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samedi, 01 novembre 2014

La mémoire hors des équilibres

But if you could just see the beauty,
These things I could never describe,
This is my one consolation,
This is my one true prize.

JOY DIVISION : "Isolation" extr. du second et dernier album "Closer". (Factory Records, 1980).

Si vous ne comprenez rien à cette histoire vous pouvez toujours cliquer sur l'imagesol cendre.JPG

Ici, on achève patiemment la mémoire du dernier soldat vivant oublié sur la dune, parlant seul aux étoiles, cherchant Orion et la grandeur de l'ourse quand tout finit à l'horizon et qu'il n'a plus assez de munitions pour s'en griller une en silence. On lui envoie bien le poison par signaux de fumée qui montent du fond de la vallée, et le cristal de soufre réanime son berceau. Peut-être est-ce une intention religieuse ? Ou la frénésie collective qu'il attrape de son regard mort aux choses qui persistent dans la gaieté et l'insistant désir de communication. La foule a brûlé son cerveau. Il en a vu tant et tant eu dans la ligne de mire que l'écran diffusant soit disant son histoire sous les grands chapiteaux soit disant financés par des constructeurs d'Algéco, ne lui parait au fond que de facétieuses entourloupes nées des chiffres ignorant la marge de manoeuvre des derniers primitifs, ceux là aux visages oubliés en ont tant vu aussi, que leurs yeux noirs troués de suie, ne peuvent plus supporter l'idée même de la lumière. Cheminant désormais dans la fine poussière des talus, ils biberonnent à tâtons, les veines aux poignets des jeunes filles, baroudent l'âme de ces créatures qui livrent leurs corps de débutantes à ces pourvoyeurs d'anciens mondes. Sur ce gibier doux à mourir, ils folâtrent, accueillent le mouvement de ces vallées à reconstruire où désormais ils ne pourront plus rejoindre leurs épouses sans un regret, ça ressemble au dégoût. C'est rester là, intacts, renoncer à la renommée, ou se trahir et devenir héros, condamnés à transcrire le vieux crime en livres d'images préfacés par des vedettes de la télévision, ou des poètes qui se donnent en spectacle, ils assureront désormais notre avenir. Le pays natal rétrécit. Les enfants collectionnent les livres de dinosaures, des photos de martiens, des panoplies de prédateurs sous forme de combinaisons étanches fabriquées en Chine, imitant l'acier brossé, emballées dans les sarcophages. Les femmes, elles ont le souvenir de ces très jeunes garçons, soldats tristes et vaillants dans leurs costumes de guerre, tandis que meurent près des talus d'augustes vieillards à cheveux gris virant au bleu comme les brumes du couchant. Ce sont les mêmes qui jadis emmenaient tout le monde au manège, ou au cirque, et le dimanche parfois, vêtus de bleu sombre et de blanc, ils allaient à la messe. Ce sont les mêmes qui renversaient les imprudentes et les visaient nues dans les champs, ou leur faisaient la conversation gentiment, en effeuillant la marguerite, premiers pas de la ritournelle... Aux talus vert-de-gris atomisés, tout cela nous revient et se met à tourner en rond. La terre grouille et se fend. Le vent retourne la vallée où se lisent les chiffres alignés des nouvelles numérotations. Dehors sur les bancs des marchés, dehors c'était notre vallée où des constructeurs d'Algéco déroulent avec un gant discret le plan d'un énorme projet qui détruira le Nombre d'Or.

   

Photo :  Un fantôme sur un lac cendré. Tracé quelque part près de la Tour Oxygène, un jour de pluie, dans le quartier de la Part-Dieu à Lyon. Nov 2009.

Retouche : quelques années plus tard, texte revu et corrigé, un jour de pluie, pas loin de la tour Incity près du quartier de la Part-Dieu à Lyon. 

Un ban pour les rivages, et pour tous les voyages lointains ou proches, dédicace en passant aux étranges rêves de Marc**, merci à lui, (Wait and see, amigo...)

Quelque réflection de ma rue s'échappe jusqu'aux attractions nécessaires de Mister Ernesto Timor**. scuzi (l'impardonnable et des crucifixions... ;-), l'ordi demeure en-rade, la crémière unplugged, des champs mu(ai)ent dans les gares, mes champs perdus fumant du caquet des mégères, je n'ai pas re-branché, je remets l'échappée à plus tard, voir très tard, mais pas trop; (I hope so) no soucis (eau de là) peut-être, à Benito ou à Lyno ? Aux forêts de la Céruse ? ... voir le livre ! (sans mourir).

 

Lyon © Frb. Novembre 2014.

mercredi, 09 mai 2012

Un peu froissé

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Merci à Pascale Dufraisse qui m'a aimablement envoyé cette photo, prise le Dimanche 6 Mai 2012 à .... Chut !

Le froissé presque audible touchant à la perfection, je vous laisse  contempler...

lundi, 02 avril 2012

"A l'Hyper" by Hozan Kebo

"Le hasard n'est que la mesure de notre ignorance" (H.POINCARE)

A Sonia :

elle est.jpg

 

Un prologue, avant d'ouvrir cette page à l'invité du jour, il n'est pas inconnu des lecteurs qui font leur petit tour par ici, (j'allais écrire leurs "emplettes", mais non, tout est gratis ici et j'espère pour longtemps, je maintiens "le petit tour") au delà de la sacro-sainte brosse à reluire, (que Roger le siamois me pardonne) je ne cacherai pas que j'ai toujours grand plaisir à accueillir ici son frère Hozan Kebo  fort en thèmes sur nos pages, cette fois-ci la coïncidence ajoutant son grain, là où n'étions pas, nous nous sommes étonnés nous-mêmes (eh oui ! soyons replets et restons naturels, ce sont des choses qui arrivent, mais rares, je cite Henri Michaux "Jubilation à l'infini de la disparition des disparités"). Et l'on s'étonnera de ces rencontres que nous ne pourrions jamais deviner à l'avance. Nous voilà dépassés, par le z'hasard et les coïncidences  via nos virées persos en zhypers et finalement assez contents de contempler notre Sonia revenue du néant pour aller rouler du nid d'Hozan K. jusque dans le mien son petit corps de métier entre nos pleins et nos déliés. Et par dessus le l'hypermarché pendant que nous avions le dos tourné, le sou d'osier de la  coquine pouaêsie récupéra la petite affaire pour livrer notre Sonia en tirant des rubans virtuels de ceci à cela, via le pohème que vous découvrirez, à la fin, aimablement offert par l'artiste ayant longtemps cherché sa Sonia perdue, puis retrouvée, tandis que je donnais ses premiers bains de foule à la mienne (de Sonia)... Mais comme je ne suis pas sûre d'être assez claire, je vous joins un extrait d'une correspondance récente, non, ce n'est pas celle de Raymond Guérin mais il s'agit des fameuses "lettres secrètes de HK/RL à /Frb enfin révélées au public", c'est une doublette voire une triplette qui marche à l'envers sur les fleuves avec Sonia, patinant merveilleusement entre les archives, pendant que nous dormons. D'ailleurs qui sait si chacun d'entre vous  n'a pas une Sonia cachée dans son placard à balai ? S'il l'a achetée au Niquéa ou au fauquonrama y'a de fortes chances que la Sonia y'ait pondu des oeufs, et je vous conseille de passer vos maisons au peigne fin, car Sonia est partout. Fino ed dresoginsi !

Voici donc cet extrait du mail (on dit courriel) que Sir Hozan Kebo m'a posté ces jours-ci, jetez-y un coup d'oeil qui abolira peut-être le hasard, sait-on jamais ? Puis lisez sans vergogne, sur le thème des rubriques de la poste c'est peut-être moins extravagant que la lettre d'Eva Jolie à sa chhère France, mais comme on n'a pas fait exprès... Je vous laisse savourer le courrier et le poème par la voix du maestro.

 

dés.jpg

 

"[...] Ce matin j'ai (comme tous les jours - certains ou incertains) était lire vos "CJ"

Sonia arrive, à très grandes enjambées, sur son gilet vert pomme molletonné, un carré épinglé "City marché, le sourire en plus", en dessous de la poche, un rectangle en carton plastifié découpé au cutter avec écrit, au marqueur rouge en gros "Sonia". Sonia est jeune, 20 ans, à peine, c’est elle qui s’occupe du "Rayon Beauté",

Quand j'ai lu ces lignes j'ai eu, comment dire , une sensation de "déjà vu" ou plutot de "déjà lu"
mais sans aucune reminiscence précise
Ce soir j'ai relu votre billet et  soudain déclic !

Il m'a fallu presque une heure pour retrouver le texte qui avait déclenché cette sensation de déjà lu
(j'ai un giga dossier "POESIE" qui contient des centaines et des centaines de "dossiers" sous dossiers fichiers
un labyrinthe où je ne m'aventure désormais que fort  rarement

j'ai fini par retrouver ce que je cherchais sans savoir exactement ce que je recherchais
le "fichier" date de 2003
vous allez voir  la coïncidence est assez troublante".


