dimanche, 23 août 2009
Bacarouler
"Le secret pour voyager d'une façon agréable consiste à savoir poliment écouter les mensonges des autres et à les croire les plus possibles. On vous laissera, à cette condition, produire à votre tour votre petit effet et, ainsi, le profit sera réciproque."
F. DOSTOÏEVSKI (1821-1881)
"Le p'ti bus Nabirosinais s'en va dans la campagne... Deux roues solides comme celles des des tubes et la Blanchette, à l'avant. Increvable ! ça coûte moins cher que de payer un cocher. (La Blanchette il faut pas y toucher, c'est la "crésa vécha racholliase"). Pour le trajet, on paie l'aller avec une douzaine d'oeufs, un fromage blanc, ça dépend, du vent, du temps... Le retour on le fait à pied, parce que desfois le p'tit bus Nabirosinais, il se perd dans la forêt, s'embourbe dans la tourbe brune qui dévore les pieds des anges chassés du paradis, aux gargouilles souterraines. (cf. Raoul GLABER " Et soudain, les entrailles de la terre furent vêtues d'un brun jupon de tourbe [...]"). Parfois, le p'tit bus nabirosinais, il sert aussi de corbillard, (on le recouvre d'un tulle noir, parce qu'un corbillard rouge ça ne se fait pas). Et l'été, on le met en "décapotable", et nous voilà partis au village, avec nos chapeaux de paille, assis sur la motte de terre qui fait à la fois office de siège avant, et de banquette arrière... Trois jours trois nuits pour faire l'aller-retour Bois Ste Marie, Vendenesse lés Charolles, on va voir les fours à chaux (En aôut, on dit "les fours à chauds" parce qu'on y fait de belles rencontres). Et puis on grimpe, (tant qu'à faire !) jusqu'au domaine de St Racho, à 552 mètres d'altitude (c'est notre Everest à nous, après le Mont st Cyr, bien sûr). Les habitants de Saint Racho on les appelles "les St raquois" (du nom du "raquois à houpette", un moineau dont la houpette rose sert aussi de boussole aux hérons de Bourgogne. Mais non ! je déconne, comme dit la Pinturault, "faut pas croire tout ce qu'on lit !").
Au début du mois de Septembre, tous les villageois se cotisent pour faire un grand voyage, on monte tous dans le bac à rouler, et on pousse tous dans les montées ou quand la Blanchette fait la tête, certains passagers sont alors obligés d'aller devant pour tirer le petit bus, (rires et fous rires en perspective, surtout dans les tunnels !). Mais en fin de compte le plus important, c'est de bien prendre le temps de contempler le paysage. Et le pt'i bus nabirosinais est un moyen de transport très "bio" comme ils disent, beaucoup moins polluant que le train à vapeur des Cevennes dont le fabricant a copié tout le disagne de notre bus Nabirosinais. (Y 'en a qui manquent pas d'air !). Enfin, cette année, pour ce qui est du voyage c'est décidé, on part le 5 septembre visiter Oran, surnommée la "radieuse" ou la "ravissante" c'est vrai que ça a l'air très beau ! J'espère qu'on sera de retour avant Noël. Mais avant, il faudra bien que je retourne à Lyon, parce que j'ai une très grande nouvelle à vous annoncer : je vends ma voiture à mon beau frère, ça va me faire un peu de sous."
GUY BOUILLON : "Transports et voirie en région nabirosinaise" in "Chroniques villageoises", Editions de la Corne d'Abondance. 1974. Suzy les Charolles.
07:23 Publié dans Art contemporain sauvage, Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective, Transports | Lien permanent
samedi, 22 août 2009
Cailloux
"Hélas ! mes pauvres enfants, où êtes-vous venus ? Savez-vous bien que c'est ici la maison d'un Ogre qui mange les petits enfants ?
Nous étions là, assis par terre sur l'ancienne place de la Grenette à Bois Ste Marie, minés par la chaleur, nous écoutions le Germain Poître nous raconter des histoires d'hydres et de gargouilles, tout un Moyen-Age à faire peur, quand la cloche se mit à sonner. Le son allait lentement, lugubre et revenait presque sans variation. Il semblait que le métal coulait sur les maisons, et que le plomb perché tout en haut du clocher mêlé à la blancheur du ciel, nous ferait perdre la raison. Le Germain Poître murmura à voix basse, "Quelqu'un en moins ! la Marie-Antoinette a parlé". (Marie-Antoinette c'était le nom de la Cloche boscomarienne, celle de La Clayte s'appelait Marie-Charlotte, les deux cloches étaient soeurs dans la vie, je veux dire les deux filles étaient soeurs, filles jumelles du donateur, elles portaient le même prénom que les cloches en hommage, ou le contraire enfin bref...). On chercha parmi tous les vieux lequel aurait pu être "emporté" par les dernières grosses chaleurs (Bois St Marie étant aujourd'hui partiellement transformé en asile, ou plutôt en "long séjour" très honorable, comparé aux mouroirs encore nombreux partout, dont je vous parlerai peut être un jour, Bois Ste Marie, disais je, compte sans doute plus de pensionnaires à son asile que d'habitants, il était donc impossible de savoir pour qui sonnait ce glas).
Deux jours après, l'annonce parût dans le journal "La Renaissance", à la rubrique nécrologique, (c'était la première rubrique qu'on lisait, juste avant le billet du père Mathurin). Un papier signé Guy Bouillon, notre journaliste cantonal, une grande vedette, sorte de Pujadas du Nabirosina. C'était un tout petit article avec une toute petite photo, montrant un tout petit bonhomme entouré de ses sept frères, et de ses parents bûcherons originaire des bois environnants ; une sorte de nain, en somme. Le journaliste avait écrit "un tout petit homme cordial et travailleur, un ouvrier bien sympathique". Le titre, en plus gros caractère affichait "Un orphelin est décédé". Chez nous on dit officiellement "est décédé" pour les gens, "a crevé" pour les bêtes, ce n'est qu'à voix basse qu'on ose le "il est mort", comme dit la Berthe, (la bonne du Germain Poître), "être décédé" ça fait plus propre ! Le Germain Poître, lui, il pense carrément qu'à trop prononcer le mot "mort" ça fait mourir les gens, il dit que c'est comme le vert au théâtre : ça porte malheur ! Le papier signé Guy Bouillon ne tarissait point d'éloges pour vanter les mérites du "défunt". Il évoquait entre parenthèse quelques drames survenus naguère dans cette famille, soulignant "l'enfance malheureuse, toute la pauvreté d'une famille" mais aucun autre détail ne filtra. Notre curiosité en fût lésée.
La seule façon de la satisfaire était de suivre l'enterrement. La cérémonie fût très brève. L'église était vide, hormis le père Prunier qui fit une homélie incompréhensible à cause de son accent de Palinges, le journaliste-vedette Guy bouillon qui était revenu en "reportage spécial", et nous mêmes, les curieux, plus quelques autres commères. Ce ne fût qu'à la sortie de la messe que nous remarquâmes un très très vieux monsieur qui pleurait toutes les larmes de ses yeux. Il était vêtu à la mode ancienne, une lavallière, des guêtres, une perruque bouclée et poudrée. Il portait sur son dos un gros sac qui faisait un bruit bizarre, de billes entrechoquées... Guy Bouillon vint nous saluer, Le Germain Poître lui demanda si le bonhomme qui pleurait c'était pas le fils du Jean de La Fontaine. Guy Bouillon tapota gentiment l'épaule du Germain Poître : "Non, non , mon vieux, ce n'est pas ça, je crois que vous confondez, avec Jean Pierre Delafontaine (un notaire farfelu de Suzy les Charolles)... Mais ce n'est pas lui non plus !"
