vendredi, 16 septembre 2011
Colt ...
Invisible limits : le mode d'emploi est dans l'image. Une certaine tentation...
Rébus urbain © Frb 2011
mercredi, 14 septembre 2011
Le dessus des cartes (désir du jour)
Programme : Amis de la petite province, je vous promets le bonheur pour tous. (Votez pour moi !). Note à l'attention du lecteur qui n'ose pas regarder sous les jupons des cartes, j'ajouterai, le lien du dyptique, (fin dyptique cartésien, il en faut, et sa synthèse va dans les murs) vous trouverez le voyage dans toute sa complétude en cliquant sur : ICI.
Photos : Le dessus des cartes de la rue Descartes ou petit rébus provincial
Restructuration d'une ancienne enseigne d'un atelier artisanal situé rue Descartes à Villeurbanne. © Frb 2011
La suite toujours plus bas ↓
Le dessous des cartes (c'est déjà demain)
Discours d'investiture : Provinchiales, provinchiaux, mes chers compatriotes. Merchi de m'avoir élue. Vous avez fait le bon choix, le choix du bon chenche. Mais la chituachion étant che qu'on chait, et dans le contechte de rechechion qui menache la nachion, nous jalons touche être forchés de retroucher nos manches. L'opchion de l'auchtérité est auchi chelle de la chagèche, pour che faire, nous rechterons jichi enchemble afin de trouver une choluchion qui rende pochible la cholidarité entre touche. Je compte chur votre conchienche chitoyenne, cha demandera des chacrifiches, mais gil en va de l'avenir de la Franche, ch'est bien trichte mais ch"est comme cha : Vive la Franche ! de droite de gauche, et du chantre !)
Photos : Le dessous des cartes de la rue Descartes. Ou solution du petit rébus provincial (y'a un proverbe provincial qui est signé du Riri, qui dit aussi que "c'est bien partout Vendenesse" mais bon, on fait de la politique, (et c'est exceptionnel) on ne va pas se mettre à faire de la philosophie par dessus le marché...
Villeurbanne © Frasby 2012.
(eh ben oui ! c'est ça l'avant garde, avec une petite longueur d'avance, en toute humilité ! et dans un but, toujours le même, vous distraire, mes chers compatriotes, vous pouvez me remercier, envoyez vos dons !)
dimanche, 11 septembre 2011
Rentrer
Mes espaces sont fragiles : le temps va les user, va les détruire : rien ne ressemblera plus à ce qui était, mes souvenirs me trahiront, l’oubli s’infiltrera dans ma mémoire, je regarderai sans les reconnaître quelques photos jaunies aux bords tout cassés. Il n’y aura plus écrit en lettres de porcelaine blanche collées en arc de cercle sur la glace du petit café de la rue Coquillière : "Ici, on consulte le bottin" et "Casse-croûte à toute heure".
GEORGES PEREC in "Espèces d'espaces, éditions Galilée 2006.
Et puis, Septembre remit sur pieds les corps glorieux qui claquaient le jour au défi des tapis roulants et c'était toutes sortes de gens qui revenaient d'on ne sait où, dorés comme des bijoux du manège enchanté de la galerie "Toutor". Ils marchaient au dessus du monde, ils glissaient dans le labyrinthe dont le sol serait bientôt recouvert de feuilles mortes, et par dessus encore, il y aurait le bruit des pas de ceux qui rentrent à reculons, déjà figés dans le décor avec leur tête de d'autruches, les éternels amoureux du dimanche et de l'oisiveté qui ouvrent les yeux comme autant de fenêtres sur de multiples mondes. Il y aurait la beauté intouchable des noctambules qui battent le pavé à minuit, finissent sous les poutres des pigeonniers cours d'Herbouville ou dans ces rues sans avenir la "De nuits", ou la "Longue". Il y aurait du bruit sur la Côte, de la bière et des flics entre Polycarpe et Terraille et puis, dans la fraîcheur, les nuiteux reviendraient à l'aube, claquer leurs derniers sous pour être les premiers dans les boulangeries aux noms qui flattent un peu l'amitié voir l'amour ou juste la mémoire comme "Le banquet" "L'épi d'or", ("Gerbe d'Or", ou "Rodrigue"), il y aurait des orgies de croissants chauds et de chaussons aux pommes. Il y aurait des halos de brumes fondus dans la lessive des particules fines et le couloir de la chimie qui ramènerait les odeurs d'oeufs pourris, à l'heure des ablutions des uns, des réunions des autres, tout se re-mélangerait à la fumée des cigarettes blondes, au goût du shit, au reflux d'arômes tièdes du printemps synthétique qu'on met dans les gamelles de détergents industriels sous le nom de "senteur florale", ça remonterait vers les pelouses du quartier Opéra où l'on se traîne encore, allongeant l'été à loisir, seul à seul multiplié par mille, tous portant le même sac (du positif), et lisant la même revue (de l'actu), celle qu'on nous distribue dans le métro, qui est gratuite, inventée par les concepteurs de la gratuité lucrative ciblant son grand public de publi-reportages voués aux isthmes du Sarko. Ils préparent notre avenir en nous caressant le dos, ça grignote sans nous le dire, nos heures de cerveau disponible durant les pauses ou via nos déambulations de rats des villes ; en toutes constellations où la multitude nous allège du poids de l'ombilic, nous irons. On ira, on va, on va...
Plus loin par les méandres d'un plan de Vélov' (ou "vélos d'amour"), la rentrée honorera encore le beau temps sous des blancs de cirrocumulus granulant légèrement le bleu qu'on possède encore en lambeaux et l'on remuera l'aventure sur un pied d'appareil photo, espérant du nouveau, à croquer un peu de perspective. Ici, tout semble prévisible. Rien ; sinon cette chaleur de tripot, cet air brut et torpide. Rien ; sinon que du beau dans la ville aux façades rosées cachant son mal entre les ponts, autant de gouffres côtés du Rhône que de guinguettes aux volets clos et de plages interdites, les boites de nuits plongeant sur Vaise neuf et refait avec sa gare qui fût détruite sous les bombardements du 6 Mai 44, une gare en bois, vite reconstruite entre deux évènements, jusqu'à l'espace multimodal d'aujourd'hui et par dessus, tout ça, il y aura les barres vanillées de la Duche qui regardent le bas, plus pour longtemps, barrées déjà par un projet de ville, il transformera bientôt ce quartier en un "pôle attractif", disons "plus attractif", c'est la fine formule, pôle ou quartier, pourvu que tout cela devienne "attractif". Les mots bleus du Grand Lyon, peaufinant sa vitrine en bonnes concertations abonnées à la cool attitude, nebulus à venir. On ne peut rien en dire. On se porte sur les pentes, on coupe par les traboules où vit encore un monstre de légendes mystérieuses ; on croisera même en rêve les fantômes : des gisants de Loyasse, un secret chu à l'observance puis on retournera comme hier dans les rues en presqu'île, autour de la place de la Bourse, on verra des messieurs dits "d'un âge", des cadres distingués, à l'allure de Clooney raybanés (comme Dutronc), faussement déglingues, (vaguement Borloo), qui vont de table en table, glissant, leur carte de visite, en toute discrétion, aux jeunes filles venues là pour boucler leur fin de mois. C'est secret de Polichinelle mais ce n'est pas dans tous les bars de presqu'île qu'on fait ça... Chez Jules on causera d'art (mais à la bonne franquette), à la Manille on jouera (à la Manille), ou on lira sous les mêmes globes lumineux qu'autrefois, des journaux du jour ou de la veille, au Moulin joli on s'emmerdera joliment et les nouvelles couleurs de beige à chocolat nous ferons regretter le vieux "Moulin Joli" terne et bruyant, d'avant.