à l'hyper (by hozan kebo),variations sur thème,tapis rouge,à sonia,hasards et coïncidences,croisements de textes,grands magasins,zhypers marchés,marchandises,nouveau monde,correspondances,certains jours,roger lahu,dossiers,sous-dossiers,2003 vs 2012,henri poincaré,claude closky,robert wyatt,on a tous quelque chose de sonia,soniarama,elle est partout


"Les plis des bouches des gens les plis qu’ils ont les gens
à leurs bouches
qu’elles font leurs bouches

« AVEC NOUS VOTRE VIE A DU GOUT ! »

leurs yeux leurs peaux leurs vies les plis qu’ils ont les gens
à tout ça
comme des traits

de quelle plume ?

« AVEC NOUS VOTRE VIE A DU GOUT ! »

- non la carte c’est à partir de 10 € monsieur
- ah bon ?
lasse Sonia bouche lasse yeux las
encore trois heures d’au revoir bonne journée bonjour monsieur

« AVEC NOUS VOTRE VIE A DU GOUT ! »

MOINS 20 30 40 50 % ! ! ! ! derniers jours !
derniers jours !

couleurs criardes de fin d’un monde mais
rien dans les yeux des gens

leurs yeux leurs yeux leurs yeux comme des faux yeux

« AVEC NOUS VOTRE VIE A DU GOUT ! »


 HK/LR, 2003.





Photos by frb : Variations sur thème:  Sonia le retour (1)... Un coup de dé... (2), "So so so...Sonia, partout et en tous lieux (3). Avril 2012.


dimanche, 01 janvier 2012

Deux mil douzement (mais sûrement)

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Aux premières heures du jour si on enlève les mots, puis on si on enlève peu à peu ce qu'il y a autour, à supposer qu'on regarde, oui, qu'on regarde bien en dehors,  je veux dire en dehors de soi, on n'en aura pas vu deux mil, mais, juste à notre portée, disons, après des calculs compliqués, on en a choisi douze (douze quoi ? Chuuut ! un peu de patience, voyons !). Alors ça sera, mettons comme douze voeux à distiller au fil du temps et si nous survivons ce sera plus partagé que toutes les bonnes résolutions le même jour,  dont on sait d'expérience qu'elles durent peu (c'est de Montaigne). Au jour le jour, les grands et petits voeux reviendront pour un an plus neufs que le sou voilé dans les roues de l'infortune par les menaces des tout puissants. Oui mais voilà, La roue tourne et puis la route aussi, (a dit Popeye, le marin devant un tonneau d'épinards, c'est pas malin, je suis bien d'accord avec vous), tout ça pour annoncer qu'il n'y aura pas de récession au programme en nos lieux, plus que jamais reliés à d'autres perspectives, pour nos jeux sans un rond c'est plutôt l'abondance et comme nous n'avons pas les moyens de vous offrir Elisabeth Teissier,  afin de vous annoncer tout ce qui  va arriver en cette future année, (qui s'enfuit déjà, pas Elisabeth Teissier ! l'année !), voici  un résumé extra lucide de ce qui nous pend au nez à tous sans exception, enfin, un peu d'égalité, avec les bons adages offerts par certains jours, pourvu que tout finisse par des chansons. Je remercie les lecteurs qui durant cette précédente (année) ont partagé les humeurs plus ou moins régulières de notre petit éphéméride. Je passerai mes bons voeux via les pluies de Vendeix, ou le soleil de St Amant, (prions pour lui) car le timbre amoureux se trouve être plus tendre, à nos yeux que l'encre noire sur blanc. Belle année, mes amis, au lieu d'être contre tout, soyons pour ce qui nous plaît avec des brosses d'amour pour les hirsutes comme dirait Paul Eluard, (alias Eugène grain d'ailes) en reprenant quelques libertés dont on pourrait (parfois) se sentir (trop) privé, (quoique pas totalement), avec ce "pas totalement", on devrait peut-être y arriver "douzement"... Soyons, soyons...  Et je glisse le calendrier dans votre botte de sept lieues, pour tout l'usage qui vous plaira.

 

JANVIER : "prends garde à la Sainte Martine, l'hiver se mutine".

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FEVRIER : "le douze février, si le soleil est clair, ce sera encore quarante jours d'hiver."

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MARS : "A la mi Mars le coucou se cache dans les épinards".

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AVRIL : "Pâques pluvieux, Saint Jean farineux."

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MAI : "Pluie de Sainte Pétronille, quarante jours trempe ta guenille." 

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JUIN : "Pour la Saint Antoine (de Padoue), les jours croissent comme la barbe d'un moine." (ou d'un Hozan)

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JUILLET : "Avec Sainte Procule arrive la canicule."

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AOÛT : "A la Sainte Radegonde, quand l'eau abonde, la misère est dans le monde."

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SEPTEMBRE : "A la Saint Firmin, l'hiver est en chemin."

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OCTOBRE : "Vilaine veille de Toussaint ne présage rien de bien."

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NOVEMBRE : "A la Sainte Delphine, mets ton manteau à pélerine."

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DECEMBRE : "Quand Noël se trouve être un dimanche, les ennuis de l'hiver viendront en avalanche."

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Photos : Ritournelle, ou la ronde des saisons à relire ci dessous :

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2010/04/27/tr...

Saisie entre les mois de Janvier et Décembre au cours de cette année 2012, he oui ! il y en aura d'autres, des mois, et des années dans cette année. C'est même la grande nouveauté (ô douce !), mais on  ne va pas se mentir ni tout se raconter, sinon adieu surprises ! et sans surprises, bonjour tristesse ! (c'est de La Palisse).

Je remercie monsieur Herbert-Georges Wells, (on ne peut rien refuser à un Georges, surtout pas à un Georges à moustaches) ; Wells donc, m'a gracieusement prêté sa formidable machine à explorer le temps (j'ai beaucoup aimé), et je dédie ce billet à mon grand ami Herr Zack Einstein (le frère caché de Georges Albert), qui m'a envoyé un émissaire-facteur de sa planète à lui, pour enfin me permettre de remonter les sons à la vitesse de votre lumière (- ah bon ?), oui,  je promets ! mais ceci est une autre histoire que je vous raconterai, (peut-être) un certain jour, au risque de perdre toute crédibilité, il faut vivre dangereusement, sinon ce n'est pas vivre, n'est-ce pas ? Voeux doux, toujours debout avec des cadeaux parmilliés. Promesses... !

© Paul, frasby, raidi pour, (photomix) 2012

vendredi, 23 septembre 2011

Brader la ville

Ce qui est actuel, c'est toujours un présent. Mais justement, le présent change ou passe. On peut toujours dire qu'il devient passé quand il n'est plus, quand le nouveau présent le remplace. Mais cela ne veut rien dire. Il faut bien qu'il passe pour que le nouveau présent arrive, il faut bien qu'il passe en même temps qu'il est présent, au moment où il l'est. Il faut donc que l'image soit présente et passée, encore présente et déjà passée, à la fois, en même temps. Si elle n'était pas déjà passée en même temps que présente, jamais le présent ne passerait. Le passé ne succède pas au présent qu'il n'est plus, il coexiste avec le présent qu'il a été.

GILLES DELEUZE in "L'image-Temps"

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VST 2.JPGterne.JPGblocc.JPGvitres.JPGrayures.JPG

 

Conséquences (barbares) by Luc Moullet :

 

 

 

Photos : Comme un monde entre ??? De l'architecture utilitaire, plus ou moins diverse (ou la beauté caché du laid ?). Photographiée du quartier République à celui de la Part-Dieu, entre Villeurbanne et le Grand Lyon.

© Frb 2011.

mercredi, 14 septembre 2011

Le dessous des cartes (c'est déjà demain)

Discours d'investiture : Provinchiales, provinchiaux, mes chers compatriotes. Merchi de m'avoir élue. Vous avez fait le bon choix, le choix du bon chenche. Mais la chituachion étant che qu'on chait, et dans le contechte de rechechion qui menache la nachion, nous jalons touche être forchés de retroucher nos manches. L'opchion de l'auchtérité est auchi chelle de la chagèche, pour che faire, nous rechterons jichi enchemble afin de trouver une choluchion qui rende pochible la cholidarité entre touche. Je compte chur votre conchienche chitoyenne, cha demandera des chacrifiches, mais gil en va de l'avenir de la Franche, ch'est bien trichte mais ch"est comme cha  : Vive la Franche !  de droite de gauche, et du chantre !)

