

- Comment préserver la mémoire d'une culture si un pays se trouvait brutalement rayé de la carte et son peuple dispersé à travers le monde ?

"En dehors de cet archipel et de sa nature, de ces montagnes, de ces rivières, de ces forêts, de ces herbes... Les Japonais n'existent pas. Ils sont unis à eux. Ils ne font qu'un seul corps avec tout cela. Si cette nature délicate et les îles sont détruites et disparaissent, les Japonais n'existent plus [...]"

Les questions sont multiples et on s'apercevra qu'il n'y a pas de réponses préconçues qui tiennent, mais ce qui marque plus encore le roman, c'est "l'esprit japonais", avec le spectre omniprésent de l'engloutissement, mais aussi l'absence de figure héroïque, de sauveur se distinguant des autres par son courage (genre cow boy à l'américaine), au profit d'une action collective anonyme, l'absence de happy end, une organisation implacable. Là encore, on n'évitera pas quelque analogie avec le séïsme de 2011, devant le spectacle d'un chaos permanent, les images cataclysmiques incessantes qui pétrifient d'horreur le monde entier, le peuple japonais reste d'une dignité, qui force l'admiration, pas de pillage, pas de panique... Mais la "Submersion du Japon" n'est qu'un livre d'anticipation, qui n'a rien de si visionnaire, il possède son double sens abordant le thème du naufrage mais aussi celui du déclin du Japon, il faut le reconsidérer dans son époque, l'ouvrage a été rédigé durant la guerre froide au moment où le Japon (3ème puissance mondiale) cherchait à s'affirmer vis à vis des autres puissances. La métaphore semble assez évidente.

Dans ce récit, on ne trouvera aucun mystère : le Japon va couler. Il n'y aura aucune alternative à ce constat, (cf. le titre anglais "Japan sinks", voir également le film adapté du roman :"Nihon Chinbotsu", réalisé par Shinji Higuchi, entre autres, le best seller ayant été adapté plusieurs fois, tant au cinéma qu'en manga). On ne pourra s'empêcher de relier dans un tout autre style, le film "The day after tomorrow" de Roland Emmerich où des images s'ajusteront encore d'une façon invraisemblable à celle d'une réalité qui dépasse aujourd'hui autant la science que la fiction. Le critique (occidental) glané dans un quelconque magazine, des années 80's,  évoquant le roman de Komatsu Sakyo avait-il réellement saisi ce qu'une simple phrase (somme toute "vendeuse" et très banale) pourrait contenir d'effroi quelques années plus tard, lorsqu'il écrivait à l'époque aux lecteurs amateurs de récits de science fiction à propos de la "submersion du Japon" (je cite) : "Un best-seller pour ce livre d'anticipation" qui pourrait devenir réalité"...

 

 

Photo : Nuages de Mars. Sommes nous insubmersibles ? Question.

© Frb 2011.

samedi, 18 septembre 2010

Pourquoi si peu ?

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Photo :  Une note "éphémère", vue sur le petit muret de l'esplanade qui domine Lyon presque en haut du plateau de la Croix-Rousse, ce petit mur sert fréquemment de "carnet urbain" à certains oiseaux de passage... Ne cherchez plus sur le terrain, ce doux prélude, les nettoyeurs l'ont déjà effacé. Hélas ! hélas ! ... Août 2010. © Frb.