Il y aura la sortie des classes vers Ampère ou ailleurs, des ados qui ricanent à trois sur un scooter, roulant les pelles, les mécaniques, claquant de la planche, l'Icare niqué sur des genres d'escaliers. Passée vers la mairie de la place Sathonay, il on croisera Mademoiselle Pugeolles, rejoignant sur une trottinette, son petit F2 de la rue Burdeau, un cartable tout neuf sous le bras, avec des surpiqûres, et des poches intérieures de la taille d'un kleenex. Il y aura rue de la Ré plein de monde en grappes vers les cinq heures du soir, des groupements sous la cnaf avec toute la culture de Levy à Musso et des livres de Daniel Pennac à moitié prix entassés près des piles de compils de Pavarotti chante Verdi. Il y aura des regards en biais, sur le flottement d'une jupe plissée bourgeoise, s'attardant devant la vitrine d'Yves Rocher, des mains de femmes chez Sephora dépliant la publicité d'un nouveau parfum (pour les femmes) qui leur affine les hanches pendant qu'elles dorment. Il y aura les dernières robes d'été, des chapeaux d'hommes à l'Argue, à fines rayures noires et blanches genre maquereaux siciliens à porter avec des bottines en daim à demi lacées, exprès, fausse néglige, de la bohème, encore, des bottines de gamines, vraiment ergonomiques à talons de 7 cm, qui font de belles chevilles et qu'on porte avec des collants 15 deniers de teinte biche.
Photos : Des filatures fragiles aux quatre points cardinaux d'une ville entre deux ponts et deux collines, du quartier de bureautique (et domotique) aux costumes froissés près des gares (1) juste à proximité de l'école (2), un passage clouté de bellecour en Presqu'île (3) enfin, sortie du temple où la terre promise distribue de la marchandise et pour quelques centimes (de plus) vous avez les cabas recyclables, bien de quoi battre le pavé jusqu'aux prochaines vacances (4). Juste quelques images from Lyon entre déjà hier, dans le vieil aujourd'hui, aussi loin que demain.
Lyon vu par © Frb : 2011.
01:43 Publié dans Actualité, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, De visu, Impromptus, Le monde en marche, Le nouveau Monde, Mémoire collective | Lien permanent
jeudi, 08 septembre 2011
Harpe céleste
Ecoutez bien leur devis,
Détoupez vos oreilles.
Et fa ri ro frere li joli
Ti ti pi ti, chouti toui.
Tu, que dis tu ?
CLEMENT JANEQUIN : extr. "Le chant des Oyseaulx"
Transcription de la partition destinée aux humains, à cliquer sur l'image
- Shéma récapitulatif de la fonction du chant : ICI
- Révision des classiques et autres questions ci-dessous :
http://www.freinet.org/creactif/blain/comenius/oiseaux.ht...
Louanges et doux oiseaux-copains by Catherine L. : ICI
Nota : Notre canari n'est pas sur le balcon, on l'aura pincé sur une corde de la harpe céleste, suivant une partition pas comme les autres. Selon Clément Janequin, "la doulce saison" se situe plutôt au printemps, mais l'hypothèse vient d'être contestée par le savant de certains jours, qui s'est basé sur notre cadran lunaire à nous, puis a conclu qu'il n'y avait plus de printemps. Ainsi "on ne renaît qu'à l'automne", c'est le sésame de la maison.
Photo : September nous détoupe les oreilles au chouti toui d'oiseau, pendant que la Biennale de Lyon ouvre ses portes, (ce que ne dit pas notre photo), l'art contemporain sauvage déchiffre sa portée par de minuscules beautés éphémères (sitôt vues, sitôt envolées) et dans les mouvements de la harpe géante caressée par Lily Pinson sous l'aile (invisible) de l'oiseau prophète, (oui, je sais, c'est un peu compliqué), ne pas confondre avec l'oiseau vogueur, qui ne va pas tarder à nous refaire son manège, souvenez vous... Finalement plus ça change et plus c'est pareil, à quelques détails près...
Lyon passerelle amarrée © Frb 2011
22:18 Publié dans A tribute to, Actualité, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, Ciels, De la musique avant toute chose, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
dimanche, 04 septembre 2011
Presque rien
- En quel endroit de la terre sommes-nous, cher Pisthérère ?
- Ma foi, cher Euélpide, je n'en n'ai pas la moindre idée !
Vous vous souvenez des oiseaux ? Non ? Ils roucoulent encore sous les images. C'était hier
En remontant sur le plateau, "les bonnes pentes font les belles ascensions" (a dit Lapalisse), j'en ai vu un, en pleine conversation avec trois autres qui se morfondaient sur un fil, je suis restée là, un peu bête, le nez en l'air, comme on regarde passer les condors (dans un film de Sergio Leone). il m'a semblé que cette année les oiseaux resteraient et les maisons s'envoleraient, mais quand il m'a fallu rentrer, c'était un peu comme si la terre penchait... - Et la tête ? Mademoiselle l'Alouette ? - La tête aussi, Monsieur Pinson !...
A SUIVRE. (Peut-être...)
Photo: Vu rue Pierre Blanc à Lyon, le premier "rassemblement" avant les grandes migrations.
© Frb 2011.
04:52 Publié dans Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective, ô les murs !, Objets sonores, Transports | Lien permanent
vendredi, 02 septembre 2011
Où sont les femmes ?
Excédé de dégoût, à moitié asphyxié, Durtal voulut fuir. Il chercha Hyacinthe, mais elle n'était plus là. Il finit par l'apercevoir auprès du chanoine ; il enjamba les corps enlacés sur les tapis et s'approcha d'elle. Les narines frémissantes, elle humait les exhalaisons des parfums et des couples - l'odeur du sabbat ! lui dit-elle à mi-voix les dents serrées.
J. K. HUYSMANS in "Là bas" (1892), éditions P. Cogny, GF- Flammarion, 1978.
Le pape Innocent VIII ayant envoyé deux moines enquêteurs en Allemagne, leur recherche sur l'extension de la sorcellerie donna naissance en 1486, à un rapport intitulé "le Malleus Maleficarum" ( ou "le Marteau des sorcières"), un traité des dominicains allemands Henri Institoris (Heinrich Kramer) et Jacques Sprenger, publié à Strasbourg en 1486 ou 1487. Il s’agit pour la majeure partie du texte d’une codification de croyances préexistantes, souvent tirées de textes plus anciens comme le Directorium Inquisitorum de Nicolas Eymerich (1376), et le Formicarius de Johannes Nider (1435). L'invention de Gutenberg permit de diffuser le manuel à grande échelle pour l'époque et l'ouvrage connut de nombreuses rééditions (au moins 34 entre 1487 et 1669, période principale de la chasse aux sorcières et des polémiques qu'elle suscita). A l'époque, les femmes étaient surveillées par leur mari ou par le prêtre, car leurs mœurs et leur moralité étaient "naturellement" douteuses. Leur sexualité effrayait les hommes d'autant plus qu'il leur était impossible de la comprendre. Comme l'écrivait Jean Delumeau dans "La peur en Occident", la femme a toujours été diabolisée, les phénomènes de chasse aux sorcières ont traduit cette conviction d'une collusion "naturelle" entre la nature féminine et le monde des ténèbres. Ce sont encore les femmes, livrées à elles-mêmes, qui développèrent la médecine par les plantes, car les médecins à cette époque ne se préoccupaient pas de les soigner. Ces pratiques renforcèrent l'idée qu'il fallait s'en méfier et les femmes firent rapidement l'objet d'enquêtes lors de passages d'inquisiteurs dans les villes et dans les villages. Pendant longtemps la défense des "sorcières" était d'affirmer qu'elles étaient folles et irresponsables, leurs bonnes connaissances des plantes, étant la preuve certaine qu'elles n'étaient pas si simples d'esprit… Pour citer quelques chiffres, on accusa de sorcellerie, entre 1606 et 1650, 31 % d'hommes pour 69% de femmes au Luxembourg, 13% d'hommes pour 87% de femmes en Wallonie. Dans une autre étude, sur 155 cas, 105 sont des femmes ; parmi elles, 32 ont plus de 50 ans, 7 ont moins de 20 ans (dont une enfant de 8 ans et 2 adolescentes de 13 ou 14 ans ). Ce fameux livre, le "Malléus Maleficarum" connut un immense succès et devint une référence quasi obligatoire pour tous les procès en sorcellerie, car il décrivait scrupuleusement ce qu'était une sorcière, ses caractéristiques, et comment la contraindre à avouer ses crimes. En exerçant leur affreux ministère, les inquisiteurs et chasseurs de sorcières, se croyaient non seulement investis d'une mission divine mais ils appliquaient à la lettre les élucubrations écrites dans "Le Marteau des sorcières".