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va  o.jpgpa  N.jpgVoir R.jpgpan.jpgri  n.jpg

Photos : Le dessous des cartes de la rue Descartes. Ou solution du petit rébus provincial (y'a un proverbe provincial qui  est signé du Riri, qui dit aussi que "c'est bien partout Vendenesse" mais bon, on fait de la politique, (et c'est exceptionnel) on ne va pas se mettre à faire de la philosophie par dessus le marché...

Villeurbanne © Frasby 2012.

(eh  ben oui ! c'est ça l'avant garde, avec une petite longueur d'avance, en toute humilité ! et dans un but, toujours le même, vous distraire, mes chers compatriotes, vous pouvez me remercier, envoyez vos dons !)

dimanche, 11 septembre 2011

Rentrer

Mes espaces sont fragiles : le temps va les user, va les détruire : rien ne ressemblera plus à ce qui était, mes souvenirs me trahiront, l’oubli s’infiltrera dans ma mémoire, je regarderai sans les reconnaître quelques photos jaunies aux bords tout cassés. Il n’y aura plus écrit en lettres de porcelaine blanche collées en arc de cercle sur la glace du petit café de la rue Coquillière :  "Ici, on consulte le bottin" et "Casse-croûte à toute heure".

GEORGES PEREC in "Espèces d'espaces, éditions Galilée 2006.

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rentrer seul_0109.JPGPlus loin par les méandres d'un plan de Vélov' (ou "vélos d'amour"), la rentrée honorera encore le beau temps sous des blancs de cirrocumulus granulant légèrement le bleu qu'on possède encore en lambeaux et l'on remuera l'aventure sur un pied d'appareil photo, espérant du nouveau, à croquer un peu de perspective. Ici, tout semble prévisible. Rien ; sinon cette chaleur de tripot, cet air brut et torpide. Rien ; sinon que du beau dans la ville aux façades rosées cachant son mal entre les ponts, autant de gouffres côtés du Rhône que de guinguettes aux volets clos et de plages interdites, les boites de nuits plongeant sur Vaise neuf et refait avec sa gare qui fût détruite sous les bombardements du 6 Mai 44, une gare en bois, vite reconstruite entre deux évènements, jusqu'à l'espace multimodal d'aujourd'hui et par dessus, tout ça, il y aura les barres vanillées de la Duche qui regardent le bas, plus pour longtemps, barrées déjà par un projet de ville, il transformera bientôt ce quartier en un "pôle attractif", disons "plus attractif", c'est la fine formule, pôle ou quartier, pourvu que tout cela devienne "attractif". Les mots bleus du Grand Lyon, peaufinant sa vitrine en bonnes concertations abonnées à la cool attitude, nebulus à venir. On ne peut rien en dire. On se porte sur les pentes, on coupe par les traboules où vit encore un monstre de légendes mystérieuses ; on croisera même en rêve les fantômes : des gisants de Loyasse, un secret chu à l'observance  puis on retournera comme hier dans les rues en presqu'île, autour de la place de la Bourse, on verra des messieurs dits "d'un âge", des cadres distingués, à l'allure de Clooney raybanés (comme Dutronc), faussement déglingues, (vaguement Borloo), qui vont de table en table, glissant, leur carte de visite, en toute discrétion, aux jeunes filles venues là pour boucler leur fin de mois. C'est secret de Polichinelle mais ce n'est pas dans tous les bars de presqu'île qu'on fait ça...  Chez Jules on causera d'art (mais à la bonne franquette), à la Manille on jouera (à la Manille), ou on lira sous les mêmes globes lumineux qu'autrefois, des journaux du jour ou de la veille, au Moulin joli on s'emmerdera joliment et les nouvelles couleurs de beige à chocolat nous ferons regretter le vieux "Moulin Joli" terne et bruyant, d'avant.

rentree  cc.jpgIl y aura la sortie des classes vers Ampère ou ailleurs, des ados qui ricanent à trois sur un scooter, roulant les pelles, les mécaniques, claquant de la planche, l'Icare niqué sur des genres d'escaliers. Passée vers la mairie de la place Sathonay, il on croisera Mademoiselle Pugeolles, rejoignant sur une trottinette, son petit F2 de la rue Burdeau, un  cartable tout neuf sous le bras, avec des surpiqûres, et des poches intérieures de la taille d'un kleenex.  Il y aura rue de la Ré plein de monde en grappes vers les cinq heures du soir, des groupements sous la cnaf avec toute la culture de Levy à Musso et des livres de Daniel Pennac à moitié prix entassés près des piles de compils de Pavarotti chante Verdi. Il y aura des regards en biais, sur le flottement d'une jupe plissée bourgeoise, s'attardant devant la vitrine d'Yves Rocher, des mains de femmes chez Sephora dépliant la publicité d'un nouveau parfum (pour les femmes) qui leur affine les hanches pendant qu'elles dorment. Il y aura les dernières robes d'été, des chapeaux d'hommes  à l'Argue, à fines rayures noires et blanches genre maquereaux siciliens à porter avec des bottines en daim à demi lacées, exprès, fausse néglige, de la bohème, encore, des bottines de gamines, vraiment ergonomiques à talons de 7 cm, qui font de belles chevilles et qu'on porte avec des collants 15 deniers de teinte biche.

rentrer.JPG

Antithèse : ICI

Photos : Des filatures fragiles aux quatre points cardinaux d'une ville entre deux ponts et deux collines, du quartier de bureautique (et domotique) aux costumes froissés près des gares (1) juste à proximité de l'école (2), un passage clouté de bellecour en Presqu'île (3) enfin, sortie du temple où la terre promise distribue de la marchandise et pour quelques centimes (de plus) vous avez les cabas recyclables, bien de quoi battre le pavé jusqu'aux prochaines vacances (4). Juste quelques images from Lyon entre déjà hier, dans le vieil aujourd'hui, aussi loin que demain.

 

Lyon vu par © Frb : 2011.

vendredi, 20 mai 2011

La vie sur terre (part I)

Je ne puis rien dire sur cette matière que tout le monde ne sache aussi bien que moi, pourvu qu'on y veuille penser. C'est pourquoi j'aurais grande envie de n'en rien dire. Mais parce que l'expérience m'apprend que les hommes s'oublient souvent si fort eux-mêmes, qu'ils ne font point de réflexion sur les raisons de ce qui se passe dans leur esprit, je crois que je dois dire ici certaines choses qui peuvent les aider à y réfléchir. J'espère même que ceux qui savent ces choses ne seront pas fâchés de les lire : car encore qu'on ne prenne point de plaisir à entendre parler simplement de ce que l'on sait, on prend toujours quelque plaisir d'entendre parler de ce que l'on sait et de ce que l'on sent tous ensemble.

NICOLAS MALEBRANCHE : trouvé en exergue du petit livre "La vie sur terre" de BAUDOUIN DE BODINAT, Réflexion sur le peu d'avenir que contient le temps où nous sommes", éditions de l'encyclopédie des nuisances, 1996.

Nouveau ! En cliquant sur les 3 images vous pouvez visiter nos appartements-témoins, profitez !vie sur terreF9006.JPG

Le champ est clos, la lumière se tamise. Le voisin du rez-de-chaussée est parti il y a quinze jours, je l'ai su car je ne voyais plus son chat gratter à ma porte. Lui, le voisin, je l'avais croisé, un peu, il avait l'air anxieux. En vérité, il allait mal. Il voulait m'inviter à boire un verre chez lui, j'ai dit "non, pas aujourd'hui, je n'ai pas le temps, mais quand tu veux, demain, plus tard", j'avais un rendez-vous qui me paraissait urgent. Il y eut des imprévus, je suis partie, je me suis intéressée à des gens si noyés de préoccupations, qu'ils n'avaient plus la place, ils racontaient toujours leurs préoccupations et il fallait toujours les écouter, les écouter, et tout ça se dévidait à perte, désarmant nos identités, sans résonance, sans même une bribe d'une empathie vaguement bétazoïde, ce vide se déployant à l'infini développait aussi le sentiment mortel d'une déperdition de chaleur humaine et cette idée de temps perdu entretenait une secrète colère qui bientôt ne serait plus contenue. Etait-ce donc "ça" que j'avais de si urgent à faire ? Le voisin, personne ne l'aura vu déménager, on ne sait pas s'il a trouvé mieux, s'il fût malade - a été expulsé - on sait qu'il n'avait plus d'argent, qu'il ne pouvait plus payer l'électricité et les lettres de rappels qu'il n'ouvrait plus, s'entassaient sous sa porte, plus de quoi poursuivre ses projets, il avait peur des huissiers, de la facture du dentiste et d'une espèce d'assistante sociale très insistante qui désirait absolument l'aider à se "reclasser", il était paniqué à l'idée d'être aidé par une assistante. Il me racontait ces choses graves avec légéreté, il n'aurait jamais supporté que je prenne ses problèmes au sérieux, au final il rebondissait, on en riait, on s'aimait bien, une complicité sans fadaises, pas la peine d'en faire tout un foin.