Nous partîmes au cimetière. Tous les vieux de l'asile, nous regardaient passer, on pouvait deviner leurs têtes, derrière les volets roulants descendus à mi-fenêtre. Il faut croire que chaque enterrement pour eux était une sorte de fête. C'était "leur" évènement. Aucune animation d'accordéon ou de trompette (menées tambours battants) par Jo Corda (et sa trompette), Ricky Vallin (et son accordéon) ni les concours de "diamino" ne pouvaient surpasser cet élan d'allégresse, que provoquait chez eux, un enterrement, au désespoir du personnel hospitalier qui faisait tout pourtant...
Au cimetière, on ne prononça pas le nom du défunt. On jeta la boite en sapin au fond d'un trou, un employé du cimetière la recouvrît à grands coups de pelle, cela fît une grosse motte de terre, sur laquelle il planta une croix. On récita le "Notre Père". Un signe de croix. Et puis voilà.
L'histoire pourrait s'arrêter là, si je n'avais pas perdu mes clefs dans une de ces allées. Tandis que je grattais la terre entre les tombes, je vis, (et pour mieux voir, me cachai derrière la chapelle du Marquis de Carabas sous Dun), l'homme à la perruque bouclée, s'approcher doucement de la motte de terre. Il prit son sac cliquetant, en déversa le contenu tout autour de la croix. Il pleurait toujours à chaudes larmes. Du sac je vis tomber des milliers de petits cailloux, blancs, gris, roses, tous scintillants dont la tombe fût bientôt recouverte. Puis l'homme se mit à parler seul : "Tu vois, petit, je les ai gardés pour toi... Ces petits cailloux, ils te reviennent, ils sont à toi". Puis il posa soigneusement l'objet : une babiole, ornée d'une belle rose rouge sculptée, et le mot "souvenir" peint à l'encre dorée. "Et ça, Poucet, je te le donne aussi, c'est de la part de Blanche Neige"...
Photos : Une tombe + quelques souvenirs. (Vous savez maintenant pour qui, pourquoi.) vue au cimetière du village médiéval de Bois St Marie. Nabirosina. Aôut 2009. © Frb
04:11 Publié dans A tribute to, Art contemporain sauvage, Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
vendredi, 21 août 2009
Du pareil au même
Photo : Fin des vacances. L'itinéraire est même flêché sur la pierre de l'église de Châtenay sous Dun. Cependant on a le choix. (Je n'ose dire l'embarras du choix). Nabirosina. Août 2009. © Frb
Si toutefois vous trouviez le choix un peu "limité", je vous conseille vivement d'aller défier le hasard en suivant d'autres flêches du côté des nuages... Vous ne le regretterez pas , (tout y très bien indiqué) :
http://les-nuages.hautetfort.com/archive/2009/08/27/le-ha...
A suivre... Billet ci-dessous ↓
03:42 Publié dans Affiches, panneaux, vitrines, Art contemporain sauvage, Balades, De visu, Le nouveau Monde, Mémoire collective, ô les murs ! | Lien permanent
Où allons nous, quand nous ne sommes plus vacants ?
HOZAN KEBO'S REMIX :
"Battre la campagne" VS "Battre le pavé" (Version novlangue)
L'encer et le fiel étant pavés ...
http://kl-loth-dailylife.hautetfort.com/archive/2009/08/2......
... de mauvaises directions.
Original remix : Hozan Kebo's enterprise. Août 2009. (HK/LR©)
jeudi, 20 août 2009
Tracer
"Quand j'aurai cent dix ans, je tracerai une ligne et ce sera la vie."
HOKUSAÏ KATSUSHIKA, (北斎), (1760, 1849)
Une écriture naît sur la route, quelques points de suspension, telle la mise en demeure de la ligne d'horizon. C'est tout en bas de la page que commencent les grands voyages. Ils se remontent comme les fleuves dit-on, et voilà que le voyageur se prend pour un saumon... Du labour viendra la métamorphose, ils ont tracé la route, ne reste plus qu'à suivre. Le mouvement envoûte. D'autres incisent encore la terre avec la lame bleue des faux, mais ils sont de plus en plus rares. Au mouvement précis du devoir régulier, tâchons bien et traçons. Abreuvons le sillon du sang de l'aventure. Et que le pas s'élève, et que s'inscrive un peu de sueur dans cette mûe. Le devoir de contradictions. Nous voilà à ce point, rendus et gratifiés. L'outil offrant la symétrie, nous travaillerons au salut de la ligne. Un grand nombre de traits reste à réaliser, plus nous irons à l'épaisseur, plus nos jours seront prévisibles. Nous joindrons par des ligatures, nos traces, et les organiserons. Tout cela formera des phrases vouées à la ligne de fuite, aussi fastes que des murailles, plus mouvantes que le marécage. Et nous peindrons par terre d'hallucinants messages, nous les coucherons sur la route. Nous apprendrons les signes qui vont apprivoiser. Nous occuperons tous les espaces, nous les refermeront. Un à un. Ailleurs, il y aura des calligrammes ouvragés, sur le marbre. Et une ligne horizontale, bel écheveau de nos destins, livrera aux oracles, les déliés, le trop plein, où ne se perçoivent plus les destinations idéales. Où serons nous demain ? Un champ vide ouvrira la page. (Page du latin "Pagus" = "Champ"). Une série inépuisable de combinaisons, entrera en ligne de compte. Des comptabilités, toute une paperasse. Comme à chaque fois, les signes s'en retourneront à la ligne et se déploieront d'un point à un autre. Etc...
A écouter : http://www.deezer.com/listen-2238985
Photo : La ligne blanche, sur la grande route du Nabirosina, celle qui mène aux villes, comme partout. Géométrie urbaine en milieu rural avec St Cyr en ligne de mire (hors champ). Vue en Aôut 2009 du côté de Vicelaire. © Frb
10:28 Publié dans A tribute to, Art contemporain sauvage, Balades, De visu, Impromptus, Le nouveau Monde, Mémoire collective | Lien permanent
mercredi, 19 août 2009
Vermillon
Je décolle souvent et voyage toujours
pour voir si le lieu du leurre
ne se confond pas
avec celui de ma main
NICOLAS DE STAËL à René CHAR, lettre du 12 novembre 1953.
NICOLAS de STAËL dédia cette phrase à René CHAR en 1953. Deux ans avant sa mort, deux ans après que René CHAR ne le solllicite pour illustrer un livre luxueux avec les textes du "poème pulvérisé". Les deux hommes se rencontrent en 1951 grâce à Georges DUTHUIT qui publie dans les "Cahiers d'art", un article sur N. de STAËL, et sait que celui ci souhaiterait illustrer le poète. Dès le départ, la relation est évidente. Les deux hommes sont entiers, à la fois larges d'idées et chatouilleux, cultivés et sauvages. L'art est pour eux, le combat d'une vie. Tous deux sont aussi chacun engagés dans leur oeuvre, à corps perdu, peut-on dire. Pour R. CHAR, N. de STAËL, (né à St Petersbourg en 1914) vient d'un autre monde, il est : "L'enfant de l'étoile polaire dont Orion s'est épris sur son parcours". Dans l'exergue du poème "Libera II", il compare même leur amitié à celle d'Achille et de Patrocle. Achille le poète s'extasie sur les sons qu'il tire de sa lyre, tandis Patrocle, le peintre l'écoute, silencieux. Le livre qu'ils envisagent de réaliser ensemble se composera de 12 pièces issues du "poème pulvérisé", de 14 bois en noir et d'une lithographie en couleurs. N. de STAËL s'attache à ce travail, avec fougue, il lui consacre les mois d'été 1951, conseillé discrètement par R. CHAR. Dans son atelier parisien, Nicolas DE STAËL choisit la technique du bois gravé et tente d'instaurer un dialogue dans ce rapport des gouges et du bois, avec les écrits de René CHAR. Ce travail commun intitulé "Poèmes" sera exposé le 12 décembre 1951 à la galerie Jacques Dubourg à Paris où seront présents tous les écrivains à la mode : A. CAMUS, M. LEIRIS, G. BATAILLE... N. de STAËL est fier de ce premier livre et s'enthousiasme à l'idée d'en publier d'autres. "Bois de Staël" est la première étude que R. CHAR consacre à la peinture de STAËL. Sa vision des gravures sur bois est celle "d'empreintes de l'homme des neiges"... Ecrira- t-il.
