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mardi, 28 juin 2011

L'infini

Dame en sandales contemplant des sandales pour dame...

Si vous préférez les sandales "astro-stars". Cliquez dans les petites bulles.dame en  sandales.JPG

Photo : filature dans les quartiers chics, (cours Vitton, sur la rive gauche à Lyon). Il est doux de rêver devant les petites sandales soldées à 77 euros (pièce). Juste un interlude, ou presque rien pour aborder d'un pas léger les premiers jours de Juillet. Mais au calendrier d'ici on traînera encore un peu sur les p(l)ages (déjà surannées) du vieux Juin. Au lieu-dit de l'entretemps mais pas exactement, non plus. (ô mondes infinis !)...

© Frb 2011. 

vendredi, 24 juin 2011

Une vie

 



Solution pratique (plus propre et rapide) :

http://www.galantine.com/upload/referentiel/934/le-ramass...

Lecture pour tous :

http://www.libriszone.com/lib/notices/loana.htm

Science  et  technique (autopublicité) :

 http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/11...

Partie fine  (puisque c'est la saison) : 

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/02/05/le...

Peut-on parler d'intelligence ?

http://www.youtube.com/watch?v=mDntbGRPeEU&feature=pl...

 

Variation  sur  thème   : 

"Les  miettes", c'est  aussi un petit film extra, de Pierre Pinaud, qui  a  obtenu  le César du meilleur court  métrage  en  2009.  L'histoire est celle  d'une  ouvrière qui vit dans sa maison, va travailler dans une usine, fait ses courses dans un commerce, en résumé, ramasse des miettes. Un matin, l’usine qui sert de toile de fond à son univers se déplace et sort du champ. Consternée, la femme tente de la retenir. Les images sont d'une poésie étonnante on pensera  Fritz  Lang,  mais aussi  à Chaplin,  les miettes  étant  la monnaie de  l'univers  du  film,  (vous l'avez bien  compris) il  s'y trouve également une métaphore  (et celle ci  de très loin plus fouillée que la précédente)... Lien  du  film  sous l'image, et visionnage vivement recommandé par la maison : un pur bijou.

 

 

Journal rétro-actif du film by Pierre Pinaud à lire :  ICI

samedi, 11 juin 2011

Préparatifs de départ en vacances

Si tu colles ton oreille sur l'image tu verras la mer.

CLAUDE DEBUSSY

DSCF5362.JPG

Photo  : Plage du pauvre ☐  ou rude épreuve ☐  Cochez  (1)

(1) Si vous ne pouvez pas cocher alors on vous collera les deux d'office.

© Frasby 2011

vendredi, 20 mai 2011

La vie sur terre (part I)

Je ne puis rien dire sur cette matière que tout le monde ne sache aussi bien que moi, pourvu qu'on y veuille penser. C'est pourquoi j'aurais grande envie de n'en rien dire. Mais parce que l'expérience m'apprend que les hommes s'oublient souvent si fort eux-mêmes, qu'ils ne font point de réflexion sur les raisons de ce qui se passe dans leur esprit, je crois que je dois dire ici certaines choses qui peuvent les aider à y réfléchir. J'espère même que ceux qui savent ces choses ne seront pas fâchés de les lire : car encore qu'on ne prenne point de plaisir à entendre parler simplement de ce que l'on sait, on prend toujours quelque plaisir d'entendre parler de ce que l'on sait et de ce que l'on sent tous ensemble.

NICOLAS MALEBRANCHE : trouvé en exergue du petit livre "La vie sur terre" de BAUDOUIN DE BODINAT, Réflexion sur le peu d'avenir que contient le temps où nous sommes", éditions de l'encyclopédie des nuisances, 1996.

Nouveau ! En cliquant sur les 3 images vous pouvez visiter nos appartements-témoins, profitez !vie sur terreF9006.JPG

Le champ est clos, la lumière se tamise. Le voisin du rez-de-chaussée est parti il y a quinze jours, je l'ai su car je ne voyais plus son chat gratter à ma porte. Lui, le voisin, je l'avais croisé, un peu, il avait l'air anxieux. En vérité, il allait mal. Il voulait m'inviter à boire un verre chez lui, j'ai dit "non, pas aujourd'hui, je n'ai pas le temps, mais quand tu veux, demain, plus tard", j'avais un rendez-vous qui me paraissait urgent. Il y eut des imprévus, je suis partie, je me suis intéressée à des gens si noyés de préoccupations, qu'ils n'avaient plus la place, ils racontaient toujours leurs préoccupations et il fallait toujours les écouter, les écouter, et tout ça se dévidait à perte, désarmant nos identités, sans résonance, sans même une bribe d'une empathie vaguement bétazoïde, ce vide se déployant à l'infini développait aussi le sentiment mortel d'une déperdition de chaleur humaine et cette idée de temps perdu entretenait une secrète colère qui bientôt ne serait plus contenue. Etait-ce donc "ça" que j'avais de si urgent à faire ? Le voisin, personne ne l'aura vu déménager, on ne sait pas s'il a trouvé mieux, s'il fût malade - a été expulsé - on sait qu'il n'avait plus d'argent, qu'il ne pouvait plus payer l'électricité et les lettres de rappels qu'il n'ouvrait plus, s'entassaient sous sa porte, plus de quoi poursuivre ses projets, il avait peur des huissiers, de la facture du dentiste et d'une espèce d'assistante sociale très insistante qui désirait absolument l'aider à se "reclasser", il était paniqué à l'idée d'être aidé par une assistante. Il me racontait ces choses graves avec légéreté, il n'aurait jamais supporté que je prenne ses problèmes au sérieux, au final il rebondissait, on en riait, on s'aimait bien, une complicité sans fadaises, pas la peine d'en faire tout un foin.

Je n'ai pas vraiment deviné qu'il avait atteint des limites. Le monde est ainsi fait, les gens meurent (c'est symbolique, c'est réel encore banal à dire) quasiment sur notre palier, nous ne l'apprenons qu'après. Ensuite nous affectons cet air (tellement trop) désolé, et déclarons (solennellement) "si j'avais su", si occupés que nous étions à ceci et cela, nous voici consternés (tant d'indifférence entre humains, n'est ce pas honteux, messieurs dames ?), pleins de bonne volonté, pressés d'aider, de consoler, nos discours sont si généreux, on donnerait volontiers sa chemise, on la donnerait sans hésiter, toujours après. Ruinés à l'insu de notre plein gré par la cruauté environnementale, comment aurions nous pu savoir ? Mais on n'en fera pas non plus tout un foin.

Il faut dire que mon voisin, ne boudait pas sa solitude pour lui, elle était sans fatalité, sa vie alternait entre des fêtes plutôt joyeuses et sa "bonne solitude", quand elle était trop rude, il n'en divulguait rien, sachant combien nous avions tous du mal à vivre, trop fiers pour exhiber nos plaintes, nous trouvions encore nos malheurs relatifs, par rapport à deux ou trois autres de notre connaissance, qui n'avaient pas d'endroit pour vivre. Ces derniers temps mon voisin ne faisait plus rien, d'ailleurs je ne le croisais plus, je le croyais en vacances. Hier des gens sont venus visiter, "ça fera un beau loft", ils ont dit, j'étais en train de relever ma boîte aux lettres, quelques factures, les prospectus de Quick Planet, Pizza vit', CroQ' MinuT', Go-Footing, les petits flyers du marabout Ali Sekou, le Top vacances et la publicité agressive de l'agence immobilière Simone Ballaud qui veut absolument acheter et vendre notre quartier. Simone Ballaud, experte des grands ensembles coordonnés : "Vos biens nous intéressent" qu'elle m'écrit. Chaque jour c'est la même chose elle veut mes biens, Simone Ballaud. Toujours elle me colle sa photo, un concentré de marketing, émergeant d'un corsage orné d'un collier de perles roses, prête à tout Simone Ballaud et même que ça se devine, à ce sourire qui sourit trop. Si je sympathisais avec elle, je suis sûre qu'elle me mangerait la laine sur le dos (ou le peu qu'il en reste). En gros elle a écrit : "Contactez moi", elle met sa signature sur la photo et tous les jours elle me l'envoie. Simone Ballaud, mauvaise copine de boîte.