Je n'ai pas vraiment deviné qu'il avait atteint des limites. Le monde est ainsi fait, les gens meurent (c'est symbolique, c'est réel encore banal à dire) quasiment sur notre palier, nous ne l'apprenons qu'après. Ensuite nous affectons cet air (tellement trop) désolé, et déclarons (solennellement) "si j'avais su", si occupés que nous étions à ceci et cela, nous voici consternés (tant d'indifférence entre humains, n'est ce pas honteux, messieurs dames ?), pleins de bonne volonté, pressés d'aider, de consoler, nos discours sont si généreux, on donnerait volontiers sa chemise, on la donnerait sans hésiter, toujours après. Ruinés à l'insu de notre plein gré par la cruauté environnementale, comment aurions nous pu savoir ? Mais on n'en fera pas non plus tout un foin.

Il faut dire que mon voisin, ne boudait pas sa solitude pour lui, elle était sans fatalité, sa vie alternait entre des fêtes plutôt joyeuses et sa "bonne solitude", quand elle était trop rude, il n'en divulguait rien, sachant combien nous avions tous du mal à vivre, trop fiers pour exhiber nos plaintes, nous trouvions encore nos malheurs relatifs, par rapport à deux ou trois autres de notre connaissance, qui n'avaient pas d'endroit pour vivre. Ces derniers temps mon voisin ne faisait plus rien, d'ailleurs je ne le croisais plus, je le croyais en vacances. Hier des gens sont venus visiter, "ça fera un beau loft", ils ont dit, j'étais en train de relever ma boîte aux lettres, quelques factures, les prospectus de Quick Planet, Pizza vit', CroQ' MinuT', Go-Footing, les petits flyers du marabout Ali Sekou, le Top vacances et la publicité agressive de l'agence immobilière Simone Ballaud qui veut absolument acheter et vendre notre quartier. Simone Ballaud, experte des grands ensembles coordonnés : "Vos biens nous intéressent" qu'elle m'écrit. Chaque jour c'est la même chose elle veut mes biens, Simone Ballaud. Toujours elle me colle sa photo, un concentré de marketing, émergeant d'un corsage orné d'un collier de perles roses, prête à tout Simone Ballaud et même que ça se devine, à ce sourire qui sourit trop. Si je sympathisais avec elle, je suis sûre qu'elle me mangerait la laine sur le dos (ou le peu qu'il en reste). En gros elle a écrit : "Contactez moi", elle met sa signature sur la photo et tous les jours elle me l'envoie. Simone Ballaud, mauvaise copine de boîte.

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Eux, les nouveaux, je les entends parler, à l'employé, (Patrick Montier il s'appelle, le fils spirituel), il leur sourit, il a appris dans une école spéciale. Il a des dents blanches comme celles des animateurs des émissions du genre "Combien ça coûte ?". Il commence ses phrases comme les hommes politiques avant de parler il dit : "Ecoutez-moi !". Coaché par trente ans de télévision française, il se frotte les mains, devant ses clients et c'est machinalement, il leur répète deux ou trois fois "Ne tardez pas trop c'est un produit qui intéresse beaucoup de futurs propriétaires". Un produit ? Cet endroit jadis à la renverse, ce lieu qui résonne encore de toutes les musiques fusionnées quelque part entre Saïd Chraibi et Neil Young. Le futur loft est hors de prix et la rue très bruyante, ils n'ont pas vu sur la mezzanine repeinte vite fait, (blanc laqué impeccable), que les murs suintent d'humidité. Les visites ont lieu entre midi et deux, il est malin l'autre, avec ses dents blanches, entre midi et deux il n'y a pas de bruit dans le quartier. Le temps s'arrête. Les gens, ils mangent.

Eux, "les futurs", ils ont prévu de grands travaux, ils feront un salon à la place de l'atelier, ils ont pris des mesures contre un mur qui ne leur semble pas large, ils mesurent pour savoir si le canapé - leur canapé en cuir - pourrait aller à cet endroit. Ils ont visité la cabane, là où dormait un chat approximatif (celui que chaque été mon voisin prenait en vacances et qui s'appelait "Maurice") ils vont détruire la cabane "Maurice", ils ont dit. "On fera une terrasse", elle a rajouté "je pourrais mettre mes plantes" elle a souri à son mari à l'idée qu'il y avait même la place pour installer une table ronde avec un parasol, et pourquoi pas d'ajouter une pergola, un barbecue, même des fauteuils-relax ! un hamac entre les deux arbres, une cage avec des perroquets. Le mari a souri. Ensuite ils ont demandé à l'agent si l'immeuble était équipé de fibre optique. L'agent il a dit "oui, ça marche très bien internet ici, je m'en porte garant" il m'a regardée avec son sourire carnassier : "demandez à cette résidente. Ca marche bien ! hein ?" qu'il me disait, j'ai répondu (avec la voix d'Arletty) "j'sais pas, j'ai pas la fibre optique". La dame a dit "Et les boutiques ? Pour faire ses courses c'est pas trop compliqué ?" Elle me parlait à moi. J'ai dit (avec la voix de Jean Gabin): "oh vous savez les boutiques, c'est jamais compliqué", elle a rajouté "Non, non je voulais vous demander est ce qu' il y a des supermarchés dans le quartier ?" j'ai dit (avec la voix de Danielle Gilbert) : "oui, bien sûr ! vous avez un Super Casino à deux pas, un Franprix sur la place en face du Crédit agricole, un Champion au bout de la rue, le Carrefour à deux stations de métro, un Lidl en face du gymnasium, un Leader Price vers l'école de musique, un Super U de l'autre côté, le Monoprix à 50 mètres d'Intersport, un autre Franprix cours Vitton, un Schlecker  à Wilson et un Spar". L'agent me souriait pour peu il m'aurait presque donné une petite commission. J'eus honte de moi. Elle avait l'air déçue, sur sa faim, elle a dit : "Alors ... Y'a pas d'Intermarché ? Pas de Auchan ? Pas de Leclerc ?"... J'ai dit, (quasi sans voix) : "Non, pas à ma connaissance".

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Puis ce fût le silence. J'ai jeté la lettre et la photo de Simone Ballaud à la poubelle (la poubelle des papiers à recycler pour sauver la planète) sur laquelle l'agent avait posé sa pochette en cuir avec tous ses dossiers. "J'ai dit pardon, je vous prie de bien vouloir m'excuser, il faut que je jette une cochonnerie dans la poubelle", il a vu sa collègue disparaître sous son nez. Dans quelques années se serait lui, le successeur, "Votre bien nous interesse", "Patrick Montier pour vous servir". Le plus grand espoir de Simone Ballaud. Fer de lance, un homme très ambitieux, capable lui aussi de bouffer la laine sur tous les dos, y compris sur celui de Simone Ballaud (ce sera même la première sur qui... Enfin bref).

Le champ est clos, la lumière se tamise. Je vais aller lire à la terrasse d'une buvette en bord de Saône en attendant le 3 Mai (oui, je sais, c'est déjà demain), la réouverture du café le plus extra de Lyon, sous les arbres et pas loin des ponts, le Mondrian, endroit intemporel, crée par l'artiste cuisinier, notre ami Michel Piet (et ses acolytes), nous y mojiterons le mois de Juin, quand la clique de Paris, (et Bonnières) ramènera à vélo, le bon vent de l'Espagne. Et mon voisin peut-être qu'on le retrouvera cet été par hasard dans la ville de Madame de Sévigné près de Vitré où il voulait aller vivre, finir sa vie, (il disait), et pourquoi pas mourir ? Il voulait aussi vivre sur la banquise ou au 221 B de la Baker Street  à Londres, (une adresse qui n'existe pas), ça dépendait du temps, du vent. Hier, j'ai appris que mon voisin n'était pas mort, il a écrit de Londres. Il va soit disant bien et habite réellement au 221B de la Baker Street.

L'autre elle hésite. "Y'a pas d'Intermarché, ça c'est très embêtant". Son mari il lui dit "Ma chérie, y'a Carrefour c'est pareil". Elle soutient que "Non, c'est pas du tout pareil". Patrick Montier ronge son frein il sourit. Les affaires sont les affaires. Grosse commission. J'ouvre "La vie sur la terre" :

J'ai pensé en outre ceci, que l'indifférence minérale de ces formes abstraites qui nous entourent, leur sévère fonctionnalité, produisent un composé de sécheresse et de méchanceté qui nous signifie nettement quelque chose : la vie y est un désordre. L'impression que l'on ressent est la même que nous fait un appartement neuf et meublé par un futuriste : on se voit transformé en animal humain ; comme on est en réalité au regard de l'économie toute-puissante. Il y en a donc pour déclarer aimer cela, pour s'exalter d'être au nombre des animaux domestiques de ce maître-là. 