Ce travail commun fût nourri d'une très belle correspondance entre les deux hommes, leur l'amitié fût infrangible. On sait que René CHAR accordait à l'amitié une place immense, il fût fidèle à d'autres très connus, sans démenti, tels BRAQUE, ELUARD, GIACOMETTI, A. CAMUS, mais cette amitié envers N. de STAËL était exceptionnelle, un sommet, un grand signal qui toucha l'essentiel, non seulement humainement, mais aussi pour la compréhension de leurs oeuvres. Tout cela demeure encore dans ces nombreuses lettres échangées : besoin de rassurer, d'être rassurés, d'exprimer des saturations personnelles et des fragilités. L'échange est absolu, d'une sincérité absolue. N. de STAËL a réduit la peinture aux formes élémentaires comme René CHAR l'a fait pour la poésie, et ces traces font rêver car en proposant une lecture figurative des peinture de N. DE STAËL, René CHAR anticipera le virage que prendra son ami pour amplifier son oeuvre. Il est à noter que cette rencontre réunissait deux géants, tant par l'engagement artistique, que par la taille. Deux solitaires "En exil à la fois dans le ciel et sur la terre". R. CHAR parlait d'un "couple d'êtres", de "Deux passants des cimes". Ce texte sur N. de STAËL sera le point de départ d'une nouvelle entreprise, dans laquelle le peintre et le poète prennent encore engagement : la création d'un ballet dont R. CHAR écrit l'argument tandis que N. de STAËL ébauche des idées de costumes et de décors. Ce sera "L'abominable homme des neiges", un rêve irréalisé, faute de compositeurs. DALLAPICCOLA, STRAVINSKY et MESSIAEN se récusent. Le projet restera sans suite. En 1953, une revue de Montevideo ("Entregas de la licorne" où N. de STAËL a exposé en 1948), publie un texte de R. CHAR intitulé "Nicolas De Staël", il a été inséré dans "recherche de la base et du sommet", entre "bois de STAËL" et "Il nous a dotés...". Tandis que N. de STAËL s'éloigne de la réalité palpable, CHAR nous y ramène. Les pavés des tableaux redeviennent rochers, et les toiles, "des chemises qui claquent au vent". Mais ni le peintre ni le poète ne peindront ce qu'ils voient.
Autre collaboration de René CHAR avec les peintres → ICI
A suivre / ... Des extraits de la correspondance de Nicolas de STAEL et René CHAR. Dans un billet que vous trouverez exactement en dessous de celui-ci.
Photo : Un monde, précédant la palette, les cimes et les cimaises. Nous avons pressé tous les tubes, nous sommes sortis de l'atelier, une couleur approximative a pris le ciel par une fantaisie (fantasy ?) légèrement trafiquée. Après le vermillon, la rouille, et juste avant le bleu cassé, nous n'avons pas trouvé cette couleur idoine. Ce vermillon parfait. Un ciel trop rouge étant un leurre, nous l'avons donc désaturé . Nabirosina. Juillet 2009. © Frb.
11:04 Publié dans A tribute to, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, Ciels, De visu, Mémoire collective | Lien permanent
Bleu cassé
"Le travail de Nicolas de Staël est d'une exigence absolue et il est peu problable que j'aie le coeur de m'autoriser un jugement.
Cependant je peux bien vous avouer que je cherche toujours, sans trouver, dans quel monde de lumière il est possible de vivre autant de vérité que dans les tableaux des footballeurs, grands ou petits... Quelle danse de lumière et quelle puissance d'homme et de lion. J'aime l'oeuvre de Nicolas dans sa profonde humanité et sa pure vérité."
René CHAR, correspondances. (En réponse à la lettre d'une admiratrice qui lui demandait quel était le tableau de N. de STAËL qu'il préférait)
Une des ultimes toiles de N. de STAËL s'appelle "Les mouettes", les couleurs se déclinent du blanc gris au bleu sombre, en strates qui se succèdent. On n'aperçoit nullement les oiseaux dans le détail, mais des formes qui fuient, l'orage venant au ciel. On sait pourtant combien Nicolas De STAËL aimait le vermillon, couleur dans laquelle il flamba sa vie et l'incendie revient encore aujourd'hui éblouir sublimement et interroger sans répit son visiteur.
En 1951, Nicolas de STAËL est à Paris, dans son atelier, René CHAR vit à l'Isle sur la Sorgue. Mais la présence de R. CHAR habite l'atelier du peintre. Ils collaborent.
je vous livre ici quelques extraits de leur correspondance :
[...] Je ne le dirai jamais assez ce que cela m'a donné de travailler pour toi. Tu m'as fait retrouver d'emblée la passion que j'avais enfant pour les grands ciels, les feuilles en automne et toute la nostalgie d'un langage direct, sans précédent, que cela entraîne. J'ai ce soir mille livres uniques dans mes deux mains pour toi, je ne les ferai peut-être jamais, mais c'est rudement bon de les avoir. [...] A bientôt. De tout coeur.
N. DE STAËL à René CHAR (source "Lettres de N. DE STAËL, annotées par Germain VIATTE, dans "Nicolas de STAËL", 1968)...]
"Ne presse pas le mouvement, c'est le livre qui en souffrirait. Nous ne sommes pas à 8 jours. Reçu le paquet. Bien sûr, c'est informe et je ne peux pas me faire une opinion sur le livre. Attendons la fin et le premier exemplaire du tirage. Tel que ''ça n'existe pas''. Mais à l'examen voici quelques observations. 1) La page de titre de l'ouvrage est un peu basse, ''POEMES'' et l'ensemble devraient être composés légèrement plus haut. Ce n'est pas très grave. Tant pis. 2) J'aime le fourreau (l'emboîtage) noir. Je le trouve très beau. 3) Je ne trouve pas heureux le ''CHAR'' de l'étui, même je le trouve laid. Peux-tu le faire disparaître ? Est-il temps ? Je préfère rien que cela. [...] 5) Il ne faudra pas oublier de glisser des papiers fins devant les bois dans tous les exemplaires. Très important. [...] Cher Nicolas en définitive tout ira et sera bien. Sois sans inquiétude. Tu t'es très heureusement tiré de ce poison qu'est la fabrication d'un livre grand luxe. Grands et sincères compliments. [...]"
René CHAR à Nicolas de STAËL, 11 novembre 1951.
Les lettres que R. CHAR écrivit à N. de STAËL, n'ont pas été publiées intégralement, mais le poète fût imperceptiblement dans les confidences de N. de STAËL, comme le suggèrent les poèmes "Vermillon" et "Libera II". N. De STAËL éprouvait, à cette époque, une passion qui ruinait peu à peu ses forces vitales; tout comme son travail, qui l'épuisait. Le poème "Vermillon" paru du vivant de N. de STAËL, semble crypté, R. CHAR par amitié, discrétion, pour son ami, s'en tint à des allusions délicates, mais claires aux initiés. "Vermillon" est sous titré : "Réponse à un peintre", le poète tente de conjurer les affres de la vie personnelle et d'offrir à son ami ce peu de recul nécessaire pour continuer.