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Eux, les nouveaux, je les entends parler, à l'employé, (Patrick Montier il s'appelle, le fils spirituel), il leur sourit, il a appris dans une école spéciale. Il a des dents blanches comme celles des animateurs des émissions du genre "Combien ça coûte ?". Il commence ses phrases comme les hommes politiques avant de parler il dit : "Ecoutez-moi !". Coaché par trente ans de télévision française, il se frotte les mains, devant ses clients et c'est machinalement, il leur répète deux ou trois fois "Ne tardez pas trop c'est un produit qui intéresse beaucoup de futurs propriétaires". Un produit ? Cet endroit jadis à la renverse, ce lieu qui résonne encore de toutes les musiques fusionnées quelque part entre Saïd Chraibi et Neil Young. Le futur loft est hors de prix et la rue très bruyante, ils n'ont pas vu sur la mezzanine repeinte vite fait, (blanc laqué impeccable), que les murs suintent d'humidité. Les visites ont lieu entre midi et deux, il est malin l'autre, avec ses dents blanches, entre midi et deux il n'y a pas de bruit dans le quartier. Le temps s'arrête. Les gens, ils mangent.

Eux, "les futurs", ils ont prévu de grands travaux, ils feront un salon à la place de l'atelier, ils ont pris des mesures contre un mur qui ne leur semble pas large, ils mesurent pour savoir si le canapé - leur canapé en cuir - pourrait aller à cet endroit. Ils ont visité la cabane, là où dormait un chat approximatif (celui que chaque été mon voisin prenait en vacances et qui s'appelait "Maurice") ils vont détruire la cabane "Maurice", ils ont dit. "On fera une terrasse", elle a rajouté "je pourrais mettre mes plantes" elle a souri à son mari à l'idée qu'il y avait même la place pour installer une table ronde avec un parasol, et pourquoi pas d'ajouter une pergola, un barbecue, même des fauteuils-relax ! un hamac entre les deux arbres, une cage avec des perroquets. Le mari a souri. Ensuite ils ont demandé à l'agent si l'immeuble était équipé de fibre optique. L'agent il a dit "oui, ça marche très bien internet ici, je m'en porte garant" il m'a regardée avec son sourire carnassier : "demandez à cette résidente. Ca marche bien ! hein ?" qu'il me disait, j'ai répondu (avec la voix d'Arletty) "j'sais pas, j'ai pas la fibre optique". La dame a dit "Et les boutiques ? Pour faire ses courses c'est pas trop compliqué ?" Elle me parlait à moi. J'ai dit (avec la voix de Jean Gabin): "oh vous savez les boutiques, c'est jamais compliqué", elle a rajouté "Non, non je voulais vous demander est ce qu' il y a des supermarchés dans le quartier ?" j'ai dit (avec la voix de Danielle Gilbert) : "oui, bien sûr ! vous avez un Super Casino à deux pas, un Franprix sur la place en face du Crédit agricole, un Champion au bout de la rue, le Carrefour à deux stations de métro, un Lidl en face du gymnasium, un Leader Price vers l'école de musique, un Super U de l'autre côté, le Monoprix à 50 mètres d'Intersport, un autre Franprix cours Vitton, un Schlecker  à Wilson et un Spar". L'agent me souriait pour peu il m'aurait presque donné une petite commission. J'eus honte de moi. Elle avait l'air déçue, sur sa faim, elle a dit : "Alors ... Y'a pas d'Intermarché ? Pas de Auchan ? Pas de Leclerc ?"... J'ai dit, (quasi sans voix) : "Non, pas à ma connaissance".

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Puis ce fût le silence. J'ai jeté la lettre et la photo de Simone Ballaud à la poubelle (la poubelle des papiers à recycler pour sauver la planète) sur laquelle l'agent avait posé sa pochette en cuir avec tous ses dossiers. "J'ai dit pardon, je vous prie de bien vouloir m'excuser, il faut que je jette une cochonnerie dans la poubelle", il a vu sa collègue disparaître sous son nez. Dans quelques années se serait lui, le successeur, "Votre bien nous interesse", "Patrick Montier pour vous servir". Le plus grand espoir de Simone Ballaud. Fer de lance, un homme très ambitieux, capable lui aussi de bouffer la laine sur tous les dos, y compris sur celui de Simone Ballaud (ce sera même la première sur qui... Enfin bref).

Le champ est clos, la lumière se tamise. Je vais aller lire à la terrasse d'une buvette en bord de Saône en attendant le 3 Mai (oui, je sais, c'est déjà demain), la réouverture du café le plus extra de Lyon, sous les arbres et pas loin des ponts, le Mondrian, endroit intemporel, crée par l'artiste cuisinier, notre ami Michel Piet (et ses acolytes), nous y mojiterons le mois de Juin, quand la clique de Paris, (et Bonnières) ramènera à vélo, le bon vent de l'Espagne. Et mon voisin peut-être qu'on le retrouvera cet été par hasard dans la ville de Madame de Sévigné près de Vitré où il voulait aller vivre, finir sa vie, (il disait), et pourquoi pas mourir ? Il voulait aussi vivre sur la banquise ou au 221 B de la Baker Street  à Londres, (une adresse qui n'existe pas), ça dépendait du temps, du vent. Hier, j'ai appris que mon voisin n'était pas mort, il a écrit de Londres. Il va soit disant bien et habite réellement au 221B de la Baker Street.

L'autre elle hésite. "Y'a pas d'Intermarché, ça c'est très embêtant". Son mari il lui dit "Ma chérie, y'a Carrefour c'est pareil". Elle soutient que "Non, c'est pas du tout pareil". Patrick Montier ronge son frein il sourit. Les affaires sont les affaires. Grosse commission. J'ouvre "La vie sur la terre" :

J'ai pensé en outre ceci, que l'indifférence minérale de ces formes abstraites qui nous entourent, leur sévère fonctionnalité, produisent un composé de sécheresse et de méchanceté qui nous signifie nettement quelque chose : la vie y est un désordre. L'impression que l'on ressent est la même que nous fait un appartement neuf et meublé par un futuriste : on se voit transformé en animal humain ; comme on est en réalité au regard de l'économie toute-puissante. Il y en a donc pour déclarer aimer cela, pour s'exalter d'être au nombre des animaux domestiques de ce maître-là. 

Sans doute n'avons-nous à connaître, le plus souvent, que les bâtisses mécanographiées dont la société de masse a recouvert le globe, les embouteillages, les plages salies par la mer, les nourritures décevantes une fois dépouillées de leur emballage, les soins approximatifs de la médecine bureaucratique. Mais peu importe.

Liens : Si vous avez loupé le début, ci-joint un résumé des épisodes précédents ("La vie sur terre" (Part II, et III) :

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/06/22/co...

http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/06/28/la...

Photo : Un quartier rénové, immeubles grands standing ils ont sûrement un nom genre résidence "Les Eurydice" ou "Asphodèles", bouchant la vue hier imprenable d'un appartement où il paraît qu'avant, on voyait de la fenêtre, des petits pavillons ouvriers, avec des choux dans les jardins mais je n'ai pas connu ce temps, j'ai toujours vu ce quartier piqué de grues. Jamais ne cessent ces constructions. Les bâtiments choisis ne manqueront pas de design, pour ceux qui aiment disons, la pureté des lignes... Photographiés à Villeurbanne au niveau du métro République.

Photos :© Frb 2011

mercredi, 18 mai 2011

Obscuritudes

Nous savons pourtant le prix de la douleur
les ailes de l’oubli et les forages infinis
à fleur de vie
les paroles qui n’arrivent à se saisir des faits
à peine pour s’en servir pour rire

TRISTAN TZARA, extr. "Sur le chemin des étoiles de mer" dédié à Frederico Garcia Lorca.

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"Vous êtes menacé de tomber victime d'une ruse infernale"

Achille traîne à son char le corps inanimé d'Hector. Pénélope est devenue à force, cet oiseau qui fait de la couture. L'agriculteur repose sous le talisman de la lune.

"Malédiction"

Une famille pleure. La carte est triste pour le fort comme pour le faible. Celui qui triomphait hier est aujourd'hui abattu. Celui qui est aujourd'hui à terre ne sait s'il se relèvera demain. L'artiste introduit de la matière brute dans l'oeuf philosophique. La transmutation n'a pas eu lieu. Une jeune fille refuse les avances d'un ouvrier métallurgiste. Elle se croit aimée d'un homme riche, elle compte sur ses promesses. Il l'oublie. Elle part en Amérique, elle le revoit, puis on la perd de vue. On se réjouit d'une maternité sous des roses bâtardes. L'artiste vendra ses propres faux pour payer la note d'électricité. Le Grand Oeuvre est remis à plus tard. Une épouse bafouée passe dans un trou de souris juste au milieu d'un disque noir.

"Possible tromperie."

Des énergies puissantes sont mobilisées en vue d'un travail constructif. Un cheval à bascule entre sous la porte de Scée, suivi de troupes. L'évènement s'annonce désastreux. Des hommes à cheval tentent de voler le Talisman de la lune. Heureuse fatalité.

"Vous souffrirez de l'effet d'une discorde qui n'est point de votre faute."