Sans doute n'avons-nous à connaître, le plus souvent, que les bâtisses mécanographiées dont la société de masse a recouvert le globe, les embouteillages, les plages salies par la mer, les nourritures décevantes une fois dépouillées de leur emballage, les soins approximatifs de la médecine bureaucratique. Mais peu importe.

Liens : Si vous avez loupé le début, ci-joint un résumé des épisodes précédents ("La vie sur terre" (Part II, et III) :

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/06/22/co...

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/06/28/la...

Photo : Un quartier rénové, immeubles grands standing ils ont sûrement un nom genre résidence "Les Eurydice" ou "Asphodèles", bouchant la vue hier imprenable d'un appartement où il paraît qu'avant, on voyait de la fenêtre, des petits pavillons ouvriers, avec des choux dans les jardins mais je n'ai pas connu ce temps, j'ai toujours vu ce quartier piqué de grues. Jamais ne cessent ces constructions. Les bâtiments choisis ne manqueront pas de design, pour ceux qui aiment disons, la pureté des lignes... Photographiés à Villeurbanne au niveau du métro République.

Photos :© Frb 2011

jeudi, 02 décembre 2010

La chaleur humaine

J’ai passé ces derniers mois à passer ces derniers mois. Rien d’autre, un mur d’ennui surmonté de tessons de colère.

FERNANDO PESSOA, Lettre à A. Cortes Rodrigues.

chaleurF2640.JPGDe manière progressive, une teinte un peu grise dominait à présent. La poussière devenait liquide quelques éclats abimaient le velours qui avait recouvert la ville tous les jours précédents, la couleur de l'ennui revenait comme toujours, et nous déplorions cet instant où la ville silencieuse avait rassemblé dans le froid les volontaires qui distribuaient la chaleur humaine gratuitement à l'entrée des magasins ou dans les bouches de métro, rien que des volontaires enjoués, prêts à tout pour distraire les passants, les éloigner de "la pensée frileuse" qui s'invitait dans les maisons et couvrait tout du voile de la dépression venue par les brouillards d'Octobre, les premiers frimas de Novembre et les noëls où il manquait toujours quelqu'un aux festivités, chez les uns et les autres, pour que la fête soit absolument réussie. Les solitaires ne souffraient pas. La "dépression saisonnière" pour eux, c'était tout le temps, mais les solitaires ne comptaient pas, ils appartenaient au "domaine à part" qu'on avait classé "atypique", l'adjectif fourre-tout "atypique" plutôt en vogue courait dans des dossiers spéciaux, sur les listes d'attente et vidé de son sens, on avait choisi "atypique" plutôt que ses synonymes tels : "exceptionnel", "hors norme", "inaccoutumé", "inhabituel", ou "singulier" qui connotaient trop dans le particulier, "atypique" était un mot atypique même, une façon de considérer la chose sans vraiment la considérer, les solitaires n'étaient pas tout à fait dans la marge, pas assez dans la marginalité, on pensait d'abord aux familles, aux clans, à tout ce qui rentrait dans les statistiques, il fallait préserver leur joie, leur cohésion, l'intégrité des plaisirs, tout en leur transmettant la certitude qu'ils appartenaient à une collectivité vraiment active, leur forger une identité, une communauté, quelque chose qui ait l'air solide, leur livrer l'illusion leur en fabriquer d'autres, jusqu'à ce qu'ils se sentent protégés par quelque plan définitif. Les volontaires, des jours entiers affinèrent leur stratégies, leur action fût dévouée aux terrains les plus "sensibles". Les volontaires portaient les sacs et les valises des pauvres gens, engageaient les conversations, complimentaient les dames, laissaient leur place aux vieux. Aux époux qui allaient seuls au bistro se saouler avant de rentrer les volontaires offraient un pot, y ajoutaient les distractions (blagues belges, histoire de blondes, bonne humeur et bons mots). Il y avait dans cette sorte de bonté accompagnée de manières généreuses, la gratification de plaire inséparable du souci d'attester que la chaleur humaine était une constante de l'humanité, malgré les derniers évènements, les décrets aberrants, la liberté qui sourdement se réduisait, divisant des classes entières de gens, rien ni personne ne pourrait attenter à cette valeur proclamée "sacrée" de la chaleur humaine, aucun gouvernement ne pourrait jamais modifier ce que la nature avait désiré libre, rien, jamais n'aurait l'outrecuidance de réduire la chaleur humaine à moins que ce qu'elle était, même si chacun laissait au secret ses petits enchantements personnels, c'était justement ça, le travail de ces volontaires : faire fructifier les prodigieuses ressources de chacun, un peu partout afin que la morosité ne ronge pas la saison et n'empêche pas, par ailleurs les réformes de se faire. Les volontaires croyaient à une vie meilleure, ils mettaient une ardeur particulière à divertir les gens, ils se disaient indépendants, bien qu'une rumeur courait qu'ils étaient payés en avantages par les gouvernements. Le ministre de la solidarité, lui même, n'avait pas caché au journal de 20H00, qu'il avait commencé à songer à la création d'un "bureau des chaleurs humaines" avec un système de bons, de tickets, et d'emprunts à un pourcentage raisonnable et des campagnes de prévention menées par des psychologues qu'on pourrait associer à des prêtres pourquoi pas à des artistes ? (Il y en a de serviles-...) qui évalueraient le potentiel de chaleur humaine que chacun pourrait offrir à son prochain dans des proportions raisonnables, et mettraient en place des dispositifs ludiques et opérationnels, pour recréer une dynamique dans le tissu social des villes voire des quartiers. Il y aurait aussi un "bureau des débordements" afin d'éviter toute exagération, on avait réfléchi à des quotas, des systèmes d'amendes et à des soins relatifs aux pathologies "débordantes", il y aurait des orientations systématiques encadrées par des assistants au volontariat, qui permettraient de réguler les flux déviants vers des centres spécialisés dans les troubles psycho-affectifs remboursés par la sécurité sociale jusqu'à 57,3 %, cela, doucement, se mettrait en place par la grâce d'un mécénat proposé par les grands noms de l'industrie pharmaceutiques. De même qu'on réfléchissait à "une journée de la chaleur humaine" où chacun pourrait rencontrer son voisin et l'embrasser avec toute l'affection qu'il n'osait lui offrir dans l'année. Les créatifs d'évènementiel inspirés par des performers d'art contemporain, planchaient sur un projet dément : des farandoles géantes de citoyens et de voisins qui iraient d'immeuble en immeuble chercher d'autres voisins, ils partiraient de ville en ville pour que la chaleur humaine se diffuse et dépasse les frontières, il y aurait des feux d'artifice, des ballons, des lancers de radiateurs symboliques, chacun serait encouragé à offrir des fleurs aux passants, ou à inviter à déjeûner chez lui, celui qu'il jugerait plus démuni que lui. On demanderait aux maires dans les villes d'engager des débats sur les places, aux gens de se parler spontanément, on fabriquerait des affiches invitant les consommateurs à se faire mutuellement la conversation dans les magasins, à s'aimer sincérement, on puiserait l'émotion cachée au fond de chacun pour que le monde ne soit plus qu'émouvant. On pensait même organiser un grand "love-in" de fin d'année animé par des vedettes déjà très investies dans le projet, on parlait de Yannis Noanne, Mimile Matry, de Florent Pagnol et peut être de Claudine Fion, on ferait venir Michel Pornaleff et Jean-Lichel Marre, l'entrée ne serait pas donnée, mais grace à cet argent on pourrait fonder prochainement, un "ministère de la chaleur humaine" qui bénéficierait de moyens, grâce aux dons, pour imposer à tous la valeur de chaleur humaine, guidée des professionnels pluralistes et attentionnés. Il y aurait cette idée de "générosité méritée" appuyée par des philosophes qui viendraient en parler à la télé en bidouillant grosso modo Voltaire à partir d'une seule phrase qui serait placardée dans tous les établissements scolaires, les halls de gare, à l'entrée des supermarchés :

"Rien ne se fait sans un peu d'enthousiasme"

 On prévoyait d'ici 2025 de mieux distribuer le trop plein de chaleur humaine de certains à ceux qui en manquaient, ainsi s'acheminerait-on vers un monde plus parfait que le précédent, aussi convivial que porteur d'espoir d'une civilisation plus authentique, plus équitable. La chaleur humaine allant de pair avec le coeur à l'ouvrage, c'est dans la joie de tous et toutes, marchant main dans la main, qu'il fallait que les bonnes choses se fassent.

Photo : La foule du cours Emile Z. vue d'avion (l'avion de certains jours ne vole pas haut mais c'est quand même un avion). Villeurbanne in December © Frb 2010

mardi, 09 mars 2010

Préface

"J'avais entrepris une lutte insensée ! Je combattais la misère avec ma plume."