Le 9 novembre 1953, N. de STAËL adresse à R. CHAR, une lettre magnifique. Amoureux en Sicile d'une femme, épouse d'un mari très jaloux, le peintre désespère de ne "pouvoir la tirer de son caveau mesquin", il se plaint des complots qui se trament contre lui pour l'éloigner de ce "visage de Sicile". On retrouvera ce vermillon, (la couleur préférée du peintre), dans ses derniers tableaux notamment les "paysages siciliens", et ces ciels écarlates témoignent encore du feu, de cette fièvre qui le consumeront. Il écrira à R. CHAR en 1953, ces quelques mots sublimes :
"Il y a cela de vraiment merveilleux entre nous, c'est qu'on peut se donner tout ce qui est possible et impossible sans limite, parce qu'on ne voit pas la fin de nos possibilités [...]"
EN 1954, dans un atelier ouvert sur la mer, N. de STAËL s'installe à Antibes. En six mois, il réalise plus de 300 toiles. En solitaire. Sa peinture qu'il applique alors au coton semble de plus en plus limpide, presque transparente. Il écrit alors :
"Je n'ai plus la force de parachever mes tableaux."
Le 16 mars 1955, aux remparts du Cap d'Antibes, N. de STAËL arrêtera tout. Laissant une toile immense, inachevée. Une orpheline intitulée "Le grand concert".
Photo : Ciel bleu, gris, tournant à l'orage et cassant doucement la blancheur des nuages, vu dans le Nabirosina, au dessus de l'étang des clefs. Août 2009.© Frb.
07:24 Publié dans A tribute to, Arts visuels, Balades, Ciels, Correspondances, De visu, Mémoire collective | Lien permanent
mardi, 18 août 2009
Battre la campagne (2)
"Chaque région de l'espace, aussi petite soit-elle, en descendant jusqu'au simple photon, contient la configuration de l'ensemble."
GRICHKA BOGDANOV : (notre grand jeu d'été "battre la campagne", vous invitera à deviner qui est Igor, qui est Grichka, personnellement, je n'ai jamais su, c'est bien trop compliqué pour moi ;-)
Couchée sur un tapis de mousse, par un très bel après-midi d'été, je me mis à rêver à la structure des bryophyta et à son embranchement. Il y avait tant à dire, tant à faire partager car il faut le savoir, l'embranchement des Bryophyta, ne concerne que les mousses au sens strict (pas du tout la mousse à raser au chlorophylle, ni la mousse à la pistache), tandis que le terme bryophyte, pris au sens large (à quel autre autre sens pourrait-on le prendre ?) s'applique aux trois embranchements de plantes terrestres qui ne possèdent pas de vrai système vasculaire. Les hepatocophyta par exemple (ou marchantiophytes (la marchantia)) ou les Anthocérotophyta (comme l'anthoceros levis, pour ne citer que lui ). Dépourvues de racines et de lignine, leurs "rhizoïde", (ah j'aime ce mot ! qui m'en rappelle un autre encore plus beau), permettent l'ancrage au substrat et pour certaines espèces, une vie épiphyte (du grec έπί "sur", φυτόν "végétal"; littéralement "à la surface d'un végétal"). Il faut aussi savoir que les épiphytes sont des organismes autotrophes photosynthétiques. Les organismes autotrophes s'avèrent capables (comme vous l'avez deviné), d'utiliser des éléments inorganiques pour synthétiser leurs propres constituants organiques. Mais pour en revenir aux bryophyta, elles sont dépourvues de tissus conducteurs comme ceux des plantes à graines. Pourquoi ? Se demandera-ton. Tout simplement parce que leur appareil végétatif, ne contient ni xylème, ni phloème. Le tissu xylèmique du grec "Xylon", "bois" est un ensemble comprenant le xylème, du parenchyme de réserve, des cellules associées ainsi que des rayons libéro-ligneux. grâce au phénomène de reviviscence, ces espèces peuvent survivre à l'état déshydraté. Ce sont également des indicateurs de pollution. Quant au phloème c'est le tissu conducteur de la sève élaborée (solution riche en glucides) chez les plantes vasculaires. Le phloème a aussi un rôle de réserve avec les parenchymes. Ceci explique cela; sauf si l'on ne sait pas ce que sont les parenchymes. Du grec ancien παρεκχέω, "parenkheô", "épancher auprès" (para = à côté, et egkheô = répandre), les parenchymes sont des tissus végétaux constitués de cellules vivantes, à paroi pecto-cellulosique mince, perforées de ponctuations ou plasmodesmes, qui permettent des communications intercellulaires et une circulation des substances à l'intérieur des cellules (circulation symplasmique). Ce sont donc essentiellement des cellules de remplissage. Enfin pour en finir avec les bryophyta, leur structure est simple, peu d'organes sont clairement différenciées, on parle alors d'une structure "thalloïde", de "Thalle" : une thalle, (parfois thalli au pluriel), est un appareil végétatif ne possédant ni feuilles, ni tiges, ni racines (si vous avez l'impression qu'on tourne en rond, vous le dites, hein !), produits par certains organismes non mobiles (végétaux, champignons, lichens, algues), les végétaux à thalles étaient autrefois rassemblés dans les "thallophytes" (algues, champignons, lichens, mousses), nous y sommes. Je vous épargne la différence entre Thallophytes et cormophytes ceux qui parlent couramment l'ancien grec comprendront... Pour en finir avec nos chères bryophyta, parlons un peu, (il le faut bien), de leur sexualité : elles se développent par division d'une seule cellule à l'extrémité de chaque organe végétatif ou reproducteur, pas de quoi s'en émouvoir. Mais le plus fascinant, puisque l'ébat des mousses nous a déçu, c'est le phénomène de reviviscence. En effet, grâce au phénomène de reviviscence, ces espèces peuvent non seulement survivre à l'état déshydraté mais si l'on s'approche du vrai sens de "reviviscence", littéralement, on trouvera un retour aux manifestations de la vie. De la reviviscence à la resurrection, il n'y a qu'un pas, que je franchis allégrement, puisque Wiki (l'érudi térisson), à la page "reviviscence" me redirigea automatiquement à la page "résurrection". C'est un signe providentiel, car si le Wiki est d'accointance avec les Dieux, et, si l'on ne redoute pas trop la compagnie de l'hepatocophyta (souvenez vous "la marchantia"! surnommée dans certains cas "l'hépatique des fontaines"), alors; (alors seulement), on pourra se rouler des journées entières dans la mousse en espérant attraper la reviviscence et la passer sans crainte à son voisin. Une prochaine fois, peut-être, je vous parlerai des Amours des sphagnopsida hors des sentiers battus, plus précisément de la redoutable killeuse des tourbières. Et cela s'appellera encore "battre la campagne".
Nota : Que les botanistes me pardonnent... Si la précision scientifique s'en trouvait un peu écornée, le plaisir des mots l'ayant emporté sur la leçon de choses, un coin de mousse m'inspira paradoxalement l'idée de chercher ses racines... (Dois-je rajouter que je ne suis pas botaniste ? ;-)
Si vous n'aimez pas la campagne, vous pouvez toujours aller battre le pavé : ICI
Photo: Une planète de mousse toute Nabirosinaise, caresse doucement l'écorce d'un épicea centenaire, dont cinq bras d'hommes, (dit-on), ne parviennent pas à faire le tour ➝ quant à l'explication de ce mystère arithmétique des "cinq bras d'hommes", vous la trouverez quelquepart dans nos commentaires...
Vu en forêt au lieu dit :"Clôt Boterêt" sur le chemin de Montrouan. Août 2009. ©
04:26 Publié dans Art contemporain sauvage, Balades, De visu, Impromptus, Mémoire collective | Lien permanent
lundi, 17 août 2009
Comme un lundi (au soleil)
Que ton vers soit la bonne aventure
Eparse au vent crispé du matin
Qui va fleurant la menthe et le thym...