Un homme tue sa famille. On le croise dans le sud de la France avec une femme, mangeant des glaces à la vanille sur une plage. Le talisman de la lune peut vous sauver par le cercle de magie blanche dont l'effacement s'effectue grâce à un balai. Le Centaure ne veut pas mourir ; la flêche qui l'a blessé est à côté de lui, Pénélope reprisera son passé avec du fil de fer, il ne meurt pas, il est métamorphosé en lapin et peaufine des enluminures dans la nuit.

"Mollesses et ingratitudes dominent."

Avec de grandes connaissances, nous resterons sans avenir. Un homme à tête grise, un bracelet à la cheville se heurte à des entraves insurmontables. Un chasseur sans gibier. Un ami joue au frère. C'est un personnage de malheur, nul succès ne peut l'atteindre. Le jour vient. Le même journal est distribué à tout le monde. Cupidon décochera quelques flêches avec plus ou moins de force dès qu'il en recevra le signal. Une femme recouvre la ville du regard bleu de l'amour insensé, visage de la douleur, garder l'honneur est favorable. Le monstre typhonien armé d'un trident renverse une région dans un pays très loin. Une manivelle donne le branle. On parle du retour d'un nuage de cendres. Etc...

  

Photo : Un crépuscule sur "Le répit de l'Agriculteur", sculpture créee par l'artiste Jules Pandariès (1862-1933), photographiée un soir d'orage, entre le cours Emile Zola et l'Avenue Henri Barbusse, dans le quartier des Gratte Ciel à Villeurbanne.

 

Photo : © Frb 2011.

samedi, 30 avril 2011

Retenue

La vérité ne peut presque jamais se dire quand il s'agit d'êtres humains, car elle ne peut engendrer que douleur, tristesse et destruction.

ERNESTO SABATO : (24 Juin 1911- 30 Avril 2011) extr."Alejandra" (1961), éditions du Seuil (Point) 1982.

Pour voler plus haut et plus loin. Il suffit de bousculer un peu les oiseauxcerfs volants1723.JPG.

Toutes ces choses qu'on devine, brûlent la langue. Des chapes redessinent nos contours, toutes ces gommes au bout des crayons, un cratère visité de lunes, romancées au brouillon, qui précèdent un livre. On l'écrirait volontiers, si seulement...

Devant les choses de la nature, l'âme honnête, exhibant toujours ce qu'elle n'a pas, louera la beauté des jonquilles, les clochettes d'Avril, fétus de paille sur un fleuve innocent cerné de passerelles fragiles. On pleure aussi de temps en temps devant les kiosques à musique. Tant de choses qui ne sont plus à dire. Le contenu sous la gaze, étoufferait mais visiblement on se dompte. Des écrans diminuent la part humaine en la multipliant, misent par défaut l'aventure aux calculs, j'ai mille amis et des miroirs sans tain dont on sait qu'ils ne réfléchissent qu'une partie de la lumière.

Un rayon incident en deux flux lumineux, l'un réfléchi, l'autre réfracté (la partie diffusée, de plus faible quantité étant négligeable). (1)

J'ajouterai si j'avais le courage, un peu de vérité à tout ça, pour finir, j'unirai les faisceaux. J'écrirai une page. Je verserai l'encre dessus, l'encre coulerait à flots. Si j'avais le courage, au final, je pourrais tout dire. Je pourrais. Mais j'ai peur du courage. Alors, non.

Je m'allongerai dans un désert, peuplé de téléscopes qui détectent les rayons X émis par les étoiles pour essayer de me défaire d'à peu près tout. Une illusion ne crée pas un royaume. Demi-tour donc, jusqu'aux boulevards peuplés de dames, près desquelles je me fonds, elles passeront sans bruit aux salons d'essayage, marcheront par mégarde sur des brides de lingeries fines, elles tenteront d'assortir leurs visages aux guipures piquées d'argyronètes. J'ois le bruissement des étoffes dans la musique d'ameublement. J'ois la chute d'un porte manteau et le son du métal éclaté. Je vois les bris irréparables. Les carrelages blancs imitaient le marbre, je soulève, j'y découvre un coeur noir griffé d'ongles méchants. Un mystère génétique fait monter le mercure. Ce brassement personnel, historique, retenu, et la chape, on aura oublié de la détruire. Tout est net dans mes souvenirs. Ce que j'ai vu est sous la peau. Ce qu'on peut lire entre les lignes modifie le cerveau. Les manuscrits penchés fascinent, les biffures, et les signatures au dos des cartes voraces, des faire-parts à crédit en accordéon dans des poches plaquées impeccables. Pris sous ce joug quelque chose d'inhumain attire. C'est toujours des façons, d'infinies précautions, ces cache-coeurs ne cachent plus rien qu'un penchant somptueux au désir. Et la nuit éclaire nos cachettes. Ogres bavards sous les jupes, la solitude, mâle ou femelle portant l'infâmie à nos lèvres, nous sommes tendres mais nos promesses ne tiennent pas debout. L'idée du cosmos nous délivre. Après quoi on n'irait pas se perdre en confidences, à moins d'être complètement idiot, sûrs d'oublier ce qui doit suivre. L'Amour est un silence. Oui mais, comment en être sûr ? Un silence serait beau. Impossible d'être sûr. Alors, non.

Tant de choses ne se disent, un sourire mis en gage pour la vie domestique. Au dedans une pluie de satellites, la sécurité à ton monde, et des amortisseurs contre l'impatience, la rage plâtrée de Gaviscon, les vies sécables. Un cachet, un verre d'eau, pour l'oubli des images d'hier. Tous les absents nous rongent. Encre et Brandy, soirs d'Absolute, des amuse-gueule sur un plateau, les solutions savantes, pas un phénomène émouvant n'arracherait un verbe à la foule, pas même une réaction ? On voudrait réagir. On voudrait on voudrait. Et puis, non.

J'ois l'aubaine d'une conversation et le printemps chasse l'hiver aux corps à corps mal défendus, l'orgueil jouant avec le temps et malgré l'abandon, aussi fou que la rage contre laquelle nous sommes vaccinés, tous. Les grandes destinations reviennent plus inexplorées qu'autrefois. Je t'encombre de mon air affable, entre nous c'est amène. Ces politesses couvent un malaise dont on ne parle pas. Il y a trop de divertissements pour les rois et les reines, pas assez de royaumes, nous broutons comme autant de bêtes reluquant le ciel insolent. Nous visons le cosmos qui a un oeil partout nous sommes gourds mais sûrs de nos aises. Amoindris, à bout de songes, intenables, avec des joies torpides, nous suçons dans la nuit les bulbes d'un narcisse conçu pour tous. Le jour vient, rien ne change. Nous sommes si aplatis qu'à force on serait craintif de tout. Prudence apaise qui cache nos faces, lisse le pli vagabond, cloue le lierre aux façades. Prudent, on tournera la page. On cracherait bien sur les visages. Mais avant on racontera tout. Tout ce qu'on sait, ce qu'on a vu, ce qu'on sait que tu sais qu'on sait tous, ce qu'on devine, on balancera le paquet. La geôle qui fait poids, l'huis au gond de la grille, nos allégeances. Un pavé à la face du monde, on crachera sur tous les visages s'il nous plaît, on le fera. On fera ce qui nous plaît, ce qui urge on va le faire. Il est temps. On ira dans la rue, la bouche pleine de salive, la première tête venue, la première tête qui ne nous revient pas, la première créature, on lui crachera à la figure. On crachera sur ceux à qui on a à dire, depuis longtemps. On leur dira. On crachera ? Vous êtes sûrs ? Ca serait bon, oui. Mais non.

Nota (1) : La définition du "Miroir sans tain" est extraite du Wiki

Photo :  Toujours plus haut ? On pourrait monter haut. Bien plus haut, ça c'est sûr, mais si on tombait... Si on tombait ? Alors c'est non. Le dire avec les mouettes. Elles volent bas, côté Saône, photographiées Quai Saint Antoine sur la Presqu'île à Lyon. © Frb 2011.

jeudi, 28 avril 2011

Les printanières...

Sur une musique très courte.

Si vous avez loupé l'épisode précédent il vous suffit de cliquer sur la première image.printemps9821.JPG

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Photos : Les Printanières sont de retour, elles se baladent entre Presqu'île, et colline (qui fait travailler les maris, c'est bien normal), photographiées par un très bel après-midi d'Avril à Lyon comme en été.

© Frb 2011.

mardi, 15 mars 2011

Fallen angel

- A quoi passez-vous votre temps ?
- Le plus clair de mon temps, dit Colin, je le passe à l'obscurcir.
- Pourquoi ? demanda plus bas le directeur.
- Parce que la lumière me gène, dit Colin.