vendredi, 20 août 2010

Credo des anciens jours

Si Dun était sur Dunet
Les portes de Rome on verrait

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Hier, Je suis allée me promener sur la montagne de Dun. Lieu riche en souvenirs, mais de son passé historique, nous ne trouvons pour l'instant rien de très net, rien de très précis. (J'ai bien dit pour l'instant)... Quelques pans de murs restent debouts mais tous les principaux édifices ont été dévastés. Des fondements se retrouvent bien dans le sol, mais on se demande qui pourrait satisfaire notre curiosité en racontant de source sûre le passé de ces monuments détruits ? Il y a bien de vagues traditions, de fabuleuses légendes, transmises de génération en génération en guise d'annales et de chroniques et des auteurs qui ont un peu abordé la question historique mais leurs recherches s'avèrent d'une briéveté désolante. Est ce à dire que le silence des tombeaux se soit fait sur ses ruines et que les tentatives ébauchées pour redire le passé demeurent une oeuvre inutile ? Ou une oeuvre toute entière composée d'hypothèses et de rêveries ? N'est il pas possible de découvrir une partie de la vérité et de l'affirmer avec certitude ? Lorqu'une catastrophe épouvantable a frappé une région, il reste bien sûr une mémoire de cette catastrophe et c'est comme une fumée qui planerait longtemps sur la place d'un vaste incendie. La génération contemporaine dit à la génération suivante ce qu'elle a vu, puis de génération en génération, on peut se faire une idée (grosso modo) de ce qui s'est passé. Au fil du temps, le récit passe de bouche en bouche se déforme puis s'altère. Des légendes incroyables se greffent alors sur la vraie tradition qui elle même nous revient voilée. Dans ces récits tout se confond, les années, les lieux, les peuples et les héros et voilà le beau dunois confondu avec Charlemagne, ou le chanteur Roland. Dans ces récits, ces traditions fourrées d'anachronismes, il y a souvent pourtant quelque chose de réel: l'ombre d'une vérité...

Les enfants des écoles de la région alentour connaissent bien cette montagne charollaise, et la visitent tous sans exception, de génération en génération. Cela fait partie du programme de la discipline dite de "Plein air" et surtout des incontournables sorties de fin d'année avec celle du "bois des acacias", (un jour on vous le montrera), qui mène jusqu'à la Chapelle St Avoye. Et nous voilà, vingt mômes de 6 à 8 ans, trottant en file indienne docilement derrière Melle Pugeolles qui mène le cortège d'une main de fer (sans gant de velours) ; et nous passons par ici et nous repassons par là, nous y sommes, tout en haut à 721 mètres d'altitude, enfin presque, il faut grimper un petit chemin, minuscule, jusqu'à cette vue imprenable sur l'église d'abord, et puis ensuite, nous irons découvrir le panorama. Nous courons un petit peu avec nos gourdes en bandoulière, nos bobs ou nos casquettes autour des groseillers sauvages. Ce jour là fait époque. Ce sera à jamais, le premier plus beau jour de notre vie. Debout en demi cercle, nous tâchons de compter les clochers des églises environnantes que l'on peut distinguer à l'horizon (interminable). Nous nous familiarisons (est-ce une seconde possible ?) pour la première fois de notre vie, à l'idée encore un peu trouble, tout à fait indicible, de l'infini...

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Dans un bois dégagé tout près, un peu à la redescente, une vieille assise sur un caillou garde trois chèvres. Melle Pugeolles lui pose tout un tas de questions. La vieille est toute grise et toute sèche, elle ressemble un petit peu à ses chèvres. Nous fixons sur elle des paires d'yeux enchantés. La vieille raconte à sa manière l'histoire de Dun, sa destruction. A un moment elle s'arrête. Elle répète "Oui, mais y'a longtemps de ça ! du temps où la ville de Mâcon était perchée sur la montagne de Dun". Melle Pugeolles se raidit comme un piquet, elle tente d'autres questions: "Et après ?", "Après, répond la vieille, des ennemis sont venus, il y avait un château fort à cet endroit, là où c'était  Mâcon (elle fait une croix par terre avec son doigt) il y avait aussi de jolies maisons. L'ennemi a tout détruit", nous écoutons, une petite voix s'élève - "Mais madame de quel ennemi vous parlez ?" -"Ah ben, les autres ! ils v'naient de là haut ! de la montagne du Dunet, c'est là qu'ils avaient placé leur canon pour bombarder la ville et depuis ce temps y'a c'trou plein de pierres qu'on appelle le pote, le pote c'est le trou, le trou de l'ennemi, celui que vous voyez là". Elle tend à nouveau son bras, elle nous montre, "regardez ce chemin, et ben, figurez vous que c'est par là que l'ennemi est monté pour saccager la ville". Nous écoutons de plus en plus assidûment. Melle Pugeolles insiste encore un peu, - "Et il y a longtemps de ça ?" "Ouh ben ! j'y sais pas. Peut être ben plus de mille ans." Melle Pugeolles ne lâche pas le morceau - "Mais qui vous a raconté ça ?" - "Tout le monde y sait ! j'y ai toujours entendu dire comme ça, ma foi, et c'est la vérité ! tout le monde vous le dira, même monsieur le maire." La réponse est catégorique. Le visage de la vieille se referme. Il n'y aura plus rien à tirer d'elle. Melle Pugeolles donne un petit coup de sifflet qui veut dire "récréation". Nous avons enfin le droit de nous asseoire dans l'herbe pour manger nos bananes. Pourtant, quelque chose ne va pas. On dirait que Melle Pugeolles est préoccupée, elle tourne autour de la croix que la vieille a tracé dans la terre, elle tourne longtemps, regarde la croix comme si cette croix était mal dessinée. Elle gratte un peu autour pour dégager l'herbe, se relève, fouille dans son sac à dos, s'énerve, en sort un document qu'elle déplie, le lit de long en large, le relit, s'agenouille dans l'herbe pour gratter encore un petit peu. On l'entend marmonner toute seule: "C'est pas possible, c'est pas possible ! Ah non ! jamais de la vie ! ça ne se peut pas ! Mâcon sur la montagne de Dun, faut quand même pas exagérer !".