Et tout le reste est littérature.
PAUL VERLAINE : "L'Art poétique" 1874 in "La bonne chanson, Jadis et naguère, Parallèlement". Edition Gallimard poésie, 1979
Tournant en dérision les effusions, d'un LAMARTINE et d'un MUSSET, (entre autres), VERLAINE fourgua doucement à son siècle quelques vers impairs et autant de petits cailloux ouvrant une brèche irréversible, sur le monde des belles lettres, des grandes émotions et des rimes parfaites. C'est un chant que le son absorbe, un monde nouveau qui par le rythme vient, balaie l'univers d'un revers de la main, pour y étreindre chaque son. Ce qu'on n'apprend jamais à la petite école, (par la voix de crécelle de mademoiselle Pugeolles) : c'est que VERLAINE avait de grandes oreilles.
De la musique encore et toujours !
Que ton vers soit la chose envolée
Qu’on sent qui fuit d’une âme en allée
Vers d’autres cieux à d’autres amours.
Dani GUGLIELMI and DENA : "Out of nowhere"
Photo : D'autres Amours s'en sont allés, et des oreilles de lapins verts ont succombé au velours des sons Verlainiens. A moins que ce ne soient que les embrassements d'ailes tendres de quelques anges polissons surpris en flagrant délit d'art poétique ? Vu à Châtenay sous Dun sur le chemin du presbytère. Aôut 2009. © Frb
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dimanche, 16 août 2009
Comme un dimanche
"Ce jourd'hui 7 Août 1766, en vertu des pouvoirs qui m'ont été accordés par Mgr l'Evêque de Mâcon, je soubsigné, curé de Varennes et la Clayte ay béni une cloche du poids de 421 livres au prix de 618 livres, pour être placée dans le clocher de Sainte Avoye, dudit La Clayte, à laquelle cloche a été donnée le nom de Marie-Charlotte [...]"
"Bénediction de la cloche de Sainte Avoye". 7 Août 1766. Source : "La Clayette, hier et aujourd'hui" par F. NADEL, 1989.
Les cloches ne sont plus ce qu'elles étaient. Il est très loin le temps où l'on donnait des noms aux cloches. Très loin le temps, où quand sonnait le glas, une rumeur incontestable courait de maison en maison, et l'on disait de source sûre: "Quelqu'un est mort, c'est la Marie-Charlotte qui me l'a dit."
La Marie-Charlotte, hélas, je ne peux pas trop vous en parler, je ne sais pour l'heure rien d'elle précisément , et je ne peux pas non plus vous la montrer, invisible et trop haut perchée, pas plus que je ne peux vous montrer les peintures murales de cette église (on dit chapelle) qui ont été retrouvées, en assez mauvais état, difficiles à dater, mais dont la plus ancienne, semble être originaire du XVem siècle. Onze personnages sont représentés et une liste de noms et prénoms féminins ont été trouvés, 20 dont 16 seulement sont lisibles. L'histoire ne nous dit pas si la Marie Charlotte y figure. Mais l'enquête se poursuit...On retrouva aussi quelques blasons, des noms de saints et une vasque d'où s'échappe un bouquet de fleurs...
Nous reviendrons sur ce sujet un jour, quand je pourrai accéder à l'intérieur de la Chapelle Ste Avoye, pour essayer d'attraper quelques fresques (ce qu'il en reste) et les amener à la surface de certains jours.
Quant au nom (et au son) des cloches qui constituèrent pendant plusieurs siècles (quand même) le principal moyen d'information de masse, elles ne pouvaient sonner, ni être affectées au culte, encore moins être placées dans le clocher sans avoir été préalablement bénites. Chaque cloche portait alors un nom qui lui était attribué lors de la "Bénédiction des cloches". Mais ce n'est pas tout... A cette occasion, elle était revêtue d'une aube blanche parée de dentelles, lavée à l'eau bénite, ointe et parfumée par l'officiant. Entourée d'un parrain, et d'une marraine, elle portait les noms inscrits sur sa robe. Son nom de baptême était plus ou moins lié à celui de son généreux donateur. Je ne ferai pas mon Vermot quant à la manière qu'a aujourd'hui notre société de traiter ses cloches car elles ont souffert bien avant, (hop là ! trêve de digression, on enchaîne !). A la révolution, on décida de les "faire taire", après qu'on eût bien martellé les visages ou les mains du Christ et des apôtres au tympans des églises. On enleva les cordes des cloches et quelques unes furent enterrées. Nul ne raconta jamais comment se passa l'enterrement des cloches... C'est sans doute parce que l'histoire nous revient toujours avec plusieurs sons de... ?
Photo : La Chapelle St Avoye côté parvis. Des pierres roses, une façade fragile, qui respire encore l'abandon mais plus pour très longtemps... Au clocher on devine la présence de Marie-Charlotte, veillant en douceur sur les ruines. Nul ne sait si cette fenêtre s'appelle Marie-Antoinette, ou Gertrude...Difficile de vêtir une fenêtre d'aube blanche et de si loin, l'oindre.
La Clayette. Août 2009. © Frb.
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samedi, 15 août 2009
Fendre les flots
Toujours au cours de nos balades en Nabirosina, sur le chemin des biches du côté de chez Paul et Paulette à la ferme de Lavaux (Décor de rêve, accueil gentil, que son lecteur adoré n'y lise pas une publicité mais une très bonne adresse) ) ; J'allais me promener, pour me rafraîchir à l'étang . De l'eau ! de l'eau, qu'à cela ne tienne, ma chemise pour de l'eau, (toujours une chemise que le dancing "Macumba" de Palavas les flots ne mouillera pas).
Fendre les flots, se déplacer doucement, deviner sous les brindilles et quelque autre flore aquatique, le royaume des animaux microscopiques (ou macroscopiques ? dragon ? terrifiante hydre ?), qui vivent sous la surface de l'étang, nymphes de libellule, corise, dyptique et autres notonectes, de quoi fourbir tout un vocabulaire aux îles indigo, dévoreuses d'Holothurie. De quoi épater l'épatant patriarch(e) et son lygosome rubané, éminent spécialiste de la leçon de choses qu'on ne coiffera jamais au zoo de ce monde là. C'est décidé, nous partirons à la rencontre de cette population des hauts fonds tièdes d'un été finissant, dont les noms glissent en volupté et révèlent à l'écoute flottante l'écho d'un bruit chu aux reflets de l'univers. Eloge de l'immanence, invitation au vertige des clapotis, voire du tourniquet aquatique un nouveau jeu à moi, (très amusant) extra, aussi ce blog "bassin-nature"), les cheveux dans l'étang pour une valse humide, en tenue de poisson d'or, ou de sirène infiniment désirable, telle une Ester Williams des étang. "Tourniquet aquatique", c'est aussi le petit nom du gyrin qui ne plonge presque jamais sous l'eau, et dont les clapotements à la surface enchantent les badauds = ( badauds c'est pour la rime, que le zoologiste me pardonne. Le gyrin clapote-t-il vraiment ? et sont ils si nombreux ces badauds autour de l'étang ?). Ah non vraiment ! le lecteur n'ira pas se promener dans ces eaux troubles là, il s'y trouve bien trop d'affabulations...) Foin du flou et de l'opaque ! La curiosité se précise, je retourne aux bibliothèques d'enfant. (Gloire à Fernand Nathan, aux beaux albums Hachette-jeunesse). Je retrouve mon "Julot", avec son Nautilus entre un Henri Bosco ("l'enfant et la rivière"), et le livre "Moi Calypso" qui cause du mythique Commandant Cousteau Grand navigateur en eau douce, (comme chacun sait), connu aussi pour toutes les blagues stupides (que chacun fait), à propos de son bonnet, (je vous épargne, cette grivoise partie de rigolade)... Je retrouve disais je, ce livre de la collection "le Monde vivant" aux éditions "Time life (international)" qui me fût offert à Noël bien avant ma naissance, où des photos et listes improbables de bêtes d'eau douces défilent gentiment entre les pages. Toutes moins méchantes que l'hydre qui hante encore de son cri déchirant (déchirant, pourquoi pas ?), les nuits sans lune du Nabirosina. Tandis que les petits enfants suivent l'hydre ! (et allons donc !) comme d'autres suivaient jadis le joueur de flûte de Hamelin. Peut être, un jour je vous raconterai l'histoire de ces disparitions, si le lygosome rubané de patriarch(e) ne me mange pas...