 BORIS VIAN in "L'écume des jours",éditions, le livre de poche, 1987

Colline0129.JPGPetit plan d'une ville à saisir, dans les motifs des portails de la rue Denfer, sur la mosaïque d'une façade qui jouxte une villa de taille idéale près du jardin de l'ancien presbytère ; ici, se trouve un homme penché, qui vomit sur les escaliers, plus loin, j'aperçois la chevelure blonde d'une femme qui s'éloigne. Ensuite je ne vois plus que des chevilles, entre les ronces enchevêtrées, de longues tiges bordées d'épines cachées par l'ombre. C'est la fin du jour, c'est la nuit. Loin d'une terrasse où l'on s'allume, sur une place, un couple se dispute  ; deux silhouette longilignes appuyées contre la portière d'une 206. Une planète engloutie, des millions de figures embarrassées de songes, un château Margaux pour l'oubli, des hommes penchés sur des figures, des fugues ignorées et des êtres qui cherchent leur moitié parmi les détritus. On voit même parfois le courage revenir grâce aux bitures, et le silence nous garde de ces forces actives qui nous auront nommés misérables. Tourbillon, escalade, chute cernée d'engrenages. Le vieux terme maritime dit : "lovage en biture" qui signifie : "ranger un bout ou une chaîne en formant des huit pour éviter la formation de tours", il évoque dit-on peut-être la marche de l’homme ivre. Des bitures pour les peines, les mêmes, pour le courage, qui commencent dans la fête, se terminent en sucettes en citrate et charbon. On rentre à la maison. L'homme s'est relevé, il frappe du poing contre l'escalier il crie "conasse !". La femme revient sur ses pas, vite. Elle trotte et le bruit de ses talons joue sa petite réverbération contre les murs d'une cour d'école. Elle parle à l'homme. Lui, il se noie et continue de taper du poing violemment sur le sol. J'entends un peu la femme qui essaie de discuter. "Je sais pas pourquoi  les femmes, elles veulent toujours discuter", lui il pense qu'elles sont folles ou chiantes le plus souvent, c'est les deux. Elle lui dit gentiment "T'avais qu'à..." "T'avais qu'à pas..." Puis des injures, "Regarde moi ce con !" "T'es vraiment qu'une pauvre merde, Christian... ". Elle s'éloigne, il essaie de répondre les yeux fixés sur son vomi, il répond il ne sait plus à qui, il balbutie : "tu comprends rien" mais trop loin d'elle. Elle ne peut plus entendre. "Elles sont comme ça les femmes elles veulent, les femmes, elles veulent, toujours discuter. Elles veulent on ne sait pas quoi. Est ce qu'elles mêmes elles le savent ?". Discuter, il y a un temps pour ça. Un temps qui passe et après, discuter, elles veulent pas. Le bitume claque encore sur le passage d'un groupe de gens qui cherchent un restaurant, On voit les bottines à la mode, à petits talons en daim, des écharpes à motifs indiens, des blazers anglais, des parkas, des dizaines de parkas achetés au stock américain, hors de ce défilé de mode mi-hiver, mi-printemps on sent Mai et ses fêtes enrober les heures ternes et les premiers bourgeons minuscules, au bout de branches sèches comme soudées sur des arbres morts et ces foules cet aplomb de ces galops qui claquent, un écho de talon qui s'approche puis s'éloigne, etc.. L'homme s'effraie de l'état des lieux, il a vomi sur sa cravate, il a frappé, il a pleuré; maintenant il pue; quelqu'un dit "ça pue la vinasse". Agenouillé devant la porte, face à la rue, les yeux fuyant un halo de lune masquée par un nuage, les mains tendues vers l'escalier, il y a de la beauté dans la forme de ses mains qui ne savent plus où s'aggripper. La femme est partie de l'autre côté, disparue dans l'allée d'un n°8, parallèle à la rue d'Ivry.

Au matin l'homme se réveille, sur le même escalier, il aura dormi habillé sur des dalles de l'église St Augustin. St Valentin ? Il ne sait plus. L'aube fera resplendir ailleurs des corps absents dans d'autres chambres. La femme, elle se réveille aussi, au N°8 sous une grande couette à fleurs hybrides jaunes et violettes hideuses près d'un corps qu'elle ne connait pas mais suivant le bout de ses doigts elle en connaît, dira-t-elle "les grandes lignes". Elle pense : "les grandes lignes c'est n'importe quoi !. Elle est libre, elle l'a si souvent dit, "libre et prête à n'importe quoi", mais surtout, pas, "non, quand même pas !" elle ne va pas prendre son café avec cet homme ni beau ni laid. Elle prendra le café quand même avec cet homme, ni beau, ni rien, au caractère juste agréable, pour la forme, dont la nuque sent la savonnette, le senbon de chez Séphora, un truc de goût, genre "Eau sauvage", ou "Kouros" un parfum qui sent l'homme, qui pue sur le tissu la glande de chevrotain, avec un petit fond de pisse de chat. Elle jette un oeil sur son portable. Elle cherche Christian, elle ne voit pas. L'autre, il est dans la salle de bain, il arrange sa coiffure en brosse avec son peigne, il reste des heures, elle pense "Est ce qu'il aurait pas plus vite fait d'arranger sa coiffure en brosse avec ses mains ?". Il va dans le salon, glisse un cd dans un bidule, un vieux tube de Moby, elle pense "Merde ! Moby, il manquait plus que Moby!". Elle regarde encore son portable, elle a très chaud aux mains, elle vérifie les numéros, Christian encore. Christian n'a pas laissé de message, pas d'appel de Christian, "pourquoi Christian il l'appelle pas ?". Elle pense qu'il ne doit pas aller bien que peut être il aura besoin d'elle. ? Puis elle pense le contraire : "ce connard n'en vaut pas la peine". L'autre, il revient, avec sa coupe en brosse, des épis impeccables aplatis par le Petrol Hahn, du senbon sur les mains, il lui caresse les seins, elle ne trouve ça ni mal ni bien, elle se dit "après tout, pourquoi pas ? A mon âge, il faut que j'en profite avant que plus personne ne veuille de moi, c'est vrai, quoi ! qu'est ce que j'ai à perdre ?".

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La nuit croise le jour à l'heure où tout vient à nouveau, comme hier, comme un premier jour après une première nuit d'amour qui ressemble à une nuit ordinaire. Il y a d'abord ceux des labeurs matinaux puis une foule qui dynamise les petits couloirs de la ficelle. Station Croix-Rousse, Hénon, Caluire et Cuire. Le soleil éclaire le caillou sans éclat tel un diamant brut qui culmine à 254 mètres sur un échantillon de soie, sous l'auguste des étourneaux font un de ces baroufs, il y a des forains sous les arbres qui transportent des cageots. Il y a des taxis qui patientent devant la marbrerie, de La rue de La Salle. L'homme aura attendu longtemps en longeant le parc à vélos (vélo'v qu'ils nous disent, traduction intégrale = vélos d'amour) entre le Clos Jouve et le "café Jutard", il commence sa journée comme ça, avec deux ou trois verres de blanc. Et de quatre !  "Et hop ! un dernier pour la route ! Partout il voit des sosies de blondes qui font claquer les mêmes talons c'est la charge d'une cavalerie lourde, défilé de guerrières sur Mars. Partout il entend des femmes blondes lui dire "t'es vraiment qu'une pauvre merde, Christian"... Partout il voit des brunes en body lamé qui se couchent sur sa peau, lui chuchotent à l'oreille "Que tu es beau, Christian !". Au bout du cinquième verre il finit par y croire vraiment, il mate dans la rue les brunes et les blondes et les rousses moins souvent . Elles disparaissent, toutes de la même façon, dans des coins de rues, dans des traboules. C'est une malédiction, dont il n'a qu'une image, ces femmes qui le pulvérisent dans des coins, à coups de bombe. La seule image qui le console c'est quand il pense à elle; avant hier, il se souvient dans la petite cuisine en soupente, d'un petit appartement rue de l'Alma elle lavait la vaisselle il l'essuyait et ils causaient d'un peu de tout à peine, sans se prendre le chou, et c'était bien comme ça. Il cherche dans sa poche, le portable, où il est ? Et ses clefs ? Il faudrait qu'il refasse tout le trajet d'hier, alors qu'il ignore d'où il vient, qu'il aille au commissariat le plus proche faire une déclaration de vol, de perte, il va entre les portes de ces longs corridors et son oreille se colle sur la vitre d'entrée noire du nouveau glacier où gît la dépouille de l'ancien Lutin Bleu, le magasin des petits enfants en pyjama devenus méchants, à force. Une danse gourde porte son corps sur des passés sans gloire, des jeux de mains, qui ont fondu comme neige ou vogue, pendant que des cristaux multicolores éparpillent sa tête sur un comptoir doux c'est un traversin. Il tente dans un demi-sommeil, de reconstituer la trame des évènements, qu'il reproduit sans cesse à l'identique quelle que soit la personne rencontrée. Qu'a t-il vécu avant pour que tous ces visages au final n'en forment plus qu'un ? Le plus inaccessible, toujours le plus absent. Dans les miroirs du bar il voit son reflet prenant des airs d'homme de demain, ses gestes de chevalier d'avant, au temps de la grande époque, quand tous ses combats étaient nobles, ses étreintes sûres et fortes, toute cause valait qu'il risque gros. Les filles disaient: "Christian il est pas comme les autres", ils s'aimaient et après ils se quittaient copain-copain, il n'y avait pas de drame, pas de biture, pas de vomi sur les cravates. Et Christian, il est là, comme les autres, au milieu d'une bande de gueulards, des poivrots, des vantards, des grands minces avec des gros bides, des petits rougeauds en salopette, qui rigolent à propos de rien, ils sont tous là et ils rigolent, à charrier la serveuse, ses lolos et son popotin. Lui, il retrouve ces vieilles gueules du vieux monde, sa sale gueule qui ne s'accorde pas avec ce qu'il est, ce qu'il voudrait montrer, nul ne le voit. Il aimerait bien appeler sa blonde au téléphone il se dit (comme ces gens qui se disent "tu" à eux mêmes), il se dit "ça suffit, Christian, en ce moment tu déconnes, t'as assez déconné, maintenant tu rentres chez toi", la serveuse elle l'observe elle se dit "celui là, il est pas comme les autres", elle le tient déjà sous sa robe, dans ses bras,  sous son aile et dans son lit, tu crois ? Moins rougeaud moins poivrot que les autres, elle se dit du  pauvre gars qu'elle pourrait s'en occuper "bien", elle lui demande "Et le joli monsieur, il est tout triste, il va bien reprendre une petite rincette ? Je vous en remets un pareil ?" Il pense à cette chanson de Nino Ferrer "Rondeau". Il se dit que cette chanson c'est toute sa vie ou c'est la vie de tout le monde. Au fond, les chansons et la vie, il s'en fout. Il émet un grognement qui veut dire "va pour une petite rincette". Il se dit, "après tout. Pourquoi pas ? Un peu plus, un peu moins..."