Le fantasme de la nature diabolique de la femme est revenu en force au XIXèm siècle, une période très marquée par la misogynie, et plus précisément la gynophobie que Michel Viegnes (qui a inspiré ce billet) évoque aussi dans son texte "Gynophobia" ou "La peur du féminin dans le récit fantastique" (paru dans les cahiers du Gerf N°6 en 1999 (messieurs n'inversez pas les trois derniers chiffres, de grâce!). Pour les auteurs post-romantiques qui sont majoritairement des hommes, la femme signifie "l'autre", par excellence, d'autant plus inquiétante qu'elle est irrésistible. Salomé devient un grand mythe fin de siècle et la peinture multipliera les représentations ténébreuses de la femme. Le scientisme n'est pas en reste, bien au contraire, l'autorité de Charcot cautionne également d'une toute autre manière, l'appréhension de la femme comme un être porté vers l'irrationnel, l'animalité et surtout l'hystérie (maladie qui hanta ce XIXèm siècle autant que sa littérature), à l'époque on était persuadé que l'hystérie était un mal uniquement féminin, peut être à cause de cette racine du mot ("utérus"), or, on sait aujourd'hui, (les impressionnantes hystéries féminines étant de nos jours, plus rares), que les hommes peuvent aussi souffrir d'hystérie. Ce ne sera qu'assez tardivement, en 1928, avec Dostoïevski et le parricide, que la question de l'hystérie masculine sera abordée pour la première fois dans toute sa dimension analytique. Cela fera peut être l'objet d'un prochain thème ici, mais le sujet est très délicat, en attendant revenons à nos "dames diaboliques" de la fin du XIXem, à cette gynophobie, que certains auteurs (cependant aimés par nous autres, les péronnelles), ne dissimulèrent pas dans leurs récits. Joris Karl Huysmans par exemple, créera une première onde de choc dans sa bible du "décadentisme" : A rebours" (qui se distance du naturalisme de son maître E. Zola sans toutefois en rejeter les méthodes), amorcera l'esprit de "Là bas". Dans "Là bas", Huysmans se met en scène lui même sous les traits de Durtal, un célibataire, écrivain qui travaille à une biographie de Gilles de Rais. Cet alter ego subit les assauts d'une admiratrice passionnée, oyez le nom qui possède si j'ose dire tout son pesant d'obscurité la dame s'appelle Hyacinthe Chantelouve, elle propose à Durtal de l'introduire auprès du chanoine Docre, un prêtre catholique voué au culte de Satan. Durtal se laisse séduire par la proposition, se donnant pour excuse qu'il doit en naturaliste "sérieux", étudier le satanisme contemporain pour mieux saisir celui du Moyen Âge. Il assiste donc à une messe noire qui dépasse en hystérie, tout ce qu'il a pu imaginer et la tentative de séduction qui s'en suit, le révoltera tout à fait. Extrait choisi (gynophiles s'abstenir):
Et elle se déshabilla, jeta par terre sa robe, ses jupes, ouvrit toute grande l'abominable couche, et, relevant sa chemise dans le dos, elle se frotta l'échine sur le grain dur des draps, les yeux pâmés et riant d'aise ! elle le saisit et lui révéla des moeurs de captif, de turpitudes dont il ne la soupçonnait même pas ; elle les pimenta de furies de goule et, subitement, quand il pût s'échapper, il frémit car il aperçut dans la couche des fragments d'hostie (1)
- Oh ! vous me faites horreur, lui dit-il ; allons habillez-vous et partons !
Plus loin ...
- A bientôt , fît Mme Chantelouve d'un ton presque timide, lorsqu'elle fût déposée à sa porte.
-Non, répondit-il ; il n'y a vraiment pas moyen de nous entendre ; vous voulez tout et je ne veux rien ; mieux vaut rompre ; nos relations s'étireraient, se termineraient dans les amertumes et les redites. Oh ! et puis après ce qui vient de se passer ce soir, non, voyez-vous, non !
Et il donna son adresse au cocher et s'enfouit dans le fond du fiacre.
Je vous épargne quelques notes sur le "Salomé" de Oscar Wilde et le moment de rencontre monstrueuse de Salomé avec son désir, mais je glisserai pour le plaisir (des images), un petit baiser nécrophile (à son lecteur chéri) :"The Climax", d'Aubrey Beardsley qui illustra, à merveille ce Salomé. En espérant que ces messieurs n'iront pas soupçonner en toutes les dames les penchants diaboliques d'une Salomé ou d'une Chantelouve, et que nos dames... Nos dames, rien du tout, les dames elles font ce qu'elles veulent et puis c'est tout.
Nota (1) : Les fragments d'hostie dans la couche de la Chantelouve n'étant pas dans les habitudes de Monsieur et Madame Toutlemonde, (nous on préfère les miettes de pain au chocolat), c'est en fait que la dame (a t-on idée ?) avait cachée l'hostie dans son intimité afin quelle soit profanée (l'hostie) lors du coït, mais cela fût sérieusement noté par Huysmans d'après une documentation authentique sur les pratiques courantes du satanisme.
Nota (suite): Ces notes de lectures sont tirées de divers textes choisis et présentés par Michel Viegnes, dont la plupart, extraits du livre "Le fantastique", paru aux éditions Garnier-Flammarion en 2006. Voir l'article ci-dessous :
http://www.fabula.org/revue/document1245.php%20
Photo : Ceci n'est pas une mante religieuse (c'est pas du tout pareil, si vous doutez cliquez sur l'image plus haut, qui ne signifie pas que sous chaque sauterelle se cacherait une mante religieuse, (si ça peut rassurer, Fernand, François, Paul et les autres). Ceci n'est pas une cigale non plus, ni une étoile de mer, c'est une sauterelle du Nabirosina tout ce qu'il y a de plus affectueux, photographiée sur son brin doux d'Août, au début du mois Septembre.
Photo © Frb 2011
00:26 Publié dans ???????????, A tribute to, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, De visu, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
mercredi, 31 août 2011
Premier volet de l'exposition
Art-volet ou volet volé ? Encore une oeuvre qui ne sera pas comprise ...
"Art signifiant, signifié du mouvement flêché dans l'oeuvre non-signée, du volet blanc de l'exposition fondue au noir repassant au blanc de l'oeuvre volée, le spectateur enfin confondu par la pertinence du sujet retrouve la place qui ne lui fût jamais accordée. Celle du regardeur survolé. Cela faisait bien longtemps qu'on n'avait pas abordé une oeuvre aussi riche de sens, du nouveau pour les yeux et l'esprit. Un chef d'oeuvre stupéfiant retournant le détournement jusqu'à la plus pure authenticité du quotidien transfiguré par une sublimité à la fois simple et forcément multiple qui cache et révèle la complexité des relations du visiteur à tout ce que l'oeuvre sait lui dissimuler jusqu'à lui enseigner les bases aléatoires d'un réapprentissage des gestes comme "ouvrir" ou "fermer". Le premier volet de l'exposition est sans aucun doute l'évènement le plus intelligent de la rentrée. A ne louper sous aucun prétexte !
CLAUDE-MARIE CREMOIX, in "L'étherama" n° 8966, pages culture, Juillet 2011.
Photo : Le premier volet de l'expo, (ou l'infracritique du sub'art' précise l'expert), à ce qu'en dit l'artiste, d'autres viendront. De volets, (suivez un peu, voyons !)
© Frb 2011.
mardi, 30 août 2011
Du peu qu'on ne sait dire...
Je suis long à prendre des déterminations, à quitter des habitudes. Mais quand les pierres, à la fin, me tombent du coeur, elles restent pour toujours à mes pieds et aucune force humaine ensuite, aucun levier n'en peut plus remuer les ruines. Je suis comme le temple de Salomon, on ne peut plus me rebâtir.
FLAUBERT extr. d'une "Lettre à Louise Colet" datant du 6 juin 1853.