Nota : Evidemment, pour ne pas faire mentir tout à fait ce billet, je dirais qu'il existe aujourd'hui des ouvrages très bien documentés, où l'histoire de Dun se précise, se fait moins brève, pas du tout désolante. Je remercie P. Muguet, H. Mouterde et J. Virey, d'avoir conçu un livre passionnant abondamment documenté, une vraie "mine", comme on dit,  qui a pour titre "Dun, autrefois, aujourd'hui", et dont je me suis inspirée (un peu) pour écrire ce billet.

Photo : Un aperçu des façades d'inspiration romane (restaurée) de la splendide petite église de Dun qui était en ruine encore il n'y a pas si longtemps. Il existe des clichés des ruines de la chapelle ancienne, qui sont impressionnants tant il ne reste presque rien de cet édifice. L'église fût restaurée de manière raffinée sur initiative du Comte de Rambuteau au siècle dernier mais on évalue son origine à la seconde moitié du XIIem siècle. Vue sur la Montagne de Dun. Nabirosina. Août 2010. © Frb.

lundi, 12 juillet 2010

Des fourmis plein la tête (part 2)

A propos de quelques questions recueillies au hasard dans les livres et dans les magazines...

Pour consulter la part 3 des fourmis plein la tête vous pouvez cliquer sur l'imageIMfourmis19BB.jpg.