  

Photos : Passage clouté sur le boulevard plus un mot glissant comme la soie. Colline comme ailleurs. Entre la grande artère et petite rue d'Alma. © Frb 2010.

lundi, 14 mars 2011

Dans l'épaisseur des images, on ne sait où. (part 1)

 Si l'on ne trouve pas surnaturel l'ordinaire, à quoi bon poursuivre ?

CHARLES ALBERT CINGRIA

image_0271.JPGCes derniers jours sont ralentis par des évènements incompréhensibles. Pour  tenter de m'en dessaisir, je traîne dans une bibliothèque qui ressemble à une salle de bain avec des serviettes en papiers impeccables, toutes reliées, rangées par ordre alphabétique de "Crime et Châtiment" à "l'Ombilic des limbes", pas une page de travers, pas même une trace de doigt, nul dépôt d'encre, ni bavure, ni poussière, ne troubleront ce papier blanc, jauni parfois, à peine, aux polices raffinées dissimulant par la grâce d'un travail consciencieux, la sueur ou les drames personnels des auteurs tous pareils alignés.

Ici, je traine encore des heures à l'entresol pas loin, dans une cafeteria qui ressemble encore à une salle de bain, conçue pour tous, d'un goût moyen, au décor sans  aspérité. Des familles, des collègues de bureau, ou des couples, du genre illégitimes s'y retrouvent et déjeunent ensemble. "Ensemble" est un mot impossible. Juste un éclat. Je poursuis mon vol à l'étal dans cet espace climatisé qui m'offre toutes sortes de livres, dont certains à jamais prisonniers du silo. "Les oiseaux" pas très loin des "Métamorphoses", au rayon étranger, près d'Ovide en exil, je suis enfin chez moi. Je pille et je repille les modernes, les classiques. L'image inspire autant les sons, les couleurs apocalyptiques des bruits de Russolo, et les troupeaux Dada qui vont jouer pas loin du rayon "bonne cuisine", les revers d'un naufrage passé à la postérité :

Buvez du lait d'oiseaux
Lavez vos chocolats 
Mangez du veau 

Cette chose finira bien par nous anéantir, comme Dada, au nez des artistes, n'avait cessé de l'espérer. Ailleurs, parodiant le décompte des passions impossibles, une trame lourde tient ces mondes à la botte de la correction. L'amour et le désert qui l'accompagne, les secrets bafoués et les exhibitions ; cette normalisation qui suit l'extase, c'est cela le désastre. Il n'effleure pas l'esprit des naufragés déclinés au carré, anguleux comme des tombes, où la poésie ne crache plus. Un minimum vital de poison, survit un peu, détaché des abus, une sève diluée dans une solution tiéde, étouffée de soupirs aux semblants soulagés comme nous pleurons l'absence, bercés sur des jonques colorées de flonflons qui plaisent à peu près à tout le monde. Ensuite vient aux index, un ajoût sérieux de notes appliquées, des numérotations interminables. L'abondance suffirait-elle à conjurer un manque qui en cache d'autres ?

Nous sommes nombreux, penchés religieusement sur les pages, dans les allées sournoises de ces caissons d'isolation. On entend un bruissement, un son rassurant d'effeuillage. Que cherchons nous ? Le processus s'enclenche, le domaine écope l'eau ; jaune et noir comme le Rhône qui draîne ses corps sous des bateaux où chaque soir on danse dans les reflets des ponts jusqu'au lever du jour. Chacun chorégraphié en dépit des mouvements de son être, happé par l'obsession d'une partie qui expliquerait le tout. Ce qu'il reste à savoir est un grand poème fleuve, assiégé de vers fous voués à l'irrévérence. On plongerait dans ce flux, la saleté des remous, un déferlement de phrases qui ne diront jamais assez tout le mal d'être au monde, l'oubli, et  les reflux, le déni, le re-flou. Là, des couleurs sépias au souvenir du Valois :

 Il parlait de celles de ce temps-là sans doute !  mais il m'avait raconté tant d'histoires de ses illusions, de ses déceptions, et montré tant de portraits sur ivoire, médaillons charmants qu'il utilisait depuis à parer des tabatières, tant de billets jaunis, tant de faveurs fanées, en m'en faisant l'histoire et le compte définitif, que je m'étais habitué à penser mal de toutes sans tenir compte de l'ordre des temps.

Ici la paysanne et la vierge "Aurélia" :

Puis les monstres changeaient de forme, dépouillant leurs premières peaux, se dressaient puissants sur des pattes gigantesques ; l'énorme de leurs corps brisait les branches et les herbages, dans le désordre de la nature, ils se livraient combats auxquels je prenais part moi-même, j'avais un corps aussi étrange que les leurs. Tout à coup une singulière harmonie résonna dans nos solitudes, et il semblait que les cris, les rugissements, les sifflements confus des êtres primitifs se modulassent désormais sur cet air divin. Les variations se succédaient à l'infini, la planète s'éclairait peu à peu, formes divines se dessinaient sur la verdure et sur les profondeurs des bocages, et, désormais domptés, les monstres que j'avais vus dépouillaient leurs formes bizarres et devenaient hommes et femmes ; d'autres revêtaient, dans leurs transformations, la figure des bêtes sauvages, des poissons et des oiseaux.

Ailleurs, des figures doubles dépourvues d'ombre, des femmes assoupies, des muses grimées en vouivre, traverseraient nos villes sur un nuages de cendre. Il se peut qu'on rêvasse et la nuit en pillant les archives glissées entre les pierres des monuments, il se peut que reviennent des pans de vies anciennes miraculeusement préservées, hâtant la joie sereine des affinités mystérieuses qui exigent l'anéantissement, peut-être... On se jetterait à distance vous et moi, d'un balcon à un autre en saluant les princes qui passent lentement dans des fiacres sous de vieux luminaires, vous et moi aspirant à cueillir quelques bourgeons de roses, dans la beauté du leurre, à confondre, les locataires qui vivent là où jadis habitaient les Dieux, avec les Dieux eux mêmes. On nouerait au passage, le souvenir d'un songe à des formes plus lointaines. Les monstres des bestiaires monteraient jusqu'à nos fronts y coller l'escarboucle, un troisième oeil étincelant légué par des visionnaires revenus déposer le ciel à nos pieds. La lumière se fait rare, nous resterons au piège d'un débit de conversation qui n'est plus à nous mêmes et qui revient sans cesse, déformé par l'image animant un rocher, sorti du ventre de la terre : une carcasse d'archéoptéryx qu'on n'aura même pas le droit de caresser.