Sa mémoire recensait un peu tout ce qui remuait dans l'ombre, d'autres brassaient sur des écrans les nouvelles du soleil à venir, ça donnerait au milieu de Septembre une illusion de feu dans la lumière. Le vieux, il racontait hier, que "lorsqu'on voit sortir le museau des taupes, c'est toujours signe de mauvais temps". En attendant, l'été finissait, éclairant toute chose et même les yeux si parfaitement éteints de nous autres les promeneurs, qui prenions l'ocre pour du jaune, et l'herbe brûlée pour du foin. Ceux qui ne remarquaient rien craignaient juste que la fraîcheur du soir porte en elle les tourments aux heures les plus sombres, tout le dépressionnisme des jours qui précèdent la rentrée des classes, et s'installe longtemps à l'avance, ils redoutaient les nuits noires, de longues nuits où se bousculaient les fantômes, cela réveillait les chagrins qui se figeaient par les brumes au matin. Partout on savait qu'on allait vers une saison plus triste, chaque année c'était toujours comme à la fin, toujours les mêmes célébrations. On revivait la fin du monde une fois l'an, partout où grossissaient les ombres si démesurées qu'elles semblaient pouvoir annuler en chemin, toutes les illuminations de l'été.
Les vieux buvaient encore sous les platanes, on voyait sur leurs gueules la chaleur qui remonte par les tonneaux de vin. On attendrait qu'il pleuve, ou qu'il vente pour rentrer les bacs à géraniums et les chaises de jardin. Ici, du tonnerre de Juillet on s'en souvenait, par delà les décombres, il avait fait grand bien, balayant les anciennes demeures où le malheur frappait toujours, la foudre était tombée sur le grand chêne rouge, cette fois, il n'en resterait rien. On parlait d'un malheur ici, on espérait encore que la force du vent puisse détruire en même temps le souvenir funeste de ces gens qui portaient le malheur avec eux, trop sûrs d'eux-mêmes pour qui la cruauté semblait une force à offrir en modèle ravivant la faiblesse d'en finir avec nos faiblesses, mais on n'en soufflait mot, ce qu'il restait d'embarrassant, venait comme une maladie qui courait encore dans le ciel et l'on se sentait vaguement étranger, tâchant de se protéger au mieux de ces gravités trop humaines qui creusaient des tombes en dedans. Que n'auraient-ils pas fait, ces ambitieux, pour obtenir l'assentiment du plus grand nombre ? Hélas, ils l'obtenaient. Ils parlaient à tort à travers et les autres écoutaient, attrapés par les belles formules, des mouches attirées par le miel et ces semblants d'amour qui venaient flatter par défaut le manque. Aucun des spectateurs ne saurait dire si la source d'un tel amour n'était pas remplie de poison. On ne pouvait plus répondre aux questions, miel et poison, c'était dans l'air. C'était là notre vie présente, on en ferait un commerce égal à nos fausses compassions. On ne pouvait ni juger, ni s'y plaire, on écoutait en prenant garde de ne pas se trouver happés par la trop vive lumière que des ombres moins prévisibles écraseraient un jour en passant.
Sous la toile aguicheuse patiemment ouvragée, il y avait des doublures, des motifs piqués de frelons, un tissu cachant la vermine, des peaux de bête qui sait ? Et les monstres grimés allaient comme des loups de légende, poser cette caresse aux carrefours où des colporteurs faisaient feu de tout ce qui restait. Jusqu'au bistro d'en face on retrouvait les moues les mêmes, depuis des siècles, des créatures obscènes des chapitaux romans et des masques de plâtre. Les femmes aussi, elles portaient leur silence en dessous, à force de devoir endurer toute la boue que les hommes éconduits avaient dû déverser sur elles. Sous des coiffes impeccables et les fausses dentelles, elles pouvaient ressembler tantôt à des sorcières, tantôt à la Sainte Vierge, dont le visage, sans aspérité révélait une férocité naturelle qui faisait douter de leur sainteté, on ne pouvait plus dire si leur joie apparente était une peine ou leur peine un rire plein de méchanceté, de rancoeur ravalée jusqu'au sacrifice pour leurs mères elles mêmes sacrifiées. Aucune image, ni aucun livre n'avaient osé clairement nous dire si cela était faux ou vrai.
On marchait quelques kilomètres plus haut, la terre couvrait de souvenirs l'histoire de ces conquérants courageux. On retrouvait émerveillés les premiers écrits des trouvères, ceux du jeu de parti sous le palefroi d'un chevalier, dans les formules abolies on prenait soin de s'abolir ainsi, tout alentour allait aux pas de ces anciens poètes-guerriers partis un jour forcer les portes de la terre. On appréciait encore le charme des fenêtres à meneaux, on se promenait dans les chapelles où sous les voûtes en berceaux, on pleurait seul mais tranquille. Après s'être isolé par cette apaisante lumière, on se retrouvait dans la rue d'une ville, on se sentait perdu, vendu, défenestré, redirigé à contre-coeur vers ces nouveaux commerces où plus un seul humain ne pourrait bientôt choisir d'aller seul sans se trouver brusquement isolé, (encore qu'il reste à préciser, la différence à la fois intime et infirme entre la solitude et l'isolement). Ce nouveau monde nous forcerait-il à appartenir, (qu'on le veuille ou non), à quelquechose d'infiniment plus désarmant que la solitude ou que l'isolement ? Oui, et sans grâce, pour l'heure on se sentait presque obligé d'en accepter l'exubérance, et sa loi, cette inanité.
Lentement, on verrait se tramer les éclats de ces petits mondes, un mirage pour chaque chambre, cela nous donnerait-il la somme d'une totalité encore insuffisante ? Des vies où nous ne serions plus ni assez seuls ni assez libres pour réfuter nos dépendances. Cette nouvelle religion était si expressive, si idéalisée, que par mégarde on s'y logeait comme rien, galvaudant nos secrets, jusqu'à ceux qu'on avait juré de ne jamais trahir, pétri par cette masse, embarqué, on acceptait d'y étaler maintenant nos amitiés pareilles aux marchandises, pourvu que nous soit accordée, un court instant, ce peu de reconnaissance qui nous "fait", celle qu'on croit toujours mériter ; comme si tout était histoire de "mérite". Pour quels égards encore, serions-nous prêts à nous laisser "choisir" ? Envisagerions-nous aussi naïvement l'idée que la seule valeur défendable à ce jour fût encore la liberté d'expression ? (de chacun, bien évidemment), une fiction parmi d'autres, tout comme l'intelligence (du coeur ?) que mon ingratitude ne me permettra jamais d'exalter à si bon compte, mais ce regret inconsolé trouvera peut-être plus de sérénité à savoir qu'il est plus facile de montrer ce qu'on n'a pas, que de se regarder au miroir de ses propres contrefaçons.
Bientôt, il y aurait des courses pour chaque histoire, de compétition en compétion, des preuves au transfert de ce mal, le retour de toutes sortes de préventions, maldonne organisée pour le bien du grand nombre : retour de la morale, prise en charge de l'expression de nos forces diminuées et toutes les trahisons de nos plus grands espoirs seraient à mesure consommées. Il y aurait l'oubli de ces merveilleuses constructions, l'écroulement des cabanes pour d'autres garanties, plus solides, tout cela permettrait de nouveaux paysages. On construit déjà les maisons. On met aux loisirs tant de pages, au catalogue quelques balises et des combinaisons pour grimper dans les arbres, le retour à la vie sauvage encadrant les nouvelles colonisations. Il nous paraîtra encore délicat de poser autour de ces miasmes des bâtons d'encens parfumés. Ou bien, on ira dormir dans la crasse, par les ruines volées, imparfaites, un instant détaché de tous, scrutant le vide omni-présent dans la nuit qui vient à rebours et sous la bonne étoile qui nous relie aux trois mille autres, visibles à l'oeil nu, peut-être choisira-t-on de ne pas voir, de n'y puiser que le néant, l'immense empire impénétrable ou le noir à portée, cependant il faut toujours un peu choisir, quoiqu'on en dise ... On cherchera encore ce qu'il y aurait de charme à vivre, pas plus que le présent, pour tout le peu qu'on sait, intraduisible. On cherchera.