HONORE DE BALZAC : extr. "Le lys dans la vallée". Editions Gallimard 1972

Si vous avez loupé la période rose, cliquez sur l'image

dèche.JPGJe n'ai plus de train à moudre, je n'ai plus de cuillère à pain. je n'ai plus de sac à pot, Je n'ai plus de barrette de chenille, je n'ai plus d'ourlet à talon, je n'ai plus de seau à lapins, je n'ai plus de casquette de 12, je n'ai plus de rat aux marrons, je n'ai plus de cave à bretelles, je n'ai plus d'éléphant à traire, je n'ai plus de couteau à eau, je n'ai plus de chapeau à sonnette, je n'ai plus d'auto-dépliants, je n'ai plus d'éponge-éponges, je n'ai plus de poil à lire, je n'ai plus de soupière en coton, je n'ai plus de repose-doigts, je n'ai plus de sorbet à la langue, je n'ai plus de brosse à redire, je n'ai plus de pull col mouillé, je n'ai plus de téléportique, je n'ai plus de fusil à trompes, je n'ai plus de corne de truffe, je n'ai plus de tire-jambon, je n'ai plus de pattes à vélo, je n'ai plus de billet de marteau, je n'ai plus de stage d'auto-portrait, je n'ai plus de bouteille de veau, je n'ai plus d'épluche-savon, je n'ai plus de papier à molette, je n'ai plus d'épingle à lunettes, je n'ai plus de lampe à nouilles, je n'ai plus de poumons à huîtres, je n'ai plus de boîte de panthère, je n'ai plus de riz mâconnais, je n'ai plus de tubes de moustiques, je n'ai plus de para-bain, je n'ai plus de ceinture à huile, je n'ai plus de machine à rouler les assiettes, je n'ai plus de feuille d'impasse, je n'ai plus de chirotractateur, je n'ai plus de cornet à capuche, je n'ai plus de sauce yiddish, je n'ai plus de souliers à spirales, je n'ai plus de films de commissions, je n'ai plus de casque à repasser, je n'ai plus de corbeille à mazout, je n'ai plus de poêle à encre, je n'ai plus de taie de marcassin, je n'ai plus de tabac à désosser, je n'ai plus de fer à nombril, je n'ai plus de perce-cornet, je n'ai plus de démoule-vinaigre, je n'ai plus de torche-lèvres, je n'ai plus de sirop pour la truelle, je n'ai plus de grenouille sur ma quenouille, je n'ai plus de dosette pour le dos, je n'ai plus de carte d'entité, je n'ai plus de cache-vessie, je n'ai plus de bonnet à truites, je n'ai plus de piano à moteur, je n'ai plus de vernis à oreilles, je n'ai plus de pense-tomates, je n'ai plus d'allocations-teckel, je n'ai plus de bague à pédale, je n'ai plus de lit-rateau, je n'ai plus de chemise pointue, je n'ai plus d'hippocampe de propre, je n'ai plus de rouleau de vécu, je n'ai plus rien à éventrer, je n'ai plus de polycyrrhose, je n'ai plus de technopsychiatre, je n'ai plus de télépanty, je n'ai plus de protodégivreur, je n'ai plus de grillon-laveur, je n'ai plus de grain d'immunité, je n'ai plus de pantoufles à ressorts, je n'ai plus de verre à manger, je n'ai plus de mou dans ma poche, je n'ai plus de protège-molaire, je n'ai plus d'hydre en poudre, je n'ai plus de gilet à contorsions, je n'ai plus d'escalopes anglaises, je n'ai plus de chauffage mental, je n'ai plus d'épluche-disque... Je n'ai plus qu'un trou dans ma poche, pas même de quoi m'acheter une mouche pour mon dîner.

 

CHICHA LIBRE : Six Pieds sous terre
podcast

 

Photo : Vue en traversant "Vitton la riche", une dame assise sur sa maison, et qui avait peine à relire sa liste de non-commissions. Lyon, Cours Vitton, Mars 2010. © Frb.

lundi, 01 mars 2010

Quelques heures avant la nuit (part III)

Et moi aussi de près je suis sombre et terne
Une brume qui vient d’obscurcir les lanternes
Une main qui tout à coup se pose devant les yeux
Une voûte entre vous et toutes les lumières
Et je m’éloignerai m’illuminant au milieu d’ombres.

GUILLAUME APOLLINAIRE extr : "Cortèges", in " Alcools" 1913. Editions Poésie Gallimard 1971.

Si vous avez loupé le début cliquez gentiment sur l'image.

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J'ai sur le bout de la langue, une litanie de vieux noms d'une époque à reléguer aux croix humbles, monticule terreux d'un cimetière glorifiant le vaillant artisan et le prolétaire. Femmes ou mères courageuses, époux morts à la guerre, artisans italiens, maçons venus de Chantérac, de Gartempe ou de St Maurice la Souterraine. De ceux qui dans la vie ne purent jamais s'éléver ou bien juste un petit peu avec cet unique rêve qui n'était pas celui des parvenus, mais celui des hommes libres, enfin le croyaient ils... Devenir un jour propriétaire. Monsieur Felix Chauferin, Paulo Rossia, Melle Jeanne Manchon, Roger Bagnol, Jean Fourneau, Francine Barbonnier etc... Ceux des anciennes maisons d'un quartier construit de leurs mains. Par presque chance, ils n'auront pas connu cela. Ce qu'on nomme la déliquescence.
Sauf melle Francine Barbonnier, unique rescapée de cette triste banlieue où l'horizon autrefois, dit-on menait jusqu'au seuil de Tête d'Or, les trottoires collent devenus savonneux plus pentus que les pentes. Faux semblants en terre de naufrage. Maintenant que tout se cloaque, avec les meilleures intentions du monde, les anciens bâtiments et bâtisseurs inclus frappés de servitude, voici venir les nouvelles habitations.

"Ce jardin appartint jadis à monsieur Fourneau, homme courageux, honnête, ici, la maison du maçon Chauferin, mort d'une faiblesse pulmonaire dûe aux suites de la deuxième guerre, là, le garage de Paulo Crossia, né en Toscane, qu'on retrouva pendu au fond de son garage, après des années d'égarement, à vider méthodiquement chaque jour son cendrier dans la boîte aux lettres des voisins, pour "se venger" prétendait il, des allemands et des miliciens. Et Marie-Yvonne, à moitié folle, partant au marché à trois heures du matin dans sa robe de chambre de princesse. Et cherchant rue Melzet, la villa de son chéri Armand, projectionniste au Fantasio, mort depuis vingt cinq ans. De Profondis. Ici c'est la mauvaise époque. Qui ne ressemble pas à la légende. Bar des copains chez Jules, cinéma permanent Fantasio; où les plus aguerris , fiers à bras, chefs de bande, pleuraient à chaudes larmes sur "Tant qu'il y aura des hommes"... Cinéma Fantasio, remplacé par cette tour hideuse à peu près aussi vaine que le clip, qui insulte encore Guillotière avec sa face de vacherin gris.

Ici, perpendiculaire à la rue Descartes, tout le long de la piste cyclable, des volets de bois bringueballent, sur le bord des fenêtres quelques géraniums séchés. Cordes à linges et panosses dégoulineuses, porte d'entrée hurlant sur ses gonds désossés. Ici toutes les fleurs crèvent. Pour pouvoir, résister il faut pas mal de clops. Le bureau de tabac, café presse de la grande rue abat à tour de bras la clientèle, millionnaire, morpion, pastis,et des tonnes de tabac. Tandis que la nuit vient, une longue nuit de fête, quelques âmes se promènent, avec des sacs plein à craquer de bouteilles de vodka discount. Toute la nuit, la fête, ils appellent ça comme ça. "Se déchirer la tête", qu'il disent. Ils se la fracassent à vrai dire sur les dalles neuves, imperceptibles, qui délimitent Wilson Parking de ses massifs horticultés, rien à voir avec les charmants jardins de presbytère, de Jacquard, la belle. Du terreau brun qui fait office de cendrier, de chiottes pour chiens et plus souvent  c'est là dedans que l'être humain dégueule, jusqu'à cette église au carré, et fraîchement rénovée. "La Madeleine", qui continue, imperturbable à marier et à enterrer.

A l'enterrement de Jean Fourneau on les vit encercler le cortège, ces matinaux de la piquette, des braves gars à l'oeil torve, au regard de côté comme celui des grives litornes, posés sur le nombril de la Madeleine, partageant encore leur hilarité, devant la fourgonnette, et saluant nos têtes d'enterrements médusées, machos déboulonnés, col large à chemise ouverte, un médaillon qui se respecte avec le prénom, signe du zodiaque au revers. Une bande de vieux coucous en liesse, revenue du zinc pour renifler la sainteté d'une nouvelle charogne, et les voici, matant les jambes de la veuve et les miches d'une jeune fille endeuillée, sur leurs ventres plus ronds, obsédés de queues de pelle, tous coiffés d'une casquette à carreaux posée de travers comme un béret, ils sont là, ils ricanent. Cela était encore une fête bien acceptable, des bitures de poilades quand le saphir du Radiola faisait le manche sur la couronne mortuaire des défunts, réinventant l'Adieu d'Emile d'un Brel, ou "les funérailles d'antan" du père Georges, ils arrosaient le tout avec de la brioche et du Clapion nouveau entassées dans l'arrière boutique de l'épicerie du "Jo Michon"...  Ensuite, la page serait tournée avec les frites vite fait, bien pâles et les packs de steaks hâchés "ouverture facile", de la cafétéria de l'Hyper-Rion de Cusset.