"Je marchais péniblement à travers les ronces, comme pour saisir l’ombre agrandie qui m’échappait : mais je me heurtai à un pan de mur dégradé, au pied duquel gisait un buste de femme. En le relevant, j’eus la persuasion que c’était le sien... Je reconnus des traits chéris, et, portant les yeux autour de moi, je vis que le jardin avait pris l’aspect d’un cimetière. Des voix disaient : “L’Univers est dans la nuit !"

   CLAUDE LE JEUNE : "Que je porte d'envie" (pour 4 voix, 4 violes) 

podcast  

Lien : "dans l'épaisseur des images on ne sait où" (2) Lire ICI

Photo : Géante rouge traversant la Tupin en aveugle, dans l'apparente tranquillité d'un jour de Mars.

© Frb 2010.

samedi, 12 mars 2011

Insubmersibles ?

Le premier grand cataclysme s'abattit sur la région d'Osaka à 5 heures 11, le 30 Avril. A 8 heures 03, la chaîne de montagnes Togakure explosa. Les regards du monde entier étaient fixés sur "la mort du dragon". Des dizaines d'avions appartenant à des télévisions de toutes les nationalités volaient au-dessus de l'archipel du Japon qui crachait du feu et des flammes.

 KOMATSU SAKYO : extr. "La submersion du Japon" (traduit par Masumi Shibata 1973) éditions Philippe Picquier, (coll. Picquier poche n° 128), janvier 2000.

Japan.JPGA propos du tremblement de terre du 11 Mars 2011 et du tsunami qui s'en suivit allant impitoyablement ravager les côtes de la région de Sendaï au Japon et meurtrir la population, je n'ai pu m'empêcher de songer au roman d'anticipation (très célèbre), datant de 1973, qui fît grand bruit à sa sortie et reçut même un prix. Le livre s'intitule (sans équivoque) "La submersion du Japon" il est signé Komatsu Sakyo. On ne sera guère surpris que le titre coïncide avec un drame récent, le Japon étant constamment menacé de séïsmes, l'histoire du pays si parsemée de catastrophes que même les enfants dès leur plus jeune âge sont éduqués à adopter certains comportements, face l'éventualité d'un désastre. Toute la culture japonaise est par ailleurs imprégnée de cette peur ancestrale de l'engloutissement. "La submersion du Japon" met en scène un Japon secoué par une recrudescence de tremblements de terre. Les températures deviennent anormales :

"Il avait fait si froid à la saison des pluies qu’on se serait cru en mars mais, aussitôt après, une chaleur intense apparut soudain et, ces jours derniers, on avait invariablement plus de 35°C. Des gens tombaient malades à Tokyo et à Osaka, et même certains succombaient. A cette chaleur extraordinaire s’ajoutait l’habituelle pénurie d’eau jamais résolue [...]"

Les volcans se réveillent, des fissures apparaissent au coeur des bâtiments, les secousses vont de plus en violemment accentuer la destruction. Pour ce qui est du récit même, nous suivrons au fil de ces pages, une équipe de scientifiques (géophysiciens), qui découvrent que certains îlots peu peuplés (ou pas du tout) ont complètement disparus, et pour cause ! ils ont été submergés. Les scientifiques enquêtent, plongent dans les fonds marins, et reviennent avec la conclusion, que le Japon sera englouti à très court terme. Alors que les derniers chercheurs étudient les probabilités d'une telle catastrophe, le gouvernement tente de sauver ce qui peut l'être encore. Ce scénario, déjà à l'époque, s'appuyait sur de nombreuses études scientifiques, les personnages y sont peu décrits, on ne s'attachera pas à leur psychologie, nulle intrigue spéciale ne tiendra le lecteur en haleine, aucun voyeurisme ne s'épanchera dans ce roman assez froid qui décrit des tractations entre politiciens et scientifiques, des manoeuvres secrètes, les doutes, les incrédulités, les prévisions pour évacuer la population, préserver la mémoire d'un peuple, sauver le patrimoine, l'évocation de toutes les négociations pour obtenir des territoires en Australie etc... Si le récit semble un peu traîner en longueurs, il abordait déjà des questions fort intéressantes.

- Qu'adviendrait-il si demain, le Japon (ou un autre pays) disparaissait ?

- Que deviendraient les habitants ?

- Comment procéder à l'évacuation de cent vingt millions de japonais ?

- Où les accueillerait-on ?

- Comment préserver la mémoire d'une culture si un pays se trouvait brutalement rayé de la carte et son peuple dispersé à travers le monde ?

"En dehors de cet archipel et de sa nature, de ces montagnes, de ces rivières, de ces forêts, de ces herbes... Les Japonais n'existent pas. Ils sont unis à eux. Ils ne font qu'un seul corps avec tout cela. Si cette nature délicate et les îles sont détruites et disparaissent, les Japonais n'existent plus [...]"

Les questions sont multiples et on s'apercevra qu'il n'y a pas de réponses préconçues qui tiennent, mais ce qui marque plus encore le roman, c'est "l'esprit japonais", avec le spectre omniprésent de l'engloutissement, mais aussi l'absence de figure héroïque, de sauveur se distinguant des autres par son courage (genre cow boy à l'américaine), au profit d'une action collective anonyme, l'absence de happy end, une organisation implacable. Là encore, on n'évitera pas quelque analogie avec le séïsme de 2011, devant le spectacle d'un chaos permanent, les images cataclysmiques incessantes qui pétrifient d'horreur le monde entier, le peuple japonais reste d'une dignité, qui force l'admiration, pas de pillage, pas de panique... Mais la "Submersion du Japon" n'est qu'un livre d'anticipation, qui n'a rien de si visionnaire, il possède son double sens abordant le thème du naufrage mais aussi celui du déclin du Japon, il faut le reconsidérer dans son époque, l'ouvrage a été rédigé durant la guerre froide au moment où le Japon (3ème puissance mondiale) cherchait à s'affirmer vis à vis des autres puissances. La métaphore semble assez évidente.

Dans ce récit, on ne trouvera aucun mystère : le Japon va couler. Il n'y aura aucune alternative à ce constat, (cf. le titre anglais "Japan sinks", voir également le film adapté du roman :"Nihon Chinbotsu", réalisé par Shinji Higuchi, entre autres, le best seller ayant été adapté plusieurs fois, tant au cinéma qu'en manga). On ne pourra s'empêcher de relier dans un tout autre style, le film "The day after tomorrow" de Roland Emmerich où des images s'ajusteront encore d'une façon invraisemblable à celle d'une réalité qui dépasse aujourd'hui autant la science que la fiction. Le critique (occidental) glané dans un quelconque magazine, des années 80's,  évoquant le roman de Komatsu Sakyo avait-il réellement saisi ce qu'une simple phrase (somme toute "vendeuse" et très banale) pourrait contenir d'effroi quelques années plus tard, lorsqu'il écrivait à l'époque aux lecteurs amateurs de récits de science fiction à propos de la "submersion du Japon" (je cite) : "Un best-seller pour ce livre d'anticipation" qui pourrait devenir réalité"...

 

 

Photo : Nuages de Mars. Sommes nous insubmersibles ? Question.

© Frb 2011.

jeudi, 24 février 2011

Entre les lignes

Accommodé avec un regard et un sourire appropriés, le silence peut donner d'excellents résultats.

JEAN ECHENOZ, extr. "Je m'en vais" éditions de Minuit, 1999

entre les lignes,partir,interférences,étrangeté,intervalle,silence,mots,entretemps,entre deux,pérégrinations,humanités,voyages,lignes,effacement,voie ferrée,rêverie,nuit,jour,suspension,jean echenozUn système désastreux s'installe. On souhaiterait le cacher dans les interférences pour ajouter aux sensations élaguer la parole. Hier encore, il semblait simple de marcher en silence, la pureté de l'air, nous  allégeait, un peu. Nous avions découvert une  parfaite nébuleuse par réflexion, comme l'étoile Antarés possède un compagnon. Une paire d'étoiles en orbite mutuelle tournant chacune autour de l'autre, formant un double optique, alignées par hasard, nous retournions à ce hasard, qui par défaut, neutralisait. Un jour, on ouvrirait les yeux aux semblants d'échos machinés dans les vernis de l'emballage qui reviennent d'un vague à l'âme vieux comme le monde et se perdent en toutes saisons. On voulait ne faire qu'un avec le plus grand nombre, on désirait l'élévation, mais c'est encore la mort qui rôde dans les maisons, blesse les animaux et humilie leurs maîtres quand la nuit vient, ils perdent leur charme soumis aux travaux ménagers, ils remettent en place les objets pour le lendemain, ils se heurtent à huis clos, cultivent le métal contre l'or lentement fondu et gâché, le métal tourmente, prend forme humaine, ils vont la nuit, les bras chargés de sacs mystérieux, griffés par une bruine qui ferait fondre les paysages mais pas la geôle, le bruit du tonnerre au milieu de l'hiver plus tard, inviterait à disparaître et l'on disparaîtrait dans l'espoir de renaître, un jour, ou deux, pour d'autres.