Photo : Si l'hiver vient comme un mouton, il s'en ira comme un dragon dit un ancien proverbe hivernal. Mais ce pays n'est pas l'hiver et la bête n'est pas le cerbère du temple de Salomon, c'est juste un doux fauve pétrifié par le temps, saisi là haut sur la montagne, on ne le trouve que si on le cherche, il est caché par les buissons près des cailloux sous lesquels remontent les légendes anciennes comme celle d'un trésor qui se trouvait enseveli sous une pierre tournante, dans ce monde, (le notre) la bête garde encore de nombreux souterrains, je vous ramènerai peut être un (certain) jour quelques extraits de ces légendes encore vives qui viennent de la Montagne de Dun, dominée par une minuscule chapelle. J'ai sous les yeux les notes de trois érudits de ces mondes (Mr Jean Virey, les abbés Paul Muguet et Henri Mouterde), qui ont narré dans un ouvrage admirable, paru en 1900, l'histoire de "Dun. Autrefois, aujourd’hui". Rien à voir avec notre monde... Petite promesse, peut être à suivre...
Photo: © Frb 2010.
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dimanche, 28 août 2011
Sur la tombe de Marcel Duchamp
Pour éviter tout malentendu, nous devons répéter que ce "coefficient d’art" est une expression personnelle "d’art à l’état brut" qui doit être "raffiné" par le spectateur, tout comme la mélasse et le sucre pur. L’indice de ce coefficient n’a aucune influence sur le verdict du spectateur. Le processus créatif prend un tout autre aspect quand le spectateur se trouve en présence du phénomène de la transmutation, avec le changement de la matière inerte en œuvre d’art, une véritable transsubstantiation a lieu et le rôle important du spectateur est de déterminer le poids de l’œuvre sur la bascule esthétique. Somme toute, l’artiste n’est pas seul à accomplir l’acte de création car le spectateur établit le contact de l’œuvre avec le monde extérieur en déchiffrant et en interprétant ses qualifications profondes et par là ajoute sa propre contribution au processus créatif. Cette contribution est encore plus évidente lorsque la postérité prononce son verdict définitif et réhabilite des artistes oubliés.
MARCEL DUCHAMP : in "Duchamp du Signe", éditions Champs Flammarion, 1994.
On pourra se demander en passant où sont les artistes ? On trouvera peut-être la réponse soit en creusant un peu, soit en se couchant voluptueusement sur la dernière résidence (secondaire) de Marcel Duchamp. Marcel Duchamp, (c'est écrit), aimait placer le spectateur dans la peau du flâneur à cette exception près que le désir de celui-ci, de contempler petit à petit les transformations du monde, tout livré à son propre désir lui soit retourné brutalement par l'indifférence que l'objet suscite en lui. Cette chose n'est plus regardée / mais on sait qu'elle existe. Pour la grande question vous pouvez frapper à sa tombe, (ci-dessus), au delà des questions il s'y trouvera peut-être encore une présence ? ...
Photo : Qu'y a t-il après le ready-Made ? Ou comment regarder l'oeuvre en face ? Une boîte verte cette fois sans épitaphe, (ni moustache). A première vue, ceci est bien la tombe de Marcel Duchamp (et des siens) on la trouve désormais dans tous les bons cimetières, on peut même la fleurir avec une rose. Rose parce que Rose... (Je vous en prie... ) ! à moins que le lecteur (pas si dupe) préfère remplacer le foulard de RHozan-Muttkebo par un mouchoir et ni vu ni connu le spectateur entourloupera l'artiste. Certains jours le cimetière boscomarien se transforme en sanctuaire dada, le grand verre de Duchamp vire en petit vert du champ, (merci Marcel Vermot) Il existe une autre tombe (où est la vraie ?) qui se trouve à Rouen, sur laquelle on peut lire (et cliquer) :
"D'ailleurs c'est toujours les autres qui meurent".
Photo © Frb 2011.
vendredi, 26 août 2011
Où va la rentrée ?
mercredi, 24 août 2011
Où vont les feuilles ?
Un rêveur uni à la vie des songes interroge l'insignifiant. On réunirait aisément des documents sur l'anxiété subtile des feuilles mortes. Mais puisque celles-ci ne sont pas encore mortes, Permettez que je vous les cueille avant que d'autres ne les rechantent.
Nota : Comme on ne peut répondre à la question, sans d'abord se demander "où vont les fleurs ?", (Elles vont dans certains jours, bien sûr !) vous pouvez réviser vos classiques ci-dessous :
http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/08/06/le...
Photos : Pour les doux de la feuille, bien de quoi s'éventer encore. Des feuilles, des feuilles, encore des feuilles, photographiées dans les fourrés forêts du Marquis, là bas, au plus profond du Nabirosina.
Photos : © Frb 2011
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lundi, 22 août 2011
Topo d'ici ...
La toponymie n'a pas seulement pour but de retrouver l'étymologie des noms de lieux, les toponymes sont en effet des témoins précieux du passé et permettent à ce titre de reconstituer et l'histoire du peuplement et celle du paysage, qui lui est associée. Les noms de lieux-dits, par exemple, sont liés à la végétation d'une époque particulière et sont de ce fait les témoins d'une double histoire.
ALBERT DAUZAT, cité par MARIO ROSSI in "Les noms de lieux du Brionnais-Charolais", éditions Publibook-Université ou (EPU), 2004.
Le ciel du soir est comme une aube d'été. Les récits des anciens ici, s'écoutent sans y penser, autour de grandes tables sous les arbres, l'apéro peut se prolonger longtemps et tard dans la soirée, ce sont eux, les anciens, qui illuminent par une mémoire parfois un peu romancée, les légendes minuscules, les faits divers les existences probables et improbables de ces gens dont on dit qu'ils étaient des "figures" le tout enrobé d'anecdotes dont il est difficile de vérifier l'authenticité. Les histoires sont allées de maison en maison, les vieux, ils les connaissent sur le bout de la langue, déclinées en patois plus ou moins fidèle à l'original, en français plus ou moins "arrangé". Par leur voix, on retiendra vaguement une liste, les noms des personnes qui ont existé, existent encore et la vie des familles ayant donné leur noms à des hameaux : "les Brancion", "les Desmurs", "les (nombreux) Corneloup" du village bienheureux de Saint Racho, (prononcer St Raco, que les gens d'ici abrègent oralement en "Saracco", et dont les habitants que ceux des villes environnantes appellaient pour "charrier" "les Saracottis" sont simplement des St Rachois, St Rachoises), digression un instant pour préciser que si vous passez dans cette région, il faudrait visiter une ravissante chapelle érigée sur la montagne de Dun à St Racho (un endroit aux légendes merveilleuses). Cette chapelle est dédiée à l'evêque St Racho d'Autun (ou Rachonis ou Rognabertus) qui fût le premier Franc à occuper ce siège épiscopal, (ça vous donnera une petite idée de l'ancienneté des lieux).
Pour revenir à notre sujet (on s'égare vite dans cette contrée tant il y a de sentiers), l'histoire du Brionnais happant de plus en plus la curiosité des historiens, des linguistes, et autres chercheurs, on s'est retrouvé au fil des siècles sur des pistes de moins en moins approximatives. Les lieux ont légué également leur nom à de nombreuses familles, pour exemples, "Le Montillet", "La Verchère", "La Thuilière", la région abondant de familles "Labrosse" (de "La Brosse" qui veut dire "Le bois"), on trouvera quelques "Montaigu" des familles "Places" et des "Rocher" etc... Tous ces noms de familles sont répertoriés dans les registres paroissiaux que tenaient les curés avant la révolution. Si on remonte encore le cours du temps, on ira gaiement jusqu'avant l'an Mille, et si l'on s'intéresse aux généalogies des familles nobles anciennes, on s'apercevra qu'elles sont toutes construites avec (ou sur) un nom associant le nom de la terre possédée qui deviendra le nom de famille transmis de génération en génération : de France, de Bourgogne, de Valois, de Bourbon par exemple, pour les plus puissantes. A cette époque, parmi la population de basse extraction, il n'existe encore aucun nom de famille, juste des noms réduits aux prénoms de baptême. Après l’an Mille, les évolutions démographiques imposeront peu à peu la nécéssité de pouvoir différencier plusieurs individus portant le même prénom au sein d’une même petite communauté. Ainsi apparaissent les surnoms "...Les noms et surnoms et qualités des personnes tenant feu du lieu de la paroisse de..." (XIV em XV em siècle). Mais on peut dire qu'à partir du XIem et XIIem siècles, les qualificatifs ou "surnoms" les plus utilisés en grande majorité pour différencier les individus, seront les lieux de vie, c'est-à-dire les noms des hameaux où les gens résident. A une moindre échelle, d’autres surnoms sont issus des métiers que les gens pratiquaient (Charbonnier, Clerc, Tissier…), de l’apparence physique ("Petit", "Grand", "Gros"...) du tempérament, (exemples moins fréquents ici), ("Galland", "Bataillard", "Lherisson"...), de l'état de sujets ("Alesveque", "Auduc",...) de la filiation (aLajeanette, alamartine, alarenaude, ...) ou encore de la provenance pour les gens venus d'une autre région, ("Delauvergne ou Dauvergne", "Bourgogne ou Bourguignon", "Delamontagne ou Dumont... Etc). Après l’an Mille, les évolutions démographiques ont progressivement imposé la nécessité de pouvoir différencier plusieurs individus portant le même prénom au sein d’une même petite communauté. Ainsi apparaitront les surnoms, termes régulièrement utilisés dans les anciennes cherches de feux du XIV et XVem siècles : "...Les noms et surnoms et qualités des personnes tenant feu du lieu de la paroisse de..."
