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mercredi, 30 décembre 2015

Le murmure des forêts

Ils avaient dépassé le quartier du silence et d’ici on entendait la nuit vivante de la forêt. Ça venait et ça touchait l’oreille comme un doigt froid. C’était un long souffle sourd, un bruit de gorge, un bruit profond, un long chant monotone dans une bouche ouverte.

JEAN GIONO : "Le Chant du Monde", éditions Gallimard, 1934.

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Photo: Au premier mouvement de l'hiver, saisis sur le parcours roman, des fragments d'une balade en forêt, quelques figures et des murmures, recueillis dans l'air doux de Décembre. 

 

Là-bas. Frb 2015.

 

lundi, 09 mars 2015

Le rivage oublié (II)

Il faut savoir répondre dans le vide. Ce sont les livres. Il faut savoir se perdre dans le vide. C’est la lumière dans laquelle on les lit ; il ne faut répondre aux autres qu’en créant.

PASCAL QUIGNARD : extr. "Les désarçonnés", Septième volume du "Dernier royaume", éditions Grasset, 2012. 

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Pascal Quignard cite Montaigne tombé de cheval lors d'une promenade. Désarçonné, le grand homme affaibli et gisant à terre : 

"mort, étendu à la renverse, le visage tout meurtri et tout écorché [...] n'ayant ni mouvement ni sentiment non plus qu'une souche", et qui, après avoir vomi "un plein seau de bouillons de sang pur", entreprit d'écrire "Les Essais".

 P. Quignard écrit encore :

"Tout à coup quelque chose désarçonne l'âme dans le corps. Tout à coup un amour renverse le cours de notre vie. Tout à coup une mort imprévue fait basculer l'ordre du monde [...] Tomber à la renverse [...] C'est comme une ­seconde naissance qui s'ouvre dans le cours de la vie."

Plus loin l'auteur évoque, en 1548, Etienne de La Boétie, l'homme, ami de Montaigne qui parla en beaux termes, la théorisant même, de la désobéissance civile:

"Je ne vous demande même pas d’ébranler le pouvoir mais seulement de ne plus le soutenir."

Commencez par arrêter de voter pour vos ennemis.

Arrêtez de vous donner des maîtres.

Arrêtez de payer des surveillants pour vous épier.

Arrêtez d’offrir par votre travail, au prince, l’or et les armes dont vous serez ensuite les victimes.

Arrêtez de donner la liste de vos biens à ceux qui exigent de vous piller.

Pourquoi constituez-vous ces files qui montent au bûcher et qui alimentent le sacrifice pour quelques-uns ou pour un seul ?

Pourquoi tenez-vous tant à être le complice préféré du meurtre et l’ami fidèle du désespoir ?

Les bêtes ne souffriraient pas ce que vous consentez.

Ne servez plus.

 

******************

 

Pour entrer dans l'image ou peut-être un reflet: en contrepoint encore mais sur un fil ténu précédent, le "royaume", fût il premier, dernier, vite vu, pas encore emballé pour soi seul, ni vendu, un instant retranché, rien qu'une légère errance en dessous de la surface éblouissante d'une ville occupée à nouveau ou toujours occupée. Un espace reprend l'homme qui marchait au hasard et s'y retrouve, par là même trouve une place que peut-être la société violente a cessé de lui accorder, un silence espéré loin des flux médiateurs, loin des violences d'après, loin de l'hyper-active injonction de devoir s'y sentir engagé à s'exprimer encore ou prendre partie prenante d'un nombre d'avis auxquels de toute façon on ne peut pas entièrement se rallier, loin des heures d'affluence, loin des ponts survoltés de traversées d'autos, d'hommes pressés et de vies hérissées, de courants électriques, des réseaux, des complots et loin très loin, de la vélocité, possessive. Ici, au jour le jour comme avant, comme après, c'est à peine, ou peiné qu'on retrouve un rivage tel un monde oublié, épargné, c'est un leurre, on le sait, mais peut-être, libre encore que l'imaginaire s'y repose, s'y prélasse. Peu importe, le prétexte vrai ou pas, l'endroit s'ouvre comme un livre, qui résiste aux assauts des foules, et de la peur, à nos replis craintifs, à la chute qui partout à la fois décrypte et tétanise l'homme au tempo rapide, qui se rêve au repos. Le lieu, ici invite, préservant des crissements, des fers, de la puissance, des serpents à sonnettes, des sirènes, des échos, à peine deux ou trois mouettes. A bonne distance sur terre comme au ciel, ces espaces semblent ouverts, pour nous aider à vivre, un peu d'eau, l'air, une berge vaguement à l'abandon, sans un phare, sans aucun feux de joie qu'attise la volonté de sacrifier, quoi donc ? Ici la berge étire un instant l'horizon, par la force de ce temps disponible, luxe doux n'ayant pas tant besoin de remparts ni de cuirasser l'être pour le trouver en phase, une heure avec lui même. Ce lieu où je n'avais pas forcément prévu d'aller à cet instant alors que la balade très naturellement m'y menait, happait d'un bleu-vert magnétique une mémoire d'océan qui n'existe pas sur le fleuve Rhône, pas en réalité, jamais à l'ordinaire, plutôt gris coutumier de sa grisaille urbaine. Bleu glacé de l'hiver, comme un gel, loin des pêches des navigateurs intrépides, de leurs chasses aux trésors, loin des vagues lourdes des hommes qui tombent et se relèvent comptent les points et les morts. Ici quelques reflets et les miroitements passagers de l'eau mêlée à une éclaircie toujours brève, le ciel bas ajoutant au désarroi des jours d'après, ce n'est pas rien qu'un rêve de glisser à travers cette luminosité, puis approcher d'un pas, concret, ou toucher la texture de cette berge, esquissant une trouée dans l'univers familier, bercé du flottement comme observer la vie avec les éléments devient un jour utile pour savoir qui on est. Il ne manquait, peut-être que "La barque silencieuse", hantant la simple image qui fragmente un passage d'une plus longue promenade, ce passage hante aussi quelques êtres, les plus lents, ou les autres, solitaires, ou les peu éloquents qui n'osent dire leurs idées au grand jour, peut-être pris à cette heure, de panique par l'instance collective, qui demande à chacun de penser à l'avenir, laïc ou religieux, alors qu'on ne peut plus suivre, en ses nombreux méandres, une si lourde entreprise. Alors qu'on se replie le jour où prononcer un seul mot, dont le sens qui déjà connoté, autopsié par tant d'autres, ruine la moindre tentative, et décourage, parfois du simple fait de vivre. Tous ces flux nous informent autant qu'ils peuvent aussi annuler la présence singulière, qui craindrait de se perdre en rejoignant trop vite les mouvements ou en se dévouant corps et âme aux causes les plus pressantes, en éprouve par avance les limites dérisoires aussi paradoxales que l'obstacle qu'il faut pourtant combattre. L'errance en contrepoint, du malaise éprouvé face aux ogres et géants, ici en forme floue, émerge par simple attrait, îlot d'indépendance, doucement retiré des sonos de la cité, une absence qui s'approche tout prés d'une autre page, déroule au pas suivant encore un fil d'Ariane, ou de Pascal (Quignard) magnifique écrivain, fouinant dans les comptines vieilles de nos origines éclairant notre époque, qui ravivent l'être humain fort de sa liberté inouïe, mais aussi entravée, à toutes les époques. Le livre offre de quoi sustenter les mortels embarqués, l'écrivain a rêvé de barques grecques allant à la dérive, il s'est concentré, à décrire :

"cette réserve animale, farouche, qui ne doit jamais se soumettre au langage, ni aux arts, ni à la communauté, ni à la famille, ni à la confidence amoureuse."

Il cherche le vivant avant que l’histoire l’ait réduit au standard, une piste, une phrase encore échouée, sur la barque invisible qu'il est possible ou non, d'ajouter à l'image (à la guise du lecteur de la voir apparaître ou de la dessiner). Extrait puisé toujours à la source limpide des beaux livres de l'auteur.

"Nous emportons avec nous lorsque nous crions pour la première fois dans le jour la perte d'un monde obscur, aphone, solitaire et liquide. Toujours ce lieu et ce silence nous seront dérobés"...

pourtant: "le large existe."

 

Photo : "L'eau qui revient sans cesse"...

Eau d'ici, eau de là, le bleu rare du fleuve Rhône © Frb, Lyon 2015.

samedi, 20 décembre 2014

Des accords

Il ne s'agit pas d'être là, il s'agit d'être le là.

JEAN-LUC NANCY

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Tous les corps animés, inanimés, cette juxtaposition des extériorités, (un trottoir, un poteau, un clavier, une personne, un passant, homme, femme, enfant, chien, etc...)

Tous les corps qui veulent dire ce qui est dehors en tant que dehors à côté auprès avec un "autre" (corps), au corps à corps dans la disposition

ressentir dans la réalité la proximité des êtres à distance.

Etre touché.

Ressentir cette infime différence entre ce qui touche et ce qui est touché, le toucher - le tact - est infiniment discret, Jean Luc Nancy l'a écrit dans "Calcul du poète" 

le toucher est discret ou il n'est pas.

L'être n'est pas enfermé en lui même, on ne peut totalement jouer à se l'approprier comme une chose car il est déjà ouvert au regard de l'autre et déjà imprégné ou même "contaminé" par les présences des corps, tous les corps des autres en mouvement.

le toucher est concret et abstrait.

On pourrait évoquer cette logique du toucher via le mythe d'Ulysse et les sirènes . On pourrait évoquer ici même les Sirènes, par un truchement aussi lointain qu'intemporel,

chacun sait que ces êtres féminins instillent un chant irrésistible qui a envoûté chaque marin qui passait à proximité, (les sirènes symbolisant les âmes des morts montrées à l'origine en figures d'oiseaux à tête humaine puis en femmes à queue de poisson). Elles étaient des divinités de la mer postées dans le récit d'Ulysse à l'entrée du détroit de Sicile, sur une île entre l’île d’Aea et celle des monstres Charybde et Scylla, mais il existe d'autres lieux de leur séjour comme le cap Pélore, l'île d'Anthémuse, les îles de Sirénuses, ou Caprée. Bref, elles charmaient de leur voix mélodieuse afin d'entrainer les marins vers une vaste prairie, couverte d'ossements et de chairs asséchées. 

Mais le chant des sirènes n'ensorcelle pas les marins de passage par sa beauté, il ensorcelle parce qu'il contient en lui une promesse d'un savoir absolu.

Capturés par ce chant, les marins trouvaient inévitablement la mort sur des récifs qui entourent l'île des sirènes, et Ulysse fut le seul à dépasser les sirènes parce qu'il s'était attaché au mât pour pouvoir écouter ce chant et précisément, se préserver une distance nécessaire, ainsi aura-il pu aborder le chant des sirènes et être touché par lui.

Cette intrication paradoxale de la distance et de la proximité (par un détour qui semble étrange mais pas si étranger), évoque justement le motif ambivalent du distinct.

Dans ce mot se trouvent rassemblées les significations de la distance - du différent - ce serait une indication sur ce qui ne peut être touché ou peut l'être, mais sans contact corporel.

Ce qu'un trait retire et tient à l'écart en le marquant de ce retrait.

selon J.L. Nancy il serait impossible de toucher le distinct, non pas parce qu'il est intouchable mais parce qu'il est impalpable, c'est à dire inaccessible.

La singularité plurielle de l'être est la condition qui rend possible tout rapport éthique, même si le toucher ou le tact ne sont pas exactement considérés comme une catégorie éthique.

La discrétion du rapport entre les êtres n'est possible que parce qu'ils co-existent, parce qu'ils sont toujours déjà ensemble.

Subsisterait alors, l'unique moment où nous pourrions être touchés par un regard, simple ouverture au monde adressée, qu'on ouvre à d'autres en se dépassant.

Regard jeté devant et hors de soi.

Ces choses là sont si bien ajustées qu'on ne peut les fonder sur la seule connaissance ou l'intelligence.

Elles ne dépendent sans doute que d'une coïncidence.

Comme les sirènes dont la juste distance ne se dévoile que dans la mort, celui qui cherche, et crée, (Nancy, dit "le poèteon pourrait élargir) :

[...] doit tel Ulysse prudemment ou même avec une certaine lâcheté approcher ce qui ne peut être approché".

La mesure la plus juste serait le langage poétique, la mesure d'y mettre au lieu de mots toujours encombrés d'histoires personnelles, un rythme, quelque chose sans mesure laissant advenir la possibilité d'une coupure nécessaire. :

La continuité ininterrompue du sens vivant ne peut être "sensible" que dans son interruption".

Sujet peut-être à suivre, sur le thème de la ville pour les gens de l'été - ceux qui restent - qui battront le pavé très loin des bords de mer.

Photo et notes évasées et facultatives : La place est sur mon mur, séparant et reliant deux mondes distinctement, autre ligne de fuite filée par le canon, rien que du pacifique, des passants d'une rue s'apprêtent à rejoindre l'esplanade, c'est un corps de ballet autant de chorégraphes livrés qui se délivrent, à ce moment précis de l'obligation d'en débattre. Concentrés à leur seule façon singulière d'envisager la traversée, la possibilité d'une ville (d'une île, d'une aile, d'une houle, de huées d'hirondelles, de z'hiboux ou que sais je) se déploie en une polyphonie discrète pour mille têtes, mille nombrils et autant de chairs tièdes ou brûlantes jouant avec les pieds sur le clavier (plus ou moins tempéré) de certains jours, (cette interprétation fort contestable se passera de toute présomption pour s'unir à une sorte d'indulgence universelle (j'espère):  

"on ne traverse pas une chaussée la bouche ouverte" a dit le sage chinois (à la barbe d'Héraclite*)

"Unis sont tout et non tout, convergent et divergent, consonant et dissonant; de toutes choses procède l’un et de l'un toutes choses"*.

c'est là, (à nos gamberges, "easy") une condition suprême pour arriver (au moins) vivant de l'autre côté du piano, et ainsi me relier à toi, ô mon ami, mon frère ! unis sur l'esplanade où déjà avant toi ont chanté tous les choeurs et les voix des intempestifs - ceux-là, plus cléments et plus inoffensifs que les sirènes d'Ulysse. 

Moralité : y'en a pas.

Le poète Li Tou dans la soute à charbon, effeuillant de Nancy à Homère, les possibilités d'une ville passera par le sourire (autre énigme) du sphinx ammoniacal dit "le""caillou", (un caillou certes, mais pas un caillou comme les autres) de la bonne colline (de Madame la Croix-Rousse), figuré en Bouddha impassible donc, bienveillant pour ses gens, lire ici, son ambassadeur en émissaire pratix aidant la traversée: "l'habitant du caillou contenant un fragment de chacun d'entre nous", (notre philo-facile) via l'expert-géologue de C.J posté dans la guérite (ça fait un paquet de mondes) d'ores et déjà fondus sous le pandémonium de la traversée du lendemain, je décline à nos vagues par un conseil du jour

de grâce, soyez prudents, par les rues, on the road, (on vous aura prévenus)

La possibilité d'une esplanade en ville, n'allant pas sans dangers ni menaces, on vous réservera (il faut ça), 4'33" de silence pour la mise à distance, si rude voie sous telle chappe (ô patience). Et, si il y parvient l'égoïste semblable, pourrait bien fusionner avec la petite chorale des fourmis en vacances et autres collectionneurs de valses, de sauveurs d'harmoniums, j'en oublie et j'en passe ; alors avec des si, une multitude de si on aura peut-être une chance (j'avoue qu'elle est très mince) d'être le là ? (Vermot, sponsor). Avant de se faire broyer par un nid de pattes qui nous ferait un crochepied (évidemment involontaire), la chute finale (mourufin-loumunif) est remise à plus tard bien qu'on prévoit des bottes, desfois que ça arriverait, même si les traversées ne sont pas toutes écrites à l'avance (la chagesse, sur un pied), Héraclite dans la rue en dos d'âne jusqu'à Caluire et Cuire a testé, les chevaux de bois, en sandales, (du distinct / indistinct à se perdre pour s'y retrouver)

 La route qui monte et qui descend est une seule et la même. 

Voilà.

Sources : "Sur l'irréalité du touché poétique chez J.L. Nancy par Aukje Van Rooden.

Remerciements : aux groupies du pianiste et autres amateurs d'instruments de musique installés sournoisement dans nos villes (on nous cache tout ...) aux pianos, en freestyle installés, bien visibles, eux, dans nos  gares expérience des possibles avec de belles surprises, certaines vraiment touchantes, on y reviendra peut-être un certain jour, et enfin aux joyeux rabats-joie ceux qui n'aiment pas la plage (même pas celle des vraies villes avec un vrai faux sable) à ceux qui sont malheureux sous le soleil, à ceux qui ne traversent les ruelles que lorsque vient le soir, (crin-crin offert d'air provisoire qui peut même se jouer à la flûte traversière, la nuit, à la fenêtre).

 


podcast

 

 

Grand piano avec et sans bretelles accueillant ses artistes... vu à Lyon par... © Frb 2015

lundi, 15 décembre 2014

Passures

Interroger l'habituel. Mais justement, nous y sommes habitués. Nous ne l'interrogeons pas, il ne nous interroge pas, il semble ne pas faire problème, nous le vivons sans y penser, comme s'il ne véhiculait ni question ni réponse, comme s'il n'était porteur d'aucune information. Ce n'est même plus du conditionnement, c'est de l'anesthésie. Nous dormons notre vie d'un sommeil sans rêves. Mais où est-elle, notre vie ? Où est notre corps ? Où est notre espace ?

GEORGES PEREC, extr. L'infra-ordinaire, éditions du Seuil, 1989.

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Photos : des histoires, plein d'histoires, mises à sac, mises en sacs, une traversée, de rue en rue jusqu'aux ruelles en multiples passerelles à taille humaine, passages géographiques, et trajets fragmentés à travers les quartiers différents d'une ville, acteurs ou figurants pour approcher les fêtes, trop plein d'appréhension, de bonnes résolutions qu'on voudrait honorer, qui ne tiendront qu'à travers, et pas comme on voudrait, jamais aussi splendides, effondrements des rêves, choeurs des lamentations, chenilles de joies rapides, un mélange de désirs, à travers les clients, les marchands, et toute la marchandise, sa promo permanente, à travers - en travers - les élans versatiles, les renoncements, la hâte, l'alternative, la norme, le besoin de s'y plier puis de s'en échapper, la recherche du temps perdu ou retrouvé de son plaisir, désir de choses simples: des godasses et des fringues, sacs de fripes, à travers, tant qu'on peut préserver chez soi un endroit au chaud pour tout en déballer, débarder, essayer, apaiser les grands maux ou les petits bobos, le surplus excessif, les gros riens, ces sutures à travers, les paquets et les mots, en travers, l'immanence et la loi d'entropie et tous les paradigmes, à travers le plaisir de courir pour choper du nouveau avec les vieux poncifs "l'hiver et le printemps", la rue en kit chez Continent, des pays ou des gens, le printemps comme un clip qui grignote l'escargot en musique re-jouant Vivaldi sur des rythmes électro, les quatre saisons mutables comme l'espoir tourne en vice et revend de partout des sacs pendus aux mains, ces poings demi-ouverts, empaquetés, à travers un fourbi dans la tête avec des sentiments, l'amour et l'amitié, évasions en travers, les histoires qui vont vite pour se perdre dans les flux imiter la croissance des systèmes, marcher sur les bris de verre sous les lustres en plein air, faire monter les machins et les trucs, les compulsions d'achat, le harcèlement moral, le travail, les loisirs, la croissance, le coaching, l'open-space, mise à sac de l'éthique, rafraîchissement des murs que la ville peinturlure avec ceux qui voudraient que ça change, qui n'ont plus de certitude (ça commence à se voir) qui ne peuvent plus, ne veulent plus suivre, face à ces géants verts, des mots bleus de la peur qui caressent les personnes, vident les poches des petits, séduisent les lucratifs, à travers les précaires qu'on ne voit pas courir aussi vite, ça retombe loin là bas, à la périphérie, à nos pieds, à genoux sous les ponts, dans les squatts, les prières invisibles, la convivialité, le discount, les échanges, enfin le système D, le pas qui continue avec du grain, sans grain, à travers la beauté, des instituts de beauté, des ongleries américaines, du panache, des paillettes à travers l'épuisement, la loi de l'apparence qui fait foi d'existence, loi sélecte, les meilleurs s'y retrouvent, y glissent entre leurs dents ta carte bleue, avisent nos cartes-fidélité, du mot fidélité vidé avec les sacs, des gants raflant la mise du gueux qui tourne chèvre sans plus savoir pourquoi, au cercle du manège, mange sur les chevaux de bois, se sustente au snacking, voyage sur des lumières avec les ombres tristes abordant le scientisme et le trans-humanisme, à travers, l'homme fragile héritier de sa révolte impuissante, en travers les clous du passager s'égayant d'un spectacle 7J/7/24H/24, avec nous ou sans nous, avec les stars, les fils de..., la déco, packaging, la crise qui t'en fabrique de l'austérité capitale, la foi dans l'abondance, les possessions, les intimidations, la peur de perdre, cette commune hantise des déflagrations singulières, courses vite, en travers, la pauvreté, le luxe, à travers la bonté, la gentillesse, la culpabilité, l'empathie, la souffrance, et ceux qui s'en relèvent affrontant à travers leurs défis personnels : être soi, trouver sa voie, devenir vrai, au delà des pressions et du pouvoir d'achat, les hommes ont autant d'imagination que d'avenir, les marchandises s'en moquent, à travers les affiches pillant au plus profond, le peu, l'insuffisant, mesurant à chaque pas, le secret de chacun, qui devient frustration du grand nombre, toute la dynamique mise en sacs, par les stats en travers ceux qui rêvent que leurs têtes pourraient fuir les boutiques, les corps et les boutiques on ne sait pas où ça va. Si ça tire à travers les personnes ou les cibles, l'ego à travers ça, viserait qui s'entasse à travers, play to win, baraka, empochant, sacs à part, la ruine à prix d'amis par les lieux traversants, les néons, les lanternes, la surface amovible, la valse des étiquettes affichées de travers, les winners, les losers, les empires, l'univers made in Chine, les affaires, les modèles de mesure verticale, le bon sens, l'eau qui dort au prix flottant du genre moyen pressé, le crédit, le bizzness, les horaires, la monnaie, le job, le sac plastique, la vie rêvée de l'homme-sandwitch, et nous, courant derrière, la réalité mal traitée. Est ce qu'on pourra tenir ?

Passures ...

Sous silence, toutes les vies, des milliards de mémoires, que l'on ne connaîtra pas, pas un pas sans une conséquence, la dernière image pouvant être la première du billet on n'arrête pas le regret, ni le printemps, encore moins l'avenir qui commence minuscule sur les dalles gigantesques (pour nos pas de géants ?) d'un hall de gare avec une barotte à 4 roues, (pas encore connectée, ni coachée, ni livrée aux vigiles, ni vue en transparence, ouf, :) ...

Certains jours suivant au présent là où on serait passé, un instant pour les promeneurs ubiques et les autres égarés (au travers les méandres) et puis pour les perplexes de l'élasticité (du temps ? ou des conjugaisons), - pour ceux qui ne vont pas forcément en deçà - c'est à dire lorgner les dessous, l'image du jour retardera, demain tout comme hier, chaque jour, tous déjà advenus, ou peut-être pas encore, bref, pour cette histoire en cours, notre dernière image si on était couture, elle s'ouvrirait ICI ...

Où ne serait pas loué l'intrus, le symbolique intrus figurant à mon sens (relatif) toutes saisons confondues la marche difficile encore libre à travers l'espace et le temps, l'intrus qui s'approcherait au plus près de l'état de nous autres, créatures embringuées, au milieu de l'époque épique, afin de nous aider en image à essayer de répondre au plus près aux trois questions du Georges :

Où est-elle notre vie ? Où est notre corps ? Où est notre espace ? 

Héros pataphysique, l'intrus intemporel, serait l'anomalie qui fait avancer les idées, suggestion du Boris, cherchons donc cet intrus, et laissons le filer, bras ballants, sans s'occuper à s'y mesurer, dans des formes de concurrences, qui ne feront avancer aucune forme d'idée, une anomalie dans l'anomalie : ici il n'y a rien à gagner. Sauf un nid de pattes peut-être ? Des promesses, résolutions, promesses, tenues ou non. Un Soupir... 

 

Rues et gens from Lyon © Frb Dec. 2014

jeudi, 20 novembre 2014

A travers

Il n'y a de communautaire que l'illusion d'être ensemble. Certes l'amorce d'une vie collective authentique existe à l'état latent au sein même de l'illusion - il n'y a pas d'illusion sans support réel - mais la communauté véritable reste à créer. Il arrive que la force du mensonge efface de la conscience des hommes la dure réalité de leur isolement.

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Il arrive que l'on oublie dans une rue animée qu'il s'y trouve encore de la souffrance et des séparations. Et, parce que l'on oublie seulement par la force du mensonge, la souffrance et les séparations se durcissent ; et le mensonge aussi se brise les reins sur une telle pierre angulaire. Il n'y a plus d'illusion à la taille de notre désarroi

Le malaise m'assaille à proportion de la foule qui m'entoure. Aussitôt, les compromis qu'au fil des circonstances j'accordai à la bêtise accourent à ma rencontre, affluent vers moi en vagues hallucinantes de têtes sans visage. Le tableau célèbre d'Edward Munch, Le Cri, évoque pour moi une impression ressentie dix fois par jour. Un homme emporté par une foule, visible de lui seul, hurle soudain pour briser l'envoûtement, se rappeler à lui, rentrer dans sa peau. Acquiescements tacites, sourires figés, paroles sans vie, veulerie et humiliation émiettés sur ses pas se ramassent, s'engouffrent en lui, l'expulsent de ses désirs et de ses rêves, volatilisent l'illusion d'"être ensemble". On se côtoie sans se rencontrer ; l'isolement s'additionne et ne se totalise pas ; le vide s'empare des hommes à mesure qu'ils s'accroissent en densité. La foule me traîne hors de moi, laissant s'installer dans ma présence vide des milliers de petits renoncements. 

Partout les réclames lumineuses reproduisent dans un miroitement de néon la formule de Plotin : "Tous les êtres sont ensemble bien que chacun d'eux reste séparé.Il suffit pourtant d'étendre la main pour se toucher, de lever les yeux pour se rencontrer, et, par ce simple geste, tout devient proche et lointain, comme par sortilège. 

 

Raoul VANEIGEM: extr. du "Traité de savoir vivre à l'usage des jeunes générations", Gallimard, 1967.

 

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In situ : d'un jour à l'autre à Lyon, quelque part entre la vogue sans marrons et l'ogresse, positive, positiviste, fête des lumières. 

 

In city, la presqu'île, November like December © Frb 2014.

samedi, 12 avril 2014

L'aube et la nuit

S’épuiser à chercher le secret de la mort

fait fuir le temps entre les plates-bandes

des jardins qui frémissent

dans leurs fruits rouges

et dans leurs fleurs.

L’on sent notre corps qui se ruine

et pourtant sans trop de douleurs.

L’on se penche pour ramasser

quelque monnaie qui n’a plus cours

cependant que s’entendent au loin

des cris de fierté ou d’amour.

Le bruit fin des râteaux

s’accorde aux paysages

traversés par les soupirs

des arracheuses d’herbes folles.

JEAN FOLLAIN  in  "Exister", Gallimard, collection blanche, 1947

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Le premier mouvement du printemps, une éclosion, surprise dans la fraîcheur de l'aube, jusqu'au profond silence de la nuit et ses hymnes, qui garde avec les fleurs, nos joies perdues, ce qu'il faut redouter, apaiser et enfouir...

 

 

Au jardin : © Frb 2014

vendredi, 20 septembre 2013

Prélude à l'effeuillement

L'air par cet après-midi d'automne était d'une grande douceur et les montagnes au loin se découpaient avec une clarté froide. Malgré tout, je ne pensais guère à elles mais seulement à mes pensées. Tout ce qui avait été me parut plus triste que si tout cela n'avait jamais été.

FERNANDO PESSOA, (voir acolytes) in "L'éducation du stoïcien", éditions Christian Bourgois, 2000.

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Le caillou grossissait en colline comme un être vivant, au delà, la lumière généreuse de Septembre évoquait par instants le soleil de Corinthe. La sûreté toute humaine allait en bercements. J'étais peut-être ici coincée sous les ratures d'un roman à tiroirs, une copie dans l'espace qui pouvait reproduire pour un autre regard, agrément ou désagrément, tout me biffait alors par la force illusoire que je mettais à vouloir me rajouter au monde en ayant l'air d'occuper des vêtements camouflant des pensées opposées à tout ce que j'étais.

Je virais à l'ersatz mais parvenais toutefois à suivre les conversations y répondre poliment et les personnes croisées ce jour là, ont dû s'imaginer que j'existais vraiment. Nous avons échangé quelques banalités, comme les banalités paraissent encore des preuves du temps qu'on passe ici au temps qu'il fait là bas, nous constatons bêtement, qu'il est bon d'exister, présents avec nos chairs, ce rire bête au dehors, un gloussement, à peine, echo de la volaille, et le balancement de couleurs agréables sur des nappes à carreaux rouges et blancs sous ce ciel gris-bleuté, c'était un enchantement.

Quand le jour veut tomber, des mains molles font des gestes puis rien, absolument rien n'en peut demeurer, juste après ce sourire qui n'exprimera jamais autre chose que le contraire d'un air riant, on dirait qu'on s'y croit éternellement vivant, à causer sans manière, près d'un panneau montrant la douzième biennale d'art qui sème un peu partout une images du cochon puis cette tête de garçon - une photo réussie - d'un visage assez tendre portant autour de l'oeil les traces noires d'un violent rififi dans la gueule, c'est si bon, la violence, quelques ruines permanentes, des miroirs grossissants qu'on regarde par dépit de ne pouvoir les fuir. Et si on le pouvait, sans doute on passerait son temps à ne faire que ça:

prendre des raccourcis qui rallongeraient la vie, on s'éviterait parfois de se retrouver happé dans les plans irréels dont on nous persuade qu'ils sont notre présent, à la fin on y croit dur comme fer et ça doit s'intriquer plus ou moins dans les plis ou plus exactement, c'est un passage forcé, on serait les obligés des profusions d'images qui nous compileraient, s'approchant au plus près de nos centres d'intérêt, on s'y adapterait.

Au mieux c'est un reflet, tant de jours on espère qu'il se passe quelque chose en dehors de ce vide qui pourrait nous heurter au nerf des éléments comme surprendre le caillou rouler et s'écraser contre une Tête d'Or cachée dans les marais, et qu'enfin réveillée elle déchire les reflets et les enterre là bas, justement à l'endroit précis, où l'on ne la trouverait pas.

Ca changerait le trajet avec d'autres couleurs, la terre de Sienne brodée des sublimes strobilanthes. Mais ici rien ne bouge, pour le mieux on attend un immense évènement qui convierait les fleuves à devenir torrents, et par le cours du temps on serait ces ballants repris dans les colères on se transformerait, on serait le ruban, courant se purifier dans les éclaboussures.

Au mieux on sera le clampin qui s'en va claudiquant à son bureau de tabac au coin de la rue Say, (tu sais mais tu sais rien), entre deux vides, on serait celui qui fait son plein, un sac dessus l'épaule, à parodier les charmes qui émanent de ce monstre dévorant la parade, suivant d'autres ballants promis au menu sort, dans les joies des achats qui nous tiennent harmonieux comme des produits vitreux dérivés des trésors pour ballants-matamores. Truffes au guet, dos cinglé, dans un léger cafard caché par les formules qui s'autorisent la valse, et des ronds de fumée au milieu de l'azur, on se roulerait dedans, on piétinerait les rousses qui hantent la Tabareau et frottant sur tout le monde sa belle rangée de dents, on serait prêt à l'ouvrir pour dire n'importe quoi, on parlerait du temps:

"demain il fera beau, malgré quelques rafales dûes au violent cyclone venu des Philippines...".

Contre l'abêtissement, qu'est ce qu'on ne vous dirait pas ? Et puis clopin-clopant on se trouverait un banc, on irait lire l'avenir dans les feuilles rosissantes, on les aimerait vraiment, et on regarderait gentiment trembloter leurs ombres moins béantes que nos songes balancés aux torrents, voguant dessus des feuilles, puis dessous bringuebalant et dehors et dedans, et inlassablement...

 

  

Photo: Voyageuse immobile, contemplant un chef d'oeuvre d'ombres chinoises en presqu'île, biennale off d'arbres rares encore verts, d'où prélude...

 

 

Lyon © Frb 2013.

mercredi, 20 février 2013

Déboussoler

Ce n'est pas aux battements de son coeur que l'on juge de l'état d'une société, mais à son pas.

R. MURRAY SCHAFER in "Le paysage sonore", éditions J.C. Lattès, 1979, réédité en 2010 aux éditions Wildproject - collection "Domaines sauvages", préfacé par L.Dandrel et J.C. Risset.

les gens.jpg

L'hiver trainait encore baladant ses ombrages, dans les salons chauffés. La foule s'exposait à la foule, la foule sortait du froid. Tout encore plus compact passait entre des portes. Tirer, pousser, monter, payer, descendre, remonter, rentrer. Nous avons fait mine de ne pas retenir ce que racontaient les journaux, ces titres dont nous parlions: la dèche et de toutes parts la dépression :

MARSEILLE. Une bouteille de gaz explose devant un restaurant

LISIEUX. Une élève de 15 ans accouche dans les toilettes du lycée

METZ. La policière avait équipé le commissariat avec une TV volée

NANTES. Il s'immole devant pôle-Emploi

Nous sommes devenus plus légers à force d'être assiégés, portés par l'affluence, et pour des histoires à venir autant d'oublis passés, à ces lueurs présentes encore l'oubli partout:

PERIGUEUX. Il vole des bonbons : 1 an de prison

LYON. Pour ne pas dormir dans la rue, une quinquagénaire handicapée, se fait condamner

ALES. le professeur volait ses élèves

etc... etc... etc...

Nous avons jeté les journaux par dessus bord, nous avons fait escale près du parc, nous avons laissé les voix dérouler quantité de paroles dont chaque émission semblait se dissoudre aussi vite, entrer dans un tissu de bruits, au passage des camions, crépitement des places, musiques électro-pop, batteries de guerres, faits divers, tranchées, oppressions, brèves saillies, mauvaises langues... Tant de bruit, raz de marées, ruts, et fuites, tant de claques, et si peu de nous préservé, nos enthousiasmes s'épuisent sur l'information scandaleuse, écrasant à mesure le peu de connaissances, et cette intimité dévoyée dans les pages, harassant un instant le vide sur les beats hypnotiques, le temps mène des troupeaux fragiles, la neige urbaine se transforme vite en boue, et cette crasse, cette drôle de crasse en nous, baladée devant les instituts de beauté. Tous les coeurs semblent à bout.

Le paysage Lo-fi qui nous entoure n'ayant jamais connu la perspective, sans doute, avons-nous depuis longtemps cédé la partition à cette musique de fond compressant les courbes dynamiques, nos pas flanchent derrière nous. La cible a calibré d'avance notre goût, nous l'avions ressenti bien avant que la rue nous pare de thermostats d'ambiance. Un défilement calme et logique prévoit l'imprévisible, nous pourrions adapter nos esprits à la dèche et à la dépression, les murs agrémentés de caméras "vidéo-surveillance", d'écrans plasma, de la musique partout, des musak nostalgiques veloutent le présent, tout allant dans le bon sens, nous admettons que cela peut servir un certain équilibre. Nul ne pourrait saisir à ce jour, le point de mire, le prix réel, les conséquences. Nos singularités peu à peu se réduisent à ces paysages uniformes. Nous avons l'air d'être là, nous formons peut-être un amas comme ces étoiles jeunes nées dans un même nuage moléculaire, qui commencent à s'éloigner progressivement les unes des autres.

Nous abordons des pistes indéchiffrables, l'esprit dans l'espace, le corps sans territoire nous goûtons simplement aux plaisirs de dilapider, la crise dans la nappe musicale peu à peu s'apprivoise, L'inanité creuse en nous docilement le manque et le besoin d'aimer. Nous tuons le temps. Nous posons nos paquets, puis ces corps qui ne semblent plus à nous et le plus tranquillement du monde, nous écoutons sous nos pieds, les tapis roulants ronronner jusqu'aux prochaines gares.

  

Photo : Fin d'hiver à pas frileux, dans une rue presque atonale au nom classique dite: "rue de la République" réduite à cet inexorable fait, la compression (ou peut-être, une idée mutilée), le ton restera atonal, un nom plus cool s'ajustera à la modernité nous dirons simplement (ou homophoniquement la ferons ouliper) mais abréger à l'ordinaire, nous dirons : "rue de la Ré".

 

Lyon © Frb 2012/13

04:09 | Lien permanent

mardi, 28 août 2012

On rentre à la maison

Si la maison vous déplaît, en un clic dans l'image tout peut se remplacer.

 

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About the obsolescence :

On ne va pas éternellement s'encombrer de rêvasseries. J'efface donc le trait d'irréalité  et ni vu ni connu le remplace, biffant du même coup la vacance, le courant de rentrée ne s'y prête pas.

A noter qu'il y a peut-être une certaine audace dans l'architecture aiguepersironne qui saura naître, demeurer, disparaître sans l'assentiment de notre regard.

C’est ainsi que, selon l’opinion, ces choses se sont formées et qu’elles sont maintenant et que plus tard elles cesseront, n’étant plus entretenues.

 

Eclairages : http://www.fabula.org/actualites/parmenide-le-poeme-fragm...

Repérages : merci à Paul et Raidi pour.

Photoon the Aigueperse's road, made in Nabirosina.

 

Aigueperse © Paul-Raidi pour-Frb 2012

jeudi, 16 août 2012

Vitrailler (I)

Oh n'est-ce pas mon Christ, mieux valait l'esclavage,
Les terreurs et la lèpre et la mort sans linceul,
Et sous un ciel de plomb l'éternel Moyen-Age,
Avec la certitude au moins qu'on n'est pas seul !

Jules LAFORGUE, extr. "Certes ce siècle est grand !" in "Poésies complètes", (références incomplètes).

vitrail &.jpgLe temps allé, nos corps se trouvèrent suspendus, il fallait bien choisir entre le haut ou le bas. Nous sommes demeurés dans cette position indécise, un peu voûtés comme les  plafonds en voûte d'arêtes du petit édifice.

L'assemblée est debout, ramassée dans son cercle, elle sommeille.

Quand viendra l'heure de rentrer, il sera difficile de rejoindre les bruits. Entre la solitude et cette clameur là bas, il y a l'ombre d'un homme qui vient chercher la somme déposée dans les troncs, c'est la recette des cartes postales à cinquante centimes pièce. Il marche sur la pointe des pieds, il a fait le signe de croix, c'est une sorte de vicaire. Et toi tu vis de ça, du regard porté sur l'original au milieu des imitations, de l'envie allant au plus simple esquivant les complications de la vie ordinaire, elle aussi, a fini par te coller une lucarne dans l'oeil et tu t'enfuis là haut saisir les éclats de couleurs. La volonté de tout saisir a fait de toi un courant d'homme qui court et court sans cesse après quelque chose de nouveau, même si cette nouveauté reproduit avec précision un savoir millénaire, cela ne rencontrait pas ton rêve. Tu te promènes en touriste comme tout le monde. Un vitrail te sidère. Ta voix veut s'y loger.

A cette heure, tu devrais être avec les autres, sur la plage et tu ris de toi même, toi, le fauve à genoux, l'incrédule amusé qui s'en revient lustrer son corps sur cette pierre. Tu es tombé ici et tu tais ce hasard. Un voeu de Moyen-Âge traverse ton histoire. Tu t'es dit un instant qu'il serait temps peut-être, d'abandonner le reste, si tu le peux encore.

L'assemblée s'est tournée vers toi, elle met un doigt sur ta bouche, comme une seule émission elle te prie. La voix baisse c'est à peine, se taire, tu ne sais pas.

Tu croyais aux rictus de ces diables surgis des chapiteaux, et encore tu t'exclames, pour ce peu de silence...

Pourrais-tu leur reprendre ?

C'est le même rictus qu'autrefois. Ils t'intriguent ces vieux, avec le même dos rond qui passe en communion, quand ils baissaient les yeux à cause du jugement.

Ils t'effrayaient parfois, au delà de leur âge, il y avait autre chose. Tu n'as pas tout compris. Voulaient-ils te prévenir quand toi aussi un jour, tu marcherais voûté et monterais là haut ?

C'était inadmissible de semer la terreur dans l'esprit des enfants de faire d'eux des petits vieux avant l'heure. A présent l'assemblée ne te juge pas, elle rêve, entrée dans ses prières qui vont avec les pleurs et tout ceux que l'on pleure déjà nous pétrifient.

Tu aimes cette clarté du choeur et des travées contre l'obscurité du bas côté où le visage repeint de la Vierge-Marie semble attendre que l'on répare aussi l'enfant blotti contre les plis d'un voile cœruleum. La statue a été soigneusement inclinée derrière une pancarte qui demande une faveur : "prière de ne pas toucher / restauration en cours". 

Par l'allée principale les figurations de l'enfer ne te semblent pas plus sérieuses que ta tête quand elle sort de la nuit, ébouriffée, broyant dans une image une foule illuminée qui disait les messes basses et troublait ton sommeil. C'est comme au cinéma, ça tourne, ça se répète, ça rejoue d'autres scènes: les sentences arbitaires, l'improbable veau d'or... Un sacré beau désordre : il grouillait de bonhommes qui criaient au miracle, de gouailleuses parigottes s'entichaient d'un sauveur et Robert Le Vigan prenait son rôle à coeur,  dans la chair mortifiée d'un Jésus aberrant guidant un peuple élu qui ne peut s'y retrouver. Cette mémoire revient noire de monde...

Ils montent le long de la colline,
Chacun le front couvert d'épines...
Par centaines...

Toi, tu étais enfant, ces vieux jetaient au ciel les cailloux qu'ils trouvaient en chemin, ça leur faisait des têtes de perpétuels orphelins. Ils revenaient parfois ramper sous forme de bêtes, elles peuplaient les armoires dans la maison austère d'une cousine Charliendine ou d'une tatan chartraine. Les têtes de fouines glissaient sur des manteaux immenses qui ne sortaient que le dimanche. On te prenait la main. On t'emmenait à la messe. Tu trottais derrière eux. Tu aimais ces vitraux qui rappelaient les cubes ou les étoiles de mer avec ton imagination tantôt géométrique tantôt bercée de sphères. Déjà tu ne savais plus  comment faire pour choisir entre le haut, le bas. Le mieux eût été de demeurer toujours ainsi, pendu dans l'air...

Tu ris parce que ces vieux sont devenus d'hier. Ils ne te font plus peur à présent. Ils prient, ils pensent à eux. Ils se consolent entre eux. Ils ont peur des cailloux qui rouleront dans ta bouche, quand tu les chasseras. Ils savaient bien pourtant qu'au temps venu personne ne peut passer son tour. Ils croient que l'heure est proche, ça les hante, ces comètes, les pôles à la dérive, la barbarie, les guerres. C'est écrit dans le livre et même dans les vitraux, des genres d'apocalypse...

Tu contemples ces simples qui mettent des croix partout : aux chemins des calvaires, aux murs des crucifix...  tu ris un peu de tout, avec ta science qui pèse, ton jugement qui claque mais ne flambe pas les mitres. Viserais tu le haut avec tes rimes en raout ? Tu te crois tellement libre de savoir lier ton verbe à ces sortes de vrilles que tu finis aussi par mettre des croix partout : dans des cases, sur des plans sur les gens, sur le blanc, parfois sur tes amours, et ta bouche énumère comme ils faisaient hier, tout un tas de hantises. Tes images nous délivrent. Tes fidèles adoreront un jour ta face de chèvre. Nous te regardons rire sans savoir quoi penser, quoi tirer de nous mêmes. Pour apprécier pleinement la lumière du dehors entrée par les vitraux, peut-être faudrait-il nous crever les yeux puis en fabriquer de nouveaux qui ne soient pas tentés de nous refléter dans tes images.

Au milieu de l'allée, tu as ouvert un sac, tu as sorti des miniatures d'outils afin de mobiliser l'objectif sur ce noyau de vieux, tu les prends, tu les cadres, les traques et les mitrailles comme si tu désirais que l'image te révèle le verrou de leur Dieu. Le ciel t'appartiendrait. Tu nous libérerais avec cet air badin qui voit dans un vitrail, un produit idéal. Capturant l'éternel, tu pressens la tendance, le charme vaste et mystique de nos prochaines vacances. Cet air ne mange pas de pain, il multiplie les êtres postés en file indienne entre les cars multicolores et les modillons minuscules qui veillent sur le jardin de l'ancien presbytère. La place est pleine de monde espérant l'ouverture du choeur par un portail, une excursion bancale sur un rai de lumière. Comme il pèse à présent ce chant des vieux qui tardent dont le silence se perd encore dans la question.

What are you doing after the apocalypse ?

 

 

 

 

Photo : Récemment restauré par l'artiste Rachid ben Lahoucine, ce vitrail magnifique a été photographié en la petite église de Bois St Marie (voir billet suivant ou précédent ICI). Le rendu des couleurs du vitrail n'a pas été modifié par quelque procédé photographique, seuls les murs déjà très sombres de l'église ont été un peu assombris. Pour mieux voir vous pouvez cliquer sur l'image.

Là bas © Frb 2012

dimanche, 08 juillet 2012

Coutances

Le dépaysement demande un pays d'origine

 

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 A suivre, peut-être...

 

Photo: Comme un dimanche à Coutances inspiré par la lecture du petit livre de J.B Pontalis intitulé "Loin".

 

© Frb 2012

mercredi, 14 décembre 2011

Aventure

Voici la troisième version d'une œuvre qui m'habite depuis près de quinze ans et dont la réalisation finale m'a demandé plus de deux années. Version profondément modifiée dont la durée est presque doublée par rapport aux versions précédentes.

FRANCIS DHOMONT extr. de l'éclairage par l'auteur d'une composition acousmatique intitulée "Forêt profonde".

il y a une route.jpg

En cliquant sur l'image, vous entrerez dans l'univers sonore de Francis Dhomont pour écouter l'oeuvre "Forêt profonde".

La suite de l'éclairage :

Entreprise treize ans après "Sous le regard d'un soleil noir", "Forêt profonde", s'inspire, elle aussi, d'une réflexion psychanalytique, C'est une lecture adulte de contes pour enfants qui se balance entre le souvenir des émerveillements naïfs du compositeur et la découverte de leurs mécanismes secrets.

Peut-être cette hésitation entre deux âges présente-t-elle le risque de ne s'adresser ni à l'un, ni à l'autre ?  Mais il se peut néanmoins que l'intuition magique de l'enfance, qui en nous ne dort jamais que d'un œil, rappelle des révélations enfouies et que l'esprit rationnel prenne plaisir à déchiffrer, sous le contenu manifeste de cet inconscient universel, la logique de son contenu latent.

Il s'agit d'une écoute à trois niveaux — romanesque, symbolique, musical — plus déconcertante, sans doute, mais plus active que l'écoute unidimensionnelle.

La trajectoire humaine de Bruno Bettelheim, dont la réflexion est à l'origine de ce parcours étoilé interfère, pour des raisons évidentes, avec ces histoires de jadis qui nous questionnent encore sur notre époque.

Dans la "forêt profonde" de Francis Dhomont : cette visite guidée de l'âme enfantine n'est, à vrai dire, qu'un retour au monde initiatique — à la fois cruel et rassurant — des contes de fées. Ci dessous un extrait lumineux écrit par Bruno Bettelheim.

 

cf. "La psychanalyse des contes de fées" : (Extrait) 

Tout conte de fées est un miroir magique qui reflète certains aspects de notre univers intérieur et des démarches qu'exige notre passage de l'immaturité à la maturité. Pour ceux qui se plongent dans ce que le conte de fées a à communiquer, il devient un lac paisible qui semble d'abord refléter notre image ; mais derrière cette image, nous découvrons bientôt le tumulte intérieur de notre esprit, sa profondeur et la manière de nous mettre en paix avec lui et le monde extérieur, ce qui nous récompense de nos efforts.

 

Remerciements à Francis Dhomont, au site Arts sonores et à l'INA.

Bonus à lire : ICI

Source-liens  : by Paul avec l'oreille bienveillante de Raidi pour.

Photo  : by frasby, Loin des regards, une forêt.

© P /Frb/ Rp 2011.

mardi, 30 août 2011

Du peu qu'on ne sait dire...

Je suis long à prendre des déterminations, à quitter des habitudes. Mais quand les pierres, à la fin, me tombent du coeur, elles restent pour toujours à mes pieds et aucune force humaine ensuite, aucun levier n'en peut plus remuer les ruines. Je suis comme le temple de Salomon, on ne peut plus me rebâtir.

FLAUBERT extr. d'une "Lettre à Louise Colet" datant du 6 juin 1853.

du peu qu'on ne sait dire,passé,présent,été hiver,mondes réels,mondes virtuels,correspondances,gustave flaubert,louise colet,pérégrinations,errances,digressions,espaces,inanité,solitude,isolement,multitudeSa mémoire recensait un peu tout ce qui remuait dans l'ombre, d'autres brassaient sur des écrans les nouvelles du soleil à venir, ça donnerait au milieu de Septembre une illusion de feu dans la lumière. Le vieux, il racontait hier, que "lorsqu'on voit sortir le museau des taupes, c'est toujours signe de mauvais temps". En attendant, l'été finissait, éclairant toute chose et même les yeux si parfaitement éteints de nous autres les promeneurs, qui prenions l'ocre pour du jaune, et l'herbe brûlée pour du foin. Ceux qui ne remarquaient rien craignaient juste que la fraîcheur du soir porte en elle les tourments aux heures les plus sombres, tout le dépressionnisme des jours qui précèdent la rentrée des classes, et s'installe longtemps à l'avance, ils redoutaient les nuits noires, de longues nuits où se bousculaient les fantômes, cela réveillait les chagrins qui se figeaient par les brumes au matin. Partout on savait qu'on allait vers une saison plus triste, chaque année c'était toujours comme à la fin, toujours les mêmes célébrations. On revivait la fin du monde une fois l'an, partout où grossissaient les ombres si démesurées qu'elles semblaient pouvoir annuler en chemin, toutes les illuminations de l'été.

Les vieux buvaient encore sous les platanes, on voyait sur leurs gueules la chaleur qui remonte par les tonneaux de vin. On attendrait qu'il pleuve, ou qu'il vente pour rentrer les bacs à géraniums et les chaises de jardin. Ici, du tonnerre de Juillet on s'en souvenait, par delà les décombres, il avait fait grand bien, balayant les anciennes demeures où le malheur frappait toujours, la foudre était tombée sur le grand chêne rouge, cette fois, il n'en resterait rien. On parlait d'un malheur ici, on espérait encore que la force du vent puisse détruire en même temps le souvenir funeste de ces gens qui portaient le malheur avec eux, trop sûrs d'eux-mêmes pour qui la cruauté semblait une force à offrir en modèle ravivant la faiblesse d'en finir avec nos faiblesses, mais on n'en soufflait mot, ce qu'il restait d'embarrassant, venait comme une maladie qui courait encore dans le ciel et l'on se sentait vaguement étranger, tâchant de se protéger au mieux de ces gravités trop humaines qui creusaient des tombes en dedans. Que n'auraient-ils pas fait, ces ambitieux, pour obtenir l'assentiment du plus grand nombre ? Hélas, ils l'obtenaient. Ils parlaient à tort à travers et les autres écoutaient, attrapés par les belles formules, des mouches attirées par le miel et ces semblants d'amour qui venaient flatter par défaut le manque. Aucun des spectateurs ne saurait dire si la source d'un tel amour n'était pas remplie de poison. On ne pouvait plus répondre aux questions, miel et poison, c'était dans l'air. C'était là notre vie présente, on en ferait un commerce égal à nos fausses compassions. On ne pouvait ni juger, ni s'y plaire, on écoutait en prenant garde de ne pas se trouver happés par la trop vive lumière que des ombres moins prévisibles écraseraient un jour en passant.

Sous la toile aguicheuse patiemment ouvragée, il y avait des doublures, des motifs piqués de frelons, un tissu cachant la vermine, des peaux de bête qui sait ? Et les monstres grimés allaient comme des loups de légende, poser cette caresse aux carrefours où des colporteurs faisaient feu de tout ce qui restait. Jusqu'au bistro d'en face on retrouvait les moues les mêmes, depuis des siècles, des créatures obscènes des chapitaux romans et des masques de plâtre. Les femmes aussi, elles portaient leur silence en dessous, à force de devoir endurer toute la boue que les hommes éconduits avaient dû déverser sur elles. Sous des coiffes impeccables et les fausses dentelles, elles pouvaient ressembler tantôt à des sorcières, tantôt à la Sainte Vierge, dont le visage, sans aspérité révélait une férocité naturelle qui faisait douter de leur sainteté, on ne pouvait plus dire si leur joie apparente était une peine ou leur peine un rire plein de méchanceté, de rancoeur ravalée jusqu'au sacrifice pour leurs mères elles mêmes sacrifiées. Aucune image, ni aucun livre n'avaient osé clairement nous dire si cela était faux ou vrai.

On marchait quelques kilomètres plus haut, la terre couvrait de souvenirs l'histoire de ces conquérants courageux. On retrouvait émerveillés les premiers écrits des trouvères, ceux du jeu de parti sous le palefroi d'un chevalier, dans les formules abolies on prenait soin de s'abolir ainsi, tout alentour allait aux pas de ces anciens poètes-guerriers partis un jour forcer les portes de la terre. On appréciait encore le charme des fenêtres à meneaux, on se promenait dans les chapelles où sous les voûtes en berceaux, on pleurait seul mais tranquille. Après s'être isolé par cette apaisante lumière, on se retrouvait dans la rue d'une ville, on se sentait perdu, vendu, défenestré, redirigé à contre-coeur vers ces nouveaux commerces où plus un seul humain ne pourrait bientôt choisir d'aller seul sans se trouver brusquement isolé, (encore qu'il reste à préciser, la différence à la fois intime et infirme entre la solitude et l'isolement). Ce nouveau monde nous forcerait-il à appartenir, (qu'on le veuille ou non), à quelquechose d'infiniment plus désarmant que la solitude ou que l'isolement ? Oui, et sans grâce, pour l'heure on se sentait presque obligé d'en accepter l'exubérance, et sa loi, cette inanité.

Lentement, on verrait se tramer les éclats de ces petits mondes, un mirage pour chaque chambre, cela nous donnerait-il la somme d'une totalité encore insuffisante ? Des vies où nous ne serions plus ni assez seuls ni assez libres pour réfuter nos dépendances. Cette nouvelle religion était si expressive, si idéalisée, que par mégarde on s'y logeait comme rien, galvaudant nos secrets, jusqu'à ceux qu'on avait juré de ne jamais trahir, pétri par cette masse, embarqué, on acceptait d'y étaler maintenant nos amitiés pareilles aux marchandises, pourvu que nous soit accordée, un court instant, ce peu de reconnaissance qui nous "fait", celle qu'on croit toujours mériter ; comme si tout était histoire de "mérite". Pour quels égards encore, serions-nous prêts à nous laisser "choisir" ? Envisagerions-nous aussi naïvement l'idée que la seule valeur défendable à ce jour fût encore la liberté d'expression ? (de chacun, bien évidemment), une fiction parmi d'autres, tout comme l'intelligence (du coeur ?) que mon ingratitude ne me permettra jamais d'exalter à si bon compte, mais ce regret inconsolé trouvera peut-être plus de sérénité à savoir qu'il est plus facile de montrer ce qu'on n'a pas, que de se regarder au miroir de ses propres contrefaçons.

Bientôt, il y aurait des courses pour chaque histoire, de compétition en compétion, des preuves au transfert de ce mal, le retour de toutes sortes de préventions, maldonne organisée pour le bien du grand nombre : retour de la morale, prise en charge de l'expression de nos forces diminuées et toutes les trahisons de nos plus grands espoirs seraient à mesure consommées. Il y aurait l'oubli de ces merveilleuses constructions, l'écroulement des cabanes pour d'autres garanties, plus solides, tout cela permettrait de nouveaux paysages. On construit déjà les maisons. On met aux loisirs tant de pages, au catalogue quelques balises et des combinaisons pour grimper dans les arbres, le retour à la vie sauvage encadrant les nouvelles colonisations. Il nous paraîtra encore délicat de poser autour de ces miasmes des bâtons d'encens parfumés. Ou bien, on ira dormir dans la crasse, par les ruines volées, imparfaites, un instant détaché de tous, scrutant le vide omni-présent dans la nuit qui vient à rebours et sous la bonne étoile qui nous relie aux trois mille autres, visibles à l'oeil nu, peut-être choisira-t-on de ne pas voir, de n'y puiser que le néant, l'immense empire impénétrable ou le noir à portée, cependant il faut toujours un peu choisir, quoiqu'on en dise ... On cherchera encore ce qu'il y aurait de charme à vivre, pas plus que le présent, pour tout le peu qu'on sait, intraduisible. On cherchera.

Photo : Si l'hiver vient comme un mouton, il s'en ira comme un dragon dit un ancien proverbe hivernal. Mais ce pays n'est pas l'hiver et la bête n'est pas le cerbère du temple de Salomon, c'est juste un doux fauve pétrifié par le temps, saisi là haut sur la montagne, on ne le trouve que si on le cherche, il est caché par les buissons près des cailloux sous lesquels remontent les légendes anciennes comme celle d'un trésor qui se trouvait enseveli sous une pierre tournante, dans ce monde, (le notre) la bête garde encore de nombreux souterrains, je vous ramènerai peut être un (certain) jour quelques extraits de ces  légendes encore vives qui viennent de la Montagne de Dun, dominée par une minuscule chapelle. J'ai sous les yeux les notes de trois érudits de ces mondes (Mr Jean Virey, les abbés Paul Muguet et Henri Mouterde), qui ont narré dans un ouvrage admirable, paru en 1900, l'histoire de "Dun. Autrefois, aujourd’hui". Rien à voir avec notre monde... Petite promesse, peut être à suivre...

Photo: © Frb 2010.

dimanche, 17 juillet 2011

La plage

Nous nous hâtons, pour survivre, de confondre l'univers avec le tissu d'amitié dont nous sommes entourés, tant il est vrai que le plus difficile dans l'existence c'est de ne pas se laisser décourager par la solitude.

VLADIMIR JANKELEVITCH


pluie_0011_2.JPGJ'attendais sur la plage, le vent brouillait les personnages tout ce que nous avons cru voir ne pourrait exister ici. A nouveau, tu voyais la pluie inonder ton pays. La rue prit une couleur de cendres. Rien ne saurait prouver que c'était réellement la pluie de ton pays qui venait dans ma rue. La pluie retombait dans la pluie et la pluie balayait la pluie. Un fil enroulait le pays, la tristesse de Novembre se moquait de la plage, et nos joies ruisselantes furent lasses de se baigner dans l'eau de ces fontaines aux abords vert de gris.plieG_0014_2.JPG

Nous ne pouvions nous retenir de courir sous la pluie. Le chaud et le froid soufflaient l'ombre au milieu des reflets, je fondais pour eux mais je sens l'idiotie nous surprendre quand tu ouvres ton parapluie qu'il se tourne à l'envers sous le vent, tu le jettes à la rue, le reprends, puis pareil, tu fais tout pareil à nos vies. C'est l'idiot qui perd sa baleine paré d'un caban vert de gris c'est toute la nudité du ciel et c'est encore la pluie qui traîne, longtemps après la pluie, la longue pluie de Verhaeren, comme des fils sans fin  [...]


La pluie et ses fils identiques
Et ses ongles systématiques
...

Photo : Reflets sur le bitume du cours Vitton, à Lyon, réflection et fragments d'une plage où les reflets inversent le pays, photographiés un jour de pluie en ce mois de Juillet deuxmille etc...

© Frb 2011.

vendredi, 25 mars 2011

Les secrets de la création

Je me lève à 9H00 du matin, je me couche à minuit et entre temps, je suis éveillé.

Extr de la biographie de DAVID SHRIGLEY

ombres0142.JPGOn voudrait le miracle ou se faire une place au soleil avec des mots qui portent l'ombre. On nouera sans crainte des noeuds faciles à fabriquer, sur la corde raide dans la musique de variété. Jusqu'à la création d'un noeud de coeur assurant le second de cordée contre tout accident. Parfois le noeud glisse, on poursuit seul. Il y aurait un malaise à regarder de près les artifices. Contre eux, on trouverait quelques lois, des entraves à la liberté: un milieu avec ses côtés, ses pointillés prêts pour le découpage, et des correcteurs d'orthographe automatiques moins doués pour le système D que le"Tippex" ou la colle "Cléopâtre" avec son goût de pâte d'amande qu'on mange dans le plus grand secret. On s'entiche dans la joie du pliage des cocottes en papiers pour les yeux d'un coco à la côte d'amour, un instant. On voudrait ouvrir un dialogue avec des personnages, on les coupe de moitié. Pour nous c'est la réalité, on enregistre des conversations avec les oiseaux sur des balcons, on se roule dans les pigeonniers, une fiole d'encre renversée sur ces tables à tréteaux que l'on nomme écritoires, parce qu'on n'en finira jamais avec la création, on collera sans fin, ligne après ligne des impressions recoupées les unes sur les autres afin d'en préserver la trace pour on ne sait qui, comme on regarde le vin mûrir dans des fûts à l'obscurité. Puis on en rira avec d'autres qu'on connait, vivant en nous, loin ou plus près, au milieu des "ah!" et des "oh !" dans les clairettes d'un vernissage, tous ces accents pointus au printemps des salons, à l'hiver, et ces caves, chez ceux qui ne trouvent pas leur place, et qui peuvent en mourir un jour. On abusera des hauteurs de la gamme pour s'enticher encore : "l'art ! l'art ! l'art !".

Sérieux, n'est-ce pas ?
Sérieux, sérieux, sérieux jusqu'à la mort.

on dira qu'on fait l'art, qu'on est l'art, lardés, larbins, lardons. On applique au final, une tête normale qui en bave et s'usage à la cinquième saison pour un verbe monumental, jusqu'à dégommer la syntaxe. L'illusion, serait-elle l'unique point d'amarrage ? Il nous hante, ce rêve ancien d'où vint la joie inaltérable, où le phénix pleure et meurt puis se régale aux secrets de la création, au degré zéro de l'art pendable, au point G de l'amour monstre, au point N de l'amour fou qui fait patiner dans les graves des rimes pour incendier nos ombres sur une pente qui perd le nord et débride les points cardinaux. On ne saura pas dans quel sens lire les déclarations. Le mystère des affinités offre un goût de nectar au poison et le droit d'abolir l'espace est notre don.

Nul ne nous invitera à grimper sur l'échelle du vieil amiral. Nul fondement, nul évènement, ni passé ni futur ne pourraient servir de leçon, peu importe ! voilà qu'aujourd'hui, on s'absente, si jeune, déjà mort quelque part, toujours prêt à renaître, étranger en sa propre fiction. Saurait-on faire autre chose que bricoler notre mémoire ? Valider tout un tintamarre entruqué par des rubis doux. Ces plumes d'autruche sur ton pelage se conjuguent à la perfection avec un mot dont il est temps de connaître le nom. Tu en fais des perles que je porte pour la joie qui est rare. Une plage sur un caillou, des vers luisants dans le bois de Bellegrange, on ne voudra plus chercher ailleurs la divine proportion, on ne pourra plus s'imaginer vivre sans. Il n'y aura pas d'autre choix, pour nous mener plus haut ; et ce peu nous attache. Le vide de nos conversations amusera. Enfin, ce ricanement qui va sur tout, équilibre un peu la maldonne, nous éloigne du grappin d'un monde qui n'est pas fait pour nous. Nous barbouillons ensemble les panthéons dans ces couleurs crépusculaires, le sabordage est notre divine solution, infidèle à l'originale, il nous tarde d'en jouir, tellement nous l'attendions.

On poserait sans y penser les pieds sur une étoile, ailleurs tous les voeux armeraient d'opiniâtreté, les hommes empressés d'arriver. "Arriver" est un drôle de mot, qui ne dit pas la solitude mille fois écrite ou filmée parfaitement, illustrée par le grand Emile, reprise par quantités d'escrocs qui balaient nos songes, volent la route, se pavanent comme des majorettes font tourner des bâtons dans des foires, avec le nom de "saltimbanques" en titre. Les voilà prenant des grands airs garants de la vie de bohème, "saltimbanques", "gens du métier" autant d'artistes... Nous sommes tous des Michel Drucker. Ils disent avec solennité : "pour réussir, l'artiste doit aller charbon, que le charbon c'est un métier, et quel métier ! diable et misère !" Que savent-ils du charbon et de la misère ces escrocs, qui ne sauraient sacrifier ni enfant ni épouse, ni le canapé du salon, pour vivre peut-être mal, mais libres ?

Ailleurs, un coureur ouvrage les fusibles dans l'alchimie brutale du feu de l'eau, de la terre et du vent qui tournent. Il ne saurait s'occuper de charbon. Il s'accroche, puis il se déprave. Il effeuille les jours et les jours, sans souci des révélations ; que l'art soit mineur, ou majeur, là n'est pas la question. On s'étonne dans les pages sur une ligne fébrile qui glisse par accident dans la ligne d'un autre, il se peut qu'elle révèle, là, le point d'amarrage, ici un grand désir de versifier le monde. Juste après le néant, il y aurait encore un fil. C'est autant de foulées au dédale où l'on compte et recompte les morts, à se coucher à vie au milieu des oeillets dont le rouge ouvre à la passion, on partagerait le fil d'Ariane en suivant le fil des saisons. Certains charment les tombes ou caressent les craquelures d'une toile, ils y retrouvent l'origine presque intacte, les pas foulant une route qui ne s'arrête jamais, une planche dans une mare ne servirait de pont que pour peindre des nénuphars. Et l'autre, à tête barbouillée de charbon, viserait un chemin qui déraille du côté de la nébuleuse d'Orion, aveuglé, cherchant le soleil, ses doigts peignent des cheveux d'anges sous la lune renversée. Une avalanche de boules de neige, des biquets sortis d'un chapeau dériveraient loin des faussaires qui bradent à la criée des perles en plastique au marché où l'on vend des mensonges.

Le temps passerait. Un siècle plus tard, réveillé par un baiser de légende, on voudrait que cet embrassement déplace tout. Il serait beau de croire qu'être seuls à plusieurs est encore un secret de la création. Aux yeux de ces communs du lot, les montagnes deviendraient des pipelines pour achalander l'hyper-Rion. Elles n'accoucheraient même pas d'une souris. Les communs, (ceux du lot), ils ont d'autres occupations. Ils achètent et ils vendent, plus souvent ils shoppinguent. Ils tripotent dans les bricoland, les antennes et les paraboles qui brouillent nos émissions. Nous les croisons parfois, ils sont dignement pourvus de leurs points de vie : ils travaillent "moi monsieur", ils nous toisent, parfois ils nous conseillent ils nous parlent du bonheur, nous offrent la recette ; insolents de santé comme une tête de Mickey riant sur le dos d'un tee shirt.

Photo : Un endroit où on ne peut plus aller et qui ne sera plus jamais tout à fait tel. Ombres et lumières dans un bel escalier au hasard d'une balade à l'intérieur de l'Hôtel-Dieu aujourd'hui livré aux mains des renégats... Photographié un jour d'hiver à Lyon. © Frb 2011.

mardi, 22 mars 2011

Court circuit

Toujours... Toujours il faut que j'aille dans les rues... Et je sens toujours quelqu'un derrière moi... C'est moi même... Et il me suit.

PETER LORRE dans "M le Maudit" de FRITZ LANG, 1931

ombres002.JPGIl est riche de ses actes, il écrit son nom il l'accole aux gens qu'il croise, et cela est sans conséquences, il ne va pas, il ne se contente pas du peu. Il ne prend pas la page blanche pour le début, c'est sa fin, il l'arrange, s'y rajoute, continue l'existence jusqu'à cette stabilité qui l'insupporte, un monde imaginé par tous ceux qui ont précédé, semblables à ceux qui suivent, des tas de gens, des têtes dont il n'a rien à dire. Un niveau machinal, des relations interchangeables à l'infini, il compose à ce jeu un grattage, il ne gratte pas, il se déchire.

Vu de loin, cela contraste avec la notion pour lui, incompréhensible de sympathie. Il élabore des figures qui de près ou de loin l'obsèdent par leur monotonie, il gratte et enterre tout dans son jardin, il rature des pages et des pages jusqu'à l'avènement d'une oeuvre d'art blanche, oeuvre purgée du sentiment, art de s'absorber dans l'espace, de recomposer le désordre avec les éléments. Il se met dans la peau d'un autre qui se trouve déjà dispersé. Le plus sûr de son initiative a déjà échoué. Il voit d'avance, une page qui manque juste au milieu du livre, une morsure au coeur de la toile, les fourches dans les cheveux des filles, un concentré déjà détruit qui contient à lui seul toute l'histoire du monde, celle des hommes et son destin à lui. Dans cette absence, il y a la voie lactée, la conquête de l'espace et l'embrassement d'une fusée avec une étoile filante, la réalité confondue dont il est pure trace,  reliant au ciel sa glaise, son fleuve et son métal, une situation de danger au terme d'un lent acharnement sans aucun but défini à l'avance.

Le cours du temps passe dans l'élasticité de journées indolentes. Aux aguets d'un langage détruit, entre les corps, des bêtes à grosse carapace ont promené sur leur dos, les dépouilles des hommes et des femmes, ceux qui n'ont pu survivre, le résultat grosso modo de toutes les guerres visibles ou invisibles, il ajoute un peu de son corps, qui meurt parfois petitement dans l'amour, se voudrait inspiré, goûtant une telle offrande, prêtant sa chair qui délivre du mal aux baisers de l'éphéméride. Il pourrait avoir honte à se faire aimer trop, sans pouvoir aimer trop lui même, ou aimant trop sa solitude qu'on dit incompatible avec l'amour. Ce on dit, est encore une foutaise. La petite idée se forme dans sa tête qui le taraude pour brûler ce qu'il reste d'obsession à oeuvrer, il voudrait contempler les petits matins, dans la joie de la course à pied, du basket ball, des descentes à vélo sans les mains, tout seul des jours entiers il joue entre des marques tracées sur le sol à la craie, et court sous un panier à essayer de réussir des doubles pas, à s'encourager dans le dribble, les mains apprenant la dextérité en compagnie de joueurs invincibles, qu'il imagine et qui n'existeront jamais. Chaque jour, lui vient de plus en plus d'adresse pour en finir avec le besoin de dextérité. Cela n'est qu'un mouvement dans l'espace juste pour oublier que la pensée peut fondre comme une savonnette. Il est cet enfant souple glissant sur une rampe d'escalier. Il parade le jour. La nuit, il pleure ce que le jour lui a volé.

Des guerres ravagent son écriture, cela engendre une sorte de poème héroïque, avec des idées monstrueuses qui chevauchent des idées sublimes, tous les mots il les plie à sa volonté dans le goût capiteux de répandre l'épuisement sur la terre, l'épuisement des êtres et des lieux jusqu'à qu'il n'en reste rien, ni dedans ni dehors, et la douceur va dans son regard, dans ses yeux bleus ou gris qui pleurent et cela fait comme une pluie de météorites plus loin, ailleurs, il verse l'alcool à brûler dans des fioles d'encre bleue ou grise, un petit feu court sur toute la surface d'une nappe, du genre toile cirée, juste au milieu, il y a un ilôt de cendre qui brille, il y voit une peau de chagrin grosse comme un pois cassé. "Pois cassé", les deux mots roulent entre ses doigts. Existe t-il encore une chose au monde qui ne puisse pas se casser? "Pois cassé", rien à faire, comment casser ce rien ? Les plus petits obstacles sont toujours les plus vains, il devra désormais lutter contre cette chose minuscule qui résiste, dont chaque jour il essaye de s'acquitter au mieux. Le combat à l'oeil nu paraît pourtant facile. Chaque jour il s'applique et chaque jour ayant échoué, après des heures passées, en bras de fer qui l'auront épuisé, il regardera le soleil se coucher, et se dira : "et merde !".

Photo: Une ombre demesurée qui précède ou qui suit on ne sait quoi, on ne sait qui, prise en flagrant délit sur les pavés aux alentours de la bibliothèque de la part-Dieu à Lyon. © Frb 2011.