Ensuite vient l'aube, et ses teintes douceâtres, qu'on avait cru si vives ou mauves à force de regarder des images à l'aérographe et de croire que dans un poème on trouverait le nouveau monde. Mais rien ne tient, le soleil brille, et le silence jamais ne décape les geôles. Pour le noctambule, l'aube s'ouvre encore sur la nuit noire. Aux terrasses quand chacun se dore, des pages entières s'effacent, plus rien ne vient cueillir en rêve l'allégement, l'escalade aux sommets. On descend, ça ne prévient pas. Pour parer, on invente des enluminure aux pastels gras contre l'encre sèche, sèchant sur le sujet curieux d'une quête située à peu près nulle part avec presque personne, on dirait pire : ça décrète sans penser, ça pisse froid sous la douche écossaise ça reprend tout ce qui était donné, et le reste fantômatique, qu'il n'aurait pas fallu toucher. On ne devrait pas laisser le hasard à ce point nous déposséder. Il reste encore le vent, ni chaud ni froid et tout le luxe des vagues de la mer qui pénètrent dans des buvards où dorment d'hallucinants corsaires hantés par le chant des baleines.

Il reste des lettres pliées en petits morceaux, jetées, au loin dans des bouteilles reculant les limites. On s'éloigne, tout s'échoue à la claque sur des grèves. C'est chaque jour le retour à zéro, ce temps de grand bien être à n'être rien ou ne plus être dans ce monde qu'un guetteur en vacance. Comme il est doux ! ce rien. Il ne resterait plus qu'à retrouver la trace originale du premier homme qui fît le tour de la terre en Alpha Roméo, et ne claquer sa poésie qu'avec les hippies chics dans les fêtes légères, à rire avec les mouette aux jardins d'une villa en bord de Saône, décorée à l'antique pareille à la Villa Romaine, où nous vîmes autrefois, au milieu d'un salon mi jardin mi partouze, l'après-midi bleu pâle virer en soirées pourpres, où venaient les stridences du violon de Tuxedomoon, à en oublier les hommes ordinaires qui ploient sous le conditionnel, parmi des tableaux de conjugaisons livrent des verbes inconjugables à des otages privés d'amour, l'alphabet en lambeaux, ils voulaient le prendre à bras le corps, dans le but d'en relier les courbes pour fabriquer un mot exprès imprononçable. Tout cela resterait brouillé dans le traducteur des gougles charriant le staccato aussi vain que les nébuleuses enfermées dans une cage à poule.

On déplacera les personnages, de la réalité à la fiction puis on sommera le tout d'attirer l'oeil, l'intelligence, les appareils-photo, on ajoutera le son, peut-être des micros. Pendant ce temps nous mangerons des glaces sur le quai St Antoine, cédant à toutes les tentations, nous remonterons le temps, par la grande rue qui mène à la grande gare. Ou bien plus loin la nuit, nous irons chercher sur les pentes, un banc de square, je mettrai une radio portative sur mes genoux, la molette coincée entre le pouce et l'index, nous tournerons jusqu'à Varsovie et Moscou, au code secret d'un vieux message, qui balayerait la terre entière par d'autres voix inoffensives, des faisceaux lumineux éblouissant les ombres à la manière d'un phare, qui s'étendrait des heures au dessus de la ville. Ce halo avale la nuit noire où les noctambules s'illuminent, et tous les mensonges leur reviennnent à la première clarté du jour mais entretemps, nous aurons changé de ville...

Il faudrait tout quitter comme on s'envoûte progressivement du va-et vient  des vagues, puis revenir et repartir, mourir un peu, revivre etc ... A se sentir porté par un mouvement passant de chaud à froid puis de froid à glacé, d'une glace qui brûle la vérité au milieu du système, dans une histoire écrite par d'autres, ils n'en veulent rien céder, et sans impunité nous déplacent sans cesse, dans ce continuum sur les parallèles compliquées, sans jamais nous solliciter. Un jour, la trame, heurterait de plein fouet quelque chose en dedans qui devrait imploser sans prévenir ou bien on laisserait tout aller avec ce qui renonce, une bribe de chanson annulée par l'épais brouillage des ondes courtes, masquerait pareil au secret, le premier, ou le dernier mot du langage oublié, précédant le silence qu'un long train à l'arrêt ne pourrait interrompre.

Photo : Aiguillages entre ciel et terre et des pilônes tagués de signaux sans mystère mais encore incompréhensibles. Vus d'un train à l'arrêt quelque part dans un no man's land, entre Lyon et Orléans. © Frb 2011.

dimanche, 20 février 2011

Ready (re)made : le Porte-foulard by Hozan Kebo

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Photo : Remix by Hozan Kebo Février 2011.

lundi, 14 février 2011

Ready (re)made for Valentine : le Porte-foulard

 Il n'y a pas

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de hasard

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il n'y a

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que des rendez-vous.

 

"The Creative Act" by M.Duchamp

podcast 


 La citation est de Paul Eluard.

Le porte foulard ne se trouve pas sous le sabot d'un cheval.

Le porte-foulard se porte aussi sans foulard. (Voir ici).

Sans porte, et sans foulard, on irait vers où ?

 Ready remade's nota : Pour la Saint Valentin, chers Valentins,  offrez un Porte-foulard à l'élue de votre coeur Pratique, pas cher, gage d'une tendresse infinie, le Porte-foulard est à la fois une preuve d'amour originale et un meuble épatant. Plus fiable qu'un bracelet, moins superflu qu'un pendentif, offrir un porte-foulard est vraiment l'occasion rêvée de vous rendre à jamais inoubliable. Osez ! payez vous d'audace ! puisque l'amour ne saurait exister sans preuves, qu'attendez vous ? La rue Camille Jordan vous le donne et certains jours vous le vend (à bon prix)(*). Plus une seconde à perdre ! vous pouvez envoyer vos dons (sans bouger de votre fauteuil), dès aujourd'hui à: "Certains jours, "spécial St Valentin (retardataires  2011 et  Valentins d'avant-garde 2012") au 1 rue Centrale 69, Lyon-cedex, ou téléphoner au Babylone 36-36 (demandez Marcel à l'accueil). En tapant sur la touche étoile, de votre taxiphone peut être serez vous parmi les heureux lauréats de notre grand tirage au sort qui vous permettra de gagner un Porte-torchons à deux battants. Profitez ! le jour des amoureux, c'est aussi le moment d'équiper la maison ! La St Valentin se fête certains jours mais elle se prépare chaque jour de la vie, (on n'est jamais trop prudent(e).  © Frb 2011.

(*) Sous réserve des stocks disponibles, 499, 92 euros pièce le porte-foulard (foulard non fourni, 78,84 euros pièce, supplément porte-foulard mélaminé 345,87 euros  le mètre,  transport des foulards 800, 59 euros seulement, (avec option 156 euros/ heure, le ponçage ) renseignement frais de livraison tapez 36-15 porte-foulard cet appel vous sera facturé 7,89 euros/mn. Possibilité de crédit à 4,%à payable en 10 fois, sur présentation d'une fiche de paye. Le porte foulard existe en plusieurs coloris .Carte sénior acceptée.

vendredi, 28 janvier 2011

N'importations

La banalité est faite d'un mystère qui n'a pas jugé utile de se dénoncer.