Certains hameaux portent aussi le nom des rivières locales : "La Genette" ou "La faux", (d'un mot "gaulois" signifiant "hêtre"), les noms des villages sont parfois ceux des arbres "Châtenay" par exemple (extension ancienne du mot "Châtaignier"), d'autres noms de lieux relatent les formes du relief vallonné, par exemple : "La pouge" (rampe, montée), de même le mot de "Brionnais" pourrait provenir du mot "Brie" signifiant "terre grasse et spongieuse". On pourrait parler des étangs, tous naturels qui occupent des creux ou vallons, la présence de l'eau est rappelée par quantité de toponymes : "La Saigne" (mot provenant du bas latin et signifiant "marais bourbeux"), "Le palluet" (du latin "Palus" signifiant "le marais"), "Les mouillières" ou plus explicite "Les étangs". Certains noms de lieux, ici, par leur origine celtique ou latine prouvent aussi l'ancienneté de la présence humaine. En ce qui concerne le Charolais et le Brionnais, (impossible d'aborder ce thème en détail car il faudrait je crois y consacrer un blog entier mais je ne peux m'empecher de citer et recommander vivement à ceux qui sont intéressés par ce sujet, l'ouvrage remarquable de Mr Mario Rossi éminent professeur, qui a pour titre "Les Nom de lieux du Brionnais-Charolais - Témoins de l'histoire du peuplement et du paysage" (voir références plus haut sous notre photo). Pour terminer sur le thème un peu élargi, on notera aussi que Mr Mario Rossi a désiré que les droits d'auteurs de ce livre soient affectés à la sauvegarde du patrimoine de Montceaux l'Etoile, dont l'église datant du XIIem siècle est absolument à visiter, surtout pour son portail sculpté datant de 1120-1125 (environ), qui représente l'Ascension du Christ dans une mandorle, qui tient dans sa main droite, le bois de sa croix, au milieu des Apôtres, entouré par deux anges. De source sûre, l'ayant vu de mes yeux, ce portail est considéré, à juste titre comme un chef-d'œuvre de sculpture d'art roman, je suis un peu étonnée en fouillant dans les archives de CJ de ne pas retrouver un billet qui aurait pu vous le montrer je ne manquerai donc pas, (un certain jour) d'en reparler ; en attendant vous pourrez encore mieux l'admirer en grand format ICI.
Je signale et recommande encore vivement un autre ouvrage tout à fait passionnant de Mr Mario Rossi, pour les gens qui sont intéressés par les dialectes, et l'étymologie ou plus généralement la langue, l'excellent "Dictionnaire étymologique et ethnologique des parlers brionnais"
Autre lien plus vaste, toponymique aussi, d'ouvrages très bien référencés :
http://jeantosti.com/noms/biblio.htm
A propos des noms de familles (et des évolutions juridiques de la généalogie)
http://www.guide-genealogie.com/guide/noms-famille-nouvel...
Nota : La balade peut encore se poursuivre (en mode lecture ultralight) il suffit de cliquer sur les images (pour ceux qui ont la flemme de lire le long topo, on aura tout prévu, c'est ti pas formidable ?)
Photos : parcours flêchés, et saisis à la volée, quelques noms de hameaux nabirosinais, photographiés au hasard d'une balade à vélo en chemins buissonniers.
Photos © Frb 2011.
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jeudi, 18 août 2011
Missions célestes (Part II)
Si vous êtes dans un abîme de sécheresse et d'impuissance, allez vous abîmer dans le coeur de Jésus Christ qui est un abîme de puissance et d'amour, sans vous embarrasser à goûter la douceur de cet amour lorsqu'il lui plaira.
L'Abbé CUCHERAT : propos attribués à Marguerite Marie Alacoque, extrait du livre quatrième, chap.X, "Emplois de la bienheureuse", in "Histoire populaire de la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque et du culte du Sacré coeur de Jésus", éditions Baratier et Dardelet, 1878.
Pure folie, par cette canicule que de vous forcer proposer à lire un sujet aussi douloureux que si peu estival, c'est vraiment aimer se faire du mal pardonnez mon insistance, en attendant de revenir à des thèmes plus légers, je tiens, par un souci de cohérence qui ne s'explique pas, à poursuivre ce long chemin de croix, et aborder avant l'orage un second volet de ces missions célestes, dédiées au culte du Sacré Coeur, en évoquant encore quelques exemples (pas tous) qui précédèrent Marguerite-Marie AlaCoque dans cette fidélité ardente toute dévouée au Coeur de Jésus.
Après Sainte Lutgarde, nous citerons un saint beaucoup plus doux et plus connu dont les textes magnifiques, il faut bien le dire, sont encore lus et admirés de nos jours, Saint François d'Assise, lui aussi, rappela au monde l'expressive image des plaies du "sauveur". D'ailleurs, ce n'est pas seulement St François, mais tout un ordre religieux qui, au Mont Alverne, à l'est de la Toscane, fût appelé à l'adoration et à la garde du Divin Coeur. De Saint François lui même je ne reproduirai que trois petites strophes d'un de ses cantiques d'amour traduites mot à mot, j'ose espérer que vous apprécierez la simplicité de ces voeux d'une beauté encore bien troublante :
Serre-moi bien tendrement,
Baise mon côté :
Pour toi je suis blessé
De la tête aux pieds
Regarde un peu et vois
Où le réduit l'amour :
J'ai le coeur transpercé
Par une lance ...
Mon coeur désire ton coeur
Tu me vois d'amour languir ;
Hâte-toi de venir à moi,
Livre moi ton coeur.
Autre élu que nous avons choisi, un disciple du Patriarche d'Assise, est Saint Bonaventure (surnommé "Le docteur séraphique"), né en Italie en 1217 ou 18 ou 21 (?) mort à Lyon en 1274, a lui aussi dans sa vie et ses écrits, distillé le parfum de la dilection. Extraits choisis.
Un jour, s'approchant du coeur de Jésus, il s'écria :
Ô aimable plaie ! c'est par vous que je suis entré et que je suis arrivé jusque dans les entrailles les plus intimes de la charité de Jésus christ, c'est là que je fais ma demeure [...] Là je trouve une si grande abondance de consolations que je ne puis l'exprimer. Ô aveuglement des enfants d'Adam, qui ne savent pas entrer en Jésus-christ par ses plaies sacrées ! voilà la félicité des anges qui nous a été ouverte et on néglige d'y entrer. Croyez-moi, hommes aveugles, si vous saviez entrer dans Jésus par ces sacrées ouvertures, vous y trouveriez non seulement une demeure et une douceur admirable pour votre âme mais encore un doux repos pour votre corps [...] faites en l'expérience, et vous y trouverez un trésor de toute sorte de biens. Voilà la porte du paradis ouverte [...] entrez-y donc ô âmes fidèles ! voilà votre époux qui par un excès de son amour vous a ouvert son côté afin de pouvoir vous donner son coeur.