Sommes nous certains ou non d'une réalité matérielle extérieure ? Le gaullisme a-t-il encore un avenir ? Manies tu bien ta souris ? Qui est Gaëtan Mouche ? Qu'est ce qu'un amortissement dégressif ? Suis je responsable d'autrui ? Où se jette la Meuse ? La croyance est-elle une faiblesse d'esprit ? Faut-il brûler Anna Uméni ? Le forex est-il rentable ? Le futur existe-t-il déjà ? Pour ou contre les abrasifs ? Faut-il avoir peur des astéroïdes ? Qui occupe le poste 4 ? De combien faut-il réduire le temps de cuisson entre un four traditionnel et un four à chaleur pulsée ? Que pensent les hommes des femmes qui couchent le premier soir ? La pataphysique est-elle une science ? Peut-on vivre plusieurs vies en une journée ? Lorsqu'il n'y a plus rien à faire que faites vous ? L'anxiété est-elle une maladie ? Pourquoi attendre demain ? Est ce que beaucoup remercier n'est pas encore une façon de demander ? L'arme est-elle l'ennemie de son maître ? Comment connaître le périmètre d'un triangle équilatéral qui est dans un hexagone de 4cm de coté avec la propriété de Thalés ? A qui se confier ? Qu'est ce que la rancune ? Quelle est la date précise de la foire de la petite angevine à Beaupréau ? L'asthénosphère est-elle respirable ? Peut-on comparer le cerveau de certaines personnes à un grenier ? Quelle est la limite de l'amour ? Quelle mer baigne la France à l'ouest ? Qu'est ce qu'une galerie marchande conceptuelle ? Un homme peut-il faire l'amour plusieurs fois par jour après cinquante ans ? Comment procéder pour que mon hamster doré puisse faire de la roue sans renverser la cage ? Qui êtes vous pour me parler sur ce ton ? Etes vous achluophobe ? Ou se trouve la sonde lambda ? Pour combien je vous en mets ? L'âme est-elle la meilleure partie de nous même ? Où trouver des épingles à chignon vintage ? La sobriété des dirigeants sera-t-elle un critère pour retenir les prochains lauréats de notre trophée ? Seriez vous prêt à manger des insectes s'ils étaient bien cuisinés ? Qu'y a t-il donc de changé à ma situation ? Peut-on aimer quelqu'un qui est toujours absent ? Est ce qu'on peut habiter le temps ? Avez vous fait la vaisselle ? Pourrais je me faire tatouer la Joconde grandeur nature sur le visage ? Qu'est ce que l'immaturité affective ? Dans une usine de futons, puis-je être sûre de passer à côté d'un lit sans ciment ? Désirez vous un petit apéritif avant que nous passions à table ? Qu'est ce qu'un trésor de sapience ? Peut-on apprendre à un vieux singe à faire d'autres grimaces ? Sommes nous faits l'un pour l'autre ? Que voulez vous dire exactement par "faire des tranches" ? Tout être humain a t-il obligatoirement besoin de tendresse ? Le passé est il comme de la poussière ? Où trouver du parchemin végétal ? Doit-on punir les gens qui n'aiment pas le travail ? Notre conscience existe-t-elle avant d'arriver dans un corps ? Mes oies pondent dans la mare que faire ? Quelqu'un pourrait il venir m'aider à installer mes étagères ? Savez vous bien mentir ? Pourquoi avez vous fait la vaisselle ? Que représente pour vous le chiffre 476 ? Qui sont les vrais fous ? Le nouveau passeport biométrique est-il acceptable ? Quarante mille est ce assez ? D'où provient le fait qu'un robinet, ouvert à moyenne pression, est bruyant ou silencieux ? Ce qui est inséparable peut-il rester longtemps séparé ? Peut-on penser sans image ? Peut-on s'aimer sans se comprendre ? Qui façonne les objets ? Pourquoi l'arbre ne pourrait-il pas s'appeler Plouplouche et Plouploubache quand il a plu ? L'écrivain a t-il la langue chargée ? Sommes nous nécessaires ? Peut-on faire une oeuvre avec un os de sèche ? Quand avez vous fait la vaisselle pour la dernière fois ? Comment casser la logique dualiste ? Les années lumière seront elles nos meilleures années ? Le pire est-il caché ? Lorsqu'un système est totalement désordonné, a-t-il atteint son maximum d'entropie ? Comment se retrouver ? Le bonheur se vit-il nu ? L'inconscient est-il infini ? Suis je plusieurs ? A qui appartiens tu ? A quelle heure dois-je faire sonner le réveil ? Qui décide ? De quoi parlions nous ? Vous pouvez répéter la question ? Plaît il ?...

(A SUIVRE...)

Photo : Des bestioles sur fond bleu rasent les murs du côté de la rue D'anvers pas très loin de l'excellente Galerie Roger Tator, dans le 7em arrondissement de Lyon, photographiés en Juin 2010.© Frb.

samedi, 03 juillet 2010

Une nuit à la fenêtre...

J’ai élevé chez moi un petit cheval. Il galope dans ma chambre. C’est ma distraction.

HENRI MICHAUX "Lointain intérieur" in "Plume ; lointain intérieur" Gallimard, collection poésie 1985.