MAURICE BLANCHOT in "Faux pas", éditions Gallimard 1943.

n'importations,clandestinité,indistinction,multitude,banalité,tout venant,fantaisie,étrangeté,masse,maurice blanchot,de visu,le monde en marche,humanité,n'importe qui,n'importe quoi,fatras,dérision,erranceN'importe quel lieu avec n'importe qui sur n'importe quelle île grande ou petite, sous n'importe quelle lumière où l'on verrait l'hiver prolonger toutes les saisons, n'importe quel lieu pourrait convenir. N'importe quel reflet suffirait, si l'on s'y penchait à effacer n'importe quel visage dont les traits déjà vagues raconteraient n'importe quelle histoire, où n'importe quels èvènements se mélangeraient, n'importe quelle protestation s'étoufferait dans n'importe quelle masse de gens rassemblés sur n'importe quelle place dans n'importe quelle ville de n'importe quel pays, n'importe quelle plainte pourrait se mêler au tournoiement, à n'importe quel vacarme de n'importe quel trafic dans n'importe quelle accumulation de sens interdits ou d'interdiction de stationner indiquée sur n'importe quel panneau de n'importe quel code d'une route qui mènerait n'importe où. N'importe quel chemin pourrait convenir. N'importe quelle idée à la fois fausse et vraie viendrait se noyer dans les reflets qui nous effaceraient, dans la parole des autres qui raconte une vie dont ils s'imaginent qu'elle est notre, avec n'importe quel argument qui pourrait nous persuader que n'importe quel autre nous connait mieux que n'importe qui. N'importe quel lieu pourrait suffire, avec toi, peu importe, avec eux, par exemple, ou n'importe quel voisin de palier, n'importe quel cousin éloigné, un oncle d'Amérique. N'importe quelle lumière, n'importe quel fleuve nous méneraient dans n'importe quelle rue de Paris ou de Londres, n'importe quel homme, n'importe quelle femme pourraient s'y rencontrer, parmi la cohue, n'importe quel homme ou femme suffiraient pour m'assaillir et brouiller mon identité, réduire mon histoire en fumée ou la votre, nous pulvériser à n'importe quel instant, nous transformer en n'importe quel tas. En fatras, en bris, un amas de bris, en cri beau ou honteux jusqu'à toutes sortes de bruits semblables à celui de n'importe quelle machinerie. N'importe quelle fièvre ferait fondre n'importe quel glacier. N'importe quel grain cristalliserait n'importe quel sentiment heureux, malheureux, dans n'importe quelle inspiration, n'importe quel instinct évaluerait la géométrie de n'importe quelle chambre pour faire coucher n'importe qui avec n'importe qui, lesquels croiraient qu'ils sont faits l'un pour l'autre, toi pareil à moi, comme deux, toi comme un seul ou des milliers, les autres, couchant sur toi et moi, ou entre eux et ça donnerait n'importe quoi qui serait raconté comme n'importe quelle chose importante. N'importe quelle autre chose importante pourrait convenir aussi. N'importe quelle pierre, n'importe quel rocher nous retrouveraient dans n'importe quelle position sous n'importe quel vent du sud ou du nord, en train de fumer n'importe quel tabac hollandais ou français n'importe quel Pierre ou Paul, dans la perspective de n'importe quelle aventure nous mettraient dans n'importe quels draps. N'importe quel grain de folie installerait n'importe quels cosmonautes dans n'importe quelle fusée, n'importe quelle erreur humaine les feraient exploser en plein vol, il en retomberait n'importe quels déchets comme n'importe quels flocons de neige qui fondraient comme n'importe quoi sur n'importe quelles mains tendues pour recevoir n'importe quel signe qui tombe du ciel, de n'importe quel nuage, de la lune, du soleil. Des mains pleines de n'importe quoi qui auraient rendez vous pour serrer. Ouvrir, pousser n'importe quelles portes, les fermer, ou se tendre, cocher signer n'importe quel papier. Des mains à moi, tes doigts, leurs têtes, dans n'importe quel bureau y parleraient sérieusement de n'importe quoi pour remplir n'importe quelle plage horaire, après quoi on se promènerait comme rien, on ferait les magasins avec quelqu'un qui serait d'accord avec ça. Peu importe.

Photo : D'un "Faux pas" de Blanchot aux vrais pas en Presqu'île, il n'y a qu'un fil (étroit émoi) vu à Lyon, à la fin de l'hiver de l'année dernière. © Frb 2010.

samedi, 15 janvier 2011

Persévérance

Il faut imaginer Sysiphe heureux

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Photos : Le pied du mur insiste et signe, heureusement les injonctions sont roses. Elles ont été photographiées dans une rue des pentes à Lyon (j'ai oublié son nom) menant au sommet de la colline qui travaille évidemment  (un peu de la coiffe et du pinceau). Il manque peut être la girafe (?) elle n'est pas loin, (au parc de la tête d'Or exactement, avec les Watusis), on la sortira peut-être au printemps, si il fait beau. © Frb 2010.

mercredi, 12 janvier 2011

Vues de nuit

Pour qui s'enfonce sans peur dans ces labytinthes ténébreux, la nuit est pleine de retraites inconnues, de territoires vierges. Au gré de l'imagination des créatures qui l'habitent se révèlent soudain avec sur leurs corps, les traces mystérieuses de leurs pérégrinations. Il n'appartient pas à tout le monde de s'enfoncer d'un pas ferme dans ces solitudes...

ROBERT DESNOS, extr "Les trois solitaires", (longtemps après hier etc...), éditions les 13 épis, 1947.

Pour voir une autre nuit, il suffit de cliquer dans la nuitby night.JPG

Je les vois, près des zincs se mêler aux danseurs, ceux qui trinquent à minuit font trêve et davantage, se réjouissent dans le bruit, aspirent à l'essentiel laissent le soin à d'autres d'arroser leur chemin. Dans la crainte d'abord, d'être absorbés par les battements d'une horloge qui rétrécit leur monde, ils l'emballent avec eux au guet des ombres, jusqu'à ce que son mouvement s'arrête. Aussi compréhensifs que les amants, ils franchissent les portes, trainent sur eux les traboules puis ils flanent, unis en grappes sûres mais toujours seuls.

Je les vois sur les quais, le long des fleuves adorer les scintillements, et criant dans le souffle asséché de l'hiver des injures à nul autre qu'eux mêmes. Cette liquidation dont librement ils s'acquittent, semble filtrer encore le mauvais sang des jours qui ont précédé. Ils se scellent au ciment, contemplent les péniches, les terrasses des restaurants, dans l'éclat du rissolement des poulardes ou les odeurs de poissons frits. Ils réecrivent chaque nuit, la même histoire, tradition urbaine et orale, la préface d'un conte braille ou l'écho d'un chant né dans la hâte d'en finir puis d'éparpiller toute l'intensité inhérente à la joie de s'anéantir. Je les vois, seuls, trinquer avec tous leurs amis d'une heure, ils ne doutent pas qu'ils peuvent se lier éternellement, veiller à ne jamais laisser d'autres les perdre dans la plus abondante réserve de mots, de promesses. Ce tintamarre... Je les retrouve plus loin, plus gais, ils fanfaronnent plus saouls aussi, à d'autres zincs mais émus de la même façon à la vue d'une horloge qui vient de s'arrêter. Je les vois dans ma rue, titubant endormis près d'une villa bordée de bergenias sans fleurs, pendant que leurs amis, les quittent déjà, s'en vont mener un autre slow sur "Valentine" près des fausses cariatides du bar d'un hôtel chic.

Toutes ces processions en marche sur la terre, nous observent impassibles, rient en coin de nos rythmes. On pourrait soupçonner que l'arrêt d'une horloge irait enamourer tout le reste du monde. La nuit vante l'avantage de se brûler à ces amours qui n'espèrent pas, n'offrent rien en retour. Un sang commun circule dans leurs veines, ils embrassent comme rien des filles qui leur déplaisent. Elles attendent sur des strapontins. Elles sont même là pour ça. Le deal est simple, ça reste honnête. Eux, ils restent au fond de l'aquarium avec leurs yeux ronds leurs barbillons de poissons-chats, longeant les serres ou traversés d'icebergs, de mondes flottants sucrés, givrés, peu importe là, partout, ils ont le pied marin, la colère des grands capitaines, et de belles euphories pour claquer les chagrins. Cette liquidation, toujours la même les tient en équilibre entre deux fleuves, le coeur tâtant du vide au sommet des falaises, les pare d'arc et de flêches, d'un nom de plume vaguement mexicaine.

Je vois nos emplacements se déplacer comme eux, courir derrière l'ivresse, rejoindre les collines à la recherche de plantes vénéneuses, comme l'herbe de bisons, dans sa grande bouteille verte, ils entament avec elle, la tristesse d'un coup de barre, puis vers quatre heures, ils ressucitent.

Je les vois transformer les fleuves en bord de mer, admirer rue de l'Alma au loin les caravelles, je les retrouve à cinq heures, affalés sur des bancs, et toujours le ciment, pour eux méconnaissable se transforme en lit de camp ou en échasses obliques pas plus hautes qu'une  allumette à craquer dans la nuit, pour tout ce qui embrase, et qu'un feu brassant l'air, provoque l'incendie sur la ville. Un lever de soleil, les ramène avec le premier bus bondé de gens, dans un champ de savons, là où ils ne savent plus, à cause de la lumière, exactement par quel chemin retrouver leur maison.

Photo : Berges du Rhône by night vu d'un vélo garé sur un pont entre rive gauche et Presqu'île à Lyon, photographié au mois de Janvier, un certain jour. © Frb 2011