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Tout autour de ces fleurs urbaines, on voit ces vieilles carnes revenues de la pharmacie Brihac, qui marmonnent et glaviottent à propos des problèmes notamment de la maladie, leurs maladies exactement ou celles des autres. La main sur l'abdomen, palpant ce corps, plâtré par une vie de Smecta (qui n'est pas poète grec), ne jurant ça et là que par le générique de l'imodium, le spasfon Lyoc, et le pili-pili de quinoa, flux de mots rabâchant un Vidal allégé, conversations autour des fréquents voyages à la selle et vantant les mérites des fruits et légumes de saison. Une vie entière faite d'abstinences. "Mais, madame ! le docteur a dit c'est pas une maladie, c'est un syndrome"... "Ah ben si le docteur a dit! alors c'est pas pareil !". Et puis, ça cause pendant des heures avec sur le dos un foulard où se multiplent des pommes, des poires et des espèces de scoubidous et puis écrasant chaque oreille elles ont vissé des coeurs énormes pour cacher l'apparence austère d'un sonotone qui siffle parfois l'air d'une vieille cocotte à vapeur. Enfin on voit ça assis d'une poubelle toujours très architecturale constamment connectée aux ballonnements intestinaux de ces créatures blettes, tenant ici, chaque jour de marché, leur permanence d'hypocondrie, dans le fracassage d'engins modernes, style pelleteuses mécaniques...

Je n'ai heureusement aucune compétence pour fourbir les correspondances, ce n'est pas moi qui tire les ficelles, et même en métaphores filées de ces pétarades jouvences nées après la biture de kro; de ces pavillons d'ouvriers, à ce rut de barres fonctionnelles, soudain, la claustrophie vient. Je cherche l'air, Il y a comme une saleté dans l'atmosphère. Hier, encore, au même instant, une disparition, un monde qui faisait pousser au ciel, le corail. L'oeil malin croquant  les jambes d'un Dieu que le temps fît cul de jatte, et lui faisant crier "j'ai mal" aux croisements d'étranges calvaires villageois médiévaux à fortes consonnances celtes. Oui, je cherche désespérement. Le refuge de rieuses mouettes. La roche tendre, léchée par les flots d'une planète nimbée de styx, de cailloux blancs. Un monde qui attrapait les effraies à l'aurore, et croquait les nuances gris vert de la pleine mer avec aisance ou plus simplement une étoile dans la nuit d'hiver. Où êtes vous "Nuage" ? Nuage c'était, il faut le dire, mon goûter quotidien transformé soudainement en fameuse erreur 404. Inévitablement, je pense à cet autre goûter, du côté de Combray :

"Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d’une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine. Mais à l’instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d’extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m’avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse: ou plutôt cette essence n’était pas en moi, elle était moi. J’avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel."

Une bouteille d'encre se répand, sur un verbe paralysé. Du tangage des festivités jusqu'à l'implosion des buvettes.

Voilà que tangue par dessus les graviers le corps brisé d'un couple exsangue et passablement ivre tandis que la bière même pas Gueuse, ni Blanche de Bruges, jusqu'à l'atroce débouchonnée de la vodka Franprix (qui ne connaît rien de la Zubrowska, cette poètesse russe) pousse aux suicides lents. Un hurlement sort encore de ces corps trop bruyants, masculins, féminins, agitant devant les fenêtres, bites et popotins dans des survêtement à poils longs, humains au soir pesant lourds de fornications qui n'arracheront ni cri ni joie, pas même un petit brame de bonne satisfaction. Tandis que le mari, glisse encore cette pogne, dans quelque couinement femelle, et que je passe là, parce qu'il me faut rentrer chez moi (ou ce qu'il en reste) arriver à passer, comme si je n’étais rien, comme ça, sans y penser entre les corps et les canettes.
Le gars crache sur mon petit manteau, puis il me crie "salope !" comme ça, pour rien.

Photos :  Emile Zola, le cours. A l'endroit à l'envers, en été en hiver, on y trouve bien toujours une flaque pour se refaire une beauté (urbaine, bien sûr !). Photographié à Villeurbanne côté Charpennes en Février 2010. © Frb

lundi, 22 juin 2009

La vie sur terre ( part II )

Comme un lundi...

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8H00. Le désert avance bien.

Photo : rue Melzet. Et sans autre légende. Permis de démolir photographié (sans permis de photographier), près de la place Wilson (devenu le parking Wilson, sauf les jours de marché), à Villeurbanne en Avril 2009. © Frb.

samedi, 31 janvier 2009

Après le déluge...

"Aussitôt que l'idée du Déluge se fut rassise, un lièvre s'arrêta dans les sainfoins et les clochettes mouvantes, et dit sa prière à l'arc-en-ciel à travers la toile de l'araignée.
Oh ! les pierres précieuses qui se cachaient, - les fleurs qui regardaient déjà.
Dans la grande rue sale, les étals se dressèrent, et l'on tira les barques vers la mer étagée là-haut comme sur les gravures.
Le sang coula, chez Barbe-Bleue, - aux abattoirs, - dans les cirques, où le sceau de Dieu blêmit les fenêtres. Le sang et le lait coulèrent.
Les castors bâtirent. Les "mazagrans" fumèrent dans les estaminets.
Dans la grande maison de vitres encore ruisselante, les enfants en deuil regardèrent les merveilleuses images. Une porte claqua - et, sur la place du hameau, l'enfant tourna ses bras, compris des girouettes et des coqs des clochers de partout, sous l'éclatante giboulée.
Madame *** établit un piano dans les Alpes. La messe et les premières communions se célébrèrent aux cent mille autels de la cathédrale.
Les caravanes partirent. Et le Splendide Hôtel fut bâti dans le chaos de glaces et de nuit du pôle.
Depuis lors, la Lune entendit les chacals piaulant par les déserts de thym, - et les églogues en sabots grognant dans le verger. Puis, dans la futaie violette, bourgeonnante, Eucharis me dit que c'était le printemps.
- Sourds, étang, - Ecume, roule sur le pont et passe par-dessus les bois ; - draps noirs et orgues, éclairs et tonnerre, - montez et roulez ; - Eaux et tristesses, montez et relevez les Déluges.
Car depuis qu'ils se sont dissipés, - oh, les pierres précieuses s'enfouissant, et les fleurs ouvertes ! - c'est un ennui ! et la Reine Sorcière qui allume sa braise dans le pot de terre, ne voudra jamais nous raconter ce qu'elle sait, et que nous ignorons."

ARTHUR RIMBAUD : Extr: "Après le déluge" in  "Les illuminations" ( ou 54 poèmes composés entre 1873 et 1876)

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Le titre du recueil "Illuminations" fait allusion au sens vieilli du mot "illumination" à prendre ici dans le sens d'enluminures... "Après le déluge" est une fable sur le thème de la révolte. sa morale - ou plutôt son appel est telle une injonction glissée entre les lignes : "Révoltons nous" encore et toujours. Et même si le succès est improbable, cet éveil est de mise, tant que nous n'aurons pas découvert le secret douloureux qui nous empêche d'être heureux. "Après le déluge" est une fable qui repose sur trois histoires enchevêtrées :

1 -L'histoire du Déluge c'est à dire l'Histoire universelle, l'Histoire de la civilisation depuis ses origines telles que la racontent les mythes. Après que la colère de Dieu contre les Hommes eût entraîné la destruction quasi totale de l'ancien monde, la vie recommença comme avant : Superstition, travail, commerce, violence, mystifications artistiques et religieuses, amours mensongères...

2 - l'histoire de la Commune, c'est à dire pour RIMBAUD, l'histoire immédiate, les stéréotypes à valeur allégorique, utilisés par le poète évoquent THIERS, bourreau de la Commune, les grands travaux Haussmanniens, les expéditions coloniales de la III eme république, les affaires qui reprennent, le tourisme de luxe qui refleurit, les débats des milieux littéraires, et les divisions consécutives au "déluge révolutionnaire"...

3- L'histoire personnelle de RIMBAUD, sous une forme stylisée et quelque peu mythique, façonnée de texte en texte : enfance, départ, vagabondage, réinvention de l'Amour, révolte...