Une douceur encore bien mystérieuse... Et parce qu'il me faudra vous présenter la première Marguerite, qui précéda de quelques siècles notre illustre Marguerite nabirosinaise, je ne reproduirai pas ici les effusions d'amour de Saint Bonaventure envers le Divin Créateur, dont certaines sont plus ardentes encore, vous les retrouverez, parmi ses écrits, si vous en êtes curieux. A retenir qu'il fût un grand prédicateur, et grand adorateur du Coeur de Jésus. Mais honneur aux dames chrétiennes douces ou rudes pénitentes, comme cette Marguerite de Cortone qui inspira des écrivains et mériterait un long billet bien que ce ne soit pas écrit dans le ciel, je glisserai entre-temps quelques pages moins sacrées lunaires ou païennes, telles des intercalaires variant la ritournelle, avant de vous parler de Marguerite de Cortone et qui sait ? Peut-être même de Sainte Angèle de Foligno. Mais pour boucler la boucle, avant que vous ne fassiez vos ablutions je ne fermerai pas ce billet sans laisser à la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque, tendant son coeur vers vous autres, mes biquets, agneaux, de vertu en vertu, le soin de vous adresser le dernier mot. Voilà qui est dit. Sera dit...
Cent fois je me suis étonnée comme Dieu ne m'anéantissait pas après tant de fautes, comment quelques grandes qu'elles fussent, il ne me privait pas de sa présence. Mais il me la rend si terrible, lorsque je lui ai déplu en quelquechose, qu'il n'y a point de tourment qui ne me fût plus doux, et auquel je ne sacrifiasse plutôt mille vies, que de supporter cette divine présence et paraître devant la sainteté de Dieu ayant l'âme souillée de quelques péchés.
Ensuite nous chanterons.
Photo : Statue du Sacré Coeur photographiée à l'entrée du Parc des chapelains à Paray le Monial. Le Seigneur vous montre lui même ce coeur d'or...
Photo © Frb 2011.
08:25 Publié dans A tribute to, Arts visuels, Balades, De visu, Le vieux Monde, Mémoire collective, Pépites | Lien permanent
mardi, 16 août 2011
Missions célestes (Part I)
Mon divin Coeur est si passionné d'amour pour les hommes, et pour toi en particulier que, ne pouvant plus contenir en lui-même les flammes de son ardente charité, il faut qu'il les répande par ton moyen, et qu'il se manifeste à eux pour les enrichir de ses précieux trésors que je te découvre..
Extrait : le 27 Décembre 1673, le Christ révèlant à Sainte Marguerite-Marie Alacoque, la solennité du Sacré-coeur de Jésus .
En cliquant sur l'image vous verrez apparaître la Chapelle où fût visitée Marguerite
Loin des polémiques suscitées par la venue de Benoît 16 et le rassemblement de jeunesses catholiques en Espagne, un "dérangement", si j'ose dire, au coût exagéré dans le contexte économique et social où nous sommes, ce déploiement de fastes ayant de tout temps existé, de la part de l'Eglise, il aura de tout temps été bien difficile à acccepter quand cette même église toujours proclama les vertus de l'humilité, exalta l'extrême dénuement envisagé par des saints, fidèles ou autres disciples... (Mais là n'est point dans mon désir ni dans ma compétence d'enfoncer ce genre de porte ouverte, ni d'ouvrir un débat, lequel, c'est déjà plié, ne changerait pas grand chose), ce ne sera sûrement pas le sujet de cette page (suite à certains courriers, je tiens toufois à re-préciser, qu'il ne s'agit nullement de propagande), nous poursuivrons sans mépris, l'exploration d'une contrée chargée d'histoire, où nous retrouverons la bienheureuse Marguerite-Marie Alacoque, (la "Soubirou Nabirosinaise"), qui consacra entièrement sa vie au "Sacré Coeur" de Jésus. J'ai eu l'opportunité de visiter plusieurs fois cette chapelle (cf. notre photo) d'être guidée par des historiens et chercheurs passionnés, (moins croyants que sceptiques) que je remercie pour m'avoir aimablement offert leur temps et disponibilité tandis que je leur posais des questions (on dira "de candide", ou plus souvent perplexes), contemplant avec eux, les reliques, il me venait des questions plus vastes encore, à propos de ces êtres investis de missions célestes dont certaines révélées dans des contextes si étranges qu'on pourrait les qualifier parfois de "pure folie". Entre mortifications, sacrifices, macérations, puis illuminations des uns (on pourrait dire des "Saints") et des autres justifiant la souffrance, ou des comportements qui paraissent à nos vues, insensés, la frontière entre dévotion et folie confondra parfois notre compréhension. Mais nous laisserons ici, encore de côté, toute considération psychologique, afin de simplement donner à voir l'étrange "monde" des premiers adorateurs de ce très mystérieux "Coeur de Jésus" : le "Sacré Coeur" datant du jour où le Fils de Dieu prit un coeur semblable au nôtre. Le Fils de Dieu le signala aux Hommes, en recevant St Jean sur sa poitrine, puis il l'ouvrit au monde par une large blessure qu'il portait sur la croix. Bien avant Marguerite-Marie Alacoque, les premiers adorateurs du "Coeur de Jésus" furent les anges du ciel et leur divine Reine. Leurs hommages se sont répétés et recrutés en traversant les siècles. Selon Saint Jérôme, il faut lire sous le mot de "Coeur", le sens et l'âme, l'organe et les sentiments. Ainsi Jésus ne se contenta pas de dire "Apprenez-moi que je suis doux et humble", mais il ajouta " doux et humble de coeur". Toutefois les textes à la gloire du "Sacré Coeur", sont plus rares, et moins explicites du moins juqu'au XIIIem siècle et on ne pourra les citer tous... Voici quelques noms et notes consacrées à ceux qui ont comme Marguerite-Marie Alacoque vécu dans cette même dévotion, mais bien avant elle, (Marguerite-Marie naquît en 1647) ils ont juré fidélité à la vénération du Sacré Coeur de Jésus. Pour aujourd'hui, j'en ai sélectionné deux, deux (seulement ?), vous lirez, ça semble déjà suffisant...
Aux alentours de 1150, Saint Bernard achève le chapitre III de son traité ascétique "La Vigne mystique", il écrit, je cite :
Mais puisque nous avons rencontré le Coeur tout aimable de Jésus et qu'il nous y est bon d'y être, ne nous en laissons pas facilement séparer... Oh ! qu'il est bon et agréable d'habiter dans ce coeur.
Saint Bernard ira même jusqu'à qualifier "ce Coeur" de "perle précieuse", plus loin, explication on ne peut plus limpide :
Votre coeur a été blessé pour nous ouvrir une entrée, pour que nous puissions y habiter à l'abri de tous les orages extérieurs.
ou encore, au plus profond, anatomique :
Le secret du cœur est découvert par les trous du corps ; découvert ce grand sacrement de bonté, les entrailles miséricordieuses de notre Dieu. (Saint Bernard : in "Sermon LXI sur le Cantique des cantiques").
Autre exemple : Sainte Lutgarde (1182-1246), une simple fille de bourgeois, vierge de la Belgique, mais aussi une des plus grandes mystiques (cinq siècles avant Sainte Marguerite),"rachète" par sa ferveur dans le cloître, l'amour qu'elle avait préalablement éprouvé pour le monde. "la vie mystique l'envahit comme un ouragan", c'est écrit. La jeune fille n'a que dix-sept ans. Un jour qu'elle s'entretient avec un gentilhomme qui la recherche en mariage, Jésus lui apparait subitement dans la même forme qu'il avait sur terre, et lui découvrant sa poitrine (voilà que nous brûlons, mais attendez la suite, Jésus n'était pas si coquet) il lui fait voir la plaie de son côté et de son coeur encore toute sanglante, puis il s'adresse à elle avec ces mots :
- Contemple ici, Lutgarde, ce que tu dois aimer ; laisse là les attraits de l'amour insensé des créatures et tu trouveras en mon coeur les purs délices du divin amour
Lutgarde vient d'obtenir du Seigneur,"l'intelligence des Divines Ecritures" et de l'office liturgique bien qu'elle n'ait jamais appris le latin, elle comprend vite que son humble ignorance qui l'obligeait à s'unir à son époux ne lui sera pas moins avantageuse que la connaissance de l'Ecriture, elle retourne voir le Seigneur et lui dit :
- Qu'est-il nécessaire, Seigneur, qu'une pauvre soeur comme moi, pénètre les secrets de vos divines paroles, changez moi je vous prie, encore cette grâce...