Ipara168b.jpgLes nuits d'été, sont lourdes irrespirables. Elles se succèdent toutes pareilles. Les nuits sont noires (pas autant que certains jours en nos villes mais tout de même ), les nuits sont blanches, et je les passe à la fenêtre qui m'offre une vue imprenable sur un ciel absolu, infini. Ma nature adorant le vide, je m'y noie à feuilleter mentalement  "Le Grand Livre des Pourquoi" qui fit les délices de l'enfance et me revient régulièrement de mémoire, avec ses casse tête plus ou moins chinois d'une simplicité désarmante, enfin bref, c'est un ouvrage plein de ces questions pour les moins de huit ans, auquel nul ne pourrait répondre (pas même les tricentenaires ni madame Jesétou, éminente théoricienne du grantou devant l'Eternel, pour qui un jour ou l'autre il faudra bien composer un panégyrique)... Mais je m'égare. Ceci ne sera encore qu'une modeste nota/ notte à la fenêtre d'une chambre plus petite que l'esprit qui s'y perd (quoique...), et plus grande, (si j'en crois mon cheval), que mille fois l'univers entier. Et voilà aussitôt que je me demande pourquoi le ciel est noir la nuit alors que la lune qui m'éclaire et les étoiles qui entrent dans ma chambre sont si étincellantes. Mais au même moment quelqu'un frappe à ma porte : "Qui va là ?", Une grosse voix me répond : "N'ayez crainte, c'est monsieur Heinrich Wilhelm Matthaus OLBERS ! pour vous servir !". Je n'en crois pas mes yeux, l'astronome en personne ! ce grand découvreur d'astéroïdes est venu exprès de Göttingen, sur son alezan lacté, me visiter, afin de m'expliquer grosso modo le contenu de son paradoxe, si fascinant, que je ne pourrai (dans mon immense générosité), garder cela une seconde de plus pour moi seule, ainsi je me sens investie d'une mission toute nouvelle, celle de vous présenter (grosso modo) le paradoxe de OLBERS, si toutefois il vous est encore inconnu. Ames sensibles, s'abstenir ! c'est une histoire qui finit mal.

"Le paradoxe de OLBERS est une contradiction apparente entre le fait que le ciel est noir la nuit et le fait que l'Univers était supposé statique et infini à l'époque. Si on suppose un univers infini contenant une infinité d'étoiles  uniformément réparties, alors chaque direction d'observation devrait aboutir à la surface d'une étoile. La luminosité de surface d'une étoile est indépendante de sa distance : ce qui fait qu'une étoile semblable au Soleil est moins brillante que celui-ci, c'est que l'éloignement de l'étoile fait que sa taille apparente est beaucoup plus faible. Donc, dans l'hypothèse où toute direction d'observation intercepte la surface d'une étoile, le ciel nocturne devrait être aussi brillant que la surface d'une étoile moyenne comme notre Soleil ou n'importe quelle autre étoile de notre Galaxie.

Une autre explication consiste à considérer que le milieu cosmique n'est pas parfaitement transparent, de sorte que la lumière provenant des étoiles distantes est bloquée par ce milieu non-transparent (des étoiles non-lumineuses, de la poussière ou des gaz), de sorte qu'un observateur ne peut percevoir que la lumière provenant d'une distance finie (comme dans un brouillard). Cette explication est incorrecte, car le milieu devrait s'échauffer en absorbant la lumière. Au final, il se retrouverait aussi chaud et aussi lumineux que la surface d'une étoile, ce qui pose à nouveau le paradoxe [...]

Ce paradoxe est important, une théorie cosmologique qui ne saurait pas le résoudre serait évidemment invalide. Cependant, une théorie qui résout le paradoxe n'est pas forcément valide. Après quoi tout ce qui brille nous laissera pantelants, affamés, à ras des cailloux, mais là n'est pas le plus le plus tragique.

[...] Il est clair que dans sa formulation initiale, on faisait implicitement l'hypothèse que les étoiles pouvaient briller indéfiniment. Or on sait aujourd'hui que
c'est faux et que les étoiles ont une durée de vie finie."

Grand livre du pourquoi et autre liens utiles, sûrement complèmentaires :

http://www.astrosurf.com/nezenlair/nel3/olbers.htm

http://oncle.dom.pagesperso-orange.fr/astronomie/histoire...

http://tice.education.fr/meteo/rayonn/jour_nui/html/jn01....

http://fr.wikipedia.org/wiki/Univers_observable

Photo: La nuit à ma fenêtre, ornée d'une charmante bimbeloterie lumineuse, à en frôler le haïku, mais bon cette fois ci je vous l'épargne. Lyon by night. Juillet 2010.© Frb.