Ces trois histoires sont toutes trois des histoires de ruptures entre l'ancien et le nouveau.

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Photos: pierres figées au bord du lac gelé et puis lac en dégel avec, au loin vue sur le parc et les fermes du château en terres brionnaises. Décembre 2008.© Frb.

mardi, 30 septembre 2008

Planète plus ou moins bleue...

terre.jpgOn annonce que dans 17 ans ce sera la fin de l'acier galvanisé, (or nous n'y  pensons pas assez mais sans acier galvanisé point de gratte-ciel, ni de ces majorités de machines qui envahissent le quotidien des êtres humains) c'est programmé, les mines de zinc seront totalement épuisées en 2025 (et comme l'acier galvanisé se plonge dans des bains de zinc en fusion, ceci explique cela), tout juste le temps de construire un petit truc à Dubaï qui devrait culminer à 855m d'altitude et brusquement, on devrait se retrouver au ras des pâquerettes, si toutefois il en reste! On dit aussi que le phénomène des zones marines mortes prend de l'ampleur, et l'on compte aujourd'hui 400 zones côtières dans le monde où la vie marine est asphyxiée par la pollution, le phénomène dit d'eutrophisation est provoqué à la fois par la pollution industrielle et le déversement dans les eaux, de ruissellement des phosphates et des nitrates issus des engrais. On dit encore qu'une île d'immondices plus vaste que le Texas dérive  en ce moment dans l'océan pacifique à mi chemin entre San Francisco et Hawaï. Et qu'en 2050 nous serons 9 milliards sur terre, il faudra donc produire deux fois plus de nourriture qu'actuellement. Tandis qu'actuellement, une partie de la planète fait des régimes à coups de budgets spectaculaires, l'autre partie souffre de malnutrition en silence... Aux USA la moitié des aliments finissent à la poubelle... Et je lis que dans notre région du Rhône, certains habitants sont contaminés aux PCB= polychlorobiphényls CLICK, les rivières sont des dépotoirs. Certains PCB appelés "dioxin-like", présentent les mêmes effets sur l'organisme que la dioxine (neurotoxiques, perturbateurs endocriniens voire cancérogènes). Pendant ce temps là, la France cherche un nouveau site pour enfouir ses déchets radioactifs. et on dit par dessus le marché, qu'il y aura cinq fois plus de voitures à l'horizon 2050. Quant aux forêts primaires des tropiques, elles risquent tout bêtement de disparaître avant même qu'on ait pu achever le recensement de leur riche diversité biologique. En outre, certains experts commençent à s'interroger sur les dangers des ondes émises par les téléphones portables. Wi-Fi et lignes à hautes tensions suscitent la même inquiétude et de nouvelles études s'annoncent... ... Je continue ? ou vous voulez sortir prendre l'air ?

Lien utile:  ICI

jeudi, 17 juillet 2008

Robots

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Dans un futur imaginé, des robots humanoïdes capables de raisonner et de faire presque toutes les tâches propres à l’Homme seraient construits. Pour contrer la peur du « syndrome de Frankenstein » (qui remonte en réalité à la légende du Golem) des créations se retournant contre leur créateur, les robots seraient construits à partir de trois axiomes, appelés Lois de la robotique :

* Première Loi : Un robot ne doit pas porter atteinte à un être humain ni, en restant passif, laisser cet être humain exposé au danger.

* Deuxième Loi : Un robot doit obéir aux ordres donnés par un être humain sauf si de tels ordres entrent en contradiction avec la Première Loi.

* Troisième Loi : Un robot doit chercher à protéger son existence dans la mesure ou cette protection n'entre pas en contradiction avec la Première Loi ou la Deuxième Loi.

Ces lois sont codées au plus profond du cerveau positronique des robots et dans l’œuvre d’Asimov apparaissent deux robots particuliers, R. Daneel Olivaw et R. Giskard Reventlov. Par leurs réflexions, ils arrivent à la conclusion que les Trois Lois sont incomplètes, et que les robots doivent aussi considérer la protection de l’humanité dans son ensemble. Ces robots formulent la Loi Zéro de la robotique ainsi :

* Loi Zéro : Un robot ne peut nuire à l’humanité ni, restant passif, permettre que l’humanité souffre d’un mal.

Les Trois Lois sont donc modifiées ainsi :

* Première Loi : Un robot ne peut porter atteinte à un être humain ni, restant passif, laisser cet être humain exposé au danger, sauf en cas de contradiction avec la Loi Zéro.

* Deuxième Loi : Un robot doit obéir aux ordres donnés par les êtres humains, sauf si de tels ordres sont en contradiction avec la Loi Zéro ou la Première Loi.

* Troisième Loi : Un robot doit protéger son existence dans la mesure où cette protection n’est pas en contradiction avec la Loi Zéro, la Première ou la Deuxième Loi.
Les conséquences de la Loi Zéro sont considérables : elle donne le droit aux robots de s’attaquer à des Hommes, si ces Hommes mettent l’humanité en danger... (Source Wikipédia )
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Pour ceux qui espèrent,un jour domestiquer les nouvelles créatures de notre futur, ils peuvent découvrir ici en supplément, un petit robot-chien très attendrissant, qui ressemble un peu à un cafard mais tellement docile que ça en devient effrayant...  CLICK HERE
Et pour ceux qui voudraient en savoir encore plus sur Isaac ASIMOV et  les lois de la robotique c'est par   ICI

samedi, 05 juillet 2008

Je vous fiche mon billet

societe-de-control.jpg Un nouveau fichier policier institué le 1er Juillet 2008 pourra contenir des données sur les mineurs susceptibles de "porter atteinte à l'ordre public". les mineurs "susceptibles de porter atteinte à l'ordre public" notamment pour violences urbaines pourront désormais être fichés dès l'âge de treize ans. C'est ce que prévoit un nouveau fichier policier dont le décret est paru mardi au journal officiel,ce fichier baptisé "EDVIGE" pour "exploitation documentaire et valorisation de l'information générale " (Radio Moscou internationale  il y a quelques années ,n'aurait pas trouvé meilleure appellation) suscite l'indignation de la gauche,de la ligue des droits de l'Homme, du syndicat de la magistrature, et de celui des éducateurs. Jusqu'à présent, les mineurs pouvaient être fichés mais seulement dans des bases de données recensant les infractions commises. Le fichier ,nouvellement adopté , contiendra, des données comme l'état civil, les adresses physiques, numéros de téléphone, et adresses électroniques ,ainsi que les signes physiques, photographies et comportement, les informations collectées sont notamment "relatives aux individus, groupes ,organisations ,et personnes morales (...) susceptibles de porter atteinte à l'ordre public",des données peuvent être aussi collectées sur les personnes " ayant sollicité , exercé, ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique, social ou religieux significatif". Le décret précise que les données concernant les mineurs de 16 ans (c'est à dire âgés entre 13 et 16 ans) ne peuvent être enregistrés que dans la mesure où ceux ci en raison de leur activité individuelles ou collectives sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public". Il est souligné que ces données, "ne feront l'objet d'aucune interconnexions (...) avec d'autres fichiers". cette évolution vers un fichage des mineurs inquiète la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). la CNIL appelle à"l'adoption de garanties renforçées". Le fichage des mineurs doit selon elle "conserver un caractère exceptionnel et une durée de conservation spécifique". Entendu par la CNIL, le ministère de l'intérieur a justifié ce fichage dès 13 ans par des "mutations affectant la délinquance juvénile" notamment dans des phénomènes dits de "violence urbaine", en faisant valoir que l'âge de 13 ans était celui de la responsabilité pénale . Réponse de la CNIL: cette majorité pénale "ne saurait servir de référence puisque le fichier ne vise qu'à l'information générale du gouvernement". La ligue des droits de l'Homme (LDH) a également dénoncé "une redoutable extension du fichage politico-policier des citoyens". Avec "EDVIGE"dénonce la ligue des droits de l'Homme "il ne s'agit plus de ficher les auteurs d'infractions constatées, mais comme pour la rétention de sûreté de cibler ceux que l'on étiquette d'avance ,comme de futurs délinquants hypothétiques". la LCR de son côté a exigé le retrait du décret et la destruction du fichier "EDVIGE" qu'elle assimile à "un élément de plus dans l'espionnage généralisé de la population". Le syndicat de la magistrature appelle aussi à une mobilisation contre ce fichier "d'inspiration antidémocratique". "Il s'agit aujourd'hui d'informer le gouvernement sur des individus engagés, et non plus de lui permettre d'apprécier une situation politique, économique,ou sociale". ...Sur cette belle conclusion, je vous fiche mon billet, faites en des confettis pour le 14 juillet ... DEVOLUTION HERE CLICK

Merci au journal "LIBERATION" édition du mercredi 02 juillet 2008 pour la source très objective de ses informations

pour autres détails c'est  ICI