- Que veux tu donc ? Lui demande le Seigneur, or la jeune fille quoique simplette, sait déjà ce qu'elle veut, elle en demande même on dirait beaucoup (bon, je sublime un peu) mais les vieux ouvrages populaires à ce sujet jugés "fiables et sérieux", souvent rédigés par de fervents chrétiens, le font encore davantage, dans la volonté affirmée de louer "notre Seigneur" et de convertir, je ne pourrais donc vous garantir, ni m'assurer auprès de feu l'Abbé F. Cucherat où j'ai relevé ces fins dialogues, qu'ils sont à ce point authentiques et puisque ces dialogues sont tirés d'un livre attesté en hauts lieux, (j'y reviendrai en fin de billet), il faudra bien s'en contenter. Suite de notre dialogue, réponse de Lutgarde à "Notre Seigneur" :
- Ce que je veux, ce que je vous demande, c'est votre coeur. (Oserait-on ?) ...
Le Seigneur ne s'offrant pas ainsi aux caprices des Hommes ni à la première exaltée venue sans quelque contrepartie, réplique alors drastiquement :
- Moi, je veux plutôt avoir le tien"
Ce qui fût dit fût fait et la jeune fille en éprouva une joie incomparable de sorte qu'il y eût entre Jésus et Lutgarde un heureux échange de coeurs, non d'une manière corporelle, (bien sûr !) mais profondément spirituelle, le coeur de Lutgarde, à présent bien gardé, si parfaitement muni, ne fut plus jamais assiégé par les tentations des sens (quelle horreur), et ses mauvaises pensées d'autrefois, n'osèrent plus la traverser. Peu de jour après cette révélation, pour la récompenser d'une victoire "remportée sur elle même", le Seigneur lui apparaît attaché à la croix et tout couvert de sang, s'approchant d'elle, il détache (c'est du moins relaté dans les écrits de la vie de Lutgarde) un de ses bras pour l'attirer à lui, il lui fait porter ses lèvres sur la plaie saignante de son coeur. Et ce n'est pas tout... Un jour, affligée d'une fièvre intermittente, Lutgarde se consola en pensant à St Jean l'Evangéliste, qui avait pu en son temps, coucher sa tête sur la poitrine sacrée (c'est à dire, notre lecteur plein de sagacité l'aura compris, sur le coeur du Christ tant convoité), et d'y puiser les eaux salutaires de l'Evangile. A ce moment, apparût à Lutgarde en un songe éveillé le symbole prophétique du disciple : un grand aigle aux ailes si éclatantes qu'elles étaient capables d'éclairer l'univers entier par leur magnificience, et l'oiseau vint mettre son bec dans la bouche de Lutgarde pour remplir son âme de lumière qui vint lui révéler les plus grands mystères de notre religion ainsi que la conduite de Dieu sur les âmes. Devenue aveugle en 1235, elle commença peu d'années après son troisième jeûne de sept ans, répondant à une invitation divine afin d'écarter de l'Eglise un ennemi redoutable. Ce jeûne ne s'achèvera qu'avec sa mort, le 16 juin 1246. Aujourd'hui Sainte Lutgarde est encore invoquée chez certains croyants contre les douleurs de l'accouchement.
Deux exemples dont j'ai passablement allégé le récit (et les exemples) fermeront cette première partie, sur le thème ou extraits choisis des adorateurs du Coeur de Jésus, exemples curieux d'exaltation prenant chacun des formes différentes, pour le même but quelque peu élitiste il y en a d'autres, que j'évoquerai un certain (prochain) jour, dont l'illustre Saint François d'Assise (de l'ordre Séraphique) et Saint Bonaventure. Un sujet idéal à lire sur la plage, un suaire une serviette humide sur les yeux, si toutefois les corps dénudés des baigneurs pêcheurs menaient sourdement vos esprits aux plus mauvaises tentations, pensez très fort à ce baiser de Lutgarde au Sacré Coeur, sanguinolent... Ou bien par un désir de connaissance plus ordinaire, si vous passez dans la région de Paray le Monial, et voulez vous instruire, la Chapelle des apparitions se visite, sous l'oeil bienveillant de cette chère Marguerite, enfant "spirituelle, des mystiques cités ici au destin extra-ordinaire exalté par les chroniqueurs et autres biographes d'une époque dont beaucoup étaient aussi ecclésiastiques. Les notes bibliographiques et autres extraits de ce billet, ont été puisés à deux sources quasi opposées, une longue conversation avec un professeur et psychiatre, passionné d'histoire pour qui la vie des Saints qu'il étudie par passion, donne aussi de précieuses pistes à sa profession et le livre de l'Abbé F. Cucherat, (aumônier en son temps de l'hospice de Paray le Monial, admirateur inconditionnel de M.M. Alacoque). Ce "grimoire" épuisé sûrement mais encore trouvable en cherchant, (la BM de Lyon, le possède il me semble), date de 1878, j'ai en main l'édition originale aux pages mystérieusement conservées après une vie de mise en malle dans un grenier infesté de rats, (un des rares livre qui n'ait pas été dévoré un mystère isn'it ?) il fût édité par Baratier et Dardelet, imprimeurs libraires à Grenoble, sous le titre : "Histoire populaire de la bienheureuse Marguerite-marie Alacoque et du culte du Sacré-Coeur de Jésus", lu et approuvé par les vicaires mandatés par Frédéric, evêque d'Autun, Châlon et Mâcon, qui signa. L'Abbé Cucherat soumis aux décrets du Saint siège apostolique ne pouvait pas le publier sans l'accord préalable de son évêque, on pourra lire une page entière de certification :
Avons fait examiner par un de nos vicaires généraux l'ouvrage ayant pour titre [...] Et sur le rapport favorable qui nous en a été fait, l'avons approuvé et en avons autorisé l'impression etc..
Bien de quoi rassurer ceux qui auraient encore un doute sur l'authenticité de ce billet. Quoique...
Photo: oh la belle plaque ! ouvrant la Chapelle des Apparitions, (eh non, ce n'est pas de la pyrogravure sur contreplaqué, c'est plus joli en vrai), photographiée rue de la Visitation à Paray le Monial, non loin de la "Maisons des poupons" un domaine de perdition qui sera peut être le futur palais des festins (ou agapes) des grands papes du charmillon, réservé à des coeurs plus sacrés qu'au Sacré-Coeur, (mais non, ce n'est pas pareil), cette dernière précision n'étant pour l'heure pas plus attestée par monsieur le maire que par Monsieur le Curé puissent-ils pardonner mes audaces. J'assumerai (sans trop m'en consumer, j'espère), la responsabilité fantaisiste et "suaggantequer ed tceet edérenir te port ehniuma aréviélton ed sno gouteulen turfrus" (comme on dit). Histoires à suivre...
© Frb 2011.
dimanche, 14 août 2011
Ronde des immortels
Et d'un coup, nous voici jetés dans les nues en plein ciel. Les esprits soufflent et règnent partout. Ceci est la peinture des esprits.
VICTOR SEGALEN, extr. "Peintures magiques" in "Peintures", éditions Gallimard/ L'imaginaire, 1983.
L'homme aux oreilles qui fument ↑
Le pianiste endormi sur le dos du grand tamanoir.
Le souffleur de Nimbostratus.
La Jeune fille et le caniche à groin.
Sur cette dernière image je tiens particulièrement à remercier Fernand Chocapic qui a judicieusement remarqué qu'il ne s'agissait pas exactement d'une jeune fille avec un caniche à groin mais bien d'un lapin Duracell avec cymbale et salopette, il en a rapporté une preuve incontestable que vous pouvez encore contempler en cliquant ICI-MÊME. Toutes autres propositions seront accueillies avec bienveillance et seront ajoutées ici...
Photos : Figures libres... Regarder tous ces personnages attise ma fascination. L'étranger n'est pas loin, il suffit de frôler chaque image pour trouver vos correspondances, c'est peut-être écrit dans le ciel furtivement mais vous n'êtes pas obligés de voir ce que j'ai vu...
© Frb 2011.
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