En attendant, de fixer mon hamac entre deux joncs, au dessus des eaux dormantes de Châtenay sous Dun (ou "soudain Chatenay", à votre guise;-), je m'en vais relire l'éloge de la paresse, par la voie buissonnière dite chemin des biches, en vous laissant une liste de petits noms de libellules. Puissiez vous y trouver, trois fois rien d'agrément pour conjurer les premières têtes d'enterrement et les bourdons macabres, de la non moins macabre et proche rentrée.
Aeschne bleue, Coenagrion puella, Anax imperator, Gomphus pulchellus, Gomphe gentil (qui est aussi gomphus pulchellus), Libellule déprimée (et déprimante), Crocothémis erythraera, Orthethrum cancellatum, Libellula quadrimaculata, Sympetrum jaune d'or, Aeshna Grandis (la pharaonne ?) Somatochlora metallica (très attachante), Sympetrum sanguin et pour finir la plus belle, une naïade, aux yeux rouges, (comme l'hydre de bourgogne), sa majesté : l'Erythromma najas...
Cette promenade à dos de libellules n'aurait pas été possible sans l'aide merveilleux lien :
http://www.les-mares.com/html/invertebres/insectes.php
Il ne me reste plus qu'à rendre à Cesar, et puis l'aurore au crépuscule, en dédiant ce billet à Patriarch sous forme de jeu de l'été : le lien de Patriarch est caché dans ce billet. Notre ami, le lecteur, saura-t-il le retrouver ? ;-). Sogr penssus...
Photo : Etang de la ferme de Lavaux, sur le chemin des biches à Châtenay sous Dun. Nabirosina. Août 2009. © Frb
14:32 Publié dans Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
vendredi, 14 août 2009
Peindre
"Quand j’ai fait un beau tableau, je n’ai pas écrit une pensée. C’est ce qu’ils disent. Qu’ils sont simples ! Ils ôtent à la peinture tous ses avantages. L’écrivain dit presque tout pour être compris. Dans la peinture, il s’établit comme un pont mystérieux entre l’âme des personnages et celle du spectateur. Il voit des figures, de la nature extérieure ; mais il pense intérieurement, de la vraie pensée qui est commune à tous les hommes : à laquelle quelques-uns donnent corps en l’écrivant ; mais en altérant son essence déliée. Aussi les esprits grossiers sont plus émus des écrivains que des musiciens ou des peintres. L’art du peintre est d’autant plus intime au cœur de l’homme qu’il paraît plus matériel ; car chez lui, comme dans la nature extérieure, la part est faite franchement à ce qui est fini et à ce qui est infini, c’est-à-dire à ce que l’âme trouve qui la remue intérieurement dans les objets qui ne frappent que les sens. [...]"
EUGENE DELACROIX Journal mardi 8 octobre 1822.
Quelques années plus tard en 1956 exactement, Yves KLEIN dans son atelier, ouvre une page du journal de DELACROIX, il tombe sur quelques lignes :
"J’adore ce petit potager, ce soleil doux sur tout cela me pénètre d’une joie secrète, d’un bien-être comparable à celui qu’on éprouve quand le corps est parfaitement en santé. Mais que tout cela est fugitif, je me suis trouvé une multitude de fois dans cet état délicieux, depuis les vingt jours que je passe ici. Il semble qu’il faudrait une marque un souvenir particulier pour chacun de ces "moments". (E.D.)
Cette page du journal de DELACROIX imprègnera durablement l'univers d'Yves KLEIN, qui parlera à propos de sa recherche artistique, d'"états-moments". La marque de ces "états-moments" de la chair, il la tient par les empreintes arrachées aux corps de ses modèles, la marque de ces "états moments" spirituelle, il la tient aussi par ses monochromes, mais tient-il la marque des "états moments" de la nature ?
Elément de réponse et conséquences de quelques notes du journal d'un vieux peintre se prolongeant quelques années plus tard, sur le carnet d'un autre peintre :
"Je bondis dehors et me voilà au bord de la rivière, dans les joncs et dans les roseaux. Je pulvérise de la couleur sur tout cela et le vent qui fait plier les fines tiges vient les appliquer avec précision et délicatesse sur ma toile que je présente ainsi à la nature frémissante, j’obtiens une marque végétale. Puis il se met à pleuvoir une pluie fine de printemps ; j’expose ma toile à la pluie et le tour est joué. J’ai la marque de la pluie ! une marque d’événement atmosphérique [...] Je travaillerai même, je crois, non plus avec des couleurs, mais avec la transpiration des modèles mêlée de poussière avec leur propre sang peut-être, la sève des plantes, la couleur de la terre, etc., et le temps fera tourner au bleu monochrome I. K. B. les résultats obtenus. Le feu est bien là, aussi, il me faut son empreinte !" (Y. K.)
Ainsi une ère anthropophagique s'approche, effrayante, en apparence seulement. Elle obéit à d'anciennes paroles (effrayantes, aussi, à la lecture seulement : "Prenez et mangez, ceci est mon corps ...". Il y a de la contraction (dans l'ère ?) et des passages où l'espace neutralise le temps. Dans sa recherche de la liberté de l'esprit et de la chair, Y. KLEIN écrit encore : "ll faut être comme le FEU en soi dans la NATURE ; savoir être doux et cruel à la fois, savoir se CONTREDIRE. Alors, alors seulement l’on est bien de la famille des PRINCIPES D’EXPLICATION UNIVERSELLE."
C'est à dire, (l'image est de KLEIN, lui même) : "se sentir proche de la famille du ver, tel ce ver qui fait des trous dans le gruyère, qui fait le vide autour de lui et qui avance, et mange mange, il rencontre aussi des trous qu'il contourne, parce qu'il faut bien vivre. Un jour il n'y a plus de gruyère parce qu'il a tout mangé il n’y a plus que le grand vide" :
"Il est alors lévitant, libre, heureux dans l’espace, mais un instant seulement, puis il tombe tout naturellement sur un autre fromage" ...
Vous me direz, quel rapport avec DELACROIX ?
Aucun. Apparemment... ;-)
Source : Texte de Yves KLEIN 1960.
Un autre bleu plus beau que bleu et que KLEIN ne réfuterait pas est à contempler au delà de ce lien (cliquez absolument ;-)
http://kl-loth-dailylife.hautetfort.com/archive/2009/08/2...
Photos : 1/ Paysage vu d'un chemin de terre, à quelques km du Mont St Cyr. 2/ Mont St Cyr vu d'un champ. 3/ Ciel doux. Nabirosina. Eté 2009. © Frb
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jeudi, 13 août 2009
La terre pour oreiller
Enfin, j’ai découvert la source des Immortels ! j’atteins enfin ce mystérieux refuge où l’on se tient caché.
TCHU HUAN (poésie chinoise)
S'il n'est plus question de pierres édifiant une citadelle en forme de bibliothèque minérale du côté de Vareilles, ce très court extrait de poème évoque imperceptiblement les livres... Entre le Nabirosina roman et la Chine ancienne, il n'y a sans doute qu'une passerelle où se croisent quelques immortels, pendant que nous dormons :
"En l'an 213 , avant notre ère, Thsin-chi-hoang-ti, ordonna un incendie de livres, un grand nombre de lettrés perdirent la vie s'efforçant de soustraire aux flammes, les ouvrages auxquelles il attachaient le plus de prix. Quelques uns se réfugièrent dans les montagnes et se tinrent cachés jusqu'à la chute de leur persécuteur. 600 ans plus tard, on raconta qu'un pêcheur, promenant ses filets sous le fleuve Yuen, découvrît une petite rivière ignorée, et en remonta le cours. Après avoir côtoyé des régions sauvages et désertes, il se trouva soudain dans un site admirable, où, bien qu’on fût en automne, l’air était embaumé d’un parfum délicieux de fleurs de pêchers. Le pêcheur attacha sa barque à la rive, et suivit le cours du ruisseau qui le mena à l’entrée d’une grotte profonde. Guidé par un point lumineux trahissant un passage, il finit par découvrir une vallée charmante où se trouvaient des pêchers en fleur. Les habitants de la vallée, ayant tous de longues barbes blanches et des vêtements de forme antique, témoignèrent en l’apercevant, une surprise mêlée de frayeur. Ils lui demandèrent : "Que venez-vous faire dans ce paisible refuge, êtes-vous un lettré, fidèle à la science, fuyant comme nous la persécution des Thsin ?" - Holà, s’écria le pêcheur émerveillé, que parlez-vous des Thsin ? Il y a des siècles aujourd’hui que leur règne a cessé !" De retour dans son village, le pêcheur fit le récit de son aventure ; on reconnut qu’il avait eu affaire à des sages, qui s’étaient réfugiés jadis au fond d’une vallée secrète pour ne point sacrifier leurs livres, et qui étaient devenus des immortels."
Photo : Les passages secrets murmurent à l'oreille. Et les parfums d'automne viennent à l'été, dans les plis d'un pays qui sommeille sous des racines enchevêtrées, afin que les vivants ne colonisent pas les immortels. Un passage vu pendant mon sommeil. Nabirosina. Août 2009. © Frb.
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mercredi, 12 août 2009
Page d'échos
"Sur les tablettes des cheminées ou des radiateurs (l'on considérera toutefois que la chaleur peut, à la longue, se révéler quelque peu nocive), entre deux fenêtres, dans l'embrasure d'une porte condamnée, sur les marches d'un escabeau de bibliothèque, rendant celui-ci impraticable (très chic, cf. Renan), sous une fenêtre, dans un meuble disposé en épi et séparant la pièce en deux parties (très chic, fait encore meilleur effet avec quelques plantes vertes)."
GEORGES PEREC : "Endroits d'une pièce où l'on peut disposer des livres" in "Penser Classer". Editions Seuil 2003.
Peut-être l'image aurait-elle plus de sens au chapitre suivant : "Choses qui ne sont pas des livres et que l'on rencontre souvent dans les bibliothèques" avec les fleurs séchées, les verres à pieds, les pyrophores garnis et les photographies dans les cadres en laiton doré... Je laisse à son lecteur (pourvu de quelques rayonnages de livres), le bon soin de nous communiquer aimablement et s'il le souhaite, la liste de ses petites bimbeloteries personnelles que nous livrerons telles, à la planète et qui étofferont la liste des choses citées dans le beau livre de PEREC.
L'important étant l'ordre : celui-ci un brin monastique, après les livres fantastiques de la très grande bibliothèque de Vareilles (la TGBV), vous racontera que le modillon a quelquechose du livre (ça c'est moi qui rajoute) ou quelque chose de l'ornement sublimant le rayonnage. Quand la mode du Bouddha en série lassera, viendra celle du modillon-bougeoire et bourgeois, (en véritable cire d'abeille), trônant devant les livres de bête bégueule ou de Bralo, de Le Clézio, son lecteur (fin observateur;-) remarquera côté-déco que les plantes y trônent déjà, c'est un petit miracle dont je ne peux expliquer l'origine. (A moins que ce soit ces étranges et fameux choux boscomariens qui furent à l'origine du non moins fameux modillon, (qui du chou ? qui du modillon ?). Le roman est bien né de la rose, dit-on. Comme l'affirmait une dame défendant l'attachement obsessionnel (au modillon) de quelques fêlés archéologues médiévistes: "le modillon est une personne". Et je crois qu'elle avait raison. Mais on en sait trop peu sur l'histoire "du peuple menu des modillons" (sic). Cela vaut quelques précisions...
Le modillon roman est un bloc de pierre sculpté finement ou grossièrement, placé sous les corniches, et l'illusion d'optique pourrait même nous faire croire qu'il les supporte. Il relève de l'art populaire, illustre autant la vie courante que l'imaginaire médiéval le plus fantastique. Il peut être décoratif, (on revient à nos fleurs séchées), à motifs géométriques; ou plus figuratifs, végétal, animal etc...) La finesse ou la grossiéreté des figures dépend surtout des matériaux dont disposaient les sculpteurs jugés artistiquement naïfs et gauches mais qui ne manquaient pas de créativité, les plus riches ornementations furent ciselées dans le calcaire, les roches granitiques, volcaniques donnant une sculpture plus sévère. En l'absence de sources historiques laissées par les sculpteurs romans, on a déduit qu'il n'y avait pas de projet symbolique global émanant de ces modillons (n'a pas encore été trouvé le grand modillon d'Alexandrie ou de Babylone), pas de programme iconographique entier, comme on en découvre sur les tympans ou sur les chapiteaux médiévaux. Pourtant il semble que certains modillons considérés séparément ne soient pas sans message... On a souvent tendance devant un modillon, "à voir trop ou trop peu". Nul besoin d'être historien pour déceler dans ces sculptures, tous les efforts qu'accomplissait une société pour tenter de se raconter, se parfaire, et surtout perpétuer ses légendes.
Peut-être qu'un jour, sur quelque autre chemin roman, (si je le croise), je vous parlerai de "l'homme vert", ou bien faudra-t-il que j'accepte enfin, cette invitation en Dordogne (merci mon troll !) pour croquer ces masques feuillus d'époque romane, motifs que l'on peut contempler partout en Europe, voire jusqu'à Istanbul. Il en existe datant du 2em siècle de notre ère, à Périgueux, avec des bonnets de feuillages comme dans les églises d'Espagne et, à L'église de Colombiers en France (datant du XIIes) où l'on peut admirer des têtes de personnages aux oreilles remplacées par des oisillons auxquels d'insolites oiseaux donnent la becquée. Peut-être chasserons-nous le feuillu jusqu'en Grande Bretagne, où il s'en trouve qu'on appelle bêtement "The Green man", figure déjà connue avant la Rome antique pour être le gardien des bois et l'Esprit des anciennes forêts. Il faudrait chercher à "masque feuillu" en France, peu étudié, la documentation est parfois fantaisiste, le plus souvent insuffisante...
Pour en revenir au modillon, on peut être parfois étonné de remarquer dans les motifs, certaines obscénités, voire des cruautés. Il ne faut pas oublier que quelques-unes de ces coutumes figurées remontent à des cérémonies païennes transformées par l'église en cérémonies "acceptables" pour les premiers chrétiens. Le modillon obscène représentait aussi, des personnages, (parfois religieux, ou architectes...) dans des postures dégradantes. Il semblerait qu'ils aient été conçus par esprit de vengeance à une époque où les ouvriers soi-disant payés à la pièce pouvaient aussi ne pas être payés du tout. Ainsi, les ouvriers n'ayant que ces pierres là pour exprimer leur rancoeur, pouvaient encore façonner à leur guise leur créditeur en le ridiculisant. Une fois que la pierre était posée à 15 ou 20M de hauteur, il était difficile de l'en déloger. Il y eût sans doute des modillons obscènes issus de quelques bonnes blagues de chantier comme à Chambonas en Ardèche l'un des modillons de l'église romane représente une belle paire de fesse, que des mains écartent pour afficher un anus sans défaut, (hélas pour vous, je n'ai pas d'image, tant pis ! hé hé !). Si la blague n'est pas historiquement prouvée, elle est assez probable. J'espère que nous trouverons matière à développer tous ces sujets, l'été prochain, si quelque épidémie de peste nouvelle ou autres démons bleus ne nous emportent pas.
Pour revenir au pays qui nous tient, il y a en cette merveilleuse petite Eglise de Bois- Ste-Marie, certains vestiges d'inspiration païenne (difficiles à photographier), comme ces modillons trop haut perchés. Celui qui ouvre cette page étant sage comme une image sainte, je refermerai ce billet sur la terrible figure d'un modillon moins catholique : on peut dire un démon. (Mais à Nevers, on a vu pire). On raconte qu'il mange les livres, qu'il ronge l'écran liquide, et qu'il transforme en pierre celui qui le regarde, (on vous aura prévenus). Sur cette pierre, (où reposera ton âme, ô lecteur adoré), je construirai une autre église ! (c'est ma folie en ce moment !), j'y scellerai des modillons et ainsi de suite... L'Histoire n'étant qu'éternel recommencement. A moins que par une flemme assez contemporaine, je sois tentée par le très bas, l'argent facile, qui consisterait à faire fabriquer à la chaîne, (en sous-traitance, bien sûr), des bougies-modillons, des cales-livres en balsa (merci Sophie K.) à simili têtes de dragons, et pourquoi pas ? des modillons un peu coquins en médaillons. Il ne me resterait plus qu'à les vendre (très cher) pour que vous en orniez vos rayonnages. Ainsi tirant par les cheveux mon petit homme vert jusqu'au bureau de tri de l'ami Perec, pourrais-je ajouter ces babioles à votre catalogue d'échos et tenter d'épuiser sous le poids de cette poussière nos esprits compactés du très haut au très bas. L'autre sens étant obsolète voire impensable...
Maudits liens : http://chantecoucou.over-blog.com/article-28883031.html
http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2008/09/15/co...
Photo 1 : Modillon à figure d'ange ou veilleur de troupeau et son chou (?) merveilleux quasi miraculeux vus sur la façade de l'église romane du village de Bois Ste Marie.
Photo 2 : Zoom sur un modillon végétal orné d'une tête de démon (?) ou d'animal (?). Mais je ne crois pas que ce soit "Green man". Vu à l'Eglise romane de Bois Ste Marie. Nabirosina. Août 2009. © Frb.
13:13 Publié dans Arts visuels, Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective, ô les murs ! | Lien permanent
mardi, 11 août 2009
Battre la campagne (3)
"Toute bibliothèque répond à un double besoin, qui est souvent aussi une double manie : celle de conserver certaines choses (des livres) et celle de les ranger selon certaines manières."
GEORGES PEREC : "Penser classer". Editions Seuil 2003
Il y a des gens qui disposent les pierres comme on range des livres : cela s'appelle peut-être aussi "battre la campagne" .
Je repense à Alain CAVALIER qui disait dans la "lettre d'un cinéaste", (cf. l'émission "Cinémas-cinémas" à propos de la préparation de "Thérèse"), ne vouloir conserver uniquement 3 livres au plus. "Jamais je n'arriverai à cette légéreté là."
Surtout avec les livres gravés sur la pierre de Vareilles, trois livres ça fait déjà un sacré poids.
Et s'il ne fallait qu'un seul livre pour une île déserte, le poids des mots, (et le choc de ma photo) en disent assez long sur ce thème. Moi qui croyais ne voir qu'un tas de pierres, en caressant l'espoir de construire une église. Ou peut-être une chapelle ? (merci Choule !). Me voilà avec un tas de livres sur les bras. Tout en ancien français. Qu'en faire ?
Je ne vais tout de même pas m'asseoir dessus ? Ce serait une infâmie. Une injure aux premiers et derniers troubadours; ce serait comme bafouer l'arrière arrière arrière galant de mon arrière arrière arrière grand-mère, ce charmant GONTIER DE SOIGNIES qui louangeait les dames par le chant et la poésie dans les bosquets de Vareilles (?) et du Comté de Bourgogne. Il y a tant de beauté à lire dans ces pierres là, tant de pages à tourner. Mais je me demande qui acceptera de m'aider à les porter. Car voyez vous, les temps ont bien changé et l'on ne trouve plus tellement (sur le marché) de galants à la GONTIER (De Soignies, s'il vous plaît !), célébrant les vertus absolues de la Dame et l'accompagnant (à la sortie de la bibliothèque jusqu'au seuil de sa chambrette), des pierres savantes plein les bras. Non, on ne trouve plus de ces messieurs si délicats, qui venaient à la nuit tombante, (avec une viele), célébrer sous notre tonnelle embaumée de roses trémières, les paysages de l'amour et des beaux sentiments... J'ouvre la pierre à la page 27. Ma surprise est immense de voir le poème que GONTIER (De Soignies, quel merveilleux garçon) m'a dédié cet après-midi :
Onques mes ne fu soupris
De nule amour, ne destroiz,
Mais or m’ont dou tot conquis
Ses sens et sa bone foi.
Cors a gent et cler le vis,
Blanches mains et longuez doiz,
Douz semblant et simple ris :
Bien est faite en touz endroiz.
Pou la voi…
Nota : Certes, je bats la campagne, un peu, beaucoup, paisiblement. Et j'ai un magnifique projet : la future bibliothèque du petit village de Vareilles formera autour de ma grande église (j'ai trouvé d'autres pierres) un bienveillant rempart... Tandis que dans la grande ville, je ne sais pas trop pourquoi, on range les livres tout autrement. On dirait qu'ils sont bien scellés peut être pour empêcher les gens de les jeter dans la mare ? Mais n'allez pas croire que je suis exagérement en train de battre la campagne, tandis que vous battez, (et peut être sans le savoir) chaque jour ce pavé que l'on ne vous autorise pas à lire...
Parallèlement, à mon rêve minéral, je me désole de constater (ce n'est pas faute d'avoir essayé ;-) qu'on ne pourra sans doute jamais construire des églises en papier. Et là, je crois savoir pourquoi...
Photo : Une bibliothèque rangée et classée à la mode médiévale, elle entoure partiellement l'église et la compose partiellement. Mémoire romane du Nabirosina vue à Vareilles le 11 Aôut 09. © Frb.
06:11 Publié dans A tribute to, Art contemporain sauvage, Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective, ô les murs ! | Lien permanent
lundi, 10 août 2009
Travailler
"Je préfère risquer en osant, que regretter de ne pas avoir su saisir l’occasion qui se présentait."
Voilà le travail !
Aujourd'hui je me suis dit :
"tiens un tas de pierres ! et si je construisais une église ?"
La tâche s'avérant compliquée, je savais qu'on ne construirait pas d'église digne de ce nom, avec deux mains et une devise Shadok. Pour que la réalisation soit belle, il fallait changer de citation.
A suivre...
Photo : Les grosses pierres de Vareilles. Nabirosina. Aôut 2009. ©Frb
04:42 Publié dans Art contemporain sauvage, Certains jours ..., De visu, Impromptus, Le nouveau Monde, Mémoire collective, ô les murs ! | Lien permanent