samedi, 10 novembre 2012
Vers l'idéal...
L’avenir n’est pas encore venu, le passé est déjà bien loin [...]
Il me plaît de marcher de travers ne gêne pas mes pieds. C’est le moment de laisser faire.
ZHUANG ZI : "Oeuvre de Tchouang-Zeu"
Adage : Quand les hommes s'en retournent au pays des Anatidés, ça veut dire que l'hiver ne va pas tarder
Bonus : L'affirmation du jour se multipliera sous l'image et la métamorphose sera presque achevée...
Photo : Saisir à la volée du haut (pas trop) d'une falaise lyonnaise (?) une pêche miraculeuse sur les berges du Mississipi qui ressemblent (étrangement ?) à celles de la Saône, par endroits...
Mississipi ou presque © Frb 2012
22:50 Publié dans Actualité, Arts visuels, Balades, De la musique avant toute chose, De visu, Impromptus, Le monde en marche, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
mardi, 16 octobre 2012
Des jours et des jours à la vogue
Dernière grande fête foraine de l'année à Lyon, la vogue des marrons tire son nom des premiers marrons de l'année et du premier vin blanc qu'on y dégustait, à l'imparfait, rien n'est parfait, bien sûr. La vogue des marrons actuelle a démarré le 6 Octobre elle finira le 11 Novembre 2012.
Qu'on l'apprécie ou non, parler de l'esprit bon enfant de la vogue paraît aujourd'hui déplacé (on ne sait où), même si l'enchantement des jolis manèges hante encore notre époque, c'est une image entre autres, de fête et de flonflons, rien qu'une image légendaire puisque pour la plupart d'entre nous, ces fêtes foraines familiales, bricolées sans manières, nous ne les avons pas connues. Nous savons simplement, malgré la joie délitée, et révolue, peut-être, que si la vogue des marrons, à Lyon, n'existait plus, elle manquerait. Mais je n'ose pas ici employer le mot "fête", la vogue est rituelle, c'est admis dans l'esprit des habitants de cette ville, elle marque un temps dans l'année, juste avant la saison des pluies, les foules du 8 décembre et les marchés de Noël, elle balade aujourd'hui plus d'ennui que de gaieté. On s'accorde à l'idée, on s'y traîne, on y flâne sans penser par exemple qu'au XIXe siècle Lyon totalisait plus de 207 jours de vogue, de Pâques à la Toussaint. Il n'en reste qu'une, c'est celle-ci, on la prend pour ce qu'elle est, entre la vogue et notre esprit il y a des nébuleuses... Nous fermons les yeux sur ce qui manque, ou bien encore heureux, nous nous rattachons aux mémoires idéales de ces mondes enfantins qui suçaient les guimauves une fois l'an, nous nous contenterons des arômes d'un Chardonnay allégeant l'Homme (et son désir), tenterons d'en retenir le dernier tourbillon sans trouver le raccord entre ces vieilles gravures et les temps à venir qui nous invitent à décharger notre poids soucieux ou abêti, matière poreuse ou bons vivants, nous contemplerons en touristes ces rubans colorés où les jeux vont sans nous. Nous ne savons pas comment cette grande usine à attractions valdinguera les corps, pourvu qu'elle ne valdingue pas les notres (pas le mien en tout cas), des furies techno-funk à la nostalgie du mashed potatoes via le rock à l'antique (Elvis, tuning, sodas, ice-cream), l'over-bass brutalise. Les engins crachent le feu, les flammes, au propre, au figuré, nul ne devrait s'en plaindre car l'intitulé ne ment jamais (desfois qu'on n'aurait pas su lire les enseignes kitsch and cheap)...
Âmes vagues décomposées seules ou accompagnées, c'est à peu près pareil, voguant dans l'ennui patent de nos semaines contemporaines qu'il faut absolument secouer de loisirs à grands cris sur la place solidaire plombée par la dérive, l'esprit dans la paillette du pepsi pop, les défilés se suivent et ne tarderont plus à nous s'enchaîner, (8 décembre, morne plaine, ma flamme dans leur publicité) ; rameutent ici ou là un bref éclat entre les bruits, tiraillant nos faiblesses: le caprice d'un enfant qui ne veut pas redescendre du manège, des parents sur des chaises et leurs gueules d'enterrement, des gars avec des franges qui tirent comme Charles Bronson sur des figurines en plastique pour gagner une peluche du bon temps de Pandi Panda, ça reste divertissant de regarder tout ça afin de n'en tirer aucune réflexion particulière. Juste regarder. Et puis voilà.
Flâner entre les hurlements d'humains harnachés par des courroies fixées sur des machines qui montent, tournicotent, gesticulent, brassant l'air, d'accord pour ces crampes d'estomac qu'on se fera à la place des passagers retournés à l'envers, d'accord pour l'empathie-express qui est notre, à ce moment là, superflue, tout-express, même la peur des antres gothiques et ces sorcières qui remuent des balais sur un toit brûlant, même la nuit quand je rentre chez moi, à chaque fois, je suis d'accord avec moi, pour avoir peur de ça. D'accord pour écouter les mécanismes stridulatoires des simulateurs inspirés des plans les plus sombres de L'exorciste qui propulsent mais quoi ? - D'accord pour être propulsée - juste une fois, mais sans rien essayer, parce que la joie d'une vogue c'est aussi de s'y noyer. La vogue n'est qu'une fois dans l'année, alors on peut bien vivre avec son temps une fois, en marchant, pourvu que le boulevard et ses rues parallèles, continuent à sentir la vanille, le nougat, les bonnes gaufres, les crêpes au Nutella... Peut-être vous livrerai-je un jour une traversée by night dans la vogue en sommeil mais je ne promets pas étant donné que c'est déjà un peu ça: une stimulation acharnée qui n'arrive pas à réveiller grand monde, ni grand chose, la nuit au fond de soi, en plein jour, l'émerveillement absent, ou caché sous un air de s'en foutre. Ca validera peut-être cette adhésion sympa à tout ce qui peut plonger l'esprit dans sa paresse, encanailler l'espace avec ses grappes festives d'humanité blasée, toquée de gigantisme, où les bulles énormes font pétiller le corps d'une ville enrobée dans le sucre et la glace à venir. Nous goûtons en deçà, le plaisir monotone de nous disperser puis voguer, ne serait-ce que pour se vouer tout entier à la recherche éperdue du premier cornet de marrons chauds. Chauds, chauds, chauds, les marrons ! où sont-ils ?...
Au hasard, la plus réaliste de cette expédition en quête de marrons, (chauds, chauds chauds), rend le pas tiède ou triste, mollement nous grillons nos cartouches à l'américaine sur de vraies carabines, tellement bien imitées (des Kalashnikov, on dirait) sans la moindre biquette à caresser, ni un cheval de bois dont on fait les violons, pas de quoi pousser la chansonnette. Nous croiserons plus tard, le nez de Pinocchio qui s'allonge, s'allongera, grâce aux reflets multicolores d'une flaque d'eau. Cela vaut les discours sur les fameux marrons, promis en cette vogue, seule vérité discordante, ô spleen de nos nuits sans marrons, moins folâtres que les nuits sans Oscar Wilde, (à ce point d'inanité, je vais me faire un peu de réclame) ; le marchand de marrons (nous apprendrons le jour d'après, que c'est en fait, une marchande) serait-il du genre lève-tard ou couche-tôt ? Nous le cherchons nous le trouvons. Le stand est minuscule, il est doux, il sent bon, c'est tout ce qu'on vous dira de cette première tentative sans pouvoir plucher le maroncho, c'est un peu de ma faute, je ne sais pas jouer des coudes en société, ainsi je n'ai même pas eu le culot de bousculer quelques badauds, pour photographier le fameux stand aux marrons, parce qu'il y avait devant, les personnalités de la colline : Monsieur Marcel Rivière (et sa femme, la grande, dont je ne me rappelle plus le prénom) qui charmillonnaient discrètement avec un Alceste entièrement caché sous une toge recouverte d'écorces avec des feuilles rousses et ocres made in Tabareau collées sur son chapeau évasé par le haut en multiples branches ornées de nids de hulottes revenues de Couzon, je n'osais déranger, et ne fixais pas mon objectif afin d'obtenir un cadrage (presque) parfait sur les mains des personnalités qui tenaient leurs cornets de marrons comme on tient des cierges lors des grandes processions hivernales (par exemple, celle en l'honneur de la Sainte Vierge, nous en reparlerons peut-être...). Il faut dire qu'affecté par les privations, on glissera dans la romance de toutes petites choses pourtant vraies, à ce sujet fragile, j'ouvre une parenthèse puisque je ne peux décemment exposer ici Monsieur Alceste piquant à pleine branchées les marrons de Monsieur Rivière, (à lire prochainement "Les marrons de Monsieur Rivière" un inédit issu des carnets de la mère Caquelon, poètesse Lyonnaise oubliée, grande copine de la Mère Pompon qui mit au point la recette des quenelles de marrons, plat mythique servant à décupler le courage des canuts lors de la révolte en 1831, - là, j'exagère, mais c'est un des nombreux effets secondaires produit par le manque de cornet aux marrons, quand on en goûte un seul, ensuite, ça dure, une vie parfois - quant au livre, je l'ai déniché récemment dans un vide-grenier de la Tabareau, on ne dira jamais assez - surtout en plein coeur de la vogue - qu'il s'en passe de chouettes sur la Tabareau où la rutilante boule lyonnaise n'a que faire des tournis des manèges; les parties de boule lyonnaise se déroulant dans un monde parallèle, en silence, les manches retroussées, les hommes ne pourraient en être déconcentrés ou seulement par une boule dégommant l'autre boule, pour aller se placer à deux millimètres du cochonnet, on entendra alors un gars qui l'ouvrira plus fort que ses copains, mais pas trop, pour dire "ouhla ! joli !", c'est ici, que le vogueur épuisé viendra se reposer sur un banc pas loin de "la Coquette", qui comme son nom l'indique est une coquette auberge, quand on passe devant ça sent bon le thym et l'échalote, surtout l'été, mais je ne peux rien en dire je n'ai pas encore testé), là je referme la parenthèse, (vogue off). Laissant grésiller en paix les marrons, pour goûter les bonbecs, j'ai compté qu'avec trois picaillons, on peut obtenir 80 grammes d'un diamètre de huit centimètres de réglisse + une bille de gum au milieu, après une telle dépense je n'oserais pas entamer mon dernier billet de mille pour dilapider des restes (?) de jeunesse dans la bétaillère jurassique où la foule, clairsemée sur les feuilles abattues, attend de faire son baptême, happée par le plus fameux des glyptodons de Lyon, relouqué par qui vous savez.
Enfin, ce qui est bien agréable à la vogue c'est qu'on s'y trouve tous en vadrouille, un peu comme des stars démodées allant incognito, offrant aux sunlights jaunes et verts nos mines cadavériques, nos lèvres jaunes et nos dents vertes (juste un sourire pour la photo), stars d'un jour flambant à la roulette le mou avant l'hiver, vivotant au sommet, sans se soucier de savoir s'il existe un autre lieu au monde, la colline valant à elle seule, un hémisphère. Une seule fois dans l'année quand la vogue est de retour les Croix-Roussiens vivant en autarcie au village, se sentent pénétrés du lourd de ces camions beaux comme des barres de la Duchère branchées sur des prises électriques qui serpentent de la place par les rues et sur les tapis (introuvables) de la place (des tapis), ils croisent aussi les monstres qu'on ne verra (pour de vrai) qu'à la fin du monde, venus culbuter nos grattons, crapahuter sur nos coussins (ces quiétudes ganachées fourrées d'un filet vert, couchés dans leurs boîtes de velours, à se damner). Quelle pagaille, en nos us et coutumes! quand, soudain, dans les premières heures, du 5 au 6 Octobre, on regarde les gars de la vogue (de magnifiques garçons) déballer le matos afin de monter les engins, on croirait voir construire une ville, elle se fait en un jour ou peut-être une nuit, sous nos yeux se déroulent des kilomètres de câbles et des kilomètres de rallonges sur le bitume courant dans les rigoles, après on s'y balade comme si tout cela avait poussé uniquement par magie, on est dans la vogue-champignon et les jours qui suivront ça scintillera de partout. Je suppose que la vogue des marrons aurait plu à Andy Warhol, ces objets en série multipliés partout, auraient pu lui souffler de sacrés tableaux, l'Amérique qui se pose là, avec ses boîtes en kit, des bistanclaques qui se perdent au milieu d'une foule, cette année, pas trop dense à cause des restrictions. Ce n'était pas complètement étranger à l'oiseau vogueur, lequel, d'une année à l'autre s'était fait grignoter par un sanglier vogueur, voyez qu'il y a quelque changement, (le lecteur assidû, qui s'y connaît forcément en sanglier connaît aussi son paradoxe, toutefois je laisserai ouverte l'interprétation symbolique pour laisser voguer l'homme et son désir dans l'approximation). Bref, chacun sait que le mot sanglier vient du latin "singularis", (au sens isolé, solitaire "singulier") et que le sanglier est aussi ubiquiste, à vrai dire, je ne sais pas ce que signifie sociologiquement cette raréfaction de l'oiseau vogueur au profit plus imposant du sanglier ubiquiste mais je trouve, ma bonne dame, que c'est pas rassurant et peut-être aussi triste que nous autres les festifs désolants qui picorons nos beignets entre les barrières métalliques du boulevard et les autos méchantes, à se demander encore qui a décidé d'encastrer la vogue sur la place des tapis où l'on entre enjambant des panneaux et des fils alors qu'une partie du boulevard semble plongée dans le gris, sans doute à cause des travaux, d'autre chose, peu importe, on pourrait être ailleurs, déjà à la périphérie, et ce n'est sans doute pas un hasard de trouver de plus en plus de pigeons moches, mal polis (ubiquistes) gouverner sur la tête de notre vénérable inventeur.
Le lendemain ce fût la même vogue ainsi les jours d'après telle l'année précédente, malgré une fine pluie, (ce retard coutumier de l'automne), après que le thermomètre eût marqué 26° à l'ombre, sous un ciel mitigé, comme on dit chez nous desfois "ça mouillassait", le gros rire (voguenard ?) du sanglion raillant l'inventeur des métiers m'attira sous un stand abrité, c'était une sorte de vestiaire à peluches (peluchons) encore des pantelantes arachnoïdes à cornes et multipattes difformes (soyeuses ? Je n'ai pas approché), je remarquais juste, que l'une des bestioles tristement pendue par les pieds portait entre les oreilles, un bonnet de lutin indécollable qui ressemblait à un cône de Lübeck, pourquoi, des cônes de Lübeck sur la tête de nos bêtes à la vogue ? Vous me direz! alors que des cornets de marrons seraient plus rigolos ? (Vous remarquerez que l'odeur des marrons grillés peut très vite taper sur le système surtout quand on les cherche), enfin voilà pour l'énoncé d'une vogue aux présumés marrons, nous repasserons, (enfonçons un clou dans ce marron), je subodore que si je n'ai point l'occasion de goûter au seul produit annoncé chaque année dans cette vogue, par cet engouements précaire qui jalonne les recherches de certains jours, (comme leur façon là bas de fabriquer la barbapapa), ça tournera à l'obsession.
Enfin, sortant de là, un peu sonnée, seule ou accompagnée, de toutes les façons harassée, je ne rejoindrai pas les copains comme prévu au RV du café du bout du monde où c'était encore convivial de pouvoir causer un brin tranquillement après avoir patassé (comme dit le lyonnais les pieds dans sa bassine de sel) puisqu'ils sont revenus déçus, les copains, de voir le bout du monde remplacé par un bar à bière, un autre ! dont nous ne pensons à peine moins que rien, le houblon on s'en fiche, au départ on voulait un voyage en ballon de blanc (même de rouge, ô fillette !) avec des cornets de marrons (si je radote, mon lecteur, râle et indigne toi mais là, minute papillon ! je promets de boucler la boucle et après on n'en reparlera plus jamais), un cornet de rien du tout, pour dire que ce n'était pas demander la lune. Oui, certes, mais il est comme ça le monde, dès qu'on veut quelque chose de simple, même si on on le demande gentiment, ce n'est jamais possible, ou alors ça devient compliqué parce que c'est rare etc... Et s'il faut demain voir en vrai griller des marrons, je serai prête à faire sonner le réveil (sacrilège) vers les 14H00 du matin. C'est vrai qu'à ces heures à la vogue y'a moins de monde. Un tout petit monde, discret , lent, pas bégueule, du coup ça fait vogue oubliée et certains jours ça paraît bizarrement plus gai bien que beaucoup de stands soient vides, on admire le courage des forains, mine de rien, rude métier !
En guise de conclusion (j'ai dit en guise), c'est une bénédiction, pour nous autres gastronomes du plateau, que le citymarché (unanimement fréquenté en colline) ferme ses portes à 21H30, c'est à dire après la vogue (mais un conseil, allez-y à 21H00 parce qu'après 21H15 les vigiles, qui n'aiment pas voir les gens lambiner se mettent à fouiner dans votre filoche, avec le vocabulaire de Rambo, (surtout un), c'est très laid, mais ce n'est pas à cause de la vogue (très influencée par Rambo également, pas pour les mêmes raisons), donc, le citymarché, reste un endroit très pratix pour trouver de la vraie crème de marrons Clément Faugier, c'est pas en cornet (heureusement pour les manchons d'hermine de la bourgeoise), mais après ces promesses de vogue aux marrons rarissimes, ça pourra apaiser un peu notre besoin de consolation.
La conclusion, la vraie : à défaut de grives (aux marrons, vogue ! mon pijon) on mangera un merle à la crème de châtaignes. La suite de la vogue une prochaine fois peut-être (avec ou sans marrons, seul ou accompagné, si les petits ânes ne nous mangent pas). la dernière image à cliquer ICI vous donnera l'aperçu vite fait, du sort des animaux de la vogue, sous les yeux de l'enfant tirant pile dans la cible qui s'en retournera, en serrant dans ses bras un authentique Stormtrooper bien utile pour battre les Flogs, les Froschs et neutraliser l'homme vieillot qui cherche avec son groin (ubiquiste) des marrons sous les platanes du boulevards (vogue, vogue !), l'homme vieillot qui ne sait même plus le nom des arbres, ni le nom des fruits qui poussent sur les platanes, qui croit que les marrons tombent tout chauds des platanes et qui pleure et dit à tout le monde que tout fout le camp, et personne ne l'entend, pas une âme ne se lèverait pour lui tendre un cornet, un tout petit cornet de marrons chauds, un cornet de frites à la rigueur, et encore ! ah non, vraiment l'être humain n'est plus ce qu'il était, la fête est triste le monde est moche, on est tous triste on est tous moche. Alors qu'avec un cornet (même tout petit) de marrons chauds, même des châtaignes grillées... suffiraient, suffiront, comme l'écrit lademoiselle Pinturault (que je salue vigoureusement) dans son dernier recueil de poème intitulé "L'hiver des poètes", préfacé par Madeleine Lacroix, (je cite): "Desfois la beauté tient à pas grand chose". Vous pouvez ricaner mais si ça se trouve, elle a raison.
Lien : oldies but goldies, la vogue 2010, si ça vous dit.
http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2010/10/10/le...
Photos : Boulevard de la Croix-Rousse et un petit peu place des Tapis: quelques vues hasardeuses de la vogue (des marrons) parcourue à pieds, à vélo, saisies de jour et de nuit, + une pensée émue pour l'Auguste Jacquard et son infinie patience. En vrai il ne s'appelle pas Auguste, ni Albert mais je crois l'avoir déjà beaucoup répété, (la vie des blogs tourne comme un manège), pardon au lecteur adoré, puisque tout doit finir par des chansons c'est inécoutable hélas je ne peux y résister, et peut-être que ça fera plaisir à msieur Fernand. (hypothèse hasardeuse j'en conviens)...
Lyon Colline © Frb 2012
dimanche, 30 septembre 2012
Les errances du modèle (I)
Je suis vague comme la mer ; je flotte comme si je ne savais où m'arrêter.
LAO-TSEU, extr. Livre I -XX, in "Tao Tö King" (ou Tao Te king ou Tao Teh Ching) "Le livre de la voie de la vertu", traduit par Stanislas Julien à découvrir intégralement ICI
Il allège, il s'abrège, il marche sur les sentines embaumées d'aromates, il prend le large saute la haie une feuille de houx sur les lèvres il marche pour un appeau affine les frontières il marche entre les phares il marche à pas chassés il marche sur ses collègues.
Il marche pour des sommets, il marche sans s'arrêter un fleuve hante son geste même s'il ne paraît pas demeurer sur la rive même s'il paraît s'y perdre il marche dans un musée il part à la recherche d'un secrétaire perpétuel.
Il marche sur des falaises pour le bruit du ressac troublé de vents contraires poussé par la galerne contemple les traînières il marche sur des ressorts pour voir bouger le nerf dans les filets de pêche de cent mugilidés.
Il a dit : "je serai l'homme qui marche" qui titube et perd pied il s'éloigne il arrache ses racines les disperse autrepart il marche sur des quais par les rues encombrées sa marche est inventaire il passe entre les creux d'un lit prisant les feux ou fragmente son verre contre un cri de colère brisant les rondes aimables puis il se radoucit.
Il prend sur lui la pluie les brumes et la tempête il marche dans l'oeil pugnace qui le prend pour un autre il contourne le rire de ces foules les bourrades il marche loin de ces langues qui morcellent le jour tenant encore l'injure pour une délivrance.
Il marche fuit les truelles les engins à chenilles vibrantes et compactées qui tourmentent l'univers l'entaillent le plissent l'emboutissent il marche jusqu'à ces temples qui cimentent le ciel avec la terre il marche pour se défaire des torchis de leurs guerres il tourne les talons à ces pieds alignés caressant les moquettes au salon.
Il marche dans la salle à manger dans la chambre dans un hall il marche dans la cuisine à la recherche d'un paquet de chips il marche près des buvettes au milieu des canettes il marche sur les franges des rideaux d'un hôtel et sur les perles roses d'une fille menée par le tempo il marche près des massifs des jardins impériaux il porte à son blason un céleste vitrail marche dans sa lumière
Il marche pour le présent grisé par la promesse "du petit bout de chemin ensemble" il marche de la vie contre la mort pipant en travers elle avant qu'elle le reprenne il marche solitaire dans la blessure la mort de l'autre qui le fera payer courir rire et pleurer il marche sans retenir ceux qui lui portaient peine et ceux qui l'ont aimé ou l'aimeront à nouveau il marche dans sa reine sous un dôme de trois cent quatre vingt quinze mètres il marche sur des fossiles marche comme on se relève d'un sommeil troublé par des monstres aux poumons secs cousus de gueules avides transpirantes.
Il marche dans un tunnel juste après l'accident marche comme un enfant que le premier pas émerveille il marche dans un couloir entre deux infirmières.
Il marche dans la combine marche avec ceux qui règnent marche à pas d'échassiers il marche sur un autel il marche de Bellême à Couronne, dans la forêt d'Ecouves pour voir un éperon rocheux repartir aussitôt il marche pour le schiste bitumineux il marche dans la question qui tournera longtemps il marche devant tout le monde pour se poser devant un drôle de monochrome la marche pourrait cesser ici. Pourtant.
Il marche sous des voûtes gardées par une fraternité d'hommes qui doutent il marche sur des prières qui redresseraient son corps s'il les savait par coeur il marche pour fuir cela il marche une pochette en carton sous le bras jusqu'à la librairie de la rue de Belfort il marche comme un soldat au delà des fossés trop larges il marche entre les arcades d'une cité universitaire rêvant de perdre la parole marche pour disparaître voudrait réapparaître là où on ne l'attend pas il marche il aimera ses arpents plus que le soleil.
Il marche au bras des égouttiers qui ronronnent sur la ville en roulant des salives aux reflets d'arc en ciel il marche sur une route il marche comme Gulliver il marche sur des plages par les cours d'eau tranquilles foulant des coquillages, à l'affût des sirènes. Il marche pour ces naufrages qui n'en n'ont jamais l'air il marche contre l'aisance pour l'exception qui passe ne s'efface pas ne sait promettre promet effacera il marche loin des cloisons cerclées de minimoog il marche chez les pop dans les pipes et la poudre.
Il marche pour revoir les contrées que l'été n'a pas pu assécher il marche pour approcher ce qui ne peut se dire il marche sur des pays qui se détruisent dès lors qu'on les traverse il marche contre ce mot roulant dans les tranchées jusqu'aux plis de la paume qui caresse en secret des marges infrangibles.
Il marche sur l'Espagne et ses auberges tristes il marche aux côtés d'un ami insolvable et cupide il marche sur des croustines beurrées avec amour il marche dans sa meurette portant son CV d'homme-sandwitch tourne autour d'un bordel avec des idées noires.
Il marche vers la mer crachant des étincelles tire son char jusqu'aux digues où se meurent les hétérocères il marche pour des sauteries arrangées de cocktails il marche pour le champagne il marche dans ces pailles aspirant les framboises et le jus des sanguines marche au mât de cocagne marche cherchant son île percée par des soleils empestés de furies il marche sur l'eternit marche comme la souris chassait entre les huis d'une geôle le mauvais rêve
Il marche derrière l'amour comme l'agneau s'abreuvait aux lèvres de la petite il marche dans la fontaine marche pour la rouquine qui se perd dans la foule marche pour une fausse blonde vêtue comme une tigresse marche pour une brune sympa qui tapine en Lancia il marche pour une princesse découvrant sous son pois des mires délicieuses il marche les yeux fermés il marche entre les bornes kilométriques tramant l'attaque d'un train de marchandises.
Il marche sur un passage sans ménager son âge il marche de l'impasse aux sentiers à l'aguet de la menthe du thym de l'aubépine il marche à la campagne dans la laine jonquille des épervières en cyme.
Il marche sur l'ardeur comme un faisan blessé perd ses plumes dans ces baies goûte la mûre cède au buisson entier marche sur les bouquets fanés entre les tombes s'y dore près de ce père qui lui apprenait à marcher il marche bercé par le son brut d'une locomotive dans la prospérité des fleurs des plantes des animaux il marche par ces travées pour y faire l'inventaire de ceux qui marcheront sans but il marche sur des tisons battant l'air à brûler un fourneau de miel de bleuet dans sa pipe il marche dans les billettes et les goussets d'azur il marche comme s'il pouvait marcher sur le déluge naviguer dans la terre sur des patins d'osier.
Il marche dans la tête une pointe de plomb fixée sur la verticale épurée d'un plan de monastère , il marche sur l'histoire il marche sur ses ancêtres et tandis qu'il s'allège marche pour confirmer la dispersion il marche pour qui l'approche participe au mouvement céleste, ainsi le verrait-on inexplicablement marcher dans les nuages.
Il marche déjouant la durée il marche comme un page au guet des servitudes marche pour l'approbation marche chemin faisant il marche brouillant ses traces marche en petits fragments détachés parmi d'autres peut-être semblables il marche comme l'ange tombé hier de son balcon anônnait un chapelet de prières glossolales il marche jusqu'au péage rêvant d'épargner ses forces vitales pour marcher au delà marcher toujours encore et ne pas s'effondrer au prochain portillon.
Nota : Pour retrouver la suite des errances du modèle il suffit simplement de cliquer dans l'image.
Photo : Fragment de filatures, et autres vies modèles, le modèle en partance a été un instant saisi marchant, sur la rue penchée de la république (c'est pas complètement faux qu'elle penche la république et la rue aussi ça va ensemble peut-être) un léger flag' de fugue aux heures hyper-pointées, Le modèle est un poème-fleuve, il ne faudra pas l'oublier si d'aventure vous en suiviez un quelquepart il vous mènerait à coup sûr au pays qui ne s'arrête jamais. CQFD...
Lyon-Presqu'île © Frb
vendredi, 07 septembre 2012
Chauve et rude
En 1956 dans "Les cocus du vieil art moderne" Salvador Dali dont l'admiration pour Gaudi ne s'est jamais démentie annonçait la venue d'une architecture "molle et poilue"...
Extr. du "Dictionnaire de la bêtise et des erreurs de jugements suivi du livre des bizarres" par Guy BECHTEL et J.C. CARRIERE, éditions Robert Laffont 1981.
Molle et poilue ?
Une seconde entrevue en rêve...
Point de bâtisses poilutes ni barbutes (ou moustachutes) en nos contrées hélas ! dans nos rues pleines de grues nous attendrons encore...
La preuve est un peu là, baladée par l'image. Comme tout se clique en ce bas monde et que c'est jour de travaux pratiques, je me suis bêtement amusée avec l'aide de notre architecte patenté Jean-Pierre Disagne® (concepting in postcards § home-graphism and Cie) à essayer d'agrémenter ces modestes propositions de quelques aménagements "tendance" (la tendance-attitude) paraissant épouser au plus près la forme de l'habitacle, vous trouverez donc des intérieurs à notre collection (peu maline et chouïa arbitraire, je l'admets) en cliquant sur les échantillons de cet échafaudage rien que du fonctionnel, propre sur lui, uniformément glabre.
Avertissement: ce billet partant du réel, il peut se situer parallèlement dans un monde de fiction, comme l'écrivait Martin Winckler : "Si les événements décrits dans ces pages semblent plus vrais que nature, c’est parce qu’ils le sont : dans la réalité, tout est moins simple. Cela dit, même lorsqu’elles ne sont pas délibérées, les ressemblances avec des personnes ou des événements réels sont, probablement, inévitables" par mesure de prudence je rajouterai qu'elles ne sont pas si mal intentionnées qu'on pourrait le supposer. Sur ce sujet, nous battons les barres et les blocs, comme on dit battre la campagne, pour le reste, nous ne sommes pas de taille. Amen !
Lignes directes :
http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2008/08/20/l-...
http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/09/22/pr...
Propositions d'ailleurs :
http://fr.academic.ru/pictures/frwiki/78/Newark-ohio-long...
http://www.bienchezsoi.net/diaporama/images/maisons-bizar...
http://laouilfaitbonvivre.l.a.pic.centerblog.net/ck9x355p...
Propositions d'ici:
Malhonnête: http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2009/09/28/le-duplex-de-malevitch.html
ou honnête: http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/08/16/on-rentre-a-la-maison.html
Photos : Lyon rive gauche + Villeurbanne quartier Charpennes, une balade où l'espace déjà rempli se remplit à vue d'oeil un peu partout ici ou là, extrait en forme d'échafaud d'échafaudage des (plus ou moins) nouveaux habitacles urbains...
Lyon § + © J.P.Disagne® / frb 2012.
mardi, 04 septembre 2012
La buissonnière
La poésie c'est aussi une façon de se débrouiller au quotidien
Nota : Si vous avez loupé le début, retrouvez notre poétesse en cliquant dans l'image
Conseil du jour : http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2010/08/04/mi...
Prévention : http://certainsjours.hautetfort.com/archive/2011/07/27/clonfa-charmillone.html
Immersion : http://www.invinoveritas.fr/pages/achats.htm
Photo : La poétesse sur les chemins de la vie.
Lyon © Frb 2012
samedi, 16 juin 2012
Dans l'intervalle...
Où il sera vaguement question de l'interprétation des nuages...
Photo 1 : Où l'on peut avoir une petite idée de la largeur des rues qui forment les pentes de la Croix-Rousse, et un peu une idée des couleurs des façades. Je sais, c'est vague...
Photo 2 : Où l'on retrouve la demeure du Maître de Lyon qui tire les ficelles de la ville au secret dans sa tour octogonale, un endroit fascinant, éclairé la nuit, on se demande parfois quels secrets s'y cachent.. Situé du côté de Bellecour en Presqu'île. Place Antonin Poncet exactement.
Photo 3 : Où l'on apprendra que la véritable boule lyonnaise se joue un petit peu dans les airs et parfois sur la terre entre le clos Jouve et la Tabareau entre autres...
Photo 4 : Où l'on aura, un aperçu fragmentaire de l'immeuble aux 365 fenêtres, qui donne sur le jardin des Chartreux, vous ne pouvez pas le voir mais les gens qui vivent là de leur fenêtre, eux, le savent... En fait elle compte 378 fenêtres, c'est la fameuse Maison Brunet, un immeuble que j'aime particulièrement d'une part j'y ai travaillé quelques années au dernier étage dans une ambiance festive mémorable avec vue imprenable sur les scintillements d'une partie de la ville dont l'autre colline de Lyon et surtout parce que des considérations cosmologiques attachées à cet immeuble méritent un peu qu'on s'y attarde, en effet la maison comporte autant d'appartements que de semaines (52) et autant d'entrées (4) que de saisons. Monsieur Marcel Rivière le savait avant moi, même si ce n'est plus lui qui officie, (tout fout le camp) cela dit, cher à notre mémoire autant que son suppléant, vous pourrez en apprendre davantage en cliquant sur l'image. L'immeuble est situé place Rouville juste en dessus de l'ancienne "Boule des rigolards", ça ne vous dit rien, c'est normal elle a changé de nom et les gargoulettes rafraîchissantes n'y sont plus les mêmes qu'à l'époque de la naissance (des Rigolards) que je n'ai pas connus, mais je vous raconterai ça un jour, quitte à broder un brin, s'il le faut (encore des promesses)...
Photo 5 : Figure libre, la photo qui n'existe pas, celle qui reste à faire, c'est la première fois qu'on vous la montre, plus dépouillée on n'oserait pas, histoire d'offrir un peu d'avenir à nos moutons, il ne sera bien sûr question que de l'interprétation des nuages. Si par hasard vous savez lire (dans les nuages, of course)...
Lyon © Frb 2012
mardi, 12 juin 2012
No "tweet" today
Photo : Danse et chant du printemps. Les amoureux de Lyon, photographiés, s'en allant au Parc. Un bref instant d'apaisement pour oublier les aviniles hirosites ed glureche et de sajoulie...
© Frb 2012
mardi, 06 mars 2012
Ponctualité
Début du printemps,
Je mets ma pendule à l'heure.
Maintenant qu'on a l'éternité, on peut toujours rêver, avec Raoul :
Nous sommes dans le monde et en nous-mêmes au croisement de deux civilisations. L’une achève de se ruiner en stérilisant l’univers sous son ombre glacée, l’autre découvre aux premières lueurs d’une vie qui renaît l’homme nouveau, sensible, vivant et créateur, frêle rameau d’une évolution où l’homme économique n’est plus désormais qu’une branche morte.
Raoul VANEIGHEM in "L'ère des créateurs".
On peut aussi croquer quelques livres d'esprit libre du même auteur, lus et approuvés par la maison (ci-dessous):
http://nouvellerevuemoderne.free.fr/eredescreateurs.htm
On peut encore s'instruire avec Georges un ami de Georges tous deux amis de Georges et de Robert et plus haut, de Roger:
Maintenant, le mouvement de l’horloge donne la cadence aux vies humaines : les humains sont asservis à la conception du temps qu’ils ont eux mêmes produite et sont maintenus dans la peur, comme Frankenstein par son propre monstre. Dans une société saine et libre, une telle domination arbitraire de la fonction humaine par l’horloge ou la machine serait hors de question. Le temps mécanique serait relégué dans sa vraie fonction de moyen de référence et de coordination, et les hommes et les femmes reviendraient à une vision équilibrée de la vie qui ne serait plus dominée par le culte de l’horloge.
Georges WOODCOCK in "War commentary - For anarchism", mars 1944.
Et comme le sujet ne pouvait ignorer ce texte, petit bonus de lecture encore signé Georges Woodcock, "La tyrannie de l'horloge", je vous joins son petit lien salutaire :
http://infokiosques.net/lire.php?id_article=632
Voilà, mes amis, de quoi occuper les prochains jours en belles lectures puisqu'on annonce la pluie, et qu'on ne pourra pas se donner rendez-vous sous l'horloge à point d'heures (sniff, sniff)...
Photo : Le lyonnais, bon marcheur, amoureux de sa ville, et peut-être les autres, reconnaîtront sans doute l'horloge de la rue Grenette située en Presqu'île entre Rhône et Saône. L'instant pur, rare décrochage d'une ville entière et pourquoi pas de ses habitants ? Ou une métamorphose d'un genre éternel ? Un temps sans temps répondra le génie des oisifs qui vit sur son nuage qu'on ne voit jamais et qui sait tout. Hélas, j'émettrai un regret (très personnel, of et hors course) c'est que l'horloge de la rue Grenette ne présente pas son programme aux élections présidentielles 2012, "arrêter le temps", (et là je suis sûre d'avoir raison), ça paraissait pourtant le seul projet enfin sensé pour le pays et surtout le plus émouvant entre tous, afin d'en finir avec les grosses promesses rébarbatives et les formes comptables si peu romantiques.
© Frb 2012.
jeudi, 01 mars 2012
Le temps des jeux
Plus on médite un sujet, plus il s’étend ; on trouve que c’est l’histoire de tout ce qu’on a dans la tête et de tout ce qui y manque : et cela sert d’autant mieux que les idées et les connaissances y sont plus liées ; il part tant de branches, et ces branches vont s’entrelacer à tant d’autres qui appartiennent à des sciences et à des arts divers, qu’il semble que pour parler pertinemment d’une aiguille, il faudrait posséder la science universelle. Qu’est-ce que c’est qu’une bonne aiguille ? Dieu le sait. Le découragement et le dégoût nous prennent, et dans l’impossibilité de tout dire, car il faudrait tout savoir, on se tait ; parti dont la paresse naturelle s’accommode fort bien.
DENIS DIDEROT : "Sur la diversité de nos jugements", extr. "Oeuvres complètes", édition Assézat, IV.
Photo : Les pieds dans l'eau, un peu de paix au coeur du monde, en état de grâce hors saison, saisi d'un pont sur les berges du Rhône.
© Lyon, frb 2012
mercredi, 26 octobre 2011
Au mieux l'aphocalypse...
Photo : Le H nuit à l'orthographe ou hante peut être "l'esprit des murs". Le nouveau visage de l'apothéose photographié en bas des pentes de la Croix-Rousse, entre les rues René Leynaud et René Burdeau un graff (ayant fauté ? A qui la faute ?) surtout, nargue l'ancienne église des oratoriens, dite église St Polycarpe (mais jamais Pholycarpe), et sa paroisse, toute dédiée à Saint Irénée (auteur d'un traité contre les hérésies, tiens donc !) et surtout dédiée à Saint Pothin ou plutôt Saint Photin pénétrant dans le corps d'un graff ou graph ? Et quel grafph ! mais non, mais non ! phaut pas de "H" à Saint Photin !... Mais si, mais si !
© Frb 2011.
vendredi, 23 septembre 2011
Brader la ville
Ce qui est actuel, c'est toujours un présent. Mais justement, le présent change ou passe. On peut toujours dire qu'il devient passé quand il n'est plus, quand le nouveau présent le remplace. Mais cela ne veut rien dire. Il faut bien qu'il passe pour que le nouveau présent arrive, il faut bien qu'il passe en même temps qu'il est présent, au moment où il l'est. Il faut donc que l'image soit présente et passée, encore présente et déjà passée, à la fois, en même temps. Si elle n'était pas déjà passée en même temps que présente, jamais le présent ne passerait. Le passé ne succède pas au présent qu'il n'est plus, il coexiste avec le présent qu'il a été.
GILLES DELEUZE in "L'image-Temps"
Conséquences (barbares) by Luc Moullet :
Photos : Comme un monde entre ??? De l'architecture utilitaire, plus ou moins diverse (ou la beauté caché du laid ?). Photographiée du quartier République à celui de la Part-Dieu, entre Villeurbanne et le Grand Lyon.
© Frb 2011.
09:00 Publié dans A tribute to, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, De visu, Impromptus, Le nouveau Monde, Mémoire collective, ô les murs !, Transports | Lien permanent
dimanche, 11 septembre 2011
Rentrer
Mes espaces sont fragiles : le temps va les user, va les détruire : rien ne ressemblera plus à ce qui était, mes souvenirs me trahiront, l’oubli s’infiltrera dans ma mémoire, je regarderai sans les reconnaître quelques photos jaunies aux bords tout cassés. Il n’y aura plus écrit en lettres de porcelaine blanche collées en arc de cercle sur la glace du petit café de la rue Coquillière : "Ici, on consulte le bottin" et "Casse-croûte à toute heure".
GEORGES PEREC in "Espèces d'espaces, éditions Galilée 2006.
Et puis, Septembre remit sur pieds les corps glorieux qui claquaient le jour au défi des tapis roulants et c'était toutes sortes de gens qui revenaient d'on ne sait où, dorés comme des bijoux du manège enchanté de la galerie "Toutor". Ils marchaient au dessus du monde, ils glissaient dans le labyrinthe dont le sol serait bientôt recouvert de feuilles mortes, et par dessus encore, il y aurait le bruit des pas de ceux qui rentrent à reculons, déjà figés dans le décor avec leur tête de d'autruches, les éternels amoureux du dimanche et de l'oisiveté qui ouvrent les yeux comme autant de fenêtres sur de multiples mondes. Il y aurait la beauté intouchable des noctambules qui battent le pavé à minuit, finissent sous les poutres des pigeonniers cours d'Herbouville ou dans ces rues sans avenir la "De nuits", ou la "Longue". Il y aurait du bruit sur la Côte, de la bière et des flics entre Polycarpe et Terraille et puis, dans la fraîcheur, les nuiteux reviendraient à l'aube, claquer leurs derniers sous pour être les premiers dans les boulangeries aux noms qui flattent un peu l'amitié voir l'amour ou juste la mémoire comme "Le banquet" "L'épi d'or", ("Gerbe d'Or", ou "Rodrigue"), il y aurait des orgies de croissants chauds et de chaussons aux pommes. Il y aurait des halos de brumes fondus dans la lessive des particules fines et le couloir de la chimie qui ramènerait les odeurs d'oeufs pourris, à l'heure des ablutions des uns, des réunions des autres, tout se re-mélangerait à la fumée des cigarettes blondes, au goût du shit, au reflux d'arômes tièdes du printemps synthétique qu'on met dans les gamelles de détergents industriels sous le nom de "senteur florale", ça remonterait vers les pelouses du quartier Opéra où l'on se traîne encore, allongeant l'été à loisir, seul à seul multiplié par mille, tous portant le même sac (du positif), et lisant la même revue (de l'actu), celle qu'on nous distribue dans le métro, qui est gratuite, inventée par les concepteurs de la gratuité lucrative ciblant son grand public de publi-reportages voués aux isthmes du Sarko. Ils préparent notre avenir en nous caressant le dos, ça grignote sans nous le dire, nos heures de cerveau disponible durant les pauses ou via nos déambulations de rats des villes ; en toutes constellations où la multitude nous allège du poids de l'ombilic, nous irons. On ira, on va, on va...
Plus loin par les méandres d'un plan de Vélov' (ou "vélos d'amour"), la rentrée honorera encore le beau temps sous des blancs de cirrocumulus granulant légèrement le bleu qu'on possède encore en lambeaux et l'on remuera l'aventure sur un pied d'appareil photo, espérant du nouveau, à croquer un peu de perspective. Ici, tout semble prévisible. Rien ; sinon cette chaleur de tripot, cet air brut et torpide. Rien ; sinon que du beau dans la ville aux façades rosées cachant son mal entre les ponts, autant de gouffres côtés du Rhône que de guinguettes aux volets clos et de plages interdites, les boites de nuits plongeant sur Vaise neuf et refait avec sa gare qui fût détruite sous les bombardements du 6 Mai 44, une gare en bois, vite reconstruite entre deux évènements, jusqu'à l'espace multimodal d'aujourd'hui et par dessus, tout ça, il y aura les barres vanillées de la Duche qui regardent le bas, plus pour longtemps, barrées déjà par un projet de ville, il transformera bientôt ce quartier en un "pôle attractif", disons "plus attractif", c'est la fine formule, pôle ou quartier, pourvu que tout cela devienne "attractif". Les mots bleus du Grand Lyon, peaufinant sa vitrine en bonnes concertations abonnées à la cool attitude, nebulus à venir. On ne peut rien en dire. On se porte sur les pentes, on coupe par les traboules où vit encore un monstre de légendes mystérieuses ; on croisera même en rêve les fantômes : des gisants de Loyasse, un secret chu à l'observance puis on retournera comme hier dans les rues en presqu'île, autour de la place de la Bourse, on verra des messieurs dits "d'un âge", des cadres distingués, à l'allure de Clooney raybanés (comme Dutronc), faussement déglingues, (vaguement Borloo), qui vont de table en table, glissant, leur carte de visite, en toute discrétion, aux jeunes filles venues là pour boucler leur fin de mois. C'est secret de Polichinelle mais ce n'est pas dans tous les bars de presqu'île qu'on fait ça... Chez Jules on causera d'art (mais à la bonne franquette), à la Manille on jouera (à la Manille), ou on lira sous les mêmes globes lumineux qu'autrefois, des journaux du jour ou de la veille, au Moulin joli on s'emmerdera joliment et les nouvelles couleurs de beige à chocolat nous ferons regretter le vieux "Moulin Joli" terne et bruyant, d'avant.
Il y aura la sortie des classes vers Ampère ou ailleurs, des ados qui ricanent à trois sur un scooter, roulant les pelles, les mécaniques, claquant de la planche, l'Icare niqué sur des genres d'escaliers. Passée vers la mairie de la place Sathonay, il on croisera Mademoiselle Pugeolles, rejoignant sur une trottinette, son petit F2 de la rue Burdeau, un cartable tout neuf sous le bras, avec des surpiqûres, et des poches intérieures de la taille d'un kleenex. Il y aura rue de la Ré plein de monde en grappes vers les cinq heures du soir, des groupements sous la cnaf avec toute la culture de Levy à Musso et des livres de Daniel Pennac à moitié prix entassés près des piles de compils de Pavarotti chante Verdi. Il y aura des regards en biais, sur le flottement d'une jupe plissée bourgeoise, s'attardant devant la vitrine d'Yves Rocher, des mains de femmes chez Sephora dépliant la publicité d'un nouveau parfum (pour les femmes) qui leur affine les hanches pendant qu'elles dorment. Il y aura les dernières robes d'été, des chapeaux d'hommes à l'Argue, à fines rayures noires et blanches genre maquereaux siciliens à porter avec des bottines en daim à demi lacées, exprès, fausse néglige, de la bohème, encore, des bottines de gamines, vraiment ergonomiques à talons de 7 cm, qui font de belles chevilles et qu'on porte avec des collants 15 deniers de teinte biche.
Photos : Des filatures fragiles aux quatre points cardinaux d'une ville entre deux ponts et deux collines, du quartier de bureautique (et domotique) aux costumes froissés près des gares (1) juste à proximité de l'école (2), un passage clouté de bellecour en Presqu'île (3) enfin, sortie du temple où la terre promise distribue de la marchandise et pour quelques centimes (de plus) vous avez les cabas recyclables, bien de quoi battre le pavé jusqu'aux prochaines vacances (4). Juste quelques images from Lyon entre déjà hier, dans le vieil aujourd'hui, aussi loin que demain.
Lyon vu par © Frb : 2011.
01:43 Publié dans Actualité, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, De visu, Impromptus, Le monde en marche, Le nouveau Monde, Mémoire collective | Lien permanent
jeudi, 08 septembre 2011
Harpe céleste
Ecoutez bien leur devis,
Détoupez vos oreilles.
Et fa ri ro frere li joli
Ti ti pi ti, chouti toui.
Tu, que dis tu ?
CLEMENT JANEQUIN : extr. "Le chant des Oyseaulx"
Transcription de la partition destinée aux humains, à cliquer sur l'image
- Shéma récapitulatif de la fonction du chant : ICI
- Révision des classiques et autres questions ci-dessous :
http://www.freinet.org/creactif/blain/comenius/oiseaux.ht...
Louanges et doux oiseaux-copains by Catherine L. : ICI
Nota : Notre canari n'est pas sur le balcon, on l'aura pincé sur une corde de la harpe céleste, suivant une partition pas comme les autres. Selon Clément Janequin, "la doulce saison" se situe plutôt au printemps, mais l'hypothèse vient d'être contestée par le savant de certains jours, qui s'est basé sur notre cadran lunaire à nous, puis a conclu qu'il n'y avait plus de printemps. Ainsi "on ne renaît qu'à l'automne", c'est le sésame de la maison.
Photo : September nous détoupe les oreilles au chouti toui d'oiseau, pendant que la Biennale de Lyon ouvre ses portes, (ce que ne dit pas notre photo), l'art contemporain sauvage déchiffre sa portée par de minuscules beautés éphémères (sitôt vues, sitôt envolées) et dans les mouvements de la harpe géante caressée par Lily Pinson sous l'aile (invisible) de l'oiseau prophète, (oui, je sais, c'est un peu compliqué), ne pas confondre avec l'oiseau vogueur, qui ne va pas tarder à nous refaire son manège, souvenez vous... Finalement plus ça change et plus c'est pareil, à quelques détails près...
Lyon passerelle amarrée © Frb 2011
22:18 Publié dans A tribute to, Actualité, Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, Ciels, De la musique avant toute chose, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective | Lien permanent
dimanche, 04 septembre 2011
Presque rien
- En quel endroit de la terre sommes-nous, cher Pisthérère ?
- Ma foi, cher Euélpide, je n'en n'ai pas la moindre idée !
Vous vous souvenez des oiseaux ? Non ? Ils roucoulent encore sous les images. C'était hier
En remontant sur le plateau, "les bonnes pentes font les belles ascensions" (a dit Lapalisse), j'en ai vu un, en pleine conversation avec trois autres qui se morfondaient sur un fil, je suis restée là, un peu bête, le nez en l'air, comme on regarde passer les condors (dans un film de Sergio Leone). il m'a semblé que cette année les oiseaux resteraient et les maisons s'envoleraient, mais quand il m'a fallu rentrer, c'était un peu comme si la terre penchait... - Et la tête ? Mademoiselle l'Alouette ? - La tête aussi, Monsieur Pinson !...
A SUIVRE. (Peut-être...)
Photo: Vu rue Pierre Blanc à Lyon, le premier "rassemblement" avant les grandes migrations.
© Frb 2011.
04:52 Publié dans Art contemporain sauvage, Arts visuels, Balades, De visu, Impromptus, Le vieux Monde, Mémoire collective, ô les murs !, Objets sonores, Transports | Lien permanent
mardi, 28 juin 2011
L'infini
Dame en sandales contemplant des sandales pour dame...
Si vous préférez les sandales "astro-stars". Cliquez dans les petites bulles.
Photo : filature dans les quartiers chics, (cours Vitton, sur la rive gauche à Lyon). Il est doux de rêver devant les petites sandales soldées à 77 euros (pièce). Juste un interlude, ou presque rien pour aborder d'un pas léger les premiers jours de Juillet. Mais au calendrier d'ici on traînera encore un peu sur les p(l)ages (déjà surannées) du vieux Juin. Au lieu-dit de l'entretemps mais pas exactement, non plus. (ô mondes infinis !)...
© Frb 2011.
jeudi, 12 mai 2011
Pas si loin de Montmartre...
Ce que tu m’as dit de ta nuit, du ciel, de la lune, du paysage, du silence a dû ranimer en moi des réminiscences similaires... Et alors, j’ai pris feu dans ma solitude car écrire c’est se consumer... L’écriture est un incendie qui embrase un grand remue-ménage d’idées et qui fait flamber des associations d’images avant de les réduire en braises crépitantes et en cendres retombantes. Mais si la flamme déclenche l’alerte, la spontanéité du feu reste mystérieuse. Car écrire c’est brûler vif, mais c’est aussi renaître de ses cendres.
BLAISE CENDRARS, extr. de "L'homme foudroyé", éditions Gallimard 1945.
Pour voir le poète de face, il suffit de lui tapoter un peu sur l'épaule ...
Chaque fois que la littérature me paraît un peu vide ou trop molle je retourne chez CENDRARS et ramasse les points de vie fondue dans la puissante liberté d'esprit du corps et du langage qui anime son écriture. L'écriture n'est pas vaine celle de Blaise encourage la vie. Son existence imprévisible était entièrement vouée au présent sans grand souci que les récits qu'il racontait à lui même ou à ses amis soient véridiques, il y avait en lui une autre quête de vérité bien plus intransigeante qui ne fût jamais servile et ne céda à aucune domestication artistique. CENDRARS représente encore aujourd'hui, la jeunesse absolue du monde, de l'Homme, la poésie mais pour atteindre la poésie, son message est limpide : il faudra abuser du monde. La "lettre océan" n'a pas été inventée pour faire de la poésie.
La lettre-océan n’est pas un nouveau genre poétique
C’est un message pratique à tarif régressif et bien meilleur marché qu’un radio
On s’en sert beaucoup à bord pour liquider des affaires que l’on n’a pas eu le temps de régler avant son
départ et pour donner des dernières instructions
C’est également un messager sentimental qui vient vous dire bonjour de ma part entre deux escales
aussi éloignées que Leixoës et Dakar alors que me sachant en mer pour six jours on ne s’attend
pas à recevoir de mes nouvelles
Je m’en servirai encore durant la traversée du sud-atlantique entre Dakar et Rio-de-Janeiro pour
porter des messages en arrière car on ne peut s’en servir que dans ce sens-là
La lettre-océan n’a pas été inventée pour faire de la poésie
Mais quand on voyage quand on commerce quand on est à bord quand on envoie de lettres-océan
On fait la poésie
CENDRARS dit une chose si évidente, qu'on pinaillerait encore par crainte que l'exaltation déboussole nos petits nids et secoue favorablement les esprits. Les métamorphoses désirables visant à nous extraire de nos plis ne sont pas sans danger, au final. Saurions nous les vivre entièrement ? Y faire entrer avec tout le vertige, un peu de paresse aussi, la plus grande liberté possible ? C'est pourtant la proposition de CENDRARS, qui un brin hâbleur, balayant les faiseurs de rimes, posera sa phrase sous nos yeux, c'est si bête...
Le seul fait d'exister est un véritable bonheur
Ma foi, oui. Mais ce bonheur ne vient pas par niaiserie, il n'exclût pas la violence. La poésie du Blaise est celle d'un conquérant, d'un gourmet, et gourmand ; de l'ogre tout en même temps. Maintenant que les continents ont tous été découverts puis explorés, il s'agira de tenter d'en pénétrer le plus grand nombre possible d'aspects. CENDRARS donjuanise l'espace, il traque, poursuit les lieux, hanté par toutes les capitales, par les ports, les routes, les sierras etc... Cela pour lui est comme de grandes conquêtes amoureuses qu'il envisage au rythme enjoué et nerveux de courses et de combats. Il n'accorde aucune concession à la grâce, peu d'attendrissement, ou léger, assez drôle. Pour être digne du monde qui n'a pas le temps de s'apesantir, CENDRARS est dur, il cale son pas sur la cadence des villes, des bruits, des trains etc... En 1924, il écrit, (il n'écrit pas, il le martelle) :
Nous ne voulons pas être tristes
C'est trop facile
C'est trop bête
C'est trop commode
Tout le monde est triste
Nous ne voulons pas être tristes
Bien sûr, CENDRARS n'a pas fait qu'endurer il a aussi laissé voir ses doutes, ses regrets, ses amours, que les conquêtes des espaces et toutes les aventures n'ont pas réussi à combler, alors il nous donne par un mouvement paradoxal les poèmes les plus drus les plus beaux et le plus poignant de son verbe, où la détresse humaine longtemps camouflée (parfois sous les bravades), paraît encore plus inéluctable jusqu'à l'aveu bouleversant comme dans ce final de "Pâques à New York", que j'ai plaisir à vous offrir, et j'offrirai dans ce même élan, (pourquoi pas ?), un supplément de Blaise à ce blog comme posant une cerise à l'eau de vie sur un petit Lu d'anniversaire (de trois ans d'âge et des poussières) tenu par le fil très fragile de nos correspondances et des lieux, tramant d'inutiles rêvasseries, des passages à la redonne, et puis toujours la ritournelle dans un coin minuscule de nos mondes réels et virtuels qui existent tous en même temps... Je dois à Blaise l'amour des mots, des rues, des villes et de la profusion. Je l'ai tellement cité certains jours, qu'il me tentait de rendre à CENDRARS ce qui n'appartient qu'à CENDRARS, et je le referai encore autant de fois qu'il me plaira. Il faut relire CENDRARS, mes amis, même foudroyé, Blaise is alive and well. Extrait choisi.
Seigneur, je rentre fatigué, seul et très morne …
Ma chambre est nue comme un tombeau …
Seigneur, je suis tout seul et j’ai la fièvre …
Mon lit est froid comme un cercueil …
Seigneur, je ferme les yeux et je claque des dents …
Je suis trop seul. J’ai froid. Je vous appelle …
Cent mille toupies tournoient devant mes yeux …
Non, cent mille femmes … Non, cent mille violoncelles …
Je pense, Seigneur, à mes heures malheureuses …
Je pense, Seigneur, à mes heures en allées …
Je ne pense plus à vous. Je ne pense plus à vous.
BLAISE CENDRARS, New York, avril 1912
Photo : En exclusivité, Blaise CENDRARS photographié par Frasby, eh oui ! et ce sera une autre preuve que CENDRARS est toujours en vie. Genèse d'une rencontre incroyable : Le hasard d'une balade à bicyclette aura fait apparaître sous mes yeux (éblouis !), môssieur Blaise CENDRARS en personne, photographié hier, le long des quais du Rhône à Lyon. Il regardait tristement les péniches amarrées, il m'a demandé : "Dis, Frasby, sommes nous loin de Montmartre ?". Je lui ai répondu "Oui, msieur Blaise ! bien trop loin, mais par la loi de la relativité, Montmartre est à côté et les roues de mon vélo sont des moulins à vent. Montez donc sur mon porte bagage, allez hop ! je vous emmène !". Ce qui fût dit fût fait et c'est avec plaisir que je fis ardemment grincer mon pédalier pour le poète. Le temps d'un aller retour, bringueballant, j'ai déposé Blaise à la terrasse du café Planchon; (très bon endroit, connu des "vrais" Montmartrois, et vivement recommandé par la maison, portant un autre doux nom à l'enseigne du "Rêve"; situé au 89 de la rue Caulaincourt (dans le XVIIIe à Paris), ultime endroit de la capitale où l'on trouve encore un bon gros téléphone à jetons (qui fonctionne !). Et me voici à nouveau sur la même berge, à Lyon, balayant du regard les péniches amarrées, à me demander si je n'ai pas rêvé. Pourtant non, la gouaille du Blaise (c'est pas pour me vanter mais nous avons bien rigolé), me manque déjà, autant que sa présence (un peu brute décoffrée mais au fond, tellement tendre)... Je me consolerai, en songeant à tous ceux qui n'ont pas eu la chance de rencontrer CENDRARS. Certains jours je me demande ce que j'ai fait au bon Dieu pour qu'il exauce avec autant de simplicité mes plus chers voeux. (Cela dit il y a baleine sous gravillon, elle se cache dans l'image, celui qui saura la trouver se verra remettre "la médaille de la sagacité" de certains jours avec un petit compliment de la crémière).
Photo : Frb © 